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Chapitre 1
17 mars 2020,
Région parisienne.
Un rayon de soleil traverse la grande baie vitrée de style haussmannien pour atterrir pile sur la barrière encore close de mes paupières et s’infiltrer dessous. Je papillonne des cils en soupirant doucement. Il est visiblement temps d’émerger de ce lit douillet.
Vaseuse, je me redresse péniblement et frotte mes yeux. La lumière du jour éclaire les murs à la peinture immaculée, et la chaleur tapant contre la vitre réchauffe la pièce au haut plafond. Cette chambre est superbe… Sauf que ce n’est pas la mienne.
J’essaie de composer avec le brouillard qui obscurcit mon esprit et observe la silhouette encore assoupie à mes côtés. Je ne distingue qu’un dos aux lignes discrètement masculines et à la peau glabre et pâle, le reste étant dissimulé sous une masse de cheveux noirs comme l’onyx et un coude protecteur replié sur le visage. Je cligne des paupières une fois, puis deux, avant de retrouver la mémoire à propos d’hier.
Aïto. Mon rendez-vous Tinder, avec lequel je discutais depuis des semaines. Il est vrai qu’en général on va sur cette application pour tout sauf raconter sa vie mais, lorsque je suis tombée sur son profil, sa description m’a aussitôt interpellée. En première ligne, il avait écrit : « La vie est une histoire de rencontres et de rendez-vous ratés », citation connue d’une auteure chilienne1, et j’ai trouvé qu’elle correspondait bien à ma propre existence. Des rencontres ratées, j’en traîne derrière moi à la pelle, pas dans le sens « manquées », mais bel et bien dans celui de « catastrophes ». J’ai pensé l’espace d’une minute qu’Aïto était peut-être l’exception à la règle… en plus de ses yeux en amande et de ses traits raffinés. Alors, j’ai utilisé mon super like2 pour augmenter les chances qu’il me remarque. Quelques heures plus tard, j’avais une notification m’indiquant que j’avais un nouveau match3. Aïto venait de liker mon profil à son tour. Euphorique à l’idée de plaire à ce bel Asiatique, j’ai envoyé un message super original :
— Salut, tu vas bien ?
Saisissant, n’est-ce pas ? En tout cas, cela n’a pas refroidi Aïto, qui a répondu quasi instantanément.
Source : kobo.com
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