Extraits

Dans la nuit, elle sentit une présence dans la pièce et quelqu’un s’allongea près d’elle. C’était son époux… Il lui demanda de ne pas regarder son visage et la supplia de ne jamais tenter d’apprendre qui il était. Elle promit et, nuit après nuit, son mystérieux mari vint la retrouver. Cette vie luxueuse, bercée par l’amour nocturne que lui portait cet homme, convenait à Psyché qui s’épanouissait de jour en jour.

Un peu plus tard, ses sœurs lui rendirent visite. En constatant l’opulence dans laquelle vivait leur cadette, leur jalousie fut telle qu’elles cherchèrent à la convaincre que son époux était en réalité un monstre qui finirait par la dévorer. Effrayée par les sinistres déclarations de ses sœurs, Psyché décida alors de découvrir le visage de son mari. La nuit suivante, elle alluma une bougie et, à la lueur vacillante de la flamme, aperçut enfin les traits de celui qui passait ses nuits auprès d’elle : un magnifique jeune homme, le dieu Éros en personne.

Hélas ! Une goutte de cire coula sur l’épaule d’Éros et le réveilla. Trahi par l’élue de son cœur, il s’enfuit aussitôt, laissant Psyché folle de chagrin. Prise de remords, elle choisit de se tuer et se jeta dans une rivière, mais elle en ressortit saine et sauve. Le dieu Pan l’attendait sur la rive. Ce dernier lui conseilla de tout faire pour reconquérir l’amour de son époux. Forte de cet avis, Psyché partit donc à la recherche d’Éros.

Elle alla d’abord trouver Aphrodite, pour lui demander son aide, mais la déesse, toujours aussi jalouse, en fit son esclave, lui imposant une série d’épreuves. Malgré les difficultés, la belle éplorée reçut de l’aide à chaque fois et surmonta tous les obstacles.

Toutefois, une ultime épreuve lui restait à accomplir, la plus dure et la plus dangereuse : Psyché devait descendre aux Enfers pour s’emparer d’un éclat de la beauté de Perséphone et le mettre dans une boîte. Découragée par la difficulté de cette tâche, elle décida cette fois de se jeter du haut d’une tour, mais la tour se pencha et lui expliqua comment remporter ce défi. Le stratagème fonctionna, toutefois Psyché eut la faiblesse de contempler le contenu de la boîte et sombra dans un profond sommeil.

De son côté, Éros était retenu prisonnier par sa propre mère, mais son désespoir devint tel qu’il parvint à s’envoler et à retrouver sa bien-aimée. La découvrant endormie, il la ranima et la porta devant Zeus pour lui demander de faire de Psyché sa compagne. Le roi de l’Olympe accéda à sa demande et accorda l’immortalité à la jeune princesse.

J’aimerais bien, Anaïa, j’aimerais tant pouvoir lire dans tes rêves, même les plus effrayants. J’aimerais savoir ce qui tourne en boucle dans ta tête, de quoi tu te souviens. Certainement de rien. C’est ainsi. Telle est ma punition.

P syché était fille de roi et la plus jeune de trois sœurs. Sa beauté était telle, que même la déesse Aphrodite en personne la jalousa… Pleine de rancœur, cette dernière fomenta un plan contre la belle princesse, afin de s’en débarrasser, et fit appel à son fils, Éros, dieu de l’Amour. Elle lui ordonna alors de bander son arc et de toucher Psyché d’une de ses flèches, afin de la faire tomber amoureuse de l’homme le plus laid qui soit. Mais Éros, frappé par la beauté de Psyché, fut incapable de mener son plan à bien. Au contraire, il s’éprit de la princesse.

Anaïa. Tu me manques, tellement… Je suis là, près de toi, je te vois tous les jours, tu ris avec tes amis, tu écoutes tes professeurs, tu ramènes en arrière ton incroyable chevelure de feu d’un geste inconscient, tu lui souris, à lui.

Te voilà… tu arrives ce matin dans la voiture de Garance, comme tous les matins. Vous faites la paire, vous deux. Elle, la grande et sublime métisse, pleine de vie, au charisme incroyable, et toi, petite fée aux taches de rousseur mutines.

Paris. L’Opéra Garnier. Les muses, ces anges dorés posés de part et d’autre du toit monumental reflètent le soleil éclatant, se découpant avec netteté sur un ciel très bleu. Je sors à peine du métro, et me rends compte que j’ai la nostalgie de Paris. Je n’y suis pas revenue depuis notre déménagement dans le Sud. D’ailleurs, je ne parviens pas à me rappeler comment je suis arrivée jusqu’ici, mais cela n’a pas d’importance. Les voitures, sur la place, sont toutes arrêtées dans un embouteillage géant. Aucune ne bouge. La vapeur qui s’échappe de leurs capots surchauffés forme un écran d’air trouble. Je slalome entre elles, afin d’atteindre le trottoir d’en face. Juliette et Simon sont là, ils m’attendent sur les marches de l’Opéra. Comme je suis heureuse de les revoir ! Ils m’ont tellement manqué, depuis tous ces mois ! Juliette me sourit, ses cheveux aussi blonds et brillants que les statues, ses yeux myosotis, sa frimousse farceuse… Elle me serre dans ses bras, tout contre elle. Je suis tellement émue que des larmes piquent le bord de mes paupières.

Garance avait raison, malgré tout. Quelques troublantes coïncidences jalonnaient le récit des aventures de Psyché. Mes rêves, tout d’abord. Moi aussi je retrouvai un homme la nuit, même si c’était dans mon sommeil, mais je ne voyais pas son visage. Je n’avais aucune idée de son identité. Et puis il y avait également une tour qui abritait la future déesse, et à chaque fois, je retrouvais justement mon inconnu dans une tour…

D’un mouvement sec, je rabattis l’écran de mon ordinateur et fit pivoter mon siège pour me tourner vers mon lit. Garance avait le don de toucher là où ça faisait mal. Un long frisson me traversa et je fus tentée, un dixième de seconde, de relire l’histoire, mais je me retins. Non, je n’avais pas besoin de poser mon regard sur ces mots une seconde fois. Ils étaient imprimés dans mon esprit. Un peu trop à mon goût. Merci Garance !

« Psyché était fille de roi et la plus jeune de trois sœurs. Sa beauté était telle, que même la déesse Aphrodite en personne la jalousa… Pleine de rancœur, cette dernière fomenta un plan contre la belle princesse, afin de s’en débarrasser, et fit appel à son fils, Éros, dieu de l’Amour. Elle lui ordonna alors de bander son arc et de toucher Psyché d’une de ses flèches, afin de la faire tomber amoureuse de l’homme le plus laid qui soit. Mais Éros, frappé par la beauté de Psyché, fut incapable de mener son plan à bien. Au contraire, il s’éprit de la princesse.

Demain, elle sera là. Une journée de plus auprès d’elle et… sans elle. Telle est ma punition. À quand la rédemption ?

Je n’ai pas envie de dormir. Ma nuit sera identique aux précédentes : vide, creuse, noire.

Demain, je reprendrai mon rôle auprès d’elle. Et elle n’en saura rien.

Ce soir, j’aimerais pouvoir me coucher et rêver d’elle. J’aimerais qu’elle apparaisse dans mes songes. Je la prendrais alors dans mes bras, je la serrerais fort contre moi et je serais enfin heureux, parce qu’elle sera revenue…