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Après avoir envoyé un SMS à Jackson pour savoir qui était cette fille, je participai aux conversations et aux quelques délires qui émaillèrent la soirée. Mais dès qu’une des filles parlait de Maden – c’est-à-dire toutes les deux minutes – un pincement au cœur me rappelait à l’ordre. Ce qui se révéla rapidement plutôt douloureux et m’enragea un peu. J’étais dépitée de me montrer si faible. Notre entrevue était encore trop récente, à peine quelques semaines, et je n’avais pas eu le temps de bien cicatriser.

Je croisais chaque fois le regard inquiet de Miou posé sur moi, mais je tentais de donner le change. Souris, rigole ! Allez, tu es avec tes amies, tu ne connais pas… nom interdit, tu zappes tout ça ! me morigénai-je pour la centième fois.

— Je me demande quand sortira le dernier volet, lança Janis à mes côtés.

— Dans mille ans au moins ! pleurnicha Lou en déclenchant un fou rire général. J’ai trop hâte…

Je crois que je grimaçais pour de bon, vu l’air sombre de Miou en face. Je replongeai illico dans mon deuxième Mai Tai, pas sûre de marcher droit à la fin de la soirée.

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Miou rit à mes côtés et secoua la tête avec son expression favorite, le « n’importe quoi, Thia » qu’elle arborait un poil trop souvent… mêlé à un subtil mélange de « je suis raide dingue amoureuse de ce type »

que, là encore, je commençais à connaître.

— Tu n’as pas idée dans quoi tu t’embarques. Ils sont pires qu’elle ! Tu verras… AÏE ! Mais arrête, je vais finir avec un bleu.

Miou venait de me décocher un léger coup de pied dans la botte.

— Son père, en particulier, est tout à fait étrange. Il est un peu dans son monde et il épingle des papillons dans des boîtes. Flippant. AÏEEEEE !

La seconde attaque fut plus violente et je renonçai donc à la taquiner, me drapant dans ma dignité d’un air pincé.

— Ne lui fais pas peur ! râla Miou.

— Bon courage en tout cas, il t’en faudra, terminai-je malgré tout.

Mon bond de côté me permit d’esquiver le troisième coup et je trottinai devant en riant jusqu’au restaurant, pour éviter toutes représailles

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Un fou rire me secoua et je le serrai contre moi, émue. À cause de son discours de soutien, mais surtout pour le « petite sœur ». Finalement, nous avions la même sensation sans l’avoir évoquée.

— Je ne sais pas si tu mérites une bonne trempe… ou un remerciement et un câlin ! Crétin, va ! Malgré

tout, je suis convaincue que tu dis beaucoup d’idioties… mais merci, grand frère.

Et à nouveau un petit fard, juste pour garder la forme. Je n’atteignis cependant pas la nuance dédiée à

Maden.

— Ouais, alors les câlins on oublie tout de suite ! Je ne tiens pas à rejoindre Maden dans la « team des jaloux », on se calme, remarqua sobrement Miou à ma droite.

Je me retournai et feignis la surprise.

— Ciel, Tim ! Mon amie était présente ! Notre idylle est démasquée et… AÏE ! Mais t’as de la force, bourrique !

Un fou rire nous secoua tous les trois. Elle venait de me pincer le bras plutôt fort pour une blague innocente. Je finis par lui tirer la langue, en faisant mine d’attraper la main de Tim, ce qui me valut un second coup.

— J’appelle le numéro vert des Thia battues !

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— On m’explique ? Tim me prend en photo pendant mes spectacles, quand je conduis en voiture et maintenant au concert ? Vous préparez une série du genre Martine à la ferme, Martine à la piscine, mais avec moi dans le rôle-titre ? demandai-je, pince-sans-rire

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— C’est la prochaine sortie et, après, il reste une demi-heure de route, évalua Tim en déchiffrant la carte.

Il la referma en vrac et la jeta sur le siège arrière, avant de fourrager dans le paquet de chips et d’en prélever une pleine poignée.

— OK, répondis-je.

Je mis le clignotant après un coup d’œil au rétro et me déportai sur la droite. Je lui volai le paquet une fois dans ma file. Je réussis à en récupérer quelques-unes, mais il avait presque exterminé à lui seul cinq cents grammes de chips. En mâchant les rescapées, je me fis la réflexion que les chips au vinaigre étaient décidément une bizarrerie culinaire anglaise. Comme la marmelade, mais comestible.

Tim, de son côté, continuait l’inspection du sac à ses pieds et il brandit bientôt son appareil photo.

— Bon, je filme ! me prévint Tim.

— Tu déconnes ?

Je pouffai.

— Bah quoi ? On est en plein road trip là, ma belle ! C’est mythique ce genre d’aventures, on en a fait des dizaines de livres, répondit-il, faussement sérieux.

— Un road trip ? répétai-je.

— Tout à fait.

— On rejoint Miou dans une vieille baraque de sa famille en Normandie. On est loin d’un ParisIstanbul, tu sais. Cabourg manque d’exotisme, pour inspirer un grand roman, non ? raillai-je.

— Un road trip reste un road trip ! Peu importe la longueur, le but, le chemin, le…, s’enflamma Tim, se filmant pendant sa tirade.

Un fou rire me secoua et je hochai la tête.

— Tu as craqué… Cra-qué ! Tu es encore dans ta préparation pour The Bridge Behind the Line ? le taquinai-je.

— Bon, à ton tour ! Dis quelque chose à la caméra pour la postérité, Marilyn !

Je détournai les yeux de la route et haussai un sourcil devant l’objectif braqué à dix centimètres de mon visage.

— Marilyn ?

— Oui, aujourd’hui, tu es ma Monroe ! Allez ma muse, parle ! continua le Tim psychotique à mes côtés.

— Euh… tu veux avoir un accident ou quoi ? Ça a beau être tout droit, je conduis.

Je repoussai un peu sa main et contrôlai le rétroviseur. Je doublai plusieurs camions et tripotai la radio. Je trouvai une station rock et vis du coin de l’œil Tim en plein panoramique de l’autoroute ParisDeauville.

— Ton film va dépoter, le thriller du siècle. En route pour Cabourg, bientôt la départementale de tous les dangers, le narguai-je.

— Avec toi au volant, tu m’étonnes, répliqua-t-il aussitôt.

Il avait à nouveau braqué l’appareil sur moi et tentait un plan pourri en contre-plongée.

— Les Anglais mécontents sont invités à se véhiculer eux-mêmes, au lieu de se plaindre. Ah, j’oubliais, tu ne peux pas !

— Ahah, je conduis, mais uniquement à gauche. Mais si un jour nous faisons Londres-Liverpool, par exemple, dans un grand hommage aux Beatles, je vous servirai de chauffeur, Miss Daisy.

— Référence qui date un peu, mais valeur sûre, approuvai-je.

— Tu préfères plus rentre-dedans ? « Juste pour toi, poupée. »

— Poupée ? Vraiment ? Je ne te croyais pas ce genre de mec, raillai-je.

Du coin de l’œil, je remarquai qu’il fouillait à la recherche des dernières chips égarées et la caméra effectua un magnifique piqué, filmant mes cuisses au passage.

— Eh ! Je suis en jupe ! râlai-je. Je te dénoncerai à Miou et te laisserai sur le bord de la route, tant pis pour toi. Elle se trouvera sans peine un nouveau Jules.

— Hilarant. Elle est folle de moi, ça n’arrivera jamais. Allez, appuie sur le champignon ! Je dois retrouver mon soleil, ma muse, ma…

— Et on l’a reperdu. C’est vrai que tu ne l’as pas vue depuis deux jours. Le temps doit te sembler long.

Enfin, surtout les nuits…

— Comme si la passion entre Miou et moi se cantonnait à un moment de la journée !

Tim fit un genre de travelling entre lui et moi. Bravo, voilà qu’il mettait en scène notre fausse dispute.

Je ne pus m’empêcher de rire.

— Je vais finir les chips, ça te fera les pieds. Ma vengeance est terrible ! lança Tim.

Je détournai un instant la tête et lui tirai la langue à lui et à sa caméra improvisée.

— Tu les avais déjà terminées il y a dix minutes, quelle excuse bidon, remarquai-je.

— Je t’en aurais laissé si je t’avais sentie bien intentionnée à mon égard, se défendit-il. Bon, ma star, adresse-moi ta plus belle moue sexy !

Je le dévisageai, intriguée, là ça devenait grave. Il était fou, ivre, ou les deux.

— Non, mais tu as bu en cachette à la station-service ou quoi ?

— Alleeeez ! insista-t-il en riant.

— Toi d’abord.

— OK… Mais je suis moins avantagé que toi, tu as la lèvre plus pulpeuse et fort bien maquillée aujourd’hui.

— La ferme ! pouffai-je. Fais-le pour montrer ça à Miou, et fiche la paix à ma bouche.

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Mon cœur rata plusieurs battements. Maden attendait de l’autre côté de la porte. Paumes dans les poches, un sweat à capuche et des lunettes sur le nez… à 1 h 30 du matin. Dark Vador à Saint-Tropez, le retour. C’était presque drôle.

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— Tu essaies vraiment de me faire croire que tu veux passer à autre chose ? Que ça ne te fera rien si

Maden ne quitte pas Lauren ? Ou qu’il la quitte mais pas pour toi ? me relança-t-elle.

Je haussai les épaules.

— Ni que Jackson se mette en couple ? persista-t-elle.

Je respirai lentement, essayant de me calmer, m’accrochant à ma tasse comme une noyée. J’aurais pu tenter de fuir, mais elle m’aurait poursuivie. Un appart de la taille du nôtre ne permettait pas vraiment d’éviter la confrontation.

— Ils auront sans doute raison, dans ce cas. Elle lui va mieux que moi. Plus adaptée à son mode de vie… Et Jackson mérite d’être heureux. Même si je tuerais celle qui câlinera Hobo…

— Qui ? s’enquit-elle.

— Le chat, rappelai-je

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