Commentaire de Goupilit

Il y a quelques jours, j'ai terminé Profession du père de Sorj Chalandon. Déjà, je tiens à remercier les éditions du Livre de poche, c'est grâce à un de leurs concours sur Instagram que j'ai gagné cette pépite (en plus de 2 places de cinéma pour le film).

Ce livre est un roman autobiographique, qui m'a sortie de ma zone de confort et que j'ai pourtant dévoré. On y suit l'histoire d'Émile, doué en dessin et asthmatique, âgé de 12 ans dans les années 60. Il vit avec son père, mythomane et violent, et sa mère, obéissante et effacée. À cause d'eux, il traverse une enfance compliquée bien différente de celle de ses camarades d'école.

Au début, je ne voyais pas trop où voulait en venir l'auteur. Les souvenirs défilent, imbriqués les uns dans les autres, sans but apparent. Mais on se rend vite compte que quelque chose cloche dans cette famille. Émile croit tout ce que lui raconte son père, il souhaite l'imiter malgré la maltraitance qu'il subit. Il est piégé dans une toile de mensonges et de chimères de plus en plus dangereuse, et mettra des années à s'en échapper. La mère est aveugle à la souffrance de son fils et aux soins psychiatriques dont son mari aurait besoin. Chaque personnage est très fouillé et touchant, en à peine 300 pages on passe facilement de l'ironie au drame.

L'écriture est incisive, faite de phrases courtes parfois sans verbes. Le récit est riche en références historiques connues qui rendent la lecture immersive. J'étais révoltée par certains éléments de l'époque : le patriarcat étouffant ou le point de vue des pro Algérie française sont durs à encaisser aujourd'hui. Et c'est paradoxal car je n'ai pas pu m'empêcher de comprendre le ressenti des personnages concernés, comme celui d'un jeune Pied Noir chassé de chez lui.

En bref, j'ai beaucoup aimé ce roman. Je suis ravie d'avoir pu le découvrir, car je ne me serais jamais penchée dessus en librairie.

Concernant le film, il reprend la plupart des moments clés, même s'il y a beaucoup de passages / détails absents ou différents comme dans toutes les adaptations. J'aurais aimé voir certaines scènes qui sont passées à la trappe dans le scénario. Le caractère des personnages change également, la mère est extravertie et tient tête à son mari, qui est quant à lui moins violent. Le jeu de l'acteur d'Émile est très bon même si l'on n'est plus dans ses pensées. J'ai bien aimé ce parti pris d'une version plus "soft" de l'histoire.