Extraits

Elle se décida à pénétrer à l’intérieur de l’église, mais la lourde porte était fermée à double tour, à cause des nombreux vols commis récemment.

En soupirant pour effacer le dernier regret, elle mesura à

quoi tenait sa destinée.

Amèrement déçue de ne pas être accompagnée de la bénédiction du curé, elle resta un moment immobile,

à tripoter son amulette, et finit par faire un vœu, aussi puissant qu’une flamme vive, avant de s’asseoir devant le porche, pour y verser quelques larmes, qui devaient servir à

influencer le Seigneur.

Elle n’avait pas d’autre choix que de se montrer à son avantage.

Le chagrin quasiment évanoui, elle essuya ses larmes, décidée à reprendre son hasardeux voyage, après une petite méditation.

« Dieu doit penser que certaines créatures comme moi ont été séduites dès la naissance par le pêcher », bougonna

Ève dépitée, devant la croix du Christ, qui semblait la regarder avec des yeux à cerner le mensonge de toute part.

Effrayée, elle camoufla l’amulette, avant d’adresser une génuflexion, agrémentée d’un signe de croix, au cas où le rédempteur voudrait bien revoir sa position à son sujet, et ne pas la laisser comme un organite tombé au fond d’un puits.

Ne croisant personne dans le voisinage immédiat, hormis les grands arbres qui formèrent une voûte sur son passage, comme pour l’encourager à suivre son chemin avec moins de morosité, elle caressa son talisman, convaincue que celui- ci ferait fuir tous les diables.

Requinquée par la confiance en son amulette, qui faisait germer dans son cerveau d’alouette, l’espoir de lendemains plus agréables, sans quoi la vie ne valait pas la peine d’être vécue, elle redoubla d’optimisme.

Quelques gouttes de pluie tombèrent silencieusement, comme si le divin, dans sa grande largesse, la vaporisait de brumes d’encouragement. Elle supposa que l’air de la mer allait lui rafraîchir les idées.

Elle monta dans le car qui l’emmenait à Dieppe, dans un dernier soubresaut de sanglot étouffé, au moment où elle s’aperçut qu’elle venait d’oublier sa valise, sur le parvis de l’église.

La jeune femme, munie d’une personnalité caractérielle insupportable, d’après les dires de son père, allait débarquer sous peu, sur le port de Dieppe, après avoir été fichue à

la porte manu militari de la ferme familiale, c’est ainsi qu’elle amorça un nouveau chapitre de sa vie, tout comme

Rolland Capet, « Pipine » pour les intimes.