Extraits

— Qu’est ce qui s’est passé ? m’exclamé-je sans pouvoir quitter son visage tuméfié des yeux.

— Rien, laisse tomber...

— Sûrement pas !

Je me lève et regarde de plus près son visage. Sa lèvre inférieure est fendue à gauche, son œil est gonflé, encore plus que le reste de sa tête.

Il attrape ma main qui effleure sa peau et en encrant son regard dans le mien, me lance :

— Ne t’inquiète pas ? le problème est réglé.

— Quel problème ?

Alors que le film vient à peine de commencer, Ryan se penche vers moi et me demande de le rejoindre dans le hall. J’hésite à y aller, je ne vois pas trop ce qu’il me veut. Je regarde Evan à mes côtés, captivé par ce qui se joue devant lui, puis Ryan qui se lève et se dirige vers la sortie. Moi, je ne bouge pas, ne sachant toujours pas quoi faire.

— T’as pas eu le temps de t’habiller ? me demande cette dernière après quelque minutes.

Je n’ai qu’une envie, l’envoyer chier, mais je me retiens aussi bien que je le peux et avec un sourire tout ce qu’il y a de plus faux, je lui réponds :

— Si, mais contrairement à certaines personnes, pour moi s’habiller veut dire couvrir les parties de son corps...

« Je dois absolument trouver un moyen de la revoir et de faire connaissance avec »

«  Super je commence à penser comme un psychopathe qui fait une fixette sur une meuf qui ne sait même pas qui il est ! »

Je peste à l’intérieur de moi, deux voix s’opposant, celle de la raison et celle que cette dernière nomme la folie.

« C’est bon détends-toi mec, tu vas la revoir demain. »

« Oui, mais elle ne te parlera pas davantage. »

« C’est clair je déraille complètement, même Ryan n’est pas aussi con que moi ! ». Cette pensée me fait sourire, mais ne me libère pas de mon envie.

« Je ne sais même pas si je pourrai la voir, ce soir. »

« Et quelle raison tu veux donner pour la voir ? Il n’y en a aucune. » me souffle mon côté responsable.

Ma conscience n’a pas tort, je ne peux décemment pas me démerder pour avoir son numéro et lui dire que je veux la voir. Et puis quel con tombe sous le charme d’une fille au bout de trois phrases ? Aucun, on est bien d’accord !

— T’as déjà pris le tram ?

— Non pas encore, et vu le monde ça risque pas ! Explique-toi !

— Genre ils avaient pas assez de thunes pour se payer une vraie sonnerie, alors la meuf qui annonce les arrêts chante, rigole-t-elle.

Je crois que ça va nous faire l’après-midi. Ça donnerait presque envie de le prendre pour entendre ça.

Après dix minutes de marche on se retrouve devant un bar nommé "Les trois pucelles".

"Super nom pour un bar..." me dis-je tout bas.

— Concernant le baiser... commencé-je gêné, mais je m’arrête, voyant Elena se renfrogner.

Elle me fixe avec attention, attendant sûrement que je lui donne une explication. Je ne l’ai pas mentionné devant sa copine car ça ne la regardait pas. Et puis, commère comme elle est, je me doutais bien qu’elle nous avait surveillés.

— J’en ai pas parlé devant elle car ça nous concerne. Je pensais qu’il valait mieux en discuter ensemble en premier, repris-je.

— Oui, pas de souci, répond-elle, même si à sa tête, on dirait tout le contraire.

On doit encore parler de beaucoup de choses nous concernant, mais s’il y en a une qui est sûre, c’est que je ne me reproche en rien de l’avoir fait. Et je ne compte pas en rester là.

— Je ne regrette pas, si c’est ce que tu penses, affirmé-je après quelques minutes de silence en m’arrêtant.

— J’ai jamais dit que je pensais ça.

— Non, mais je vois bien la tête que tu fais, dis-je en mettant mes mains de chaque côté de son visage.

Avec tout ce qu’elle m’a raconté, je ne sais pas si elle est prête à entrer dans une relation à cœur perdu. Je ne sais pas si j’en suis moi-même capable. Et je ne veux pas gâcher ce qui se passe entre nous. C’est pour ça que je compte prendre mon temps avec elle. Je ne sais pas comment lui dire, car je vois bien qu’elle ne veut pas passer pour une petite chose fragile.

Elle essaie de se montrer forte, comme si rien ne pouvait l’atteindre. Comme si elle s’était enfermée dans une cage, de peur d’être blessée. Ce que je peux comprendre. Elle a perdu ses parents et a souffert dans sa seule vraie relation amoureuse. Donc ça ne donne pas envie de faire confiance. Mais je veux qu’elle sache, qu’en moi, elle peut.