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Je chérissais la mémoire d'un homme qui avait ouvert tout un monde devant moi, mais qui ne m'avait pas assez aimée pour vouloir y rester.
Afficher en entier"D'après toi, ça prend combien de temps pour se remettre de la mort de quelqu'un? Quelqu'un qu'on aimait vraiment.
Je ne savais pas pourquoi je lui avais posé la question. Elle était brutale, presque cruelle étant donné les circonstances. Peut être avais-je peur que le baiseur en série fasse encore des siennes.
La surprise de Sam se lut un instant sur son visage.
- Ah. Euh...
Il plongea les yeux au fond de sa tasse, puis releva la tête, le regard perdu au loin dans la pénombre de la campagne.
- ... je ne suis pas sûr qu'on s'en remette jamais complètement, dit-il enfin.
- Joyeuse perspective.
- Non. Vraiment. J'y ai beaucoup songé. On apprend à vivre avec. Avec eux. Parce qu'ils restent en nous, même s'ils ne sont plus là en chair et en os. Ce n'est plus le chagrin dévastateur du début, celui qui te submerge, te donne envie de pleurer en permanence, te fait ressentir cette espèce de colère insensée contre tous les idiots qui sont toujours en vie alors que la personne que tu aimes est morte... Non, c'est juste un vide dont tu dois apprendre à t'accommoder. C'est comme si un trou s'était formé en toi et que tu devais l'accepter sans broncher. Je ne sais pas. C'est comme... comme si tu étais un petit pain et que tu devenais un donut."
Afficher en entier"- Elle ne comprend pas qu'il y a des matins où j'ai juste envie de rester couché, avec le couvertures sur la tête. Ou pourquoi je panique un peu quand il arrive des choses aux gens que j'aime. Elle, il ne lui est jamais rien arrivé de grave. Jamais. Même son lapin de compagnie est toujours en vie, et il a au moins neuf ans.
- Je crois que les gens se lassent du chagrin des autres, déclara Natasha. C'est comme s'ils nous accordaient de manière tacite un temps bien défini pour porter le deuil -six mois, mettons- et après ce délai, ça les agace de voir qu'on ne va pas "mieux". Ils se disent qu'on se complaît dans notre malheur."
Afficher en entierMais j'étais bien placée pour savoir que le personnage qu'on choisit de présenter au monde pouvait être très différent de ce que nous étions réellement.
Afficher en entier- Je suis toujours un donut, OK? répliquais-je. J'aimerais bien être un petit pain. Vraiment. Mais je suis toujours un donut.
- Mais enfin, Lou! On est tous des donuts! Tu crois qu'en voyant ma soeur rongée par le cancer, je ne savais pas que j'aurais le coeur brisé, non seulement pour elle, mais aussi pour son fils, chaque jour de ma vie? Tu crois que je ne sais pas ce que tu ressens? Il n'y a qu'une seule réponse, je peux te le dire parce que je la vois tous les jours: tu es en vie. Et quand on a cette chance, il faut se lancer dans la mêlée en essayant d'oublier ses blessures.
Afficher en entier"Je ne peux pas effacer le message du répondeur de mon frère. J'ai besoin d'écouter sa voix quand j'ai l'impression que je vais oublier à quoi elle ressemble."
Afficher en entierJe me tus un instant. Lorsque je relevais les yeux, M. Traynor me regardait toujours.
- Mon fils aimait se sentir vivre, Louisa. Je ne vous apprends rien.
- Mais c'est ça le truc, n'est-ce pas?
Il attendit.
- Il était juste plus doué pour ça que la plupart des gens, ajoutai-je.
- Vous y arriverez, Louisa. On y arrive tous. Chacun à sa façon.
Afficher en entierEt d'ailleurs, quel était l'intérêt de passer son temps à ressasser sa tristesse? C'était comme gratter une blessure et l'empêcher de guérir.
Afficher en entier"- Ce soir, nous allons parler des signes qui indiquent qu'on est en train d'aller de l'avant, annonça Marc, sa tasse de thé à la main. Pas forcément des choses énormes: nouer une nouvelle relation, jeter des vêtements, ou que sais-je encore. Simplement des petits détails qui nous font comprendre que notre deuil pourra un jour prendre fin. Souvent, nous ne prêtons pas attention à ces signes, comme si nous refusions de les voir parce que nous nous sentons coupables de tourner la page."
Afficher en entierC'est le problème quand on a vécu un événement tragique et bouleversant. On pense qu'on devra s'en remettre : supporter les flash-backs, les nuits sans sommeil, revoir sans cesse les mêmes images, toujours se demander si on a fait ce qu'il fallait, si on aurait pu changer le destin en prenant une seule décision autrement.
Ma mère m'avait dit qu'accompagner Will jusqu'au bout m'affecterait pour le restant de mes jours. Mais j'avais cru qu'elle voulait parler de moi, psychologiquement. J'avais cru qu'elle voulait parler de la culpabilité avec laquelle je devrais apprendre à vivre, de la peine, de l'insomnie, des éclats de colère incontrôlables, de l'incessant dialogue intérieur avec quelqu'un qui n'était plus là. Mais à présent je comprenais qu'il ne s'agissait pas que de moi : à l'ère du numérique, je serais cette personne pour toujours. Même si je parvenais à tout oublier, les gens ne cesseraient jamais de m'associer à la mort de Will. Mon nom serait lié au sien pour aussi longtemps qu'il existerait des pixels et des écrans. Les gens me jugeraient en se basant sur les informations les plus superficielles - si toutefois ils détenaient la moindre information -, et je ne pouvais rien y faire.
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