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Extrait ajouté par nanaelle92 2017-10-23T19:15:19+02:00

Julie m'adresse un sourire étrange.

- Dis moi ce que tu aimes chez Bossman.

-Il est brillant, arrogant, dur mais tendre en même temps. Est-ce que c'est logique?

Je me rends compte qu'elle regarde par dessus ma tête et je suppose qu'elle cherche Christian des yeux.

-Tu écoute ce que je dis?

-Mais oui, répond-elle en vidant son verre. Tu disais quoi? Que tu apprécie le fait qu'il soit insistant? C'est excitant?

Je n'ai rien dit de tel, mais elle n'a pas tort.

-Je te jure que s'il me plaquait contre la porte de mon bureau je me laisserais faire. Ce qui me retient, c'est juste que c'est mon patron, et pourtant j'adore ces manières autoritaires.

Julie sourit comme un matou satisfait.

-C'est quoi le problème?

Elle continue à sourire et je comprends. JE COMPRENDS.

- Il est juste derrière moi, c'est ça?

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Extrait ajouté par Liligreen 2018-05-07T23:04:30+02:00

La peur n’arrête pas la mort. Elle arrête la vie.

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Extrait ajouté par FiftyShadesDarker 2017-10-19T15:14:43+02:00

- Je ne veux pas qu tu changes. Pas du tout. J'aime tout chez toi. Il n'y a pas une seule chose que je voudrais que tu modifies. Enfin, sauf ton nom de famille.

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Extrait ajouté par oceaneaubrey 2017-10-23T12:17:32+02:00

CHAPITRE 1

Reese

C’était bien la peine que je prenne le temps de m’épiler.

— Julie ? C’est Reese. T’es où ? J’ai vraiment besoin de toi. C’est le pire rencard de ma vie. Je suis en train de m’endormir. J’ai envisagé de me frapper la tête contre la table plusieurs fois pour me tenir éveillée. Si tu ne veux pas que je finisse en sang, appelle-moi immédiatement et prétends que c’est une urgence. Rappelle-moi. S’il te plaît.

Je raccroche et je pousse un soupir irrité en quittant les toilettes. J’emprunte le couloir sombre pour me diriger vers la salle de restaurant.

Une voix grave dans mon dos me fait sursauter.

— À moins qu’il ne soit stupide, en plus d’être ennuyeux, il va s’en rendre compte.

— Pardon ?

Je pivote et me trouve nez à nez avec un homme adossé contre le mur, les yeux baissés vers l’écran de son smartphone, sur lequel il tape un texto. Il poursuit sans me regarder.

— C’est la plus vieille ruse du monde… demander à une amie de téléphoner. La moindre des choses serait de faire un effort. Il faut compter deux mois pour obtenir une table dans ce restaurant et le moins qu’on puisse dire c’est qu’il n’est pas donné, ma chérie.

— C’est peut-être à lui de faire un effort. Sa veste est trouée au coude et il a passé toute la soirée à me parler de sa mère.

— Et vous n’avez pas envisagé un seul instant que votre attitude arrogante puisse le rendre nerveux ?

J’écarquille tellement les yeux que j’ai peur qu’ils ne sortent de leurs orbites.

— C’est moi que vous traitez d’arrogante ? Vous écoutez aux portes et vous vous êtes permis de me donner un conseil alors que je n’en demandais pas tant, le tout sans lever les yeux de votre téléphone portable.

L’odieux personnage se fige en plein milieu de la rédaction de son SMS. Il lève lentement la tête et je suis la direction de son regard qui remonte de mes chevilles à mes jambes nues, s’attarde sur l’ourlet de ma jupe avant de poursuivre son chemin sur mes hanches et de s’immobiliser un instant sur mes seins, avant de s’arrêter enfin sur mon visage.

— Voilà, c’est ça. Juste là. Ce sont mes yeux.

Il se redresse et se tient bien droit, sous le seul rai de lumière qui éclaire le couloir. Je distingue ses traits pour la première fois.

Sérieux ? Je ne m’attendais pas du tout à ça. Entre le timbre grave de sa voix et son attitude, je pensais être en face d’un homme plus âgé, vêtu d’un costume ringard. Mais ce mec est canon. Jeune et canon. Il est tout en noir : ses vêtements sont simples et élégants, et pourtant, il dégage quelque chose de dangereux. Ses cheveux châtain clair sont savamment décoiffés, d’une manière qui proclame « j’en ai rien à foutre » et qui pourtant est parfaite. Ses traits sont virils et bien dessinés : une mâchoire carrée, une barbe de trois jours, une peau hâlée, un nez aquilin et de grands yeux sexy couleur chocolat qui me dévisagent intensément.

Il lève les bras au-dessus de sa tête sans me quitter des yeux.

— Vous voulez vérifier si mes vêtements sont troués avant de décider que je mérite votre attention ?

OK, il est peut-être canon mais c’est un connard.

— Inutile. Votre attitude parle pour vous.

Il baisse les bras en rigolant.

— Comme vous voulez. Bonne fin de soirée, ma chérie.

Je renifle dédaigneusement, mais je ne peux m’empêcher de lui jeter un dernier regard avant de tourner les talons pour rejoindre mon compagnon pour la soirée.

Martin est assis là où je l’ai laissé, les mains jointes.

— Désolée, fais-je. Il y avait la queue aux toilettes.

— Ça me rappelle un truc marrant. J’étais au restaurant avec ma mère et quand elle est allée aux toilettes…

J’ai cessé de l’écouter, reportant mon attention sur mon téléphone. Maudite sois-tu, Julie. Où es-tu quand j’ai besoin de toi ? Environ à la moitié de l’anecdote, du moins, je le suppose, j’aperçois l’abruti du couloir qui passe non loin de nous. Il jette un coup d’œil à Martin qui parle dans le vide puis reporte son attention sur mon visage clairement ennuyé, et il ne peut s’empêcher de ricaner. Je le suis des yeux, curieuse de voir qui l’accompagne.

Évidemment.

Une blonde décolorée, jolie mais un peu vulgaire, et dont les seins menacent de jaillir du décolleté profond de sa robe. Elle lui lance un regard énamouré et je lève les yeux au ciel. Cependant… je ne peux m’empêcher de leur jeter des regards à la dérobée de temps en temps.

Quand la serveuse nous apporte nos salades, Martin est en train de me raconter l’appendicite de sa mère et je m’ennuie comme un rat mort. Je dévisage un peu trop longtemps le type du couloir, qui s’en rend compte. Il me fait un clin d’œil, hausse un sourcil et lève son verre dans ma direction.

Connard.

Puisqu’il sait que je le mate, à quoi bon me cacher ? Après tout, il est beaucoup plus intéressant que mon rencard. Et il me regarde ouvertement. Un serveur s’immobilise près de lui et je le vois lui parler en me désignant du doigt. Martin est en train de me raconter une énième histoire mettant en scène sa maman chérie et je tourne la tête pour essayer de deviner ce que l’abruti pouvait bien montrer. Lorsque je me retourne de nouveau, le connard sexy et sa compagne se sont levés. Je lis sur ses lèvres ce qu’il lui dit… quelque chose à propos d’un vieux copain qu’il veut rejoindre. Et les voilà qui se dirigent vers notre table.

Est-ce qu’il va révéler à Martin ce que j’ai dit dans le couloir ?

— Reese. C’est bien toi ?

Hein ? Quoi ?

— Euh… oui.

— Ouah. Ça fait un bail. (Il se tapote la poitrine.) Tu me reconnais ? Chase.

Avant que j’aie le temps de comprendre ce qui se passe, l’abruti – qui apparemment se prénomme Chase – se penche vers moi et m’enlace étroitement. Il en profite pour me murmurer à l’oreille :

— Entrez dans mon jeu. Rendons cette soirée un peu plus excitante, ma chérie.

Sidérée, je le regarde tendre la main à Martin.

— Chase Parker. Reese et moi nous connaissons depuis longtemps.

— Martin Ward, répond-il en hochant la tête.

— Ça vous ennuie si on se joint à vous ? Bouton d’or et moi ne nous sommes pas vus depuis des années. Ça me ferait très plaisir de discuter avec elle. Vous êtes d’accord, n’est-ce pas ?

Chase n’attend manifestement pas de réponse à sa question. Il tire une chaise pour sa compagne et nous la présente.

— Voici Bridget…

Il la regarde et elle complète :

— McDermott. Bridget McDermott.

Elle sourit sans se démonter devant la tournure que prend sa soirée et le fait que Chase n’a pas retenu son nom. Martin, de son côté, a l’air déçu que notre duo se transforme en quatuor, même si je suis certaine qu’il n’osera rien dire.

— Bouton d’or ? demande-t-il à Chase tandis que ce dernier s’assied.

— C’était son surnom. Ça vient du beurre de cacahouète Reese, vous savez ? Celui qui s’appelle bouton d’or. C’est ma gourmandise favorite.

Une fois Chase et Bridget attablés, un silence gêné s’installe. À ma grande surprise, c’est Martin qui le rompt.

— Vous vous connaissez comment ?

Même si la question nous est adressée à tous les deux, je veux que Chase comprenne qu’il est tout seul dans cette galère. C’est son jeu.

— Je laisse Chase te raconter comment on s’est rencontrés. C’est plutôt drôle.

Je pose les coudes sur la table, le menton dans les mains, et je reporte mon attention sur Chase à qui j’adresse un regard enjôleur et un sourire espiègle.

Il ne bronche pas et enchaîne immédiatement.

— En fait, notre rencontre n’est pas tellement marrante, contrairement à ce qui s’est passé après. Mes parents ont divorcé quand j’étais en quatrième et j’ai changé de collège. J’étais très malheureux jusqu’à ce que je rencontre Reese dans le bus de ramassage scolaire au cours de la première semaine. Elle était très jolie et hors de ma catégorie, mais je me suis dit que je n’avais pas de potes pour se foutre de ma gueule si je lui demandais de sortir avec moi et qu’elle refusait. Du coup, même si elle avait un an de plus que moi, je l’ai invitée pour le bal de fin d’année. Et, à mon grand étonnement, elle a accepté. J’étais jeune, bourré de testostérone, et je m’étais mis en tête que ce serait la première fille que j’embrasserais. Tous mes copains dans mon ancien collège avaient déjà roulé des pelles ; il était temps que je m’y mette à mon tour. Et donc, à la fin du morceau, j’ai entraîné Bouton d’or hors du gymnase décoré avec des ballons et du papier crépon ridicules et je l’ai attirée dans le couloir désert. Bien évidemment, comme c’était mon premier baiser, je ne savais pas à quoi m’attendre. Mais je ne me suis pas démonté : je me suis jeté à l’eau et j’ai commencé à l’embrasser passionnément.

Chase s’interrompt et me fait un clin d’œil.

— Jusque-là c’était génial, pas vrai, Bouton d’or ?

Je suis incapable de répondre. Son histoire me sidère. Mais encore une fois, mon absence de réaction ne semble pas le perturber outre mesure et il poursuit son histoire à dormir debout.

— Quoi qu’il en soit, c’est là que ça devient intéressant. Comme je l’ai déjà dit, je n’avais aucune expérience en la matière et j’y suis allé de bon cœur, les lèvres, la langue, j’ai mis le paquet. Au bout de quelques instants, c’est devenu très humide mais j’étais à fond et je ne voulais pas être le premier à rompre le baiser. Quand on a fini par reprendre notre souffle, de manière littérale, puisque j’avais aspiré la moitié de son visage, j’ai compris d’où venait toute cette humidité. Reese avait le nez qui coulait et on avait tous les deux du sang plein la figure.

Martin et Bridget éclatent de rire. Quant à moi, je suis abasourdie.

Chase pose la main sur mon bras.

— Oh, allez, Bouton d’or. Ne sois pas gênée. On a passé du bon temps ensemble. Tu te souviens ?

— Vous êtes restés combien de temps en couple ? demande Martin.

Au moment où Chase s’apprête à répondre, je lui touche le bras de manière condescendante comme il l’a fait un peu plus tôt.

— Pas très longtemps. On a rompu juste après l’autre incident.

Bridget bat des mains et sautille sur sa chaise comme une enfant excitée.

— Je veux tout savoir !

— Je ne suis pas certaine d’avoir envie d’en parler, maintenant que j’y pense. C’est votre premier rencard ?

Bridget opine.

— Je ne voudrais pas que tu penses que Chase a toujours ce problème. Après tout, notre petit incident a eu lieu il y a longtemps.

Je me penche vers elle et je baisse la voix :

— Ils arrivent mieux à se maîtriser en vieillissant. Enfin, d’habitude.

Mais, au lieu d’être contrarié, Chase a l’air ravi par ma petite invention. Il semble même fier. Le reste du dîner se déroule comme il a commencé. Chase invente des histoires sur notre enfance imaginaire sans avoir peur de se ridiculiser et il nous amuse toute la soirée. Quand je ne suis pas trop occupée à le regarder bouche bée, ahurie par ses mensonges, j’ajoute mon grain de sel.

Ça me fait mal de l’admettre mais cet abruti me plaît de plus en plus, même quand il raconte des histoires sur mes saignements de nez et « le malheureux incident du soutien-gorge ». À la fin du repas, je commande un café afin de repousser le moment de nous séparer, on est bien loin de notre conversation dans le couloir.

Une fois dehors, Martin, Chase et moi donnons notre ticket au voiturier. Je préfère garder mon autonomie lors d’un premier rendez-vous et j’ai donc retrouvé Martin au restaurant. Bridget, de son côté, est évidemment arrivée avec Chase, comme le font la plupart des femmes lors d’un premier rencard. Pendant que nous attendons nos véhicules, elle se frotte littéralement contre lui, agrippée à son bras. Je suis la première à récupérer ma voiture, une Audi rouge, et je ne sais pas comment prendre congé de… eh bien… de tout le monde. J’attrape mes clefs et je m’attarde un peu.

— Jolie bagnole, Bouton d’or, constate Chase en souriant. On est loin du tas de ferraille que tu conduisais au lycée.

Je pouffe.

— Faut croire.

Martin fait un pas vers moi.

— C’était cool cette soirée, Reese. J’espère qu’on remettra ça bientôt.

Plutôt que d’attendre qu’il essaie de m’embrasser, je le prends dans mes bras pour l’étreindre brièvement.

— Merci pour le dîner, Martin.

Je recule et Chase s’avance pour me prendre dans ses bras à son tour. Mais au lieu d’une étreinte amicale comme celle dont j’ai gratifié Martin, il me serre étroitement contre lui. J’adore ça. C’est alors qu’il fait une chose étonnante… Il enroule mes cheveux dans sa main et tire dessus pour me faire pencher la tête en arrière. Ses yeux s’attardent sur ma bouche et pendant un bref instant j’ai l’impression qu’il va m’embrasser.

Puis il se penche et pose un baiser sur mon front.

— On se voit à la prochaine réunion des anciens élèves ?

J’acquiesce, presque désarçonnée.

— Mmm… oui, bien sûr.

Il me lâche et je jette un coup d’œil à Bridget.

— J’ai été ravie de faire ta connaissance.

Je m’installe au volant à contrecœur. Alors que j’attache ma ceinture de sécurité, je sens un regard posé sur moi et je lève les yeux. Chase me dévisage. J’ai l’impression qu’il veut me dire quelque chose. J’attends quelques secondes, mais il ne bronche pas.

Je prends une profonde inspiration et je m’éloigne en faisant un geste de la main, tout en me demandant pourquoi j’ai l’impression d’abandonner quelque chose d’important derrière moi.

CHAPITRE 2

Reese – Un mois plus tard

Cent trente-huit, cent trente-neuf, cent quarante. La plaque du plafond le plus près de la fenêtre tout au coin est fissurée. C’est nouveau, ça. Il faut que j’appelle le concierge pour qu’il la remplace avant qu’elle foute en l’air ma routine quotidienne : pas question que cela me stresse alors que tout ça est censé m’aider à gérer mon angoisse.

Je suis allongée sur le sol de ma chambre : je viens de raccrocher avec Bryant, un mec que j’ai rencontré au supermarché la semaine dernière (pour une fois que je ne me fais pas draguer dans un bar, ce qui ne marche jamais, ça change). Il m’a appelée du boulot pour me prévenir qu’il aurait une heure de retard. Ce n’est pas un problème : je suis crevée et je n’ai aucune envie de me lever. Je prends une profonde inspiration, je ferme les yeux et je me concentre sur ma respiration. Inspirer, expirer, inspirer, expirer. Je finis par trouver le calme. Je me lève, je rafraîchis mon maquillage, je me sers un verre de vin, puis j’attrape mon ordinateur portable.

Je parcours les offres d’emplois marketing à New York sur monster.com pendant cinq bonnes minutes avant de me faire chier. Je passe sur Facebook. Comme d’habitude. Chercher un job, ça craint. Je fais défiler les statuts de mes amis et je vois toujours les mêmes choses : des photos de bouffe, de leurs gosses, de la vie qu’il voudrait qu’on croie qu’ils mènent. Je soupire. La photo d’un mec avec qui je suis allée au collège, en train de bercer un nouveau-né, apparaît sur mon fil, et je songe soudain à l’homme avec qui je ne suis pas allée au collège, Chase Parker.

J’ai pensé à ce faux camarade bien plus souvent que je ne veux bien l’admettre, le mois dernier. Des petites choses ont ravivé son souvenir : le beurre de cacahouète Reese sur l’étagère à côté de la caisse de supermarché (j’en ai acheté un pot), une photo de Josh Duhamel dans People Magazine que j’ai lu dans la salle d’attente du dentiste (Chase pourrait être son frère, et il se peut que j’aie arraché la page), mon vibro dans le tiroir de ma table de nuit (je ne l’ai pas fait, finalement, mais j’y ai pensé : après tout, j’avais sa photo sur papier glacé).

Cette fois-ci, je rentre son nom dans le moteur de recherche de Facebook sans réfléchir. Quand son visage apparaît sur l’écran, je pousse un petit cri. Je sens même mon cœur palpiter. Pathétique. Bon sang, il est encore plus beau que dans mon souvenir. Je clique pour agrandir la photo. Il est habillé de manière décontractée, un T-shirt blanc, un jean déchiré au niveau du genou et des Converse noires. Ça lui va super bien. Je passe une bonne minute à contempler son visage sexy avant de zoomer sur l’emblème qui figure sur son T-shirt : Iron Horse Gym. C’est une chaîne de salles de sport et il y en a une juste à côté du restaurant où on s’est rencontrés. Je me demande s’il vit dans le quartier.

Malheureusement, je ne risque pas de le découvrir. Les informations concernant sa biographie ne sont pas publiques. Et la seule photo à laquelle j’ai accès est sa photo de profil. Si je veux en voir davantage, il faut que je le demande en ami et qu’il accepte. Je suis très tentée mais je décide de ne pas le faire. Il me prendrait certainement pour une folle : après tout, il me prend pour une garce (et il me l’a dit) ; nous nous sommes rencontrés alors que nous avions tous les deux un rencard avec une autre personne et un mois entier s’est écoulé depuis.

Mais ça ne m’empêche pas de screener sa photo afin de pouvoir la contempler tout à loisir plus tard. Après avoir passé quelques minutes à rêvasser en pensant à lui, je me morigène. Tu dois trouver un taf. Tu dois trouver un taf. Dans une semaine tu es au chômage. Ferme Facebook.

Je me ressaisis et passe le quart d’heure suivant à lire les petites annonces concernant tout ce qui entretient de près ou de loin un rapport avec les produits de beauté ou qui est juste vaguement intéressant. Je sais que je ne devrais pas me reposer sur les deux entretiens que j’ai décrochés, mais je ne trouve pas grand-chose. Quand on sonne à ma porte, je suis découragée : j’ai bien peur de ne jamais trouver un job pour remplacer celui que j’ai exercé pendant sept ans et que j’adorais jusqu’à il y a peu.

La façon dont Bryant m’embrasse quand je lui ouvre améliore grandement mon humeur. Ce n’est que notre deuxième rencard mais cet homme a un potentiel de folie.

— J’aime ta façon de me dire bonjour, fais-je en reprenant mon souffle.

— J’ai eu envie de t’embrasser toute la journée.

Je lui souris.

— Entre. Je suis presque prête. Laisse-moi attraper mon sac et mon téléphone.

Il fait un geste en direction de ma porte d’entrée.

— Tu as été cambriolée ? Pourquoi autant de verrous ?

Ma porte possède une serrure classique et trois chaînes de sûreté. En temps normal, j’aurais répondu sincèrement et expliqué que je me sentais plus en sécurité ainsi. Mais Bryant ne ressemble pas aux hommes avec qui j’ai l’habitude de sortir. Je l’intéresse vraiment et s’il gratte un peu, et j’ai bien peur qu’il ne le fasse, je vais être obligée de lui confier des secrets que je veux à tout prix garder pour moi.

Du coup, je mens.

— Le propriétaire est accro à la sécurité.

Il hoche la tête.

— C’est bien.

Je me dirige vers ma chambre pour aller chercher un collier, tout en lui criant :

— Il y a du vin dans le frigo, si tu veux.

— C’est bon, je te remercie.

Quand je regagne le salon, je découvre qu’il s’est assis sur le canapé, juste à côté de mon ordinateur portable ouvert sur mes recherches d’emploi.

— Qu’est-ce qu’on va voir ? je demande en enfilant mes boucles d’oreilles.

— Je me suis dit qu’on se déciderait sur place. J’ai envie de voir le dernier film avec Vin Diesel. Mais comme j’ai une heure de retard, je ne dirai rien si tu n’es pas fan.

— Tant mieux, parce que ce n’est pas vraiment ma came. Je préférerais aller voir le Nicholas Spark.

— C’est un châtiment un peu sévère. Après tout, je n’avais qu’une heure de retard, pas trois jours, me taquine-t-il.

— Ça t’apprendra.

Je me dirige vers le canapé pour rabattre l’écran de mon ordinateur portable et Bryant se lève.

— Au fait, c’est qui le mec, sur ton fond d’écran ?

Je fronce les sourcils, perplexe.

— De qui tu parles ?

Il hausse les épaules.

— Grand. Les cheveux en bataille, ce qui ne m’irait pas du tout. J’espère que ce n’est pas un ex-petit ami dont tu serais toujours secrètement amoureuse. Il ressemble à un mannequin d’Abercrombie & Fitch.

Comme je ne comprends pas de qui il parle, je rouvre mon ordinateur. Merde. Chase Parker me dévisage. Quand j’ai enregistré sa photo de profil Facebook, j’ai dû la sauvegarder en fond d’écran par inadvertance. Quand je vois son visage séduisant, je me sens troublée. Bryant attend une réponse de ma part.

— Mmmm. C’est mon cousin.

J’ai répondu la première chose qui me passait par la tête et je me rends soudain compte qu’avoir son cousin adulte en fond d’écran est un peu étrange. J’essaie de m’en sortir en mentant davantage, ce qui ne me ressemble pas du tout.

— Il est mannequin. Ma tante m’a envoyé des photos en me demandant lesquelles je préférais et je les ai téléchargées sur mon ordinateur. Ma copine Julie a bavé en les voyant et en a installé une comme fond d’écran. Comme je suis une quiche en informatique, je ne sais pas comment le remplacer.

Bryant se met à rire sans remettre en question ce que je viens de dire.

Comment se fait-il que, dès qu’il est question de Chase Parker, je me mette à inventer des histoires ?

*

* *

Le jeudi suivant, j’ai un entretien d’embauche le matin et un autre l’après-midi. Le métro est bondé et la clim ne fonctionne pas. Et comme un malheur n’arrive jamais seul, mon métro n’est pas un express mais un omnibus.

Je sens la sueur couler entre mes omoplates, prise en sandwich que je suis entre d’autres voyageurs. Le mec baraqué à ma droite porte un débardeur et il se cramponne à la barre au-dessus de ma tête. Mon visage est exactement à la hauteur de son aisselle poilue et son déo est inefficace. À ma gauche, ce n’est pas non plus un champ de roses. Ma voisine a beau ne pas sentir aussi mauvais que l’autre, elle passe son temps à éternuer et tousser sans mettre la main devant sa bouche. Il faut absolument que je sorte de là.

Heureusement, j’arrive à mon rendez-vous avec quelques minutes d’avance, ce qui me permet d’aller me rafraîchir aux toilettes. La transpiration et l’humidité ont eu raison de mon maquillage et mes cheveux frisouillent. Juillet à New York. J’ai l’impression que la chaleur est prisonnière entre les gratte-ciel.

Je fouille mon sac à main et en extirpe des épingles à cheveux et une brosse. Je parviens à dompter mes boucles auburn en un chignon élégant. Quant au maquillage, je me contente de rattraper les dégâts avec une lingette pour bébé : je n’ai pas d’eye-liner sur moi. Lorsque j’enlève ma veste, je me rends compte que mon chemisier en soie est trempé. Merde. Je vais devoir garder ma veste pendant tout l’entretien.

Une femme pénètre dans les toilettes au moment où je suis en train d’essayer d’éponger ma sueur avec du papier toilette. Elle me jette un coup d’œil dans le miroir.

— Désolée. Il faisait une chaleur à crever dans le métro et j’ai un entretien, j’explique. Je ne veux pas arriver dégoulinante.

— Je comprends très bien, répond-elle en souriant. Quand il fait si chaud, et qu’on a un entretien très important, il vaut mieux prendre un taxi.

— C’est vrai. Je ferai ça cet après-midi. J’en ai un à l’autre bout de la ville pour un job que je veux vraiment. J’ai même acheté du déo.

Alors que je me suis dépêchée pour me rendre présentable, je patiente plus d’une heure avant d’être appelée. Ça me donne le temps de me ressaisir et de compulser leur catalogue. Ils ont vraiment besoin d’un changement de plan marketing. Je prends quelques notes sur ce qu’il faudrait modifier, au cas où l’occasion se présenterait.

— Mademoiselle Annesley ?

Une femme souriante m’appelle depuis la porte du bureau. Je remets ma veste et la suis.

— Je suis désolée de vous avoir fait attendre. Nous avons eu une urgence ce matin avec l’un de nos plus gros fournisseurs et il a fallu la régler.

Nous parvenons dans un grand bureau et elle s’efface pour me laisser entrer.

— Madame Donnelly va vous recevoir tout de suite.

— Oh. D’accord. Merci.

Je pensais que c’était elle qui allait diriger l’entretien. Quelques minutes plus tard, la directrice adjointe de Flora Cosmetics fait son entrée. C’est la femme des toilettes, celle qui m’a vue m’essuyer les aisselles. Génial.

Je suis contente de ne pas avoir déboutonné mon chemisier. J’essaie de me souvenir de notre conversation. Je ne crois pas avoir évoqué autre chose que le temps.

— Je vois que vous êtes sèche.

Son ton est très professionnel, pas du tout amical, comme un peu plus tôt.

— Oui, je suis désolée. La chaleur est vraiment accablante aujourd’hui.

Elle compulse un dossier posé sur son bureau et me pose la première question sans préambule.

— Dites-moi, Mademoiselle Annesley, pourquoi cherchez-vous un emploi ? Je vois dans votre lettre de motivation que vous n’êtes pas au chômage.

— C’est juste. Je travaille chez Fresh Look Cosmetics depuis sept ans. C’est mon premier emploi, je l’ai décroché en sortant de la fac. J’ai commencé comme stagiaire au marketing et j’ai gravi les échelons jusqu’au poste de directrice. Pour être tout à fait honnête avec vous, j’ai été très heureuse chez eux. Mais j’ai l’impression d’avoir atteint un plafond et je pense qu’il est temps pour moi de me tourner vers d’autres opportunités.

— Un plafond ? Qu’entendez-vous par-là ?

— Eh bien, voyez-vous, Fresh Look est une entreprise familiale, et bien que je respecte et admire profondément Scott Eikman, son fondateur et PDG, la plupart des postes de direction sont aux mains de membres de sa famille. Et l’un d’entre eux, Derek Eikman, vient juste d’être nommé directeur adjoint.

En disant ça, j’ai un goût amer dans la bouche.

— Si je comprends bien, des gens moins compétents que vous sont promus par népotisme. C’est à cause de ça que vous voulez partir ?

— Oui. En partie. Mais aussi parce que je pense qu’il est temps pour moi de passer à autre chose.

— Ne pensez-vous pas qu’il est possible que les membres de cette famille connaissent mieux l’entreprise que vous, vu qu’ils ont grandi dans ce monde ? Il est possible qu’ils soient tout simplement plus qualifiés.

C’est quoi son problème, à cette nana ? Ce que je raconte n’a rien de surprenant. Une moitié des dirigeants de Walmart sont des descendants de Sam Walton, qui est mort depuis des années.

Je pense que ce n’est pas le moment d’ajouter que j’ai trop bu à la dernière fête de bureau et que du coup j’ai couché avec celui qui à l’époque n’était que directeur des ventes, Derek Eikman lui-même. C’était un coup d’un soir, une erreur imputable à l’alcool et à une année complète d’abstinence. J’ai su que j’avais merdé à peine dix minutes après. En revanche, je n’ai compris à quel point que deux jours plus tard, quand ce trou du cul a annoncé ses fiançailles avec sa petite amie avec laquelle il sortait depuis sept ans. Il avait prétendu être célibataire. Quand je suis entrée en trombe dans son bureau pour lui demander des explications, il a répondu qu’on pouvait quand même baiser même s’il était fiancé.

Ce mec est un abruti fini et il est hors de question que je travaille pour lui. Non seulement c’est un porc infidèle mais en plus il ne connaît rien au marketing.

— Je suis persuadée que j’étais effectivement plus compétente.

Elle m’adresse un sourire de façade et croise les mains sur son bureau. Est-ce que j’ai dit quelque chose dans les chiottes qui a pu la froisser ? Je n’en ai pas l’impression… mais la question suivante me fait subitement retrouver la mémoire.

— Dites-moi, en quoi l’entreprise dans laquelle vous avez un entretien cet après-midi est-elle mieux que celle-ci ? Je veux dire par-là que le fait que vous envisagiez de payer un taxi pour vous y rendre signifie qu’ils ont quelque chose que nous n’avons pas.

Oh. Merde. J’avais complètement oublié cette histoire de taxi ; c’est vrai que c’est le job que je veux vraiment.

Impossible après cela de me sortir du trou que j’ai moi-même creusé. Même si, malgré tout, mes réponses restent professionnelles, je sais qu’elle a déjà pris sa décision.

Alors que l’entretien tire à sa fin, un homme âgé passe la tête par l’entrebâillement de la porte.

— Tu viens dîner, demain soir, ma puce ? Ta mère me tanne pour que je te convainque.

— Papa, euh… Daniel, je suis en plein milieu d’un entretien d’embauche. On en parle plus tard ?

— Bien sûr, bien sûr. Excuse-moi. Tu n’as qu’à passer me voir dans mon bureau tout à l’heure.

Il m’adresse un sourire poli et frappe un petit coup sur l’encadrement de la porte en signe d’au revoir avant de s’éloigner.

Bouche bée, je me tourne vers mon interlocutrice. Même si je connais déjà la réponse, je ne peux m’empêcher de demander quand même :

— Daniel… Donnelly, le PDG de Flora Cosmetics, est votre père ?

— Oui. Mais je suis certaine que j’ai décroché ce job parce que je suis qualifiée, et non parce que je suis sa fille.

Mais bien sûr. Puisque j’ai gaffé deux fois en l’espace d’une heure, je ne vois pas l’intérêt de prolonger mon supplice.

Je me lève.

— Merci de m’avoir accordé du temps, Mademoiselle Donnelly.

Après, l’après-midi ne fait qu’empirer. Quand je descends du taxi climatisé devant l’immeuble de l’entreprise dans laquelle je suis censée passer mon deuxième entretien, mon téléphone se met à vibrer. La boîte avec laquelle je rêvais de travailler, et à cause de qui j’ai foiré mon premier entretien, m’appelle pour m’expliquer que le poste est déjà pourvu et que, par conséquent, je peux rester chez moi.

Génial. Tout ça est génial.

Peu de temps après, je reçois un e-mail de Flora me remerciant de m’être présentée à l’entretien d’embauche et m’indiquant que je ne faisais pas l’affaire. Et dire qu’il n’est même pas 14 heures.

Je prends une douche rapide et je décide de patienter le plus possible avant de prendre une cuite. Super programme. J’ai perdu une journée de congé. Autant en profiter.

Je suis étendue sur le sol de ma chambre, en train de compter, comme d’habitude, quand mon portable se met à sonner. Je tends la main vers le lit et je tâtonne jusqu’à ce que je mette la main sur mon téléphone. Le nom de Bryant s’affiche sur l’écran. Vu mon humeur, j’hésite à décrocher. Je finis par me décider à la dernière sonnerie.

— Salut. Comment se sont passés tes entretiens ?

— J’ai acheté deux bouteilles de vin sur le chemin du retour. Ça te donne une idée.

— Pas bien, j’en déduis.

— C’est une façon de dire les choses.

— Tu sais ce qu’on devrait faire ?

— Absolument. Se bourrer la gueule.

Il se met à rire comme si je plaisantais.

— Je pense plutôt qu’on aurait pu aller faire du sport.

— Du sport ?

— Ouais. Ça aide à décompresser.

— Le vin aussi.

— Oui, mais quand on fait du sport, on se sent mieux le lendemain.

— C’est vrai, mais quand on boit du vin, on oublie la veille.

Il rit mais je ne plaisante toujours pas.

— Si tu changes d’avis, je vais à la salle de sport, Iron Horse Gym.

— Iron Horse ?

— Elle est sur la 72e. J’ai une carte de membre et je peux faire entrer des invités.

Plus d’un mois s’est écoulé depuis mon étrange rencontre avec Parker Chase. Et pourtant, me voilà à peser les pour et les contre du vin et du sport, tout ça parce que sur sa photo de profil Facebook il porte un T-shirt avec l’emblème de cette salle de sport.

— Tu sais quoi ? Tu as raison. Je devrais faire du sport, ça me détendrait. Et si ça ne marche pas, je pourrai toujours prendre une cuite après.

— Voilà une excellente idée.

— Je te retrouve là-bas. Dans une heure ?

— Parfait.

Je devrais vraiment prendre rendez-vous chez un psy. Je me coiffe et je mets ma tenue de gym la plus sexy afin de retrouver un mec avec qui je sors depuis peu, mais en réalité je ne fais pas ces efforts pour lui. J’espère croiser contre toute attente un type qui possède un T-shirt de ce club de sport, un type qui me prend pour une garce et qui sort avec des poupées Barbie à gros nichons, pas des femmes d’un mètre cinquante-deux avec un bonnet B, et qui malgré sa taille de guêpe a des hanches larges.

Après quarante minutes de vélo elliptique, je regrette d’avoir abandonné l’alcool au profit du sport. Bryant soulève des poids à l’autre bout de la salle et j’aurais dû être ravie qu’il m’invite à faire du sport avec lui. Au lieu de ça, je suis essoufflée, déçue et assoiffée. Heureusement, deux bouteilles de vin m’attendent à la maison.

Quand il a terminé, Bryant s’approche de moi et me demande si je veux aller nager. Je n’ai pas pris mon maillot, je propose de l’accompagner quand même. Pendant qu’il se change, je fais un peu de tapis pour retrouver le bon rythme cardiaque. Comme je l’ai réglé sur lent, j’en profite pour lire mes mails sur mon téléphone. L’un d’entre eux émane d’une agence de recrutement m’annonçant qu’ils ont trouvé le job parfait pour moi à l’étranger, au Moyen-Orient, et me demandent si je veux bien faire une vidéoconférence avec cette boîte. Je trouve cette lettre amusante : elle est pleine de fautes d’orthographe et de syntaxe.

Une fois que Bryant a enfilé son maillot, nous gagnons la piscine. Je lui lis le mail tandis qu’il ouvre la porte.

— Dans les qualifications requises, il y a :: « Sobriété, bonne santé mentale, sans crise d’hystérie ». Tu crois qu’ils ont un problème avec le syndrome prémenstruel, au Yémen ?

Les yeux toujours rivés sur mon téléphone, je rentre de plein fouet dans quelqu’un.

— Je suis désolée, je ne regardais pas devant…

Je me fige.

La vision de Chase tout près de moi suffit presque à me renverser. J’espérais secrètement tomber sur lui mais je ne pensais vraiment pas que ça arriverait. Quelle était la probabilité pour que ça se produise ? Je le dévisage pour être certaine de ne pas être victime d’hallucinations. Mais c’est bien lui, en chair et en os. Il est là, torse nu, avec pour tout vêtement un boxer de bain qui me fait bégayer. Littéralement.

— Ch… Ch… Ch…

Je suis incapable de prononcer son prénom.

Évidemment, il boit du petit-lait. Un sourire ironique étire ses lèvres et il se penche vers moi.

— Tu imites très bien le bruit du train, Boucle d’or.

Il se souvient de moi.

Je secoue la tête pour me ressaisir. En vain. Il est tellement grand et je suis tellement petite que je n’ai pas d’autre choix que de contempler ses abdominaux parfaitement dessinés sur lesquels l’eau ruisselle. Je suis fascinée. Merde.

Je m’éclaircis la voix.

— Chase.

Je suis hyper fière d’avoir réussi à prononcer son nom en entier. Il soulève un peu la serviette qui lui entoure le cou pour s’essuyer les cheveux. Ce faisant, il dévoile un peu plus de peau. Ses pectoraux sont musclés. Et… oh mon Dieu… est-ce que c’est… bon sang. C’est ça. Ses tétons sont durs et l’un d’eux est… est… percé.

— Ravi de te voir, Reese. On s’est perdus de vue pendant dix ans et voilà qu’on se croise deux fois en un mois.

Il me faut un instant pour comprendre qu’il fait allusion à notre prétendue scolarité commune. Sa plaisanterie me permet enfin de me ressaisir.

— C’est vrai. Quelle veinarde je suis.

— Je t’ai déjà vu, intervient Bryant.

J’avais complètement oublié sa présence. À ma décharge, pendant une minute, j’ai aussi oublié l’existence de la Terre. Je fronce les sourcils. Est-ce qu’ils se connaissent ?

— Tu es le cousin de Reese. Le mannequin.

Merde ! Merde ! Merde ! J’ai envie de me rouler en boule dans un trou et de me laisser mourir.

Mais Chase étant ce qu’il est, il entre dans le jeu.

— C’est ça, répond-il à Bryant tout en me lançant un regard étonné. Je suis son cousin. Le plus jeune neveu de tante Bea. Et toi, tu es ?

Bryant lui tend la main.

— Bryant Chesney. (Il se tourne vers moi.) Je croyais que ta mère s’appelait Rosemarie. Comme la mienne.

Chase répond à ma place.

— C’est le cas. Mais on l’appelle parfois Bea. C’est un surnom. Elle est allergique aux abeilles. Elle a été piquée pendant un barbecue familial. Son visage a gonflé et après ça, on l’a surnommé Bea.

C’est pas possible, ce mec est un menteur professionnel. Il excelle dans le mensonge, et en plus il m’entraîne avec lui.

Bryant hoche la tête comme s’il trouvait tout ça plausible.

— J’ai été ravi de faire ta connaissance. Je vous laisse bavarder pendant que je fais quelques longueurs.

Au moment où Bryant s’éloigne, Chase l’interpelle :

— Comment tu sais qui j’étais ? Tante Bea a encore montré des photos de moi ?

— Non. Je n’ai rencontré aucun membre de la famille de Reese. J’ai vu une photo de toi sur son ordinateur.

— Une photo de moi ?

— Reese en a une en fond d’écran.

Oubliez le trou dans lequel je voulais me terrer il y a une minute. Je ferme les yeux et je prie pour que la terre m’engloutisse à jamais. Ou que je puisse revenir en arrière. Je reste parfaitement immobile et je compte jusqu’à trente, les paupières closes. Quand j’ai fini, j’ouvre un œil pour vérifier si Chase a disparu.

— Je suis toujours là, constate-t-il avec un sourire en coin.

J’enfouis le visage dans mes mains.

— Je suis super gênée.

— Pas la peine. Comme on n’est pas vraiment cousins, ce n’est pas grave si tu fantasmes sur moi la nuit.

— Je ne fantasme pas sur toi la nuit !

— Ah d’accord. Uniquement le jour, en regardant ma photo.

— C’était un accident. Je n’avais pas l’intention d’en faire mon fond d’écran.

Il croise les bras.

— D’accord. Je te crois.

— Tant mieux, parce que c’est la vérité.

— Est-ce que tu peux m’expliquer, en revanche, comment ma photo s’est retrouvée sur ton ordinateur ? Je ne me rappelle pas que tu m’aies pris en photo pendant notre double rencard.

— Double rencard ? je répète avec un petit sourire méprisant.

— En parlant de ça, qu’est-ce qui est arrivé à Œdipe ? Tu l’as déjà largué ? Je dois admettre que, même si tu n’as pas employé la bonne manière, tu avais raison de vouloir te débarrasser de lui. Ce mec est chiant comme la pluie.

— C’est vrai.

— Qui est ce nouveau loser avec qui tu traînes ?

— Loser ? Tu ne le connais même pas !

— Il me laisse tout seul avec sa copine. C’est un loser.

— Il te prend pour mon cousin !

— Je viens de te dire qu’on n’est pas cousins.

— Oui, mais, dis-je en riant un peu, tu es bizarre, tu sais.

— Pas plus que la nana qui a téléchargé la photo d’un parfait inconnu sur son ordinateur, à la vue de son petit ami.

— Ce n’est pas mon petit ami. (Je ne sais pas pourquoi j’ai dit ça. C’est à la fois vrai et pas vrai.) On n’est sortis ensemble que deux fois.

— Ah… donc, vous n’avez pas encore couché ensemble.

C’est juste, mais comment le sait-il ?

— Pourquoi tu dis ça ?

— Parce que tu n’es pas le genre de femme à coucher la première ni même la deuxième fois.

— Et comment tu sais ça ?

— Je le sais, c’est tout.

— Et quel genre de femme exactement couche le premier ou deuxième soir ?

— Celle qui envoie des signaux particuliers, elle s’habille d’une certaine manière, elle t’effleure. Tu vois très bien de quoi je parle.

— Comme Bridget ?

À la fin de la soirée, cette femme était littéralement vautrée sur lui.

Il ne répond pas.

Je trouve son silence étrangement chevaleresque.

— Bon, d’où sort la photo que tu as de moi ?

Je lui raconte la vérité. Enfin, presque.

— Je t’ai cherché sur Facebook après le dîner. Je voulais te remercier de m’avoir sauvée et d’avoir allégé cette soirée.

— Tu m’as envoyé un message ?

— Non. Je me suis dit que c’était flippant de t’avoir cherché sur Facebook et du coup j’ai changé d’avis.

— Et ma photo de profil t’a tellement plu que tu l’as gardée ?

— Je voulais sauvegarder la page au cas où je changerais d’avis et au lieu de ça j’ai sauvegardé la photo.

Je sens le rouge me monter aux joues. Je mens très mal. Ma mère a toujours dit qu’on lisait en moi comme dans un livre ouvert.

À ma grande surprise, Chase hoche la tête. Je ne m’attendais pas à ce qu’il lâche l’affaire si facilement.

— Tu viens souvent ici ? C’est la première fois que je te vois.

— Non. J’accompagne Bryant. Il m’a invitée. J’ai passé une sale journée et j’avais prévu de noyer mon stress dans l’alcool. Mais il m’a proposé de faire du sport à la place.

— Qu’est-ce que je disais. Un loser. Si j’étais Brandon, crois-moi que ce n’est pas ce que j’aurais proposé.

— Bryant.

— Comme tu veux.

— Et qu’est-ce que tu aurais proposé ?

— Rien. Pourquoi tu as passé une sale journée ? demande-t-il en changeant de sujet.

— Deux entretiens d’embauche. J’ai raté le premier avant même d’entrer dans le bureau et le deuxième a été annulé avant même que j’entre dans l’immeuble.

— Tu es au chômage ?

— Pas encore. Mais j’y serai vendredi prochain. Vu le climat économique, j’ai peut-être manqué de jugeote en démissionnant avant d’avoir retrouvé un taf.

— Qu’est-ce que tu fais dans la vie ?

— Marketing. J’étais la directrice marketing chez Fresh Looks Cosmetics.

— Le monde est petit. Je connais bien Scott Eikman, le PDG. On joue parfois au golf ensemble.

— Huit millions et demi d’habitants dans cette ville et mon faux petit ami/faux cousin joue au golf avec le PDG de ma boîte ? C’est étrange.

Chase se met à rire.

— Scott prend sa retraite l’année prochaine, non ?

— Oui. Il part en Floride. Il a deux fils qui prendront certainement sa suite.

Beurk. Derek. J’aimerais bien que ce soit lui qui se casse en Floride. Voire en Sibérie.

Chase et moi sommes toujours devant la porte de la piscine. Un mec frappe au carreau en brandissant une canette de soda.

Chase lève deux doigts pour toute réponse avant de m’expliquer.

— On a fait un pari. Je lui ai foutu une branlée à la course. C’est ma récompense.

Je hausse un sourcil.

— Un Fanta ?

— J’aime ça. Ne critique pas ou je n’en apporterai pas au prochain barbecue familial.

Son pote frappe de nouveau contre la vitre. Cette fois-ci, il agite la main comme pour dire : « qu’est-ce que tu fous ? ».

Chase hoche la tête.

— Je dois y aller. On a un dîner professionnel dans une demi-heure et il faut d’abord que je me douche.

J’essaie de dissimuler ma déception.

— C’était cool de te croiser, cousin.

On se dévisage pendant un instant. Comme l’autre soir au restaurant, j’ai l’impression que Chase a envie de me dire quelque chose. Au lieu de ça, il jette un coup d’œil derrière lui, en direction de Bryant qui nage toujours, puis il m’attire à lui, tout en tirant sur ma queue-de-cheval, pour que je lève la tête.

Ses yeux s’attardent sur mes lèvres, puis il pose un baiser sur mon front.

— À plus tard, cousine.

Il fait quelques pas en direction du vestiaire avant de se retourner vers moi.

— Une de mes amies est chasseuse de têtes. Tu veux que je te mette en contact avec elle ? Elle pourrait peut-être t’aider à trouver un job.

— Avec plaisir. Jusqu’à présent, je n’ai pas eu beaucoup de chance par moi-même. Merci beaucoup.

Je lui donne mon téléphone ; il s’envoie un texto à lui-même afin que nous échangions nos numéros. Puis il disparaît. Il me manque déjà. La probabilité de tomber sur lui une seconde fois par hasard dans une ville aussi gigantesque doit être la même que celle d’être frappé deux fois par la foudre.

Il ne me faudra pas une semaine avant de découvrir que ça arrive parfois.

CHAPITRE 3

Chase – Sept ans plus tôt

Je contemple le visage géant de Peyton tout en descendant une bouteille d’eau. La publicité s’étale sur les huit étages de l’immeuble en brique qui fait face à mon nouveau bureau.

— Arrête de glander et bosse.

La Peyton grandeur nature fait irruption dans mon bureau, laisse tomber sa guitare sur le canapé et me rejoint devant la fenêtre.

— Non mais la taille du truc, quoi. Tu m’avais parlé d’un panneau d’affichage et je me retrouve sur un immeuble entier. Le petit éclat que j’ai sur l’incisive fait un mètre cinquante, à présent.

— J’adore cet éclat.

— Je le hais. Le metteur en scène pour qui j’ai auditionné une deuxième fois hier m’a dit que je devais le réparer et perdre cinq kilos. Il m’a parlé d’une facette ou un truc du genre.

— Tu n’as rien à réparer. Ce mec est un con.

— Je n’ai pas eu le rôle, dit-elle en soupirant.

— Qu’est-ce que je te disais ? Il n’a aucun goût.

— Tu n’es pas objectif parce que je couche avec toi.

— Non, dis-je en l’attirant à moi. Je me suis tapé un putain d’opéra la semaine dernière parce que je couche avec toi. En revanche, je te dis que t’es une bonne musicienne parce que j’ai assisté à tous les concerts que tu as donnés depuis la fac, même ceux où tu étais planquée dans la fosse. Et depuis que tu t’es lancée dans une carrière d’actrice, j’ai vu tous tes spectacles off-Broadway.

— Off-off-Broadway.

— Est-ce qu’on ne dit pas ça de tout ce qui n’est pas à Broadway ?

— Non. Off-Broadway, ça veut dire moins de cinq cents spectateurs. Off-off-Broadway, c’est quand je me suis produite au café dans le Village.

— Tu as été géniale.

Peyton me lance un regard sceptique.

— Je jouais quel rôle, exactement ?

— La fille sexy.

— Raté. J’incarnais la mère qui meurt de tuberculose. Tu as passé toute la représentation à faire des mots croisés.

Oh. Cette pièce-là.

— Il se peut que j’aie loupé des bouts. Pour ma défense, c’était des mots croisés cochons. Attends… un mot de dix lettres correspondant à la définition : « sec et dur quand il entre, humide et mou quand il sort »… J’ai compté les lettres de bite, queue, popaul et braquemart une dizaine de fois avant de comprendre que la réponse était chewing-gum.

— Quel pervers.

Je dépose un baiser chaste sur ses lèvres.

— On va dîner où, mon éclat ?

Elle pose une main sur sa bouche, mais ne peut dissimuler son sourire.

— Ne m’appelle pas comme ça. J’ai envie de manger thaï. Si on retournait dans ce petit resto de Chelsea où on est allés le mois dernier ?

— Bonne idée.

Je jette un dernier coup d’œil à l’affiche avant d’éteindre la lumière et de quitter mon bureau.

Une fois dehors, je tourne à gauche pour me diriger vers la station de métro la plus proche, mais Peyton prend à droite.

— Ça t’embête si on prend la 3 à Broadway, plutôt ? Je voudrais faire un crochet par Little East.

— Pas de problème.

Peyton fait du bénévolat dans les refuges et les banques alimentaires depuis la fac. Elle adore aider les autres et c’est un trait de caractère qui me plaît chez elle. Mais cet endroit est rempli de brutes de passage. Des bagarres éclatent au moins deux fois par semaine. J’ai essayé d’aborder le sujet de sa sécurité, mais hélas !, quand il s’agit de son bénévolat, elle ne veut rien entendre.

Quand elle avait cinq ou six ans, son abruti de père s’est barré, abandonnant Peyton avec sa mère et deux autres enfants. Sa mère ne parvenait déjà pas à joindre les deux bouts avec deux salaires et quand elle n’en a plus eu qu’un seul, elle a dû choisir entre le loyer et la bouffe. Elle a choisi le loyer. Du coup, ils ont dû fréquenter les banques alimentaires pendant quelques années, jusqu’à ce que leur situation s’arrange.

L’un des habitués du refuge est assis devant la porte quand on arrive.

— Salut, Eddie, fait Peyton.

Je l’ai déjà rencontré. Je ne pense pas qu’il ait plus de quarante ans, mais vivre dans la rue l’a prématurément vieilli. Il parle peu mais semble inoffensif. Peyton a un lien particulier avec lui ; il lui parle plus qu’aux autres.

— Qu’est-ce que tu as à la tête ?

Je me penche un peu, sans m’approcher trop de lui. Je sais qu’il n’aime pas ça. Il a une plaie près de la tempe.

— Qu’est-ce qui t’est arrivé, Eddie ? demande Peyton.

Il hausse les épaules.

— Des mômes.

Récemment, il y a eu des incidents : des adolescents ont roué de coups des SDF qui dormaient dans la rue. Eddie n’aime pas les refuges. Ils sont souvent bondés et il n’aime pas se retrouver trop près des gens.

— Un nouveau refuge vient d’ouvrir sur la 41e, dis-je. Je suis passé devant l’autre jour. Il n’est peut-être pas encore pris d’assaut, du coup. Sans compter qu’il ne fait pas froid.

— Ouais.

Il me répond toujours par monosyllabes.

— Tu devrais porter plainte, intervient Peyton.

Elle a beau avoir passé un temps fou dans ce genre d’endroits, elle ne comprend toujours pas. Les sans-abri ne fréquentent pas les flics. Ils tournent les talons dès qu’ils en voient un.

Eddie secoue vigoureusement la tête et ramène ses jambes sur sa poitrine.

— Ça a l’air sérieux. Tu as besoin de points. Les gamins qui t’ont fait ça viennent ici ? demande-t-elle.

Nouvelle dénégation.

Je parviens à la convaincre au bout de quelques minutes de lui ficher la paix et d’entrer pour faire ce qu’elle a à faire. Le directeur du refuge, Nelson, est en train de débarrasser la table.

Peyton le soumet aussitôt à un interrogatoire en règle.

— Tu sais ce qui est arrivé à Eddie ?

Il cesse d’essuyer la table.

— Non. Je lui ai posé la question. J’ai obtenu la réponse habituelle. C’est-à-dire rien. Tu es la seule à qui il dit plus que « merci » et « s’il te plaît ».

— Tu sais où il dort ?

Il secoue la tête.

— Désolé. Cette ville compte plus de quarante communautés pour SDF, sans compter tous les abris de fortune. Il peut dormir n’importe où.

— D’accord, répond Peyton, contrariée.

— Je sais que ce n’est pas facile. Mais on ne peut pas aider ceux qui ne le veulent pas. Il sait qu’il peut dormir ici quand il veut.

— Je sais. J’ai oublié la liste de courses. J’ai une audition demain, je ferai les achats sur Internet.

Peyton disparaît et je jette un coup d’œil autour de moi. L’endroit a été repeint récemment et tous les bénévoles ont donné une affiche avec leur citation préférée. Il y en a une dizaine, encadrées de noir et fixées le long du mur du réfectoire. Sur la première, je lis : « Même la nuit la plus noire voit le soleil se lever. »

— C’est la tienne ? je demande à Peyton quand elle revient, une chemise à la main.

— Non, répond-elle puis elle m’embrasse légèrement sur les lèvres. Tu les liras une autre fois et tu gagneras quelque chose si tu trouves la mienne. Mais je veux parler à Eddie avant qu’il disparaisse. Allons-y, fait-elle en me prenant la main.

Eddie n’est plus assis sur le perron mais on le repère tout de suite. Il déambule, une centaine de mètres plus loin. Il traîne la jambe droite et porte un sac-poubelle sur l’épaule gauche.

Peyton l’aperçoit juste avant qu’il tourne au coin de la rue.

— Suivons-le. Je veux savoir où il va.

— Pas question.

— Pourquoi ?

— Parce que c’est dangereux ; et que c’est une façon de s’immiscer dans sa vie privée. Pas question de suivre un SDF.

— Mais si on savait où il dort, on pourrait demander de l’aide à la police.

— Non.

— S’il te plaît…

— Non.

— Bon, d’accord.

J’aurais dû me douter qu’elle ne lâcherait pas l’affaire comme ça.

CHAPITRE 4

Reese

Mon téléphone a sonné très tôt ce matin, et voilà que j’ai un déjeuner qui me remplit d’impatience. Chase m’a dit qu’il avait une amie chasseuse de têtes, mais il a oublié de mentionner que cette femme, Samantha, recrute pour Parker Industries, une boîte qui appartient à Chase. Ça a aussitôt éveillé mon intérêt et je dois bien admettre que j’ai été un peu déçue quand elle a proposé qu’on se retrouve dans un restaurant. Même s’il est facile d’accès puisqu’il est à quelques arrêts de métro seulement du bureau que je suis sur le point de quitter chez Fresh Look, je ne risque pas de croiser Chase.

Mais le déjeuner se révèle très agréable. On passe deux heures au restau, puis on fait une balade dans le parc. Après avoir évoqué mon CV et ce que j’attends d’un emploi, on passe à Parker Industries.

— Chase invente lui-même les produits ?

J’aurais peut-être dû passer plus de temps à le googler qu’à le mater sur Facebook.

— Il le faisait, oui. Maintenant, il possède un groupe de recherches et de développement, mais ils travaillent principalement sur ses idées. Croyez-le ou pas, mais ce joli cœur est l’homme le plus intelligent que j’aie rencontré de ma vie.

— Quel est le premier produit qu’il a inventé ?

— « La chatte qui ronronne ».

Je m’immobilise.

— La quoi ?

Samantha éclate de rire.

— Il a changé de nom depuis qu’il est commercialisé dans plus de cinquante pays. Il s’appelle la Cire Divine, à présent.

— C’est lui qui a inventé la Cire Divine ? Il paraît que ce truc est génial.

— Tout à fait. Quand il était à la fac, il vivait en coloc avec des mecs qui faisaient de la muscu. Certains étaient à fond. Quand il était en deuxième année, ils se sont mis à faire des concours de body-building. Ils étaient obligés de s’épiler et ces gaillards grande gueule se plaignaient sans arrêt que ça faisait un mal de chien. Chase bossait à mi-temps au labo de chimie de la fac et il a mis au point une cire contenant un anesthésiant. Les gars ne sentaient plus rien.

— Et il en a fait une marque pour les femmes ?

— Ça lui a pris du temps. Le bruit a couru à l’université qu’un beau mec avait inventé l’épilation sans douleur et c’est comme ça que le produit a été baptisé la chatte qui ronronne. Il faisait le tour des dortoirs des filles et se faisait mille dollars dans l’après-midi. En plus, il en profitait pour coucher avec la plus jolie. C’était hallucinant, poursuit Samantha en riant. Il a toujours été beau gosse et très sûr de son intelligence. Les femmes adorent ce combo.

Je confirme.

— C’est incroyable. Qu’est-ce qui s’est passé ensuite ?

— L’année suivante, Il fournissait la cire et tout ce qu’elle voulait d’autre à Dakota Canning, l’héritière de Canning & Canning.

— La compagnie pharmaceutique qui est dans le top 100 des plus grandes fortunes des États-Unis ?

— C’est ça. Je pense que Dakota a parlé de la cire à son père et tout est parti de là. Ils ont créé le packaging et vendu sous licence pendant six mois. Quand Chase a quitté la fac, il était déjà millionnaire.

— Cette histoire est incroyable.

— Oui. C’est le Zuckerberg des produits féminins. Il en a amélioré comme ça une dizaine. La plupart sont des cosmétiques, mais il est aussi l’inventeur d’une crème contre les brûlures qui régénère la peau, réduit sensiblement la douleur et qu’on ne met qu’une fois par jour. Les autres crèmes nécessitent plusieurs applications quotidiennes, or une peau sévèrement brûlée est extrêmement douloureuse et on sait très bien que, plus on touche la plaie, plus les risques d’infection sont grands.

— Hallucinant.

— Oui. Mais ne lui dites jamais que je vous ai raconté ça, fait Samantha en souriant. Vous l’avez rencontré comment, déjà ? Il m’a parlé d’un double rencard, mais sans rentrer dans les détails. Essayer d’obtenir de lui une information personnelle revient à tenter de cambrioler Fort Knox. Et pourtant, je le connais depuis le collège.

— C’est une histoire étrange. Je dînais avec un mec avec qui ça se passait mal et je m’étais réfugiée devant les toilettes pour passer un coup de fil à une copine : je lui ai demandé de me rappeler pour me sauver. Chase a entendu mon message et il m’a accusée d’être mal élevée. J’ai regagné ma table et il nous a rejoints avec la nana avec qui il était ce soir-là.

— Il connaissait l’homme avec qui vous étiez ?

— Non. Il a prétendu que nous étions des amis de longue date. Il a même raconté des histoires inventées de toutes pièces sur notre prétendue enfance commune. Elles étaient tellement détaillées et réalistes que j’aurais presque pu y croire moi-même.

— Voilà qui lui ressemble. Quand on était au lycée, il a fait une rédac à la place de mon amie Peyton. Il la lui a donnée juste avant d’entrer en cours et elle n’a donc pas eu le temps de la lire avant de la rendre. L’assistante sociale l’a convoquée le lendemain matin, inquiète. Le prof d’anglais se faisait du souci pour elle. Il avait raconté une histoire abracadabrante dans laquelle elle se faisait agresser par un grizzli pendant qu’elle faisait du camping avec ses parents qui avaient trop bu pour pouvoir la sauver. Il avait décrit le trajet jusqu’aux urgences et les points de suture de manière tellement réaliste qu’on y croyait.

— Voilà ! C’est exactement ce qu’il a fait avec moi. Il a raconté une histoire folle sur notre premier baiser quand on était en quatrième et sur la façon dont je me suis mise à saigner du nez en plein milieu. C’était tellement tiré par les cheveux que ça en devenait crédible.

Elle secoue la tête en riant.

— La frontière entre le génie et la folie est ténue.

Une fois que nous sommes parvenues à la sortie du parc, Samantha me serre la main.

— J’ai été ravie de faire votre connaissance, Reese. Je dois bien avouer que j’ai été surprise lorsque Chase m’a appelée chez moi hier soir pour me demander de vous trouver un job. Il ne mélange jamais sa vie privée et ses affaires. Mais je comprends pourquoi vous lui plaisez autant. Vous êtes pragmatique, intelligente, spirituelle ; en fait, vous lui ressemblez beaucoup.

— Oh… on n’est pas… nous ne nous fréquentons pas. Il y a eu ce double rencard étrange et on s’est croisés au club de sport il y a quelques jours, c’est tout.

Elle me lance un regard sceptique.

— Vous avez dû lui faire bonne impression, alors. C’est la première fois qu’il me demande de sous-traiter.

— Comment ça ? je demande, perplexe.

— Je ne suis plus chasseuse de têtes depuis trois ans. Je suis la recruteuse attitrée de Parker Industries.

— Oh… je n’avais pas compris. Chase m’a dit qu’il connaissait une chasseuse de têtes… j’en ai déduit que vous ne travailliez pas seulement pour lui.

— C’était le cas avant. Mais je suis contente qu’il m’ait demandé de m’occuper de vous. J’ai beaucoup de contacts dans l’industrie cosmétique. Je vais tâter le terrain pour voir qui recrute. Je sais déjà qui cherche un chef de produit. C’est un job moins prestigieux que celui que vous laissez derrière vous, mais il faut bâtir une campagne marketing de A à Z pour plusieurs produits et il faudrait donc faire un relookage complet. Ça vous intéresserait ?

— Je quitte mon job vendredi prochain et je n’ai rien en vue. Je ne suis pas du genre à me tourner les pouces, donc, oui, je suis partante.

— Super. Laissez-moi un jour ou deux. Je vais voir ce que je peux faire.

*

* *

Ce soir-là, c’est mon troisième rencard avec Bryant, le quatrième si on compte le club de sport. Il m’a invitée chez lui pour mater un film et il a prévu de cuisiner : je sais que, compte tenu de l’endroit, les choses risquent de progresser entre nous. On s’est roulé quelques pelles torrides mais c’est tout.

Une fois sous la douche, je me demande si je suis prête à coucher avec lui. Je suis loin d’être coincée et il n’est nul besoin de franchir certaines étapes pour finir dans mon lit. Il m’est arrivé plusieurs fois de coucher le premier soir mais j’ai connu aussi des relations de quatre mois qui n’arrivaient jamais jusqu’à la chambre. Je suis toujours mon instinct. Tout en me rasant les jambes, j’essaie d’analyser mes sentiments pour Bryant. C’est un mec sympa ; il a trente et un ans, pas d’enfant, pas d’ex encombrante ; il est mignon, il a un bon job dans un fonds commun de placement et il n’a pas peur de montrer son affection. Et pourtant, alors que le rasoir glisse sur ma cuisse, ce n’est pas à lui que je songe. Mes pensées sont tournées vers Chase Parker.

J’essaie de me convaincre que c’est à cause des histoires que Samantha m’a racontées au déjeuner. Il a inventé une cire révolutionnaire et je suis en train de me raser les jambes. Quand je me lave la poitrine, je songe à son téton percé. Ma main s’attarde sur mes seins. Après tout, il faut bien que je les lave. Et je pense à Chase quand je ferme les yeux, je me demande à quoi ressemblerait son beau visage si je prenais l’anneau métallique entre mes dents et que je tirais dessus. Je m’empêche de me caresser mais ce n’est pas chose aisée. Je ne pense qu’à Chase alors que je devrais songer à quelqu’un d’autre.

J’achète une bouteille de vin en me rendant chez Bryant. Il m’accueille chaleureusement.

— Tu es splendide, fait-il avant de m’embrasser.

Un minuteur retentit dans la cuisine et il m’invite à le suivre. Je jette un coup d’œil autour de moi en traversant l’appartement. Ce dernier est bien tenu et moderne. J’aperçois même quelques toiles sur les murs. La plupart de mes ex pensaient que décorer signifiait accrocher un écran géant dans le salon. C’est un progrès.

Bryant soulève le couvercle d’une marmite et le pose sur le plan de travail. Il ouvre une boîte de rigatoni en souriant.

— J’ai préparé deux plats. Des rigatoni à la vodka et du poulet parmesane. La première fois qu’on est allés dîner tous les deux, tu as commandé des pâtes primavera, du coup je me suis dit que tu aimais manger italien.

Je suis touchée qu’il se souvienne de ce que j’ai commandé.

— Tu as besoin d’aide ?

— Tu peux prendre deux verres dans le placard, répondit-il avec un geste du menton en direction du placard de gauche, tout en versant les pâtes dans l’eau bouillante. Il y a une bouteille de vin déjà ouverte au frigo. Je m’occupe des pâtes, je te laisse servir le vin.

Il ne me quitte pas des yeux pendant que je m’exécute.

— Quoi ?

— J’ai envie de te dire quelque chose mais j’ai peur que ça te fasse flipper.

— Tu en as trop dit ou pas assez.

Je lui tends son verre tout en buvant une gorgée du mien.

— OK. J’ai pensé à toi sous la douche. Tu es tellement belle.

J’aurais dû être flattée, mais au lieu de ça je me sens coupable. Tandis que le super mec avec qui je sors pense à moi, moi je pense à un autre.

Un sourire forcé étire mes lèvres.

— C’est mignon. Merci.

Il s’approche de moi et repousse une mèche de cheveux derrière mon oreille.

— Je suis sincère. Tu ne plais beaucoup. Tu es intelligente, belle et déterminée. Je sais que c’est un peu tôt pour dire ça, mais je pense que ce qu’il y a entre nous est parti pour durer.

Je déglutis. Il me plaît lui aussi. Cependant, quelque chose me retient. Il vient de dire ce que toute femme célibataire de vingt-huit ans rêve d’entendre dans la bouche d’un mec super. Et pourtant… je ne suis pas prête.

Il le voit sur mon visage.

Il fait un pas en arrière.

— Je te fais peur, hein ?

Je m’en veux de lui faire subir ça, parce que je l’apprécie vraiment.

— Non… pas du tout. Tu me plais toi aussi. C’est juste que… je pense que nous devrions aller moins vite. Jusqu’ici je n’ai pas eu beaucoup de chance dans ma vie sentimentale, et je suis échaudée.

Il hoche la tête. Mais même s’il me sourit, je devine qu’il est déçu. Je me déçois moi-même. Ça fait quelque temps que j’essaie de me persuader de tomber amoureuse de lui.

Et c’est ça qui manque. Je devrais être amoureuse de lui. À ce stade-là de notre relation, je devrais avoir des papillons dans le ventre quand il me dit ce genre de choses ou quand il me regarde avec tendresse. Je suis bien décidée à continuer d’essayer. Il en vaut la peine.

Mais même si Bryant est d’accord pour que nous allions lentement, ma réaction jette un froid sur le reste de la soirée. Je dois bien admettre que je suis ravie de ne pas avoir à réfléchir à l’éventualité de coucher avec lui. Je comprends qu’en réalité je ne suis pas prête. Et quand je pars de chez lui assez tôt, je me demande si je le serai un jour.

CHAPITRE 5

Reese

— Il faut vraiment que je me mette à prendre des taxis, je marmonne tout en grimpant quatre à quatre l’escalier du métro et en courant vers l’immeuble où je devrais déjà me trouver si le métro n’était pas resté à l’arrêt pendant vingt minutes.

Mon entretien d’embauche est à onze heures et il est déjà onze heures dix. Peut-être aussi que mes huit changements de tenue ce matin n’ont pas aidé.

L’immeuble Maxim est un gratte-ciel moderne, entièrement vitré, qui comprend plus de cinquante étages. Une fois entrée dans le hall gigantesque et élégant, il me faut une bonne minute pour repérer où se trouve la direction. Tout est argenté et brillant. Je finis par trouver Parker Industries sur la liste et je fais courir mon doigt sur la vitre jusqu’à l’étage. 33e.

Je me précipite vers l’ascenseur : les portes d’une des cabines sont en train de se refermer et je glisse le pied pour les en empêcher. Ça marche, mais je manque de perdre ma chaussure dans la manœuvre.

— Merde. Aïe.

Les portes s’ouvrent et je m’engouffre à l’intérieur. Je ne me rends pas compte que mon talon se coince dans l’espace entre la cabine et le sol. Je trébuche en avant et un bras secourable m’empêche de tomber.

— C’est pas vrai, putain, fais-je, en constatant que ma chaussure est restée coincée.

— Ravi de te revoir, Reese.

Je lève brusquement la tête en comprenant qui m’a empêchée de tomber.

— C’est une blague. Combien de mauvaises impressions peut-on faire sur quelqu’un ?

Chase s’agenouille pour récupérer mon escarpin. Il me tapote le mollet pour me faire signe de lever la jambe et glisse le soulier sur mon pied.

— Ce n’est absolument pas une mauvaise impression, rétorque-t-il en restant à genoux un peu plus longtemps que nécessaire. Tu as des jambes superbes.

— Merci pour la chaussure.

Il se relève et hausse les sourcils.

— Je n’ai pas droit à un remerciement pour t’avoir fait un compliment sur tes jambes sexy ?

Je sens le rouge me monter aux joues et je suis soulagée de le voir se tourner vers les boutons du panneau de commande.

— Quel étage ?

— Euh… 33.

Sa compagnie occupe plus d’un étage ?

— Tu vas chez Parker Industries ? Tu as rendez-vous avec Sam ?

— Oui. Et Josh Lange.

— Josh ?

— Oui. C’est lui qui est censé conduire un entretien, non ? Le directeur marketing adjoint ?

— C’est ça.

J’ai le curieux sentiment que Chase ignorait tout de ma visite.

Un silence inconfortable s’installe. Les portes s’ouvrent, et il me fait un signe du bras pour que je passe devant lui. Nous franchissons ensemble la double porte vitrée sur laquelle s’étale son nom.

L’accueil est désert.

— Assieds-toi, je vais les prévenir de ton arrivée.

— Merci.

Deux minutes après son départ, la réceptionniste fait son apparition.

— Bonjour. Je suis désolée, j’avais des photocopies à faire. J’espère que vous n’attendez pas depuis trop longtemps.

— Pas du tout. Je suis arrivée avec Chase. Il est allé prévenir Samantha Richmond et Josh Lange de mon arrivée.

— Vous devez être Reese Annesley. Sam m’a demandé de vous installer dans la salle de réunion. Suivez-moi.

Une longue table en acajou et une dizaine de sièges occupent tout l’espace. Une baie vitrée donne sur le couloir, mais les stores sont partiellement fermés. Une fois à l’intérieur, je remets du rouge à lèvres. Je viens de terminer lorsque la voix de Chase me parvient de l’autre côté de la vitre.

— Je pense que ce n’est pas une bonne idée d’embaucher Reese.

Je me fige. Apparemment, il ne m’a pas vue.

Je reconnais la voix de Samantha.

— Pourquoi ça ? Elle serait parfaite pour le job.

— Je ne le crois pas.

— Tu racontes n’importe quoi.

— Ne me fais pas chier, Sam. Ne l’embauche pas, c’est tout.

Je ne la vois pas, mais je l’imagine en train de croiser les bras.

— Donne-moi une bonne raison.

— La raison c’est que je te l’ordonne.

— Non.

— Non ?

— Tu as bien entendu. Non. Tu la punis parce qu’elle est belle et que tu la trouves attirante. C’est aussi illégal que de ne pas embaucher quelqu’un en raison de son âge ou de sa couleur de peau.

— Tu t’égares.

— Ah bon ? Alors donne-moi une bonne raison pour que je ne l’embauche pas. Le job est taillé pour elle et elle est disponible tout de suite. Dimitria part en congé maternité dans peu de temps : le timing est parfait. Le marketing est en sous-effectif et Josh comptait embaucher quelqu’un dans l’équipe stratégie. Elle peut prendre en charge les dossiers de Dimitria et mettre en place ses propres projets une fois que cette dernière sera revenue.

— Comme tu veux.

— J’espère bien.

La voix de Sam s’éloigne. Je suppose qu’elle aussi.

Je ferme les yeux. Pas question de travailler dans un endroit où on ne veut pas de moi. Mais je veux absolument remercier Samantha avant de partir. Considérant que ce serait une perte de temps pour tout le monde que l’entretien ait lieu, je quitte la salle de réunion et me dirige vers l’accueil. Je compte demander à la réceptionniste d’appeler Samantha pour moi. Évidemment, je croise Chase. Je fais immédiatement demi-tour pour ne pas lui parler, même si je n’ai aucune idée de l’endroit vers lequel je me dirige.

— Reese ? Qu’est-ce que tu fais ?

— Ce n’est pas ton problème, je rétorque sans m’arrêter.

Il me rattrape et marche à ma hauteur.

— Qu’est-ce qu’il se passe ?

Je suis furieuse qu’il joue les innocents. Je m’arrête et je pivote pour le regarder bien en face.

— Je t’ai entendu dans la salle de réunion. Je m’en vais.

Il ferme les yeux.

— Merde.

— Tu peux le dire. Je me sens traitée comme une merde.

Je me remets à marcher, mais Chase m’attrape par le coude et me fait entrer dans un bureau vide dont il ferme la porte derrière lui.

Il se passe la main dans les cheveux. Ses cheveux débiles et sexy.

— Je suis désolé. Je me suis comporté comme un connard.

— Oui. Un gros connard, même.

Chase baisse la tête en riant.

— Sam et toi allez très bien vous entendre.

— J’en déduis que tu ne savais pas que j’avais un entretien aujourd’hui.

— Non, fait-il en secouant la tête.

— Je ne veux pas travailler dans un endroit où on ne veut pas de moi. Remercie Samantha de ma part.

— Ce n’est pas ce que tu crois.

— Je ne sais même pas ce que je crois. Je suis complètement paumée.

Chase me dévisage un instant, ses prunelles plongées dans les miennes.

— J’essaie juste d’agir correctement. Crois-moi.

— Pardon ? Tu veux vraiment que je te croie ? C’est vrai que chaque fois qu’on se voit tu dis toujours la vérité.

Il me lance un regard noir.

Je ne cille pas.

— C’est bon, c’est gagné. Tu veux savoir la vérité ?

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Extrait ajouté par Ameliemarmo 2017-11-26T22:45:54+01:00

Chase s'arrête pour me présenter.

- Reese, voici Travis. Il est technicien informatique pour le marketing. Il s'occupe de gérer notre site et le référencement Web.

Travis me serre la main avec un sourire un peu niais.

- S'il te plait, dis moi qu'elle bosse ici.

- Mais oui.

- J'adore mon job.

- Oui, hein ? Allez, range tes yeux et ouvre le manuel du parfait employé à la page 14.

- Page 14 ?

- La page sur le harcèlement sexuel au travail.

Travis lève la main en riant.

- Ok. Pas de harcèlement. Juste quelques compliments sur sa beauté.

Apparemment, c'est une boite où tout le monde passe son temps à plaisanter, y compris avec le patron.

Chase se penche vers moi tandis que nous poursuivons notre chemin.

- Ne t'inquiète pas, murmure t-il. Le harcèlement n'est interdit qu'aux employés, pas au boss. J'ai vérifié ce matin.

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Extrait ajouté par Accrocauxlivres 2018-07-29T15:33:15+02:00

— J’ai trouvé ta nouvelle recrue en train d’essayer d’entrer dans l’immeuble avant le lever du soleil, explique Chase. Autant canaliser tout de suite cette belle énergie.

Il reporte son attention sur la femme qui, je le suppose, est sur le point de partir en congé maternité.

— On dirait que Dimitria va accoucher d’une minute à l’autre.

Elle n’a pas l’air bien et elle joue avec une balle anti-stress tout en parlant.

— Pourquoi tu n’as pas inventé un truc qui empêche les femmes enceintes d’avoir des fuites urinaires chaque fois qu’elles éternuent ou qu’elles rient ? Ou un produit pour éviter que nos pieds gonflent ? fait-elle en désignant les siens. Ce sont les chaussures de ma mère. Je ne rentre plus dans rien, pas même dans mes propres pompes.

Chase secoue la tête.

— Tu as peur de quoi, Reese ?

— Peur ? Dans le genre araignées et tout le bazar ?

Tu as du temps devant toi ?

— Oui. Quelque chose qui te fait quitter une pièce en courant parce que tu es terrifiée ?

— Je déteste les pigeons. Quand j’en vois un, je traverse systématiquement.

Chase hoche la tête.

— Moi, j’ai peur des femmes enceintes. Je vais aller faire mon jogging avant qu’il ne fasse trop chaud.

Dimitria lance la balle anti-stress en direction de Chase et elle l’atteint à l’épaule.

— Je viens enfin de comprendre à quoi servent ces trucs.

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Extrait ajouté par Ameliemarmo 2017-11-26T22:40:51+01:00

- Ah, autre chose. Josh ne te drague pas. Il a juste un tic à l'oeil. Quand je l'ai embauché, j'ai cru pendant une semaine qu'il me faisait du rentre-dedans.

J'éclate de rire.

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Extrait ajouté par FiftyShadesDarker 2017-10-19T15:11:31+02:00

- Dis-moi ce que tu aimes chez Bossman.

- Il est brillant, arrogant, dur mais tendre en même temps. Est-ce que c'est logique ?

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Extrait ajouté par FiftyShadesDarker 2017-10-19T15:10:56+02:00

- Ah bon ? J dis quoi là ?

Chase articule quelque chose en silence. Je comprends tout de suite ce qu'il dit, mais je décide de le taquiner. Tu devrais venir passer la nuit chez moi.

- Désolée. Faut croire que je suis rouillée, dis-je en souriant.

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Extrait ajouté par Liligreen 2018-05-07T23:05:53+02:00

Même la nuit la plus noire voit le soleil se lever.

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