Commentaire de Mademoiselle-A

Ah le Brexit ! Depuis qu’il a été voté, il a énormément fait parler de lui en France comme Outre-Manche. Il y a les pour, les contre, ceux qui ne savent pas trop. Et puis il y a les jeunes, qui ont grandi avec l’Europe, qui la considèrent comme un synonyme de liberté et sont prêts à tout pour y rester. Tout vraiment ? Même à se marier pour quelque temps avec un Français ou un Anglais dans le seul but d’avoir des papiers ? Mais à créer des faux couples on voit parfois naître de vraies romances, des Brexit Romances.

Clémentine Beauvais est sans nul doute la plus anglaise des auteurs français de sa génération. Anglaise par l’humour d’abord, un humour très pince sans rire, mais toujours démentiel qui dans ce nouvel ouvrage égratigne un peu tout le monde : les Anglais, les Français, les riches, les classes moyennes, les révolutionnaires, les fachos, les jeunes, les vieux, les hipsters et j’en passe.

Anglaise par la langue qu’elle manie aussi bien en version Shakespeare qu’en version Molière, et avec laquelle elle joue pour créer quiproquo, erreurs de compréhension et autres problèmes de communication qui entraînent parfois les personnages dans des situations improbables pour le meilleur et pour le rire.

Anglaise également par sa capacité à créer une comédie romantique digne d’un film avec Hugh Grant, Colin First et toute la clique. En fait, Brexit Romance c’est un peu le Love Actually de la littérature young adult, Noël en moins, mais les préoccupations et les implications politiques en plus. Parce que derrière cette truculente romance, se cachent des questionnements et des sujets d’actualité. Doit-on ou non sortir de l’Union européenne ? Quel avenir pour une jeunesse très éduquée mais sans travail ? Les start-up, vraie fausse bonne idée ?

Anglaise enfin dans les références culturelles. Il y a un air de Jane Austen des temps modernes dans le nouveau roman de Clémentine Beauvais. Avec ses mariages arrangés, ses rendez-vous et occasions manquées, et ses moments d’apnée pour le lecteur, qui se retient de hurler « là mais là, il est là ! » ou « dis-lui mais dis-lui bon sang », tout est finalement bien qui finit bien.

Mais il y a aussi quelque chose de très français dans la façon qu’a Clémentine Beauvais d’emballer un vrai roman de société dans une bonne couche de divertissement. Quelque chose de presque théâtral dans sa capacité à nous parler des sujets les plus graves en en faisant des farces. Le message n’en est que plus pénétrant et la réflexion d’autant plus profonde qu’elle est libérée de la tragédie dans laquelle la plongent toujours les médias.

Dans cette nouvelle comédie burlesque et un peu acide, Clémentine Beauvais réussit une nouvelle fois le pari de nous faire rire, tout en nous offrant des personnages terriblement empotés sentimentalement, ce qui ne les rend que plus attachants.

Une comédie romantique et romanesque sur fond de lutte sociale et politique qui prouve une nouvelle fois que la littérature pour adolescents a trouvé ses lettres de noblesse et que l’on peut se divertir et réfléchir en même temps, mais que c’est encore en écoutant et en se mélangeant les uns aux autres que l’on apprend le mieux. Si on doit bien reconnaître une chose positive au Brexit, c’est qu’il a permis la création de cette petite pépite littéraire.