Extraits

— Tu joues avec le feu Nath…

— Oh pitié, faites qu’il me brûle.

— Ju, lui avait-il dit, toutes les relations ne sont pas faites pour durer 17 ans tu sais, parfois un ou trois ans c’est déjà pas mal ! Il n’est pas en train de te demander en mariage, c’est déjà à peine si vous avez le temps d’échanger vos fluides corporels… laisse-toi faire, hein. Et puis si tu te casses les dents, ben tu te casses les dents. T’as plus rien à prouver, juste à donner. Alors, donne. À lui de voir s’il a envie de recevoir.

« — Mais tu es bouché ou tu le fais exprès ? Un mec hétéro de 36 balais marié à une femme hallucinante et père d’un super pote, ça ne ressemble pas à un truc impossible pour un gamin gay de 19 ans pour toi ? Alors, dis-moi ce qu’est un truc impossible, on va en disserter. »

— Je lui ai proposé de rester quelques jours encore. Il en tient une sacrée couche.

Julien avala une gorgée de son double expresso.

— Une couche de quoi ?

— De connerie. J’essaye de le calmer un peu, mais pour tout te résumer, ta femme est une salope et toi tu n’as pas de couilles. Je pourrais le détromper sur ce dernier point, mais j’ai peur que ça ne fasse qu’ajouter de l’huile sur le feu, ajouta-t-il narquois.

Pour un peu le jeune chef d’entreprise rougirait

Il repensa à la première fois qu’il avait croisé son petit-ami. Debout devant le hall de sport, une veste négligemment roulée autour de son bras, cravate défaite et boutons ouverts, il fumait tranquillement une cigarette. Perdu dans ses pensées, il laissait lentement la fumée glisser entre ses lèvres et la regardait s’envoler. Jonathan aurait pu tout donner en une seule seconde pour voler un baiser à cette bouche-là. Ça avait été un coup de cœur immédiat pour le jeune novice qu’il était deux ans auparavant. Avec combien de garçons avait-il couché à l’époque ? Un ? Deux peut-être ? Certainement pas plus. À peine venait-il d’emménager seul et de rencontrer Loup.

Il avait allumé également une cigarette et avait attendu quelques minutes de savoir ce que cet homme faisait là à attendre. Il se félicitait encore de ne pas être allé lui parler directement, sur un coup de tête, parce que voir son coéquipier de hand le saluer l’avait littéralement sidéré. Il avait d’abord cru qu’il s’agissait de son frère aîné, Julien avait l’air si jeune, mais la semaine suivante Loup lui avait présenté « son père ». Jonathan avait alors rangé bien au chaud son cœur bondissant pour ne plus faire que profiter de la vue de son amant de temps à autre lorsqu’ils traînaient chez Loup après les entraînements. Il avait complètement déchanté lorsqu’il avait rencontré également la mère de Loup : une femme fascinante et magnifique.

Et puis soudain il y avait eu cette nuit incroyable au bord de la piscine. Jonathan n’arrivait pas encore à savoir pourquoi, mais de transparent pendant deux années, il était soudain devenu visible pour le père de son copain…

« Le sourire de Julien se figea. Il n’eut besoin que d’un centième de seconde pour distinguer son amant dans le groupe que formaient les amis de son fils par terre dans l’herbe du jardin. Pour un peu il aurait fondu en larmes, la crise cardiaque le guettait sérieusement. Jamais il ne s’était trouvé dans une telle situation et, pire, il n’avait qu’une envie : le prendre dans ses bras pour lui rouler la pelle du siècle. »