Extraits

Apprends, hérétique, qu'un pyakonite tient à sa moustache comme un nain à sa barbe ! Il faudra bien que tu t'y habitues femme.

_ Je ne crois pas, non. Et pour les dents... ?

_ De la racine noire. Ce sera parti dans quelques jours.

_ C'est pô très charmint, mais ça tint ben au corps, chevrota la petite vieille. Et c'est souv'rain cont' les rhumatiss.

_ Et j'en avions ben besoin, à min grind âge, fit l'Arbogien en imitant le ton grelottant de leur hôtesse.

_ Un peu d' respect, 'spèce eud garnemint ! le rabroua cette dernière en lui claquant les mollets de sa canne.

Tout autour de nous, il y avait le vrai monde. Et il était beau.

Iriôn brillait haut dans le ciel, réchauffant leurs âmes levantines. Il leur semblait plus généreux, plus chaud que dans les terres du Sud. Les embruns arrachés par la brise d’Ymnameyt leur rafraîchissaient agréablement le visage. Le vent venait sans aucun doute du continent. Il avait un parfum léger, joyeux, qui leur mit du baume au cœur. Il sentait les fleurs des champs. Il sentait le printemps.

Il sentait la maison.

Les conjurés arrivaient enfin au bout de leur voyage.

Fallait-il le garder en vie pour empêcher l'accomplissement de sa version de cette obscure prophétie ?

_ Eh ben,Krûlinou ?! s'étonna Mharnör. On dirait que notre bon moine t'a cloué le bec ?

Et le myrmidon ? Krûl n'avait jamais pu éclaircir le rôle de cet insignifiant moucheron au sein de leur petite conjuration. Cette interrogation le rendait désagréablement moins insignifiant...

Même abimé, le sceptre de Yarang-Rast reste admirable. Tu le redresseras, prince de la Sylve. Tu feras que ce qui a été tordu redevienne droit, que ce qui a été enlaidi redevienne beau, que ce qui a été souillé redevienne pur. Ce sceptre sera le symbole d'un nouveau départ, d'une nouvelle ère de gloire pour les rrënkina...

Le devin foudroya la sorcière du regard. D'une ambition limitée à son confort matériel, il n'aspirait pas du tout à être mis sur le devant de la scène. Surtout lorsque le Premier vindicateur était d'aussi méchante humeur.

_ "On ne s'élève que par la connaissance", récita Meldaïn . C'est l'une des premières choses qu'apprend le novice de Xaïmel. La curiosité n'est pas un si vilain défaut...

Ma mère est l'une des meilleures personnes que je connaisse. Le problème est qu'elle ne peut pas imaginer qu'on puisse lui vouloir du mal.

_ Tu dramatises toujours, l'interrompit cette dernière. Les gens ne sont pas si mauvais. Il faut seulement savoir leur donner un peu de considération.

Son fils désigna Novia d'un geste théâtral : quelle belle naïveté ! Yarhem-Rhoor pouvait juger sur pièce.

_ Que puis-je ajouter ? acheva-t-il. Un prêtre aurait été un symbole de respectabilité qui n'aurait pas vraiment impressionné les esprits malintentionnés...

_ Tout d'abord, sache que la masure anodine dans laquelle il se cachait est en réalité l'un des nombreux postes de guet du quartier. Celui qui s'y trouve n'est donc pas un ange. Ensuite, apprends à te méfier des vieux, conseilla l'Arbogien à son compagnon : ils se servent de leurs infirmités pour mendier ou égorger par surprise. Méfie-toi aussi des enfants : ce sont de redoutables escamoteurs. Et méfie-toi des adultes : ce sont tous des rats en maraude.

_ C'est gai !

_ Et l'avènement du semi-lézard n'a rien arrangé...

_Belle ambiance ! ironisa le rrënkin. C'est toujours, comme ça ?