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Tout le monde pense que je fais mon deuil, du coup ils ne posent pas trop de questions. Ils ne s’étonnent pas du fait que je sois pâle et maigre, avec des poches sous les yeux et mes cheveux pas coiffés qui retombent en mèches grasses. L’autre jour, Maman m’a obligée à les couper. Au salon de coiffure, j’ai commencé à observer les autres clients et je me suis demandé combien d’entre eux avaient un cadavre dans leur placard, après tout la bonne sœur a bien dit que personne n’était parfait et que chacun avait du bon et du mauvais au fond de lui. Tout le monde. Même ceux dont on n’imagine pas qu’ils pourraient avoir un côté sombre, comme par exemple Barack Obama ou les présentateurs du « Manège enchanté ». J’essaye d’y penser quand la culpabilité devient tellement horrible que je n’arrive pas à dormir. Ce soir ça n’a pas marché, alors me revoilà. Il fait exactement aussi froid que la dernière fois, mais je me suis servie de la vieille veste de Papa pour couvrir l’espace en dessous de la porte de la cabane.
Je ne me souviens plus du nom de la bonne sœur mais elle avait un de ces visages qui font penser à un raisin sec parce que, malgré toutes les rides, on imagine encore très bien le beau fruit qu’il a été avant. Elle est venue à l’école, quelques semaines avant les vacances d’été, pour nous parler de la peine capitale. Elle parlait d’une voix douce qui tremblait un peu, mais tout le monde a quand même été très attentif. Même Adam. D’habitude, il se balance sur sa chaise et lance des capuchons de stylos à la tête des filles, mais ce jour-là on a pu baisser nos capuches parce que tout le monde est resté très sage, on a tous écouté cette vieille dame avec la bouche grande ouverte pendant qu’elle nous racontait tout ce qu’elle faisait pour abolir la peine de mort.
Elle se démène vraiment. Des pétitions, des articles de journaux, des lettres à des criminels qui lui ont répondu en lui avouant des tas de choses. « Par exemple des meurtres et des choses comme ça ? » a demandé quelqu’un. La nonne a hoché la tête : « Parfois, oui. Tout le monde a besoin d’être écouté. »
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Si vous voulez mon avis, personne n’a le droit d’effacer un être humain comme ça, comme s’ils avaient jeté un coup d’œil à leur âme et qu’ils avaient conclu que tout y était mauvais, qu’il ne restait vraiment pas la moindre miette de bonté qui vaudrait la peine d’être sauvée.
Afficher en entierAu bout d’un moment, l’officier de police a dû finir par me croire parce qu’il m’a dit que je pouvais rentrer chez moi. Sauf que ce n’était pas chez moi. C’était une bâtisse que je ne reconnaissais pas avec une famille qui me semblait être un groupe d’étrangers. Ma chambre n’était pas ma chambre et mon lit n’était pas mon lit, parce que ce n’était pas moi. J’étais quelqu’un d’autre, une étrangère que mes parents ne connaissaient pas. Une tricheuse. Une menteuse. Une tueuse.
Afficher en entierNous sommes tous les mêmes. Il n'y a aucun moyen d'y échapper. Que tu sois un Anglais chauve qui récite l'alphabet en rotant ou une femme qui tue des poulets au milieu des Andes, cela ne change rien. Peu importe quelle langue tu parles ou les vêtements que tu portes. Certaines choses ne changent pas. Les familles. Les amis. Les amoureux. Ils sont pareils dans toutes les villes de chaque continent du monde.
Afficher en entierUn jour, Papa a lu ce bouquin concernant l'adaptabilité de l'être humain. Dedans, y avait écrit à quel point nous sommes des créatures remarquables parce que nous sommes capable de nous habituer à tout, et ça, Stuart, c'est tellement vrai. Si vous considérez que des gens s'endorment dans des avions sans même réfléchir au fait qu'ils se trouvent en haut dans le ciel, en train de voler au-dessus des nuages d'Amérique du Sud ou d'ailleurs, c'est quand même incroyable. Tout comme c'est un miracle d'aller aux toilettes à des milliers de mètres au-dessus de la terre, de faire pipi au-dessus de l'océan. Eh bien rouler dans la même voiture qu'Aaron, c'est un peu la même chose. Au début c'était Waoooooooooouh, mais au bout de cinq minutes je m'y suis habituée et j'avais l'impression étrange que ce siège automobile était précisément l'endroit où j'avais ma place. Nous avons roulé sans effort le long de la grand-rue, les feux passaient au vert pile au bon moment, comme si le dragon du restaurant soufflait une flamme vert émeraude pour éclairer notre chemin jusqu'à la maison.
Afficher en entierLe garçon n’arrêtait pas de me jeter des coups d’œil et encore des coups d’œil, comme si je valais bien un deuxième, un troisième et un centième coup d’œil. Mon corps me semblait différent sous son regard.
Afficher en entierJe l’ai tué il y a trois mois précisément. Vous voulez savoir le pire ?
Le pire, c’est que je m’en suis sortie.
Afficher en entierCheveux bruns. Yeux bruns. Taille moyenne. Poids moyen. Plutôt banale, je crois. Quand on me regarde, on n’irait jamais imaginer que je cache un tel secret.
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