Extraits

- Tara n'est pas facile à suivre. Sa danse est inconnue de tous. Elle avance d'un pas, recule de quatre, chute puis se relève pour reculer encore. Quand tu crois suivre sa "choré", voilà qu'elle change son allure et fonce tête baissée pour valser sur un rock !

Célio est tout ce que j’ai fui pendant dix ans. C’est ma faiblesse impossible, mon rêve irréalisable, une illusion de bonheur, mon erreur à moi. Il a été mon second souffle, bien sûr, mon improbable paradis quand je vivais l’enfer.

Tara peut s’éteindre comme la flamme de la bougie dans un courant d’air, alors que je veux être cette étincelle qui la rallume sans cesse. 

TARA

J’enclenche le frein à main de mon Q5. Mes yeux balaient machinalement ce qui m’entoure, du parking aux murs d’enceinte du cimetière. Sans déconner ! Ils croient quoi ? Que les morts vont se barrer ? Pourquoi cache-t-on les croix de nos aïeuls ou de nos plus jeunes ?

Je respire un grand coup, je suis sur les nerfs lorsque je viens ici, mais je me garde bien de le montrer. Une magnifique Maserati est garée à l’écart, personne à l’intérieur, je souffle un peu. J’enfile mon duffle-coat, revêts mes gants et mon écharpe et sors du véhicule. Putain, le vent est glacial et je finis par me parer de ma capuche, maigre protection contre celui qui m’habite si souvent.

La grille grince, me vrille les tempes, tandis que mon regard inquiet sonde les alentours. Il n’y a personne, tout va bien.

Relâche la pression, Tara. N’importe quoi !

J’avance dans les allées tristes du cimetière, lis, malgré moi, les noms sur les stèles. Je compte les rangées perpendiculaires.

14.

Je dois m’arrêter à la quatorzième. Déposer mes deux bouquets et partir. Je lui ai promis. Pourtant, je n’en ai pas envie, bien évidemment. Je ne suis pas croyante. Après la mort, pour moi, il n’y a plus rien, le vide, le néant, comme à l’intérieur de moi. Mais voilà, je lui ai juré que sa tombe serait fleurie, le plus souvent possible.

Elle aimait les tulipes rouges, j’en ai vingt-quatre.

24.

Deux bouquets de douze.