Extraits

D’un autre côté, du temps de sa gloire, les choses avaient-elles été si différentes ? Il refilait des tuyaux aux journalistes, il les nourrissait de mensonges et de demi-vérités avec l’espoir de déranger un nid de guêpes choisi ou d’ébranler un suspect ou un témoin. De faux récits avaient été publiés et certaines histoires, délibérément étouffées. Avec dans sa poche une petite demi-douzaine de reporters conciliants, il pouvait maîtriser les flux d’infos ou, en tout cas, se donner un peu de mal pour leur redonner la forme souhaitée. Lorsqu’il leur racontait des craques, les médias grognaient, montraient les dents ou lui crachaient dessus, mais ils revenaient toujours pour un peu de pitance supplémentaire. Aujourd’hui, les commentateurs vous mentaient à la figure sans ciller et vous gavaient de leurs fadaises à la façon d’un nourrisson avalant sa cuillerée de bouillie. Les bulletins d’information en continu vingt-quatre heures sur vingt-quatre signifiaient que tout le monde voulait être premier à connaître l’histoire, même si celle-ci se révélait bancale, quand ce n’était pas du pipeau absolu.

Siobhan gara sa voiture sur la route d’accès, derrière une file de véhicules officiels. Un agent en uniforme vérifia son identité avant de lui indiquer le sentier à travers bois. Elle ouvrit l’arrière de sa Vauxhall Astra et échangea ses souliers contre une paire de bottes.

Ce matin-là, ils étaient quatre dans les bois. Pas d’école pendant quelques jours, c’étaient les vacances de février. Ils avaient pris leurs vélos et roulé aussi loin qu’ils pouvaient avant de les abandonner quand la végétation du sentier était devenue trop dense, entre les racines au sol et les branches tombées qui le transformaient soudain en parcours du combattant improvisé. Ils avaient onze ans et étaient tous dans la même classe.