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Alors que les lampes à gaz se rallumaient lentement, Ophélie ne vit plus Farouk qui refermait mollement son pense-bête, ni Berenilde qui venait à sa rencontre dans un gracieux ondoiement de robe, ni la tante Roseline qui lui adressait d'amples mouvements d'ombrelle.

Elle ne vit que Thorn dans son grand uniforme noir, tout au fond de la salle, bien à l'abri des regards.

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- Voici mon avis : vous avez urgemment besoin d'être conseillée. Et voici mon conseil : écoutez toujours mon avis.

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– Il en va de même pour vous, petite d’Artémis, murmura Farouk en découpant lentement, très lentement chaque syllabe. Je n’arrive plus à vous sortir de ma tête. Vous avez l’air fâché, constata-t-il soudain.

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Au commencement, nous étions un.

Mais Dieu nous jugeait impropres à le satisfaire ainsi, alors Dieu s'est mis à nous diviser. Dieu s'amusait beaucoup avec nous, puis Dieu se lassait et nous oubliait . Dieu pouvait être si cruel dans son indifférence qu'il m'épouvantait. Dieu savait se montrer doux, aussi, et je l'ai aimé comme je n'avais jamais aimé personne.

Je crois que nous aurions tous pu vivre heureux en un sens, Dieu, moi et les autres, sans ce maudit bouquin. Il me répugnai. Je savais le lien qui me rattachait à lui de la plus écœurante des façons, mais cette horreur-là est venue plus tard, bien plus tard. Je n'ais pas comprit tout de suite, j'était trop ignorant.

J'aimais Dieu, oui, mais je détestais ce bouquin qu'il ouvrait pour un oui ou pour un non. Dieu, lui ça l'amusais énormément. Quand Dieu était content, il écrivait. Quand Dieu était en colère, il écrivait. Et un jour; où Dieu se sentait de très mauvaise humeur, il a fait une bêtise.

Diau a brisé le monde en morceaux.

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Le moment était enfin venu pour elle d'entrer dans la partie.

Elle y trouverait sa place, envers et contre Thorn.

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Farouk gagne toujours. Vous auriez pu lui proposer d'ouvrir une fromagerie, il aurait décidé d'en faire une chocolaterie.

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- Vous voulez toujours de mes opinions et de mes conseils, mademoiselle ? Voici mon opinion : vous avez urgemment besoin d'être conseillée. Et voici mon conseil : écoutez toujours mon opinion.

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Ah, et au fait: je vous aime.

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Thorn se pencha vers elle dans un interminable mouvement vertébrale, mais il ne lui rendit pas la montre. A la place, il posa sa bouche sur la sienne.

Ophélieécarquilla les yeux, le souffle coupé. C'était un baiser absolument innatendu qui la plongea dans un état de stupeur. Incapable de réfléchir, elle perçut en revanche toutes les sensations environnantes avec une acuité nouvelle : le capotis de la pluie contre la pierre , le vent empêtré dans sa robe , seslunettes qui s'enfonçaient dans sa peau, les cheveux mouillés de Thorn contre son front, la pression maladroite de ses lèvres.

(Je vous laisse imaginer la suite ;)

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Ophélie sentie une puissante rumeur dont elle ne comprenait pas la nature lui remonter le long du corps. Son ventre se mit à vibrer, ses poumons à enfler, ses tempes à tambouriner ,ses yeux à se brouiller. Malgré son nez bouché, elle s'obligea à inspirer profondément pour refouler cette marée montante, mais les digues finirent par céder et sa voix jaillit de son corps en un flot incontrôlable:

-Il m'est arrivée un tas de choses depuis que vous avez de moi votre fiancée. J'ai reçu un nombre invraisemblable de menaces de mort et presque autant de propositions indécentes. J'ai été séquestrée, travestie, bernée, insultée, asservie, infantilisée, huée,soumiseà des manipulations hypnotiques et j'ai vu ma tante perdre la tête juste sous mes yeux.Pourtant je n'ai jamais eu aussi peur qu'en cet instant. J'ai peur pour ma famille, j'ai peur pour moi, j'ai peur pour Berenilde, j'ai peur pour Archibald aussi. Et tout cela , Thorn, c'est à vous que je le dois. Alors pourriez vous, s'il vous plaît cesser de vous adresser à moi comme si j'étais la cause de tous vos problèmes!?

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