Extraits

"On prend un trait chez celui-ci, un trait chez cet-autre; on l'emprunte à un ami de toujours, ou à quelqu'un à peine entrevu sur le quai d'une gare, en attendant un train. On emprunte même parfois une phrase, une idée à un fait divers de journal. Voilà la manière d'écrire un roman; il n'y en a pas d'autres."

Il y a sans doute bien d'autres manières, mais il se trouve que celle de Wells est aussi la mienne.

Messieurs! annonça Etienne en se levant, le devoir m'appelle. Je vous abandonne un court instant pour aller m'entretenir avec notre nouveau messie.

Il vida son verre d'un trait.

Attendez-moi. je lyrise, je génuflexe, je quiers l'absolution et je reviens me bourrer la gueule.

Jeantet, sans regarder Etienne, leva son verre au-dessus de sa tête.

Rapportez-nous quelques miettes de sainteté et j'offre le second coktail.

Pour Malevitz le fait divers était l'âme du" journal", en quoi il n'avait pas tout à fait tort, c'était une nouveauté que Denissov avait rapportée des Etats-Unis. "Le lecteur a besoin d'histoires qui lui ressemblent mais en pire."

- Ça sert à quoi, les Beaux-Arts, exactement ?

- Exactement, ça sert à faire de l'art.

- Non, je veux dire : on peut gagner sa vie en faisant ça ?

- On a plus de chances de gagner sa vie en faisant ça qu'en restant chez soi.

Chacun volerait l'autre, c'était une proposition très commerçante.

Un conflit avec des morts, ça s'appelle une guerre.

- Ah, vous travaillez à l’Agence des monnaies ?

Le fonctionnaire français au visage buriné, au nez spongieux, au teint violacé, qui jusqu'ici n’avait manifesté qu’un intérêt distant pour la démarche d’Étienne, sortit soudain de sa torpeur. Pas tant parce qu'il espérait profiter de ce contact pour bénéficier d'un transfert sur France (quoique sait-on jamais), mais par déférence pour un confrère qui devait toucher des pots-de-vin sans commune mesure avec les siens.

Le juge Lenoir n'était jamais plus touchant que lorsqu'il se noyait. Dans ces moments là, ses traits avaient des profondeurs insoupçonnées comme on en voit sur le visage des imbéciles.

L'erreur serait de croire que Saïgon est une ville. C'est un monde à part entière. La corruption, le jeu, le sexe, l'acool, le pouvoir, tout s'y donne libre cours sous l'autorité de la déesse absolue, celle que tout le monde révère, à savoir Sa Majesté La Piastre !

Si tu expliques trois fois un truc à quelqu'un et qu'il ne le comprend pas, c'est un imbécile. Mais si, à la fin, il est certain de l'avoir compris mieux que toi, alors, tu as affaire à un con.