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Mats se pencha et ses lèvres chaudes glissèrent sur le front de Marjane, passèrent sur ses sourcils, frôlèrent ses tempes. Elles étaient douces comme un morceau de soie et Marjane ferma les yeux pour mieux ressentir leur caresse. Elles descendirent le long de ses pommettes, ricochant en petits baisers évanescents, presque imperceptibles, et se posèrent sur ses larmes. Alors Marjane n'y tint plus. Elle attrapa Mats, le serra dans ses bras comme si sans lui, loin de lui, elle étouffait, elle mourait, chercha sa bouche avec avidité, et l'embrassa dans une étreinte passionnée, pressée de se fondre en lui, de mêler leurs deux corps fiévreux.
Enfin.
Afficher en entierUn silence embarrassé suivit.
Soudain, il se redressa, passa devant elle et saisit la poignée de la porte. Il se retourna si brusquement que Marjane faillit sursauter.
- Sois prudente !
Et il déposa un baiser rapide, léger, sur sa joue, là, tout près, si près de sa bouche... avant de disparaître.
Afficher en entierLes parents d’Ashley étaient d’origine simple et Marcus de Beaune ne les fréquentait pas, mais Marjane les trouvait adorables, surtout Bryn, mince femme enjouée et généreuse qui ne s’énervait jamais. Marjane aimait passer du temps avec elle. Elle avait longtemps envié Ashley d’avoir une maman attentionnée et drôle, elle qui n’en avait jamais eu. Elle observait Bryn en train d’embrasser sa fille, notait leur complicité, leurs cheveux blonds identiques… Même leurs disputes étaient enviables ! Car se fâcher impliquait d’être deux : il fallait une personne en face, une personne réelle, qui crie et s’agace.
On ne se disputait pas avec un fantôme.
Afficher en entierDébut du chapitre 1 :
< Marjane avait hésité, et s'était résignée : elle irait à l'anniversaire de son père. Même si elle était fâchée contre lui. Il y avait de quoi : Marcus de Beaune lui avait une fois de plus interdit de quitter la Résidence. Elle aurait dix-sept ans dans dix jours ! Dix jours ! À quelques nuits de sa majorité, ne pouvait-il vraiment pas faire un effort ?
"La loi est la loi..." souffla une voix dans sa tête, qui ressemblait beaucoup à celle de son père.
[en italique : Et la loi me fatigue !] pensa très fort Marjane. Elle était une des dernières à ne pas avoir atteint l'âge de maturité, cloîtrée à la Résidence jusqu'à son dix-septième anniversaire. Elle avait eu son diplôme haut la main mais ça ne changeait rien. Elle allait rater une sortie mémorable et ne fêterait pas son Passage avec les autres. Ses copains franchiraient les portes de la Résidence, goûteraient à la liberté et plongeraient dans le monde merveilleux des humains, cette énigme. Elle mangerait du gâteau avec une assemblée de vieux ninns coincés. Moyenne d'âge : deux cents ans. Magnifique soirée en perspective... Enfin, c'était toujours mieux que rester toute seule chez elle.
Et puis, le jour tant espéré (que Marjane avait baptisé la "délivrance") approchait à grands pas. Elle aussi sortirait de la Résidence, libre, et ce serait la fiesta.
En attendant, elle refoula sa colère, passa un bandeau rouge dans ses longs cheveux, noirs et épais, vérifia que ses clefs étaient glissées dans sa pochette en soie, et caressa la tête de son corkan, roulé en boule sur la couette. Dans cette position, de loin, on aurait dit une grosse pelote de laine. Jack déplia ses ailes membranées pareilles à celles d'une chauve-souris, laissa apparaître sa fourrure tigrée, sa truffe grise et ses larges oreilles poilues. Il bâilla, découvrit ses canines pointues, étira son petit corps, et observa sa maîtresse de ses prunelles nacrées. Un roucoulement de contentement fit vibrer le fond de sa gorge. >
Afficher en entierEnivré par le parfum grisant de sa peau, Mats répondit à son baiser , haletant, enfouit sa tête dans la masse de cheveux bruns.
Afficher en entierSa Majesté-Majesté était une sybare siamoise, deux êtres partageant un avant-bras commun.
Afficher en entierUn écho fit se retourner Marjane : des dizaines de personnes leur filaient le train et bruissaient entre elles.
- Vous avez vu sa peau lisse ?
- Quelle horreur !
À leurs yeux, avec son visage oblong, ses pommettes saillantes et ses sourcils dessinés, Marjane était aussi belle qu'une souche pourrie.
Afficher en entier- Chez nous, les invités n'exigent rien du tout, ils sont tolérés, acheva la sybare en franchissant le seuil de la porte à l'horizontale, sa nageoire battant lentement l'eau.
Afficher en entierElle respirait dans l'eau.
Et la douleur dans son cou provenait des branchies qui s'y étaient découpées.
Afficher en entierMarjane seule, dehors, avec des ninns qui démembrent les habitants de la Résidence...
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