Extraits

Je vous cherchais, monsieur, dit ensuite Edan à mon démon, mon maître vous demande de le rejoindre dans l’appartement d’Amy. Sytry soupira de mécontentement.

— C’est pour quoi ?

— Une urgence. Un humain sous protection qui a disparu. — J’arrive. Monte, Val, je te rejoins après.

— Je veux venir, protestai-je. Il secoua la tête et s’apprêta à répondre, mais je ne lui en laissai pas le temps.

— Vous avez dit « comme tu voudras » !

— J’ai aussi utilisé les mots « séquestré », « contre ta volonté », « sans vêtements » et « m’offrir ton corps » au cours de cette même conversation, me rappela-t-il en souriant.

Edan détourna vivement la tête pour dissimuler son hilarité. Mais ce n’était pas très efficace à cause du léger tremblement de ses épaules.

— Je ne voudrais pas vous décevoir, mais je ne pense pas que participer à une simple réunion m’affaiblira. Vous me séquestrerez une autre fois. Il me lança un regard consternant qui semblait signifier « avec plaisir ! » et nous montâmes jusqu’à l’appartement d’Amy dans lequel je n’étais encore jamais entré.

Il existait quelque part un monde où ce que nous faisions était un péché grave, où Sytry était un monstre terrible qu'il fallait repousser jusque dans l'abîme ardent duquel il était sorti, un monde où la volupté était funeste pour l'âme, un monde peuplé d'êtres de lumière qui ne demandaient qu'à me sauver.

Mais ce monde s'estompait peu à peu. Bientôt, ses rivages auraient complètement disparu. Alors je saurai que j'étais arrivé chez moi.

Et pendant tout ce temps, mon esprit égaré ne cessait de me demander à quel moment mon maître avait cessé de me voir comme une proie, à quel moment est-ce que j’étais devenu si précieux ; et s’il en avait conscience lui-même.

Son regard d’or brun était intense, bouleversant, il déshabillait mon âme. Sytry avait eu peur pour moi, réalisai-je. Est-ce qu’il savait seulement ce que me disaient ses yeux ? Est-ce qu’il les avait autorisés à me transmettre un attachement si fort, est-ce qu’il savait que ses prunelles de félin qui exprimaient toujours la concupiscence me regardaient maintenant avec une sorte de dévotion ? Je restai paralysé jusqu’à ce qu’il se lève et qu’il m’entraîne avec lui.

— Je t’expliquerai demain.

— Et tu m’expliqueras demain pourquoi tu t’es cru autorisé à t’approcher de Valenn ?

La voix de Sytry était toujours très calme, un calme un peu inquiétant, sous-tendu par une colère difficilement contenue.

La porte s’ouvrit sur Sytry qui chercha mes yeux avant toute autre chose. J’étais toujours assis sur le rebord de la fenêtre, un genou ramené contre mon torse, tourné vers l’entrée. Mon bouclier d’énergie disparut lorsque je le vis. J’étais à nouveau en sécurité. Je n’aurais su dire ni comment j’avais formé cette protection, ni comment je l’avais dissipée, mais tout ce qui comptait, c’était le regard d’ambre roux plongé dans le mien.

Je hochai lentement la tête, signifiant à Sytry que j’allais bien. Il détourna alors son regard et le posa directement sur Kairn.

Je le vis acquiescer et je me levai pour m'étirer. Il me sembla qu'un regard feu de prédateur glissait sur le bandeau de peau mis à nu entre mon jean et mon tee-shirt. Mais ce fut une impression fugace.

_Valentin Sanders ? me demanda-t-il avec un regard espiègle.

[...]

_Valenn Sanders, répondis-je.

Une expression de satisfaction fit luire l'ambre brun.

_C'est original.