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Parfois, la souffrance était juste innommable. Toute tentative pour la circonscrire par les mots ne faisait qu'en décupler la charge. Le temps de la parole viendrait plus tard - s'il venait.
Afficher en entierLa plaie est nette, et a probablement été causée par un outil à la fois lourd et très tranchant. Quelque chose comme un couperet pour la viande. Ou peut-être même un ulu.
À l’évocation du couteau traditionnel des femmes inuites, cet outil en demi-lune destiné à l’arrachage et au découpage des peaux animales, Lotte ne put réprimer un frisson. Une lame qui raclait de douloureux souvenirs. Elle avait déjà constaté, au cours d’une précédente affaire, les dégâts effroyables qu’un tel engin pouvait occasionner. Une vraie boucherie pour le coup.
Afficher en entierUne décharge le traversa. L’excitation. Il se sentait à nouveau si vivant. Être flic : cette névrose dont on ne se débarrassait jamais tout à fait. Ce poison si doux qu’on en oubliait les interdits comme les injonctions.
Finalement, cette satanée tournée ne serait peut-être pas si inutile.
Afficher en entierJ’ai quelques connaissances en la matière, le coupa l’homme. Mais Uki est la spécialiste des tatouages cousus à Nuuk. C’est l’une des toutes dernières dans le pays à les exécuter encore.
Afficher en entier- En voilà une que le « lasso du Seigneur » n’a pas loupée.
- Le quoi ?
- Le « lasso du Seigneur ».
Celui qui attrapait les âmes égarées et les ramenait au sein du troupeau, afin de les conduire jusqu’au Très-Haut
Afficher en entierElle pleure.
À réchauffer la glace sous ses pieds.
À saler la mer figée qui s’étend à perte de vue.
À pierre fendre – le mont Uummannaq tout entier pourrait s’écrouler, si elle continue à verser autant de larmes. Une montagne en forme de cœur, quelle ironie !
Elle pleure ses remords bien plus que ses regrets.
Elle pleure sur ce qu’elle a accepté.
Sur ce qu’elle a laissé faire.
Afficher en entierUne seule est demeurée sans partenaire. Mais de ce répit elle ne semble tirer aucun soulagement. Elle sait que pire, bien pire, l’attend. Car, qu’elle le veuille ou non, elle sera sienne. Il anticipe déjà ses cris et ses griffures, ses « non » qu’il prendra pour des « oui », ce tabou qu’elle invoquera et qu’il lui sera si doux de briser.
Elle se débattra, c’est certain. Et pourtant il l’aura, c’est tout aussi sûr. L’œil de la caméra, tapie dans un angle, pourra en témoigner.
Rien, pas même la honte ou les plaintes, ne pourra empêcher hier de posséder aujourd’hui.
Afficher en entierAlors, deux des garçons s’approchent l’un de l’autre et, sans crier gare, se rouent de coups de poing amollis par la boisson. Plus ils les portent et plus ceux-ci deviennent lourds. Quel est le motif de leur pugilat ? Eux seuls le savent. L’enjeu est important. Le combat ne dure pas très longtemps. Quand l’un des deux hommes tombe sur la glace sombre, l’individu masqué s’interpose et donne le signal : ils peuvent entrer dans le bâtiment.
Mais pas lui.
Afficher en entierLa soirée n’avait pourtant pas débuté comme une cérémonie. Ils s’étaient juste retrouvés entre jeunes du village pour faire la fête, une nuit de cuite et d’oubli semblable à tant d’autres, scandée par le récit des légendes et des temps anciens.
Comment les choses ont-elles viré ?
Ont-elles la moindre idée de ce qui se joue au-dehors ?
Afficher en entierElles attendent l’épilogue en silence. Immobiles. Certaines titubent un peu.
La chaleur sèche d’un poêle domine la salle commune. Seul l’âtre éclaire le vaste bâtiment préfabriqué. On distingue à peine les silhouettes plantées là, et leurs tenues bariolées.
Cinq ou six jeunes femmes.
Droites comme des piquets.
Pétrifiées par l’inconnu.
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