Extraits

Les yeux de braise de Nikolas refusaient de quitter les miens. Il leva la main et son pouce effleura ma mâchoire. Sous sa caresse aussi légère qu'une plume, mes membres faiblirent. Timidement, je sentis mon Mori s'agiter.

— Sarah, dit-il d'une voix tendue en posant son front contre le mien.

Je restais immobile sous l'assaut d'émotions diverses qui menaçaient de faire bondir mon coeur hors de ma poitrine.

— Chasse-moi. Ordonne-moi de m'en aller, murmura-t-il.

Jordan avait abandonné sa lance à incendie et nous rejoignait.

— Sara, on dirait que tu viens de remporter un concours de t-shirts mouillés, annonça-t-elle.

À ces mots, plusieurs garçons tournèrent la tête vers moi.

— Quoi ? me récriai-je avant de baisser les yeux sur le t-shirt jaune clair à col en V qui me moulait à tel point qu’il ne laissait pas la moindre place à l’imagination.

Mes joues s’empourprèrent et je décollai le tissu mouillé de ma poitrine.

Nikolas se positionna devant moi, son large dos me protégeant des regards intrusifs. Un élan de reconnaissance balaya la colère que je ressentais encore à son égard quelques instants plus tôt. Je ne le comprendrais jamais. Il faisait ou disait quelque chose qui me donnait envie de le frapper, et la minute d’après, il faisait preuve de gentillesse comme en ce moment

Mieux vaut échouer dans l'originalité que réussir dans l'imitation.

Tu m'apprécie beaucoup ? demanda-t-il d'un air taquin.

Mon visage vira au rouge.

J'étais contente d'avoir le nez dans son t-short.

-Parfois.

Il me caressa à nouveau les cheveux.

-C'est vrai, l'éternité est très longues, mais nous ne sommes pas obligés d'y penser tout de suite. Allons-y doucement et voyons ce qui se passera.

— J’ai senti quelque chose, moi aussi, quand nous nous sommes rencontrés. On aurait dit que je te connaissais même si nos routes ne s’étaient pourtant jamais croisées. Ce soir-là, ma vie s’est retrouvée chamboulée pour de nombreuses raisons. Puis tu es venu me voir et je t’en ai voulu de me dire la vérité sur ce que j’étais, de tout changer. J’ai commis des erreurs et j’étais furieuse que, chaque fois, tu aies raison. Je t’en voulais de ne pas partir pour me laisser reprendre le cours de ma vie. Je te trouvais arrogant, autoritaire et déterminé à me rendre folle.

Il se pencha pour me dire d’une voix rauque :

— Si c’est une déclaration d’amour, je ne trouve pas ça très engageant. 

Entre Jordan et Sara :

— Désolée de te le dire, mais ton appartement est infesté de diablotins. Ces petits enfoirés m’ont volé mon sandwich.

Je posai une main sur mon front.

— Zut, j’ai oublié de leur apporter quelque chose à manger aujourd’hui. Ils doivent avoir faim.

Elle en resta bouche bée.

— Tu les nourris ? Tu sais que ce sont de sales chapardeurs nuisibles qui voleraient ta mère s’ils pouvaient la soulever.

Sous le lit, j’entendis des éclats de voix scandalisées.

— Je ne pense pas qu’ils aiment être traités de nuisibles. Et s’ils veulent voler ma mère, qu’ils se servent si elle se pointe un jour. 

Entre Sara et Jordan :

— Si on mangeait ? Ensuite, tu pourras me répéter qu’il n’y a absolument rien entre Nikolas Danshov et toi…

— Je te l’ai déjà dit, il ne se passe rien entre nous. C’est mon entraîneur, point barre.

Elle posa son repas et son eau sur ma table de chevet et se rassit sur le lit.

— Hmm. C’est pour ça qu’il s’est jeté sur toi comme un bouclier vivant.

Je ricanai.

— Tu ne connais vraiment pas Nikolas. Il fait ça tout le temps, il protège les gens et il l’aurait fait pour n’importe qui.

Jordan éclata de rire.

— Je meurs d’envie que Nikolas vole à mon secours – bien que je n’aie pas besoin d’un homme pour me protéger –, mais je sais que ça n’arrivera jamais. Tu n’as pas vu sa tête quand tu t’es fait attaquer. Je n’ai jamais vu personne se déplacer aussi vite.

— J’aimerais que quelqu’un explique à Nikolas et à Tristan que, moi non plus, je n’ai pas besoin d’un homme pour me protéger, grommelai-je.

— Les hommes sont programmés comme ça, m’expliqua Jordan, la bouche pleine. Tu es coriace, mais tu as ce petit côté vulnérable qui met leur testostérone en ébullition. Bien sûr, maintenant que j’ai vu ce qu’a fait Nikolas en bas, je suis certaine qu’il y a autre chose. Quand tu étais toute trempée et qu’il s’est avancé devant toi, le regard qu’il a lancé aux autres gars… Brrr. Il aurait presque pu uriner autour de toi pour marquer son territoire.

— C’est absolument ridicule. Et merci pour cette image dégoûtante. 

— Êtes-vous malade ?

Apparemment, ce n’était pas la question à poser. Ses narines frémirent et son regard s’assombrit.

— Qu’est-ce que ça sous-entend ? rétorqua-t-il.

Je sentis les poils de mes bras se dresser. Bon, peut-être était-il un brin plus flippant que Michael, tout compte fait.

— Ça ne sous-entend rien. J’ai cru que vous ne vous sentiez pas bien.

Consciente qu’il n’accepterait pas ma compassion, j’avais répondu avec détachement.

— Je vais parfaitement bien.

— Tant mieux.

— Et d’abord, qu’est-ce que ça peut te faire ?

Il avait l’air toujours en colère, mais sa voix s’était radoucie.

— Je n’en sais rien. Ce doit être l’un de mes nombreux défauts.

Il se tut pendant quelques minutes avant de demander sèchement :

— C’est quelque chose que tu fais souvent, envahir l’intimité des autres pour leur dire qu’ils ont mauvaise mine ?

Je levai les yeux de mon livre et rencontrai son regard inquisiteur.

— À ce que je sache, cette bibliothèque est ouverte à tous, et je vous ai présenté des excuses pour vous avoir dérangé. Je n’ai pas dit que vous aviez mauvaise mine, alors arrêtez de me regarder comme ça. Si je savais, je serais presque portée à croire que vous cherchez les compliments.

— Je ne cherche pas de compliments, fit-il en plissant les yeux. Tu es aussi agaçante qu’un diablotin. Pas étonnant que tu sois venue ici au lieu de rester avec les autres enfants. Ils ne supportent pas ta compagnie, sans doute.

Je me levai, énervée par son acharnement et ses insultes.

— Écoutez, Lestat, on ne peut pas dire que vous soyez un rayon de soleil vous non plus.

— Lestat ?

Il écarquilla les yeux et bondit en vociférant.

— Tu viens de me comparer à un vampire – un vampire de fiction ?

J’ignore pourquoi je l’avais appelé ainsi, mais je ne pouvais plus revenir en arrière.

— Vous m’avez bien traitée de diablotin agaçant.

— Parce que tu es agaçante.

— Vous n’êtes pas non plus d’agréable compagnie.

Jordan et Olivia me regardaient attentivement tandis que je digérais cette nouvelle information. Nikolas n’avait encore jamais ramené personne ? Eh bien, voilà qui expliquait son manque de patience, il n’avait manifestement aucune expérience avec les orphelins. Quelles que soient ses raisons, j’étais certaine qu’il n’éprouvait aucun sentiment amoureux à mon égard, contrairement à ce que les filles sous-entendaient. C’était plutôt une question de fierté masculine. Je l’avais défié, et il ne le supportait pas.

Callum croisa les bras devant son large torse et darda sur moi un regard lourd de reproches. Avec sa musculature solide et ses trente centimètres de plus que moi, cet homme était ma pénitence pour chacune de mes erreurs passées. En tout cas, c’était ce que je me disais tous les jours quand j’immergeais mon corps contusionné dans le bain curatif. Le mystère, c’était que j’aie pu me réjouir à l’idée de m’exercer avec ce guerrier souriant, à la queue de cheval sexy et aux yeux couleur chocolat. Il m’avait fallu moins de cinq minutes dès notre première séance pour découvrir le bourreau qui se cachait derrière ce sourire enjôleur.