Extraits

Je ris tandis que l’on arrive vers le parking et qu’il me précède pour vérifier l’état de la carrosserie.

– Je suis là, bébé, tout va bien... je l’entends murmurer.

– Pa-thé-ti-que, je lance en découpant chaque syllabe. Je devrais filmer ça pour que tes fans puissent se payer ta tête quand tu seras mondialement connu !

– C’est quoi cette bouse derrière ? demande-t-il en évitant de répondre à ma pique.

Il parle de ma Clio, là ? Bon d’accord, je dois l’avouer, moi aussi j’adore les voitures, son Audi est une bombe, ok. Mais ma petite Clio, c’est mon alliée, elle m’emmène partout depuis que j’ai le permis, elle a entendu mes pleurs, mes joies, les chansons que je chantais d’une voix fausse et criarde avec la radio à fond...

– Alors là, je ne te permets pas, je lui lance en fronçant les sourcils. C’est MA voiture.

– Tu appelles ça une voiture ? Moi j’appelle ça une boîte-à-suicide ! Je parie qu’il n’y a même pas d’airbag là-dedans !

– Oui, mais ce n’est pas sa faute, elle est de 1995 !

– Putain, mais c’est une caisse de collection !

– Arrête de te moquer, débile ! Moi je ne roule pas en Audi R8 !

– Audi R8 spyder V10, cinq cent vingt-cinq chevaux sous le capot, complète-t-il d’un air rêveur.

– Ouais, voilà. C’est une petite berline, ce n’est pas une voiture de sport !

– Ok, j’avoue. Et donc c’est quoi ?

Je m’esclaffe devant sa moue intéressée, alors qu’en réalité, il n’en a strictement rien à faire. Pourtant je me prête au jeu. Je m’appuie sur le capot, caresse la carrosserie en imitant les hôtesses dans les salons automobiles. Je prends des positions sexy et lascives.

– Voici la toute première Clio de Renault. Devant vous se trouve un modèle de décembre 95, ici une phase 3. Vous pouvez remarquer le léger arrondi des phares, principale innovation de la marque qui avait pour habitude de faire des trucs rectangulaires immondes. Équipée d’un puissant moteur 1 litre 9 diesel, avec 65 chevaux, une boîte manuelle à cinq rapports, elle est la parfaite super-car qui vous garantira sensations fortes et vitesse vertigineuse !

– Waouh putain, je la veux tout de suite ! Combien coûte-t-elle ?

– Je crains que vous n’ayez pas le budget, Monsieur, c’est une voiture à huit chiffres !

– Mademoiselle, ne soyez pas grossière, j’ai précisément cette somme en grosses coupures dans mon porte-monnaie. Mais je voudrais savoir, est-ce que la jeune femme est livrée avec ?

– Mais bien évidemment, à côté de ce bolide, c’est une bagatelle !

– Bon, ben je crois que vous m’avez convaincu, je prends le lot !

J’éclate de rire tout en le repoussant :

– Connard va ! Je ne suis pas un lot !

– Oh que si... Un joli p’tit lot !

– Tu es vraiment un sale macho !

– Et bien plus encore...

Je soupire tout en levant les sourcils. Les petites taquineries de Damian vont tellement me manquer. Ce garçon a le don de me faire rire et de me mettre de bonne humeur.

– Tu es un gros gamin, tu le sais, ça ? je lui lance, tandis qu’il s’approche de moi pour m’embrasser.

– Oui je sais, je sais, les hommes sont immatures, blabla et vous les femmes vous êtes tellement intelligentes, compatissantes, patientes, me susurre-t-il en me mordant le lobe de l’oreille, et surtout... tellement chiantes !

– Oh !

Je le repousse tandis qu’il s’esclaffe, content de lui.

– Eh bien, je vais te dire un truc mon petit Monsieur, Musset a écrit un passage dans On ne badine pas avec l’amour qui est l’absolue vérité, je cite : « Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels… »

– La suite ?

– C’est tout.

Je ne vais sûrement pas continuer la citation jusqu’au bout, puisqu’elle parle des femmes...

– « Toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. » Alors ça t’en bouche un coin, hein ?

Il me murmure si bas que je l'entends à peine

- Moi, je t'ai rêvée... Tu es venue...