Extraits

D’un geste hésitant, j’effleure sa joue froide et pâle. Son beau bronzage a disparu. Il a la peau terne, les traits tirés et de profonds cernes sous les yeux. Ses pommettes sont trop saillantes dans son visage émacié, et ses lèvres sont toutes gercées.

Je peine à le reconnaître, même si ça fait déjà un mois que je le vois dans cet état, jour après jour.

— Rétablis-toi vite, papa.

Je me redresse et essuie les larmes qui coulent lentement.

Il a les yeux ouverts mais le regard perdu dans le vide.

Je devrais avoir l’habitude, depuis le temps, pourtant je donnerais mon bras droit pour voir des rides joyeuses se former au détour d’un sourire… même une dernière fois.

— À demain, papa.

Je me penche pour l’embrasser sur le front puis m’arrache à son chevet.

Il flotte dans la clinique une odeur de moisi qui imprègne mes vêtements.

Je meurs d’envie de prendre une douche, suivie d’un petit verre de vin et d’une séance de Skype avec ma meilleure amie, Laurie.

Malheureusement c’est un luxe que je ne peux pas me permettre.

J’ai une entreprise à sauver, et je ne sais pas encore où je vais trouver les fonds pour ça.

— Mademoiselle Merchant ?

Je m’arrête, et le linoléum piteux craque sous mes bottes. Je cille lentement en m’exhortant à la patience.

Si seulement j’avais les moyens de lui payer une meilleure clinique !

- A force de parler de sexe, j'ai la fleur en chaleur, moi. Si vous voulez bien m'excuser, je vais aller faire avaler deux ou trois pilules à Harold, jusqu'à ce que son lapin Duracell soit en état de me calmer.

- N'oublie pas! crie Mme Bartol du bout de l'allée en agitant un index autoritaire. Ce serait dommage de ne pas utiliser ce que le bon Dieu t'a donné avant que ça devienne tout rouillé et que tu ne saches plus t'en servir! Les hommes n'aiment pas se retrouver face à des parties intimes envahies de toiles d'araignée.