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Mon père et ma mère se sont rencontrés à Châteauroux, près de l’avenue de la gare, dans la cantine qu’elle fréquentait, à vingt-six ans elle était déjà à la Sécurité Sociale depuis plusieurs années, elle a commencé à travailler à dix-sept ans comme dactylo dans un garage, lui, après de longues études, à trente ans, c’était son premier poste. Il était traducteur à la base américaine de La Martinerie. Les Américains avaient construit entre Châteauroux et Levroux un quartier, qui s’étendait sur plusieurs hectares, de petites maisons individuelles de plain-pied, entourées de jardins, sans clôture, dans lesquelles les familles des militaires vivaient. La base leur avait été confiée dans le cadre du plan Marshall, au début des années cinquante. Quelques arbres y avaient été plantés, mais quand on passait devant, de la route, on voyait une multitude de toits rouges à quatre pentes, disséminés sur une large plaine sans obstacle. À l’intérieur de ce qui était un véritable petit village, les allées, larges et goudronnées, permettaient aux habitants de circuler dans leur voiture au ralenti, entre les maisons et l’école, les bureaux et la piste d’atterrissage. Il y avait été embauché à sa sortie du service militaire, il n’avait pas l’intention de rester.
Afficher en entierJ’étais toujours avec elle, ou sur le point de la retrouver. Soit j’étais assise à côté d’elle. Soit je marchais à côté d’elle. Soit je l’attendais. Tout mon argent de poche passait dans les cadeaux que je lui faisais. Je pensais à la fête des mères longtemps à l’avance. La bijouterie Tranchant, avenue de la Gare, était la belle bijouterie de la ville. Une année, j’y ai repéré des boucles d’oreille dorées émaillées de noir. De l’extérieur on ne voyait pas le prix. L’étiquette était retournée. Je suis entrée, la vendeuse a plongé la main dans la vitrine et m’a donné un chiffre. Après, j’ai couru en pleurant jusqu’à la gare routière. J’ai pris mon bus. Arrivée à la zup, j’ai traversé le terrain vague en courant. J’ai monté les sept étages en larmes, et j’ai sonné à la porte.
Afficher en entierOn a frappé à la porte. Elle souriait, heureuse. C’était lui.
— C’est ton papa.
Je venais tout juste d’avoir six ans.
— Mais si Christine voyons tu le connais. Tu l’as vu à Gérardmer quand tu étais toute petite. Tu te souviens qu’on avait fait du pédalo ?… Eh bien, c’était avec ton papa…
On a dîné tous les trois. Quand j’ai été couchée, ils ont discuté.
Afficher en entierLa maison était chauffée par un poêle à charbon qui se trouvait dans la cuisine. C’était tout. Ma grand-mère a refait une congestion pulmonaire. Ma mère a écrit à mon grand-père en lui demandant une aide financière, pour l’installation du chauffage central. La réponse est arrivée par une lettre postée du Niger. Cette maladie était un prétexte, il refusait. Le lit de ma grand-mère a été transporté dans la cuisine. Elle passait ses journées sur une chaise longue à lire, à coudre ou à tricoter. La nuit, elle s’asseyait dans son lit contre des oreillers surélevés. Dans la position allongée à cause de son asthme elle étouffait.
Afficher en entier« Chère Rachel,
Vraiment, tout bien considéré, notamment l’énorme distance, il ne me sera pas possible d’aller à Arcachon. D’abord, j’appréhende un long voyage aller et retour tout seul, ensuite, et c’est là un élément nouveau, j’aurai un travail à terminer chez moi pendant l’été. Ce que je suis en train de faire au bureau n’en finit pas, et je ne peux pas laisser traîner trop longtemps, de sorte que je profiterai de ce long week-end pour avancer dans mon travail tranquillement.
Mais je serai tout de même près de toi par la pensée. Bonnes vacances et une bonne brise de mer !
Pierre »
Afficher en entierAu début du printemps, ils ont passé un week-end dans la Creuse. Ils se connaissaient depuis six mois. Ils ont dormi à Crozant dans un petit hôtel. Le week-end a été merveilleux. Il avait loué une voiture, ils sont allés à Gargilès et à Nohant. Ils ont visité la maison de George Sand. Il y avait des documents sur sa vie, sur ses amants, des détails sur ceux qui ont passé du temps à Nohant, sur ses romans, ce qui a inspiré quoi, ce qu’elle voyait de sa fenêtre, les endroits où sont situées certaines scènes de ses livres, le tableau où elle est habillée en homme, en costume, veste, pantalon, chemise, lavallière, avec un cigare entre les doigts.
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