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J'ai dû te lasser avec mes manières de chien fidèle.
Afficher en entierElle s'est levée, elle m'a embrassé avec beaucoup de tendresse. Je l'ai regardée marcher, en culotte, les fesses lourdes et fières malgré quelques atteintes de cellulite en haut des cuisses.
Afficher en entierSon front était barré d'une ride discrète, comme l'amorce d'un reproche qu'elle n'avait pas le courage de me faire.
Afficher en entierLe bon dirigeant d'un empire doit être comme un gros chat, d'une infinie patience, regardant les uns et les autres s'agiter fébrilement. Et puis, alors que plus personne n'est capable d'imaginer cette grosse boule bondissante, elle se déploie. Le pouvoir exige de donner le sentiment qu'on élève une apparente médiocrité au niveau d'un art.
Afficher en entierMa mère ne pouvait se figurer qu'on l'enlevât pour un autre motif qu'une arrestation. Elle savait aussi qu'une arrestation ne nécessitait aucun motif. C'était là le principe même de la terreur.
Afficher en entierLa révolution a duré un peu plus de soixante-dix ans, si l'on accepte l'idée que la révolution est bien le trajet que parcourt une planète pour revenir à son point de départ, en tournant sur elle-même.
Afficher en entierDepuis la Révolution, j'ai fait arrêter, déporter, parfois exécuter beaucoup d'épouses de mes principaux collaborateurs qui l'ont bien compris, car ils savaient que je ne faisais pas cela pour leur nuire. Bien au contraire, je voulais les affranchir du risque de voir leur jugement altéré par des conjoints qui ne peuvent avoir le sens de l’État comme eux.
Afficher en entier- Depuis des siècles, nos dirigeants, quels qu'ils fussent, nous ont maintenus dans un état qui faisait de la mort une délivrance. Il n'y a pas de soldat plus redoutable que celui qui pense que la mort libère du poids de la vie. Toutes les idéologies du monde, en face de ça, c'est du sang de vierge.
Afficher en entierEt qu'est-ce que la terreur ?
C'est la certitude pour tout homme de l'Union Soviétique, du plus humble au plus puissant, de l'anonyme à l'ami intime de Staline, que rien ne le protège d'une décision de l'exécuter qui peut tomber chaque instant sans véritable fondement. Les hommes doivent accepter qu'à tout moment, sans raison précise, on puisse les ramener à cette forme absolue de modestie qu'est la mort.
Afficher en entierLe premier réflexe de nos dirigeants a été de faire porter la responsabilité du drame aux étrangers, en prétendant que ce submersible insubmersible ne pouvait avoir été envoyé par le fond que par un missile américain. Puis ils se sont rétractés, les avantages de faire porter le chapeau aux étrangers balayé par l'inconvénient de devoir justifier une absence de riposte, de ne pas avoir atomisé l'agresseur ou même plus. La version la plus neutre consistait alors à expliquer qu'une vieille torpille avait explosé à l'avant du bâtiment. Ils ont répandu cette rumeur avant de savoir quelle était la vraie cause qui peut bien être celle-ci, au final. Mais, dans tous les cas, ils ne voulaient pas être pris à contre-pied par les révélations des survivants. Ces hommes devaient mourir pour que le doute puisse continuer à bénéficier au pouvoir, pour que la vérité ne puisse lui être jetée à la face. Au bout du compte, que sont ces vingt-trois vies, comparées à un secret d'Etat à naître ? Rien. Et cela n'a rien de choquant. Le contraire aurait étonné. Dans un pays où la vie ne vaut rien, où la mort a longtemps été une délivrance, peut-on concevoir qu'on échange des siècles d'exercice du pouvoir dans le secret contre les vingt-trois vies d'hommes qui ont choisi le métier des armes ? Le contraire aurait été à lui seul une révolution. Et de révolution, dans ce pays, nous n'en avons jamais eu.
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