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Il ne semblait pas à sa place, entre ces murs carrelés de rose... Tout à coup, le monde tout entier me parut aussi incongru et absurde que la présence de ce garçon au milieu des toilettes des filles. Je me sentais détachée de tout, comme un simple personnage dans un film rempli de héros ambigus et de méchants insoupçonnés.
Le garçon le plus romantique et le plus généreux que je connaissais était un assassin. Le play-boy de l'équipe de foot américain venait de faire des propositions indécentes à la sainte-nitouche du lycée... Qui se transformait elle-même en mangeuse d'hommes à la nuit tombée. Les pères volaient l'argent de leurs filles et s'attaquaient à leurs propres fils. Les mères étaient trop dépressives pour s'occuper de leurs enfants. Les profs se mêlaient de la vie privée de leurs élèves, et les filles timides clouaient le bec aux garces dominatrices. La chimie, qui m'apparaissait toutefois comme le socle de l'univers, avait plongé nos âmes et nos existences dans le chaos.
Afficher en entierJ'eus du mal à crocheter la serrure, au lycée. Encore sous le choc de cette incroyable découverte, je peinais à contrôler le tremblement de mes mains.
C'était un projet d'article. Un texte que mon père considérait de toute évidence comme sa plus grande œuvre. Une exploration de la psyché trouble du Dr Frederick Hyde en personne. Le thérapeute comme son propre patient et comme son propre sauveur, aussi. Ce que j'avais lu m'avait convaincu que mon père avait baissé les bras, vaincu, depuis des mois... et que je ne vivais plus qu'avec la bête.
Avec son orgueil habituel, mon père avait cru qu'il pourrait vaincre le monstre à l'aide d'une simple auto thérapie et d'un arsenal de médicaments.
J'enfonçai l'extrémité du trombone dans la serrure, parvenant enfin à maîtriser mes doigts pour ouvrir la porte.
Tandis que je la refermais derrière moi pour pénétrer dans le lycée désert, les extraits les plus choquants du texte me revenaient progressivement à l'esprit.
Afficher en entierPeu à peu , son cœur reprenait de la force . Posant sa joue sur le sommet de mon crâne , il m'embrassa les cheveux en murmurant :
- Merci . Jill . Merci d'être venu me sauver .
Afficher en entierSa bouche était glacée contre la mienne .
Tristan ...Tristan n'était plus ...
J'allais devoir l'enterrer , comme j'avais enterré mon père . Les deux seuls hommes que j'avais vraiment aimés , mort en l'espace d'un an .
Le chagrin me submergea . J'avais beau fermer les yeux , impossible d'endiguer le flot de larmes qui coulaient le long de mes joues .; Dire qu'il y a quelques instants à peine nous étions tous les deux . A présent , j'étais de nouveau seule .Solitaire et brisée .
Qui serait là pour me consoler à l'enterrement de Tristan ? Personne....
Afficher en entierQuel était le secret de ces gens qui , comme Becca , semblaient tellement lumineux ?
Roulée en boule , je tentai de feindre le sommeil , guettant les bruits de pas de ma mère dans l'escalier .
Toujours rien . Au bout d'un quart d'heure de silence total , je commençai à me demander ce qu'elle fabriquait . Je ne l'avais même pas entendue se faire un thé ni allumer la télé . Repoussant mes draps d'un geste , je sortis dans le couloir et tendis l'oreille , inquiète .
Afficher en entierIl reporta son attention vers le piano et son sourire s'évanouit .
C'est alors que je me rappelai les propos de Becca sur Trstan et elle , cet été . Elle n'avait jamais terminé sa phrase . Que s'était-il passé , entre eux ?
- Voyons ce que donne ce pauvre piano abandonné , déclara Tristan en s'asseyant sur le tabouret .
Debout au milieu du salon , dans le rôle de la spectatrice unique , j'attendais que Tristan se mette à jouer , impatiente de réécouter la si belle musique que j'avais déjà entendue sur mon ordinateur .
En revanche , je ne m'attendais pas du tout à la métamorphose qui s'opéra en lui .
Afficher en entierDéjà , il avait cessé de m'écouter . Sans doute parce que son attention venait d'être attirée par un détail précis dans le salon .
Au début , je crus qu'il regardait mon autoportrait et mon ventre se noua .
- Ce n'est pas terminé , bredouillai-je pour parer d'avance à toute critique . Je sais que l'expression est ratée...
Lorsqu'il se tourna vers moi , je compris qu'il ne regardait pas mon portrait . Pointant du doigt un objet situé au -delà de mon chevalet , à l'autre bout du salon , il demanda , une pointe d'excitation dans la voix :
- Jill....est-ce bien ce que je crois ?
Afficher en entierC'était toi depuis le début, Jill. Il te veut autant que moi. Mais je jure sur ma vie que je préfère mourir que de le laisser gagner.
Afficher en entierPeut-être ressentais-je ce calme parce qu'à mon réveil, après avoir rêvé du meurtre de Jill Jekel, j'avais réalisé, sans l'ombre d'un doute, que j'étais amoureux d'elle. Peut-être étions-nous "tous les deux" amoureux d'elle, la bête et moi. Attirés par son innocence, ces grands yeux confiants, sa fragilité,...
La différence, c'est que la bête voulait verser le sang de Jill, la posséder pour mieux la détruire... Tandis que moi... j'étais prêt à verser mon "propre" sang pour la sauver.
Afficher en entierPourtant, la présence de Jill entre mes bras, ce mélange ennivrant de passion et de tendresse qu'elle éveillait en moi... Je n'avais rien éprouvé de tel avec aucune autre fille, et je ne pouvais me résoudre à m'y arracher. Je voulais que ce baiser dure pour toujours, certain qu'il s'agissait du dernier, absolument certain qu'il s'agissait du plus beau, et je serrai Jill plus fort contre moi, avide de sa présence, tel un condamné à mort s'efforçant de savourer son dernier repas alors qu'il entend se dresser l'échafaud de l'autre côté de sa cellule.
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