Ajouter un extrait
Liste des extraits
"Il donnait du "président" à tout le monde parce que, à présent, tout le monde était président de quelque chose, c'était comme "dottore" en Italie, et Labourdin aimait les solutions simples et pratiques."
Afficher en entier"Avant la guerre, elle les avait démasqués de loin, les petits ambitieux qui la trouvaient banale vue de face mais très jolie vue de dot"
Afficher en entierEdouard droit comme un "I" insulte le ciel, comme s'il fumait un bâton de dynamite.
C'est alors qu'arrive à sa rencontre un éclat d'obus gros comme une assiette à soupe. Assez épais et à une vitesse vertigineuse.
La réponse des dieux, sans doute.
Afficher en entierEn le tenant contre lui, Albert se dit que pendant toute la guerre, comme tout le monde, Edouard n’a pensé qu’à survivre, et à présent que la guerre est terminée et qu’il est vivant, voilà qu’il ne pense plus qu’à disparaître. Si même les survivants n’ont plus d’autre ambition que de mourir, quel gâchis…
Afficher en entierLe chauffeur, tout en barbe et qui puait la sueur, était assis au volant d'un beau fourgon tout neuf, un Berlier CBA à trente mille francs. Son petit négoce rapportait bien. On voyait tout de suite qu'il avait l'habitude, et n'avait confiance qu'en son propre jugement. Par la vitre baissée. dévisagea Albert, le jaugea des pieds à la tête, puis ouvrit la portière, sauta de son camion et le prit à part. Il lui tenait le bras très fort serré, une poigne terrible.
Afficher en entier« Ceux qui pensaient que cette guerre finirait bientôt étaient tous morts depuis longtemps. De la guerre, justement. Aussi, en octobre, Albert reçut-il avec pas mal de scepticisme les rumeurs annonçant un armistice. Il ne leur prêta pas plus de crédit qu’à la propagande du début qui soutenait, par exemple, que les balles boches étaient tellement molles qu’elles s’écrasaient comme des poires blettes sur les uniformes, faisant hurler de rire les régiments français. En quatre ans, Albert en avait vu un paquet, des types morts de rire en recevant une balle allemande. »
Afficher en entierTous ces dessins, une centaine, avaient été réalisés ici, sur le front, dans les tranchées, et montraient toutes sortes de moments quotidiens, des soldats écrivant leur courrier, allumant leur pipe, riant à une blague, prêts pour l'assaut, mangeant, buvant, des choses comme ça. Un trait lancé à la va-vite devenait le profil harassé d'un jeune soldat, trois lignes et c'était un visage exténué aux yeux hagards, ça vous arrachait le ventre. Presque rien, à la volée, comme en passant, le moindre coup de crayon saisissait l'essentiel, la peur et la misère, l'attente, le découragement, l'épuisement, la peur et la misère, ce carnet, on aurait dit le manifeste de la fatalité.
En le feuilletant, Albert en eut le cœur serré. parce que, dans tout cela, jamais un mort. Jamais un blessé. Pas un seul cadavre. Que des vivants. C'était plus terrible encore parce que toutes ces images hurlaient la même chose : ces hommes vont mourir.
Afficher en entierLes chefs veulent gagner le plus de terrain possible, histoire de se présenter en position de force à la table des négociations. Pour un peu, ils vous soutiendraient que conquérir trente mètres peut réellement changer l'issue du conflit et que mourir aujourd'hui est encore plus utile que mourir la veille.
Afficher en entierAlbert se dit que pendant toute la guerre, comme tout le monde, Edouard n’a pensé qu’à survivre, et à présent que la guerre est terminée et qu’il est vivant, voilà qu’il ne pense plus qu’à disparaître. Si même les survivants n’ont plus d’autre ambition que de mourir, quel gâchis…
Afficher en entierLes circonstances tragiques nécessitent un certain pragmatisme et Merlin estimait juste de passer sous silence diverses irrégularités, qu'on en finisse, bon Dieu, qu'on en finisse avec cette guerre.
Mais là, à Chazières-Malmont, l'inquiétude vous étreignait la poitrine. Quand vous recoupiez deux ou trois indices, ces planches d'anciens cercueils jetés dans les fosses et qui y seraient enterrées au lieu d'être brûlées, le nombre de bières expédiées par rapport au nombre de tombes creusées, les comptes-rendus approximatifs de certaines journées... Tout cela vous conduisait à la perplexité. Et votre idée de ce qui était juste ou pas s'en trouvait ébranlée. Alors, quand vous croisiez un clébard sautillant comme une danseuse et tenant dans sa gueule un cubitus de poilu, votre sang ne faisait qu'un tour. Vous aviez envie de comprendre.
Afficher en entier