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Il jeta un coup d’oeil autour de lui et un frisson glacé courut le long de sa colonne vertébrale. L’homme n’était pas mort tout seul, il ne s’était pas suicidé : en plus de la sangle qui lui serrait la gorge, plusieurs autres sangles le reliaient à la structure métallique du pont et, sur sa tête, quelqu’un avait mis… une capuche… Une capuche en tissu imperméable noir qui lui cachait le visage, prolongée par une cape qui lui pendait dans le dos.
PUTAIN ! PUTAIN ! PUTAIN !
Afficher en entierLà où la peau avait été retirée, la chair était à vif, chaque muscle distinctement visible, comme sur un dessin d’anatomie. Servaz jeta un rapide coup d’oeil autour de lui : Ziegler et Cathy d’Humières étaient livides ; le directeur de la centrale semblait avoir vu un fantôme.
Servaz lui-même avait rarement vu tableau aussi insoutenable. À son grand désarroi, il se rendit compte qu’il était si habitué au spectacle de la souffrance humaine que la souffrance animale le choquait et l’émouvait davantage.
Afficher en entierTout autre que cet adolescent aurait accusé le coup. Mais pas lui.
Pas ce garçon nommé Clément ; le garçon nommé Clément ne semblait nullement prendre la mesure des faits qui lui étaient reprochés. Servaz avait déjà lu des articles là-dessus, sur ces mineurs qui violaient, qui tuaient, qui torturaient – et qui semblaient parfaitement inconscients de l’horreur de leur geste. Comme s’ils avaient participé à un jeu vidéo ou à un jeu de rôle qui aurait simplement mal tourné. Il avait refusé d’y croire jusqu’à ce jour.
Afficher en entierIl redémarra, augmenta le volume du lecteur de CD. Les cors du scherzo envahirent l’habitacle. Quittant un court instant la route des yeux, il s’empara du café froid glissé dans le porte-gobelet. Le même rituel chaque fois : il se préparait toujours de la même façon. Il savait d’expérience que le premier jour, la première heure d’une enquête sont décisifs. Qu’il faut, dans ces instants-là, être à la fois éveillé, concentré
et ouvert. Le café pour l’éveil ; la musique pour la concentration – et pour se vider l’esprit. Caféine et musique…
Afficher en entierVous croyez que mes crimes me rendent vos mauvaises actions moins condamnables ? Vos petitesses et vos vices moins hideux? Vous croyez qu'il y a les meurtriers, les violeurs, les criminels d'un côté et vous de l'autre? C'est cela qu'il vous faut comprendre: il n'y a pas une membrane étanche qui empêcherait le mal de circuler. Il n'y a pas deux sortes d'humanité. Quand vous mentez à votre femme et à vos enfants, quand vous abandonnez votre vieille mère dans une maison de retraite pour être plus libres de vos mouvements, quand vous vous enrichissez sur le dos des autres, quand vous rechignez à verser une partie de votre salaire à ceux qui n'ont rien, quand vous faites souffrir par égoïsme ou par indifférence, vous vous rapprochez de ce que je suis. Au fond, vous êtes beaucoup plus proches de moi et des autres pensionnaires que vous ne le croyez. C'est une question de degré, pas une question de nature. Notre nature est commune: c'est celle de l'humanité toute entière.
Afficher en entierServaz savait pertinemment que dans la pratique, la police ne se souciait guère de faire respecter ce genre d’obligations. Pour une raison évidente : Il y avait désormais trop de criminels, trop de contrôles judiciaires, trop de procédures, trop de peines prononcées pour les appliquer toutes. Cent milles condamnés a de la prison ferme étaient en liberté, attendant leurs tours de purger leurs peines ou ayant choisis de prendre la poudre d’écampette à la sortie du tribunal en sachant qu’il y avait peu de risques pour que l’état français consacre de l’argent et des hommes à leurs recherche et en espérant de faire oublier le temps que leurs peine soit prescrite. Les hommes d’aujourd’hui veulent être comme des enfants irresponsables. Stupides. Criminels. Des imbéciles sans aucune moralité… Bientôt nous serons balayés par une vague de barbarie sans précédent. On en voit déjà les prémices. Et franchement, qui viendra pleurer sur notre sort ?
Afficher en entierDeuxième organisation par le nombre de ses membres après l'ONU, Interpol regroupe 187 pays. Ses services centraux ne constituent cependant pas une police à proprement parler - plutôt un service de renseignement consulté par les polices des pays membres pour son expertise et ses bases de données - dont un fichier de 178000 malfaiteurs et 4500 fugitifs. Un service qui émet chaque année plusieurs milliers de mandats d'arrêt internationaux : les fameuses "notices rouges".
Afficher en entier"Cimes des sapins enneigées. Vues d'en haut, selon une verticale et vertigineuse perspective. Ruban de la route qui file, droite et profonde, entre ces mêmes sapins aux troncs cernés de brume. Défilement des cimes à grande vitesse. Là, tout au fond, entre les arbres, une Jeep Cherokee grosse comme un scarabée roule au pied des grands conifères. Ses phares trouent les vapeurs ondoyantes. Le chasse-neige a laissé de hautes congères sur les côtés. Au-delà, des montagnes blanches barrent l'horizon. D'un coup, la forêt s'arrête. Un escarpement rocheux que la route contourne en un virage serré avant de longer une rivière rapide. La rivière franchit un petit barrage dévalé par des eaux bouillonnantes. Sur l'autre rive, la boucle noire d'une centrale hydroélectrique s'ouvre dans la montagne à vif. Sur l'accotement, un panneau : "SAINT-MARTIN-DE COMMINGES : PAYS DE L'OURS - 7 km".
Servaz regarda l'écriteau en passant.
Un ours des Pyrénées peint sur fond de montagnes et de sapins"
Des Pyrénées, tu parles ! Des ours slovènes, que les bergers du coin rêvaient de tenir au bout de leur fusil."
Afficher en entier"- Vous faites un métier difficile.
Servaz ne put s'empêcher de sourire.
- Vous êtes le premier professeur que j'entends dire ça.
- Je n'ai pas dit un métier honorable.
Servaz fut fouetté par le sous-entendu.
- Pourquoi ne le serait-il pas?
- Vous êtes au service du pouvoir.
Servaz sentit sa colère revenir.
- Il y a des milliers d'hommes et de femmes qui n'ont que faire du pouvoir, comme vous dites, et qui sacrifient leur vie de famille, leurs week-ends, leur sommeil pour être le dernier rempart, la dernière digue face à...
- La barbarie? suggéra Ferrand.
- Oui. Vous pouvez les détester, les critiquer ou les mépriser, mais vous ne pouvez pas vous passer d'eux."
Afficher en entier"— Je crois que je n’ai jamais connu une enquête pareille, dit Ziegler en se levant. D’abord, un cheval mort, puis un pharmacien pendu sous un pont. Et, entre les deux, un seul point commun : l’ADN d’un criminel en série… et, à présent, des adolescents qui se suicident à la chaîne. Ça ressemble à un mauvais rêve. Pas de logique, pas de fil conducteur. Je vais peut-être me réveiller en m’apercevant que tout ça n’a jamais existé."
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