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Le sang afflue dans mes veines, déferle dans mon corps comme un torrent, tandis que des vagues de chaleur me lèchent les os. Je perçois son angoisse, je sens la puissance sourdre de son corps, j'entends son cœur battre ,et ma tête tourbillonne sous les poussées d'adrénaline qui fortifient mon être.

Je me sens pleine de vie.

J'aimerais en souffrir. J'aimerais en sortir mutilé. j'aimerais en avoir la nausée. J'aimerais détester la force puissante qui s'enroule autour de mon squelette.

Mais en vain.

La vie de quelqu'un d'autre palpite sous ma peau et je ne déteste pas ça.

Je m'en veux d'y prendre du plaisir.

Je savoure la sensation de déborder d'encore plus de vie, d'espoir et de force que je m'en croyais capable. Sa douleur me procure une délectation que je n'ai jamais sollicitée.

Et il ne me lâche pas.

Mais il ne me lâche pas car sa lui est impossible. Parce que c'est à moi de rompre le lien. Parce que la douleur l'immobilise. Parce qu'il est pris dans mon piège. Parce que je suis une plante carnivore.

Et que je suis fatale.

Je tombe sur le dos et lui donne des coups de pied dans la poitrine pour qu'il s'écarte, qu'il soulève son poids de ma frêle ossature, mais son corps inerte s'écrase sur le mien. Je me mets soudain à hurler et je bataille pour y voir à travers les larmes qui occultent ma vision. Je suis saisie par le hoquet, hystérique, épouvantée par le regard figé sur le visage de cet homme, ses lèvres paralysées, pantelantes.

Je me libère et trébuche en arrière. La mère de soldats s'écarte dans mon sillage. La stupéfaction et la peur la plus viscérale s'inscrivent sur chaque visage. Jenkins gît à terre et personne n'ose s'approcher de lui.

Je m'égosille :

-Quelqu'un doit l'aider ! Quelqu'un doit l'aider ! Il a besoin d'un médecin...Il doit être emmené...Il doit ...IL...Mon dieu ...Qu'est ce que j'ai fait...

-Juliette...

-NE ME TOUCHE PAS... NE T'AVISE PAS DE ME TOUCHER ...

Warner à renfilé ses gants et tente de me soutenir, de me ramener les cheveux en arrière ,de sécher mes larmes et je veux le tuer.

-Juliette, faut que tu te calme...

-AIDEZ-LE !

Je sanglote, tombe à genoux, les yeux rivés sur la silhouette étendue. Les autres soldats finissent par s'approcher, prudents comme si leur camarade risquait d'être contagieux.

-Je vous en prie...vous devez l'aider ! Je vous en prie...

-Kent, Curtis, Soledad...OCCUPEZ-VOUS-EN! Braille Warner à ses hommes avant de me soulever.

Je lance encore des coups de pied, quand tout devient noir.

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Mes genoux s'entrechoquent et mon cœur bat si fort que je ne comprends pas pourquoi il bat encore.

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J'ose croiser son regard.

Ses yeux possèdent la nuance parfaite du cobalt;ils sont bleus comme une ecchymose épanouie, clairs, profonds et décidés.

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_Qu'est-ce que vous en pensez? Ca... me va ?

Kenji émet un bruit étrange.

Winston a l'air de s'ennuyer.

Adam ne peut s'empêcher de sourire.

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Mais c'est la tendresse de sa voix qui me choque. La sincérité de ses interrogations. Il me fait penser à un chien sauvage, cinglé, assoiffé de chaos, qui crève d'envie d'être reconnu et accepté. Aimé.

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« Deux, trois, quatre, cinquante mille éclats d'émotion me poignardent en plein coeur, se liquéfient en gouttes de miel tièdes qui apaisent mes bleus à l'âme. »

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« Des lueurs roses et rouges s'infiltrent dans la pièce, et je sais que c'est un nouveau début. Le début de la même fin. Un autre jour.

Peut-être que je mourrai aujourd'hui.

Peut-être qu'un oiseau volera aujourd'hui. »

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« Je veux détruire ce monde de béton pour qu'il bascule dans l'oubli. Je veux être meilleure, plus grande, plus forte.

Je veux avoir la rage, la rage, la rage.

Je veux être l'oiseau qui s'envole. »

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" L'argent sale dégouline des murs, une année de ravitaillement alimentaire gaspillée dans les sols en marbre, des centaines de milliers de dollars d’assistance médicale dépensés dans des meubles de luxe et des tapis persans. Je sens la chaleur artificielle souffler par les bouches d’aération et songe aux enfants qui crèvent d’envie de boire de l’eau potable. Je plisse les yeux sous les lustres en cristal et j’entends les mères implorer la pitié. Je vois un monde superficiel surgir au beau milieu d’une réalité terrifiante et ne peux plus bouger.

Je ne peux plus respirer. "

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La lune est une compagne fidèle.

Elle ne te quitte jamais. Elle veille, tenace, connaît nos parts d’ombre et de lumière, change au gré de nos humeurs. Chaque jour, elle offre une version différente d’elle-même. Tantôt faible et blême, tantôt forte et resplendissante. La lune sait ce que c’est que d’être humaine.

Incertaine. Seule. Grêlée d’imperfections.

Je regarde si longtemps par la fenêtre que je m’oublie. Je tends la main pour attraper un flocon de neige et mon poing se referme sur l’air glacé. Vide.

J’ai envie de flanquer ce poing à travers la vitre.

Juste pour sentir quelque chose.

Juste pour me sentir humaine.

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