Extraits

mon parquet est magnifique, je comprends qu'il puisse le trouver fascinant.

Il est à moi, et pour moi, et c’est tout !

J’attrape sa nuque sans lui laisser le temps de répliquer et fonds sur lui, sur ses lèvres, dans une nécessité incontrôlée de le revendiquer.

Puis le temps s’interrompt. Le silence s’installe autour de nous. Plus rien ne bouge, même pas nous.

Pendant un court instant, alors que je lui impose le pire baiser de l’histoire des baisers, il se fige, interdit, sans doute pour se laisser le temps de comprendre ce qu’il se passe. Et lorsque je réalise que je m’égare, que je me rends encore plus ridicule qu’à l’accoutumée, et que je tente de reculer pour m’excuser, c’est sa main à lui qui se pose sur ma nuque. Son bras qui s’enroule autour de mes épaules. Et ses lèvres qui se pressent contre les miennes alors qu’il m’attire à lui et me maintient fermement contre son corps tendu et atrocement accueillant.

Il prend le contrôle de la suite. M’offre un baiser autoritaire. Des lèvres souples et tendres, paradoxalement. Je défaille. Sa langue s’invite dans l’intimité de ma bouche et me provoque un bref arrêt cardiaque lorsqu’elle trouve la mienne pour débuter un échange voluptueux et bien trop sensuel.

Mes doigts s’accrochent à sa chemise. Mes jambes se mettent à flageoler. Mes sens entament une rumba endiablée. Mon esprit ne comprend plus rien. Mais mon âme, elle, menace d’exploser sous la réalité de l’instant.

Andrew Robin m’embrasse. Voracement. Furieusement. Absolument pas chastement.

Et c’est sacrément délicieux. Et scandaleux !

— Tu ne me perdras jamais, Andy.

Son ton est beaucoup trop sérieux tout à coup, tout comme ses paroles lourdes de sens qui résonnent entre nous et se frayent un chemin jusqu’à mon esprit. Avant d’en avoir tout à fait conscience, mes doigts s’attardent sur sa joue.

— Je sais, soufflé-je.

Et je finis par ôter ma main, avant de ne plus être capable de m’arrêter de le toucher.

Fin de la plus belle scène de ma vie. Sur mon épitaphe on pourra déjà écrire : « Il a senti Andy sous sa chemise ».

— Tu écris de la romance gay ? demande-t-il lentement d’une voix blanche.

— Ben oui ! Puisque je suis gay ! Je n’y connais rien, moi, aux moules et aux méduses. Quant aux odeurs de marée… Je ne suis pas un mec de la côte. Je pensais que tu le savais.

Comment vais-je me débrouiller pour mater son recto et son verso en même temps ? Parce que clairement, y a rien à jeter chez Andy Robin. Et occulter ne serait-ce qu'une infime partie de son anatomie serait un sacrilège. Un crime de lèse-majesté. Un affront intolérable à la beauté que mère Nature a bien voulu porter à ma disposition.

— Mais, Andrew écrit de la romance classique ! Et moi, je suis dans le gay !

Je pense quand même utile de le préciser, parce que, mine de rien, ça change pas mal la donne.

Mon agent se contente de m’adresser un regard entendu mais ne prononce aucun mot. Ce qui laisse entrevoir tout et n’importe quoi… comme, par exemple l’éventualité qu’Andrew soit… enfin que son penchant sexuel s’avère être…

Non… Pas lui, c’est tout à fait impossible.

Si ?

— Tu déconnes ?

À l’instar de mon cœur qui s’emballe ridiculement, mes jambes se mettent à trembler violemment, m’obligeant à me rasseoir en face d’elle.

Si c’est bien ce qu’elle sous-entend, alors ma vie ne sera plus jamais la même. Lui ? Gay ?

Bordel de putain de chiottes !

Gay ?

Andrew Robin ?

— Je n’ai rien dit, répond-elle innocemment. Je ne vois pas ce que tu vas chercher là… Dans tous les cas, je pense qu’il y a quelque chose à creuser de ce côté.

— Quelque chose à creuser, répété-je en plein tsunami intérieur. Creuser quelque chose. D’accord, je vais creuser. Profondément…

Elle laisse échapper un rire qui me parvient par bribes étouffées et lointaines…

Gay ?

Andrew ?

Et moi ?

Ben je suis gay aussi…

Je vais sans doute payer ce cadeau du ciel un jour, et l’addition sera atrocement salée ! Parce que là… Bonheur, j’écris ton nom…

"Alors, si quelque part l’homme qui m’a dérobé mon âme comprend que je m’adresse à lui, je le prie, le supplie, de caresser ces mots sur ce papier pour en ressentir chaque battement, chaque espoir que j’y ai déposé."

Et on inscrira sur ma pierre tombale : « Et un jour, il dédia toutes ses gaules à l’homme qui se foutait bien de sa gueule et de sa petite vie… »

— D’accord.

Je ne m’étends pas sur ma réponse car je ne le crois absolument pas et que, de toute manière, ma gorge vient de se serrer violemment sous le coup de masse qu’il vient de m’asséner. Je commence à ne plus savoir comment me sentir auprès de lui. Un coup j’ai l’impression que, telle la mer Rouge devant Moïse, mes craintes s’écartent sur la route qui mène à Andy, m’offrant une avenue plus large qu’un continent pour le rejoindre, puis l’instant d’après, j’ai l’impression que quelqu’un, quelque part, réalise qu’il s’est planté de cible et décide d’arrêter le miracle. Et chaque fois, je me prends le retour de vague en pleine tronche, le varech et les foutus poissons en prime.