Commentaire de Cameron10

J'ai beaucoup apprécié cette lecture ; j'ai immédiatement été plongée dans l'histoire et cet univers très riche, inspiré de la culture arabe et baigné dans le désert. Les descriptions sont très immersives, je n'ai eu aucun mal à me représenter le décor et à suivre les pas de Çeda dans cette grande cité. L'auteur fait preuve d'une grande créativité, néanmoins j'ai trouvé que certaines choses manquaient d'approfondissement - notamment tout le côté législatif : quelles lois régissent la ville, comment les douze rois s'accordent (ou non) pour les faire appliquer voire en créer de nouvelles, etc. - là où certaines explications arrivaient un peu trop tard. Il y a également des choses que je ne suis pas certaine d'avoir compris, par exemple la description des asirim était assez flou et même après avoir terminé le livre je n'arrive pas à les visualiser. Mais pour le coup ça ne m'a pas vraiment dérangée car ça contribue au mystère qui émane de ces créatures et des certains aspects de l'histoire.

L'intrigue est en effet très complexe et nimbée d'une aura mystérieuse avec des poèmes-énigmes, de fausses légendes, des divinités qui accordent de nébuleux pouvoirs magiques... J'ai trouvé ce flou volontaire plutôt pertinent et fascinant, il contribue à l'atmosphère du récit. Après, certains rebondissement étaient visibles à des kilomètres, comme la révélation des carillons qui m'a paru extrêmement longue et inutile puisque j'avais compris dès que j'ai eu les deux indices. Idem pour la prophétie de Melis qui annonce sans aucun doute une révélation future. En outre, j'avoue que je me suis parfois perdue parmi les nombreux personnages, en particulier quand il était question des rois et de leur entourage. Il m'a semblé également dommage d'introduire des personnages secondaires au début qui tombent ensuite aux oubliettes ; (il y a tellement de personnages que ce serait plus sympa de conserver ceux dont on arrive à se souvenir et de les développer davantage au lieu de les montrer uniquement comme des hommes dont l'héroïne se sert en les séduisant avant de les laisser tomber comme de vieilles chaussettes.

Malgré ses défauts, je n'ai eu aucun mal à m'attacher à l'héroïne ; en fait, ses défauts lui confèrent un côté très réaliste ainsi qu'un certain charme. Elle est déterminée et courageuse, une véritable battante, loyale et dévouée aux personnes qu'elle aime mais un peu trop tête-brûlée par moments, injuste parfois et il lui arrive de ne pas être très futée (pour la vision des carillons entre autres). J'ai eu le même ressenti envers Emre, qui est un peu trop séducteur et lâche mais tout aussi loyal et bienveillant avec Çeda qu'elle l'est avec lui. Leur relation est à l'image de leurs caractères : chaotique, pleine de défauts, mais profondément solide et touchante. Leurs souvenirs étaient de petites parenthèses sympathiques pour souffler un peu dans cette intrigue parfois oppressante et si certains m'ont paru un peu superflus, dans l'ensemble ils permettent de mieux comprendre la complexité des liens qui unissent ce binôme pas facile à appréhender.

J'ai aussi aimé Ramahd et les quelques chapitres de son point de vue ne m'ont donc pas gênée, en revanche j'ai eu plus de mal avec ceux d'Ihsan. J'ai trouvé que cette quatrième narration - même si ses chapitres restaient rares - était de trop et que le roman aurait facilement pu s'en passer (et y aurait même gagné). Dans un récit aussi dense il y a forcément des longueurs et c'étaient ces chapitres-là qui me faisaient le plus souvent décrocher de ma lecture. Un point négatif qui ne m'a tout de même pas empêchée d'apprécier le livre dans son ensemble, d'autant plus que le final est à la hauteur des attentes construites au fil de la lecture. Je lirai certainement la suite si j'en ai l'occasion.