Extraits

SPOILER

- Je peux faire cela pour vous, dit-il enfin, l'air résigné. Et la deuxième chose que vous vouliez ?

- Je veux vous embrasser une dernière fois avant de mourir, répondit-elle, la gorge nouée.

"(...) Mieux valait qu'elle garde ses distances avec l'ami de Will.

- J'envisageais justement de ligoter Cecily pour aller nourrir les canards de Hyde Park avec sa carcasse, dit celui-ci en gratifiant Jem d'un de ses rares sourires. Je veux bien de ton aide.

- Hélàs il te faudra reporter tes projets fratricides. Gabriel Lightwood est en bas, et j'ai deux mots à te transmettre. Deux mots qui comptent parmi tes favoris, du moins employés ensemble.

- Âne bâté ? Arriviste forcené ?

Jem sourit avant de répondre :

- Non. Vérole démoniaque."

« " I know that with Will everything is backward and upside down, but the fact that he isn't here is only further proof to me how precious you are to him. He is used to pushing everyone he loves, and the more he loves you, the more he will violently try not to show it."

"But there is no curse -"

" The habits of the years are not unlearned so quickly," Tessa said, and her eyes were sad. "Do not make the mistake of believing that he does not love you because he plays at not caring, Cecily. Confront him if you must and demand the truth, but do not make the mistake of turning away because you believe that he is a lost cause. Do not cast him from your heart. For it you do, you will regret it." »

P.74

« "You know that feeling," she said, "when you're reading a book, and you know that it is going to be tragedy; you can feel the cold and the darkness coming, see the net drawing closer around the characters who live and breath on the pages. But you are tied to the story as if being dragged behind a carriage, and you cannot let go or turn the course aside. " His blue eyes were dark with understanding - of course Will would understand - and she hurried on. "I feel now as if the same is happening, only not to characters on a page but to my own beloved friends and companions. I do not want to sit by while tragedy comes for us. I would turn it aside, only I struggle to discover how that might be done."

"You fear for Jem," Will said.

" Yes," she said. " And I fear for you, too."

"No, " Will said hoarsely. "Don't waste that on me, Tess." »

« - Tu connais ce sentiment, dit-elle, quand tu lis un livre et tu sais que ce sera tragique, tu peux sentir le froid et les ténèbres venir, regarder la toile se rapprocher et se refermer sur les personnages qui vivent et respirent dans les pages. Mais tu es attaché à l'histoire, comme si tiré derrière une calèche sans pouvoir lâcher prise ou arrêter la course.

Ses yeux bleus s'assombrirent de compréhension - bien sûr que Will comprenait - et elle se dépêcha de continuer :

- J'ai l'impression que la même chose est en train de m'arriver, seulement pas aux personnages d'un livre, mais aux personnes que j'aime. Je ne veux pas rester assise tandis que la tragédie arrive. Je voudrais l'arrêter, seulement je lutte pour savoir comment.

- Tu as peur pour Jem, dit Will.

- Oui, et pour toi aussi.

- Non, dit Will d'une voix rauque. Ne prends pas cette peine pour moi, Tess. »

P.68

"I take your hand, brother, so that you may go in peace.

Will had opened his bleue eyes that never lost their colour over all the passing years, and look at Jem and then Tessa, and smiled, and died, with Tessa's head on is shoulder and his hand in Jem's"

Après avoir scellé la lettre, Will appela l'aubergiste et obtint qu'en échange d'une demi-couronne le garçon d'écurie l'apportât à la malle-poste. Une fois qu'il eut payé, Will se renfonça dans son siège et s'apprêtait à commander un autre verre de vin pour s'assurer une bonne nuit de sommeil quand il éprouva une douleur aiguë à la poitrine. Il sursauta comme s'il venait de recevoir une flèche en plein cœur, et son verre se brisa sur le sol. S'étant levé d'un bond, il s'appuya des deux mains à la table sans prêter attention aux regards braqués sur lui. Il entendait vaguement la voix anxieuse de l'aubergiste dans son oreille, mais la douleur était si vive qu'il avait du mal à réfléchir et l'impression d'étouffer.

La tension dans sa poitrine, qu'il voyait comme l'extrémité d'une corde le reliant à Jem, s'était accrue au point qu'il avait l'impression d'avoir le coeur comprimé. Il recula en chancelant, bouscula un petit groupe de clients accoudés au bar et franchit la porte de l'auberge. Il n'avait qu'une idée en tête, sortir pour prendre l'air.

Il s'enfonça dans la nuit en titubant. Pendant un bref instant, la douleur reflua et il s'adossa au mur du bâtiment. Il pleuvait à seaux et, en quelques secondes, il fut trempé de la tête aux pieds. Il chercha son souffle, le coeur battant, en proie à une terreur mélée de désespoir. Était-ce seulement la distance avec Jem qui l'affectait?

Il n'avait jamais éprouvé pareil malaise, même quand Jem était au plus mal.

La corde se rompit.

L'espace d'un instant, tout devint blanc. Will tomba à genoux et vomit son dîner dans la boue. Une fois que les spasmes se furent calmés, il se releva péniblement et commença à marcher à l'aveuglette comme pour semer la souffrance. Il atteignit les écuries et vomit de nouveau sur le mur près de l'abreuvoir. En s'agenouillant pour plonger les mains dans l'eau glacée, il aperçut le reflet de son visage livide et de sa chemise, sur laquelle s'épanouissait une grosse tache de sang. Saisissant le vêtement par le col, il tira d'un coup sec, et tous les boutons cédèrent. Dans la faible clarté provenant de l'auberge, il vit que sa rune de parabatai saignait. Peu à peu, la pluie lava le sang qui maculait ses mains et son torse. Alors Will s'aperçut que la rune, auparavant noire, avait pris une teinte argentée, et que tout ce qui faisait sens dans sa vie venait de laisser place au chaos.

Jem était mort.

Jem à Will :

"Écoute-moi, dit-il. Je m'en vais mais je suis vivant. Je ne disparais pas tout entier, Will. Quand tu te battras, je serai encore à tes côtés. Quand tu marcheras, je serai la lumière qui t'éclairera, la terre solide sous tes pieds, la force qui meut l'épée dans ta main. Nous sommes liés l'un à l'autre au-delà de notre serment. Les Marques n'y ont rien changé. Le serment n'y a rien changé, il a seulement mis des mots sur quelque chose qui existait déjà."

" Un coeur divisé contre lui-même ne peut subsister,à ce que l'on dit. Vous les aimez tous les deux, et cela vous ronge."

Woosley Scott à Tessa

" - Et moi je pense que Mortmain ignorait que Gabriel et Gideon Lightwood seraient avec vous et que, de ce fait, il a sous-estimé ses effectifs. Sans quoi vous seriez tous morts, à mon avis.

-Au diable les Lightwood, marmonna Will. Il a surtout sous-estimé Bridget. Elle a découpé ces créatures en morceaux comme si elle avait affaire à une dinde de Noël.

Dans sa sacoche, il prit le couteau que Jem lui avait donné : une lame fine montée sur un manche en argent ciselé. A l'ombre du chêne, il entailla la paume de main et regarda le sang couler sur le sol. Puis il s'agenouilla et planta le couteau dans la terre rougie. La main posée sur le manche, il hésita puis dit : " James Carstairs..." et marqua une pause. C'était toujours dans les moments critiques que les mots lui échappaient. Le serment biblique des parabatai lui revint à l'esprit : " Ne me presse pas de te laisser, de retourner loin de toi. Où tu iras, j'irai, où tu demeureras je demeurerai, ton peuple sera mon peuple et ton Dieu sera mon Dieu. Où tu mourras je mourrai, et j'y serai enterré. Que l'Ange me traite dans toute sa rigueur, si autre chose que la mort vient à me séparer de toi."

Mais c'était ce que l'on devait récité quand on liait son destin à celui d'un autre, et non quand on était séparés. Jonathan et David avaient, eux aussi, été séparés par la mort. Séparés, mais pas désunis.

- Je te l'ai déjà dit, Jem, que tu ne pouvais pas me laisser, dit Will, sa main sanglante posée sur le manche du couteau. Et tu es toujours avec moi. A chaque instant, je penserai à toi car, sans ta présence, je serais mort depuis longtemps. À mon réveil, dans mon sommeil, quand je lutterai pour ma vie ou à l'heure de ma mort, tu seras avec moi. Tu prétends que l'on a plusieurs vies. Pour moi, il y a un fleuve qui sépare les morts des vivants. Mais je suis sûr que si nous sommes vraiment capables de renaître, alors nous nous retrouverons dans une autre vie. Et s'il y a un fleuve, tu m'attendras sur la berge pour que nous puissions le traverser ensemble.

Avec un soupir, Will lâcha la couteau. L'entaille commençait déjà à se refermer grâce à la demi-douzaine d'iratze qu'il avait appliquées sur sa peau.

- Tu m'entends, James Carstairs ? Au-delà de la mort, nous sommes liés, toi et moi, pour les générations à venir.

Il se releva, les yeux fixés sur le couteau. C'était celui. de Jem, mais le sang, c'était le sien. Ce coin de terre, qu'il puisse ou non le retrouver, resterait à jamais le leur.