Sex-Up !

Ce matin, j’ai relevé dans ma boîte à lettres une invitation. Un élégant bristol, griffé de pleins et de déliés, me convie nominativement à la visite gracieuse d’un musée parisien. Installé dans un hôtel particulier, c’est plutôt une maison-musée, un lieu d’art à visiter et à vivre, où l’on s’attend chaque instant à croiser les maîtres de céans, où l’on se contenterait d’une brosse à dents contre le luxe suprême de résider au milieu de tant de chefs-d’œuvre. Le prestige d’un tel environnement suffit à vous anoblir. Sur le parquet historique, vous mesurez vos pas. Devant les tableaux de maître, vous calibrez vos silences. Vous soutenez le menton, sous les plafonds à caissons. Quand bien même je connais déjà ces lieux, l’offre ne se refuse pas.

La jeune femme au guichet m’ouvre l’accès à la demeure, tout en s’avouant incapable de me révéler la provenance de mon bristol. Peu importe. Je remonte à pied la cour circulaire où les attelages déposaient les convives. Dans le hall, je salue le portrait en pied de feu le propriétaire. Lui et son épouse léguèrent à la postérité leur hôtel, seule création de leur couple stérile. Sa décoration fut le résultat de dix ans de voyages autour du monde, à dénicher et rapporter des œuvres d’art. Chaque objet compte pour un jalon de leurs pérégrinations, pour un membre de la famille nombreuse qu’ils n’ont jamais fondée.