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Extrait ajouté par Underworld 2020-08-21T12:34:26+02:00

** Extrait offert par Emma Darcy **

5.

Dans la bibliothèque de la Grande Maison, Paul Traverner était installé au bureau de sa mère devant la pile de documents personnels qu’elle souhaitait voir porter à l’ancienne ferme des Traverner. Sur le dessus trônait l’enveloppe de papier kraft scellée qui contenait son testament et ses dernières volontés.

La porte s’ouvrit, et David entra sans s’encombrer de formalités. Il toisa son frère et lança, ironique :

— Alors, tu essaies le trône ?

— Inutile d’être odieux.

Il se leva, écœuré.

— Mais reste assis, je t’en prie. Cela te va très bien. Et puis, la place te revient, puisqu’elle abdique.

— Je n’en mettrais pas ma main au feu, déclara Paul d’un ton mesuré.

L’irritation à peine voilée de son frère le troublait. Etait-ce une crise de jalousie ? Il espérait que non. Jusqu’ici, David et lui avaient toujours été très proches, s’étaient toujours soutenus mutuellement.

— Elle reviendrait à la Grande Maison si elle comptait reprendre les affaires en main, jeta négligemment David en se laissant tomber dans le fauteuil de cuir où il s’installait invariablement pour faire ses rapports à leur mère.

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Extrait ajouté par Underworld 2020-08-21T12:33:57+02:00

** Extrait offert par Emma Darcy **

4.

Rory prit un plaisir vengeur à faire rugir le moteur et grincer les vitesses de sa Maserati. Ce n’était plus une belle journée. Louise la lui avait gâchée avec ses prédictions de changements à venir.

En bas de la colline, il ralentit, tourna au carrefour en direction des établissements Traverner et s’obligea à conserver une allure raisonnable. Il passa devant les boutiques que les entreprises viticoles avaient ouvertes dans les années soixante-dix avec le boom spectaculaire de l’industrie du vin. Le changement ? La vie n’était faite que de cela ! Il suffisait de retrousser ses manches pour relever le défi.

Il avait vu bien des changements à Hunter Valley ces vingt dernières années. Des changements et de gros investissements de capitaux. Ce n’était plus le lieu où il avait grandi. Il y avait là maintenant plus de cinquante établissements viticoles, une trentaine de restaurants, des antiquaires, des studios d’artistes, des galeries, et d’autres entreprises commerciales visant à satisfaire les besoins croissants d’une industrie touristique en plein développement qui attirait dans la région près d’un million de visiteurs chaque année.

Rory jeta un coup d’œil de connaisseur sur les rangs de jeunes vignes qui s’étendaient des deux côtés de la route. Elles semblaient saines, pleines de vie avec leurs tendres pousses printanières. Il aimait cette saison, l’explosion des bourgeons qui recouvrait de vert la triste nudité de l’hiver. La qualité de la prochaine récolte dépendrait, bien sûr, du temps qu’il ferait au cours des quatre prochains mois, mais le printemps, le renouveau était toujours une occasion d’espoir et de plaisir.

Quatre mois jusqu’aux vendanges.

Quatre mois jusqu’à la mort d’Eleanor.

Il se demanda combien de temps elle tiendrait. Ce genre de pronostic n’était jamais très fiable, et Rory ne voyait pas Eleanor renoncer si facilement. Elle ne renonçait jamais. A rien. Elle était capable de s’accrocher, de faire main basse sur tout ce qui passerait à sa portée pour profiter au mieux de ce qu’il lui restait à vivre.

Elle était considérée au-dehors comme la grande dame des vignobles de Hunter Valley, admirée et respectée de tous, anoblie par un titre pour sa réussite, mais le grand public ne la connaissait pas aussi bien que Rory.

Peut-être qu’il tenterait de savoir quelle était la position de la génération montante quant à la direction future de l’entreprise familiale, qu’il s’assurerait que Paul et David ne lui réservaient pas de surprises. Il n’en attendait pas, certes, mais il ne perdait rien à se montrer ouvert à toute discussion.

La réaction des femmes serait sans doute plus parlante que celle des hommes. Sharon, l’épouse de David, se laissait depuis toujours intimider par Eleanor. Mais pas Gabrielle, l’épouse de Paul, qui avait su garder toute son indépendance. Sans entrer en compétition avec la maîtresse des lieux, elle ne lui était pas soumise non plus. Quels étaient donc leurs rêves, leurs espoirs secrets ?

Rory doubla prudemment un trotteur tirant un sulky — quelqu’un qui s’offrait une promenade matinale à la campagne à la mode d’autrefois. Aujourd’hui, les promenades en sulky faisaient le bonheur des touristes. Traditionnellement, c’était le moyen de transport des familles de pionniers de la vallée lorsqu’elles se rendaient visite le dimanche. Son grand-père lui avait beaucoup parlé de ces rassemblements dominicaux chez les Selby, les Traverner, les Buchanan.

Hélas, ce temps de l’amitié, de l’entraide dans l’adversité était à jamais révolu. L’ancienne propriété des Selby était là pour le lui rappeler, et il en éprouva un pincement au cœur. Ami proche de Janet Selby depuis sa plus tendre enfance, il avait eu beaucoup de sympathie pour Jim Thurston, l’homme qu’elle avait épousé.

Pauvre Janet, acculée à la ruine par une série de catastrophes ! Il s’en voudrait toujours de n’avoir pas pu obtenir les aides nécessaires pour la tirer de ses ennuis. Au bout du compte, elle avait tout perdu — son mari et la firme familiale. Sans projet, sans avenir, elle avait accepté de devenir son assistante personnelle. Du moins leur amitié était-elle sauve.

Il arriva en vue de la somptueuse demeure que Max Vandelier avait fait construire — un authentique manoir destiné par son concepteur à rivaliser avec les châteaux des grandes régions viticoles de France. Tant de prétention prêtait à sourire.

Eleanor régnait depuis vingt-cinq ans sur l’imposante bâtisse que les gens de la vallée appelaient, tout simplement « la Grande Maison ». Héritier présumé, Paul y vivait aussi, avec sa femme et sa famille. Et Rory soupçonnait Gabrielle de ne pas apprécier cette cohabitation imposée avec sa belle-mère.

David avait du moins eu le bon sens de prendre ses distances par rapport à sa mère. Il avait fait construire pour lui et Sharon sur des terres annexes le long de Broke Road.

Rory passa devant le chemin qui menait à l’ancienne ferme des Traverner près de la rivière et enfila l’allée qui conduisait au complexe créé par Max — des chais dotés d’équipements de pointe en matière de vinification, des caves souterraines à température contrôlée, des lieux de dégustation à l’ambiance raffinée propres à attirer le touriste en mal d’achat, un grand hôtel avec salle de conférences et restaurant offrant de la cuisine française. Et, bien sûr, rien que des vins Traverner sur la carte.

Max avait un sens aigu du commerce et visait une clientèle internationale prestigieuse. Son ambition avait contribué à propulser les établissements Traverner au premier rang des éleveurs de grands crus de Nouvelle-Galles-du-Sud et à leur conférer une réputation mondiale.

Que resterait-il de tout cela à Tamara, sa seule enfant ? Rien s’il ne tenait qu’à Eleanor. Paul et David seraient-ils mieux disposés envers elle ? Cela ne le concernait pas, certes, mais indépendamment de sa conduite, Tamara faisait partie de la famille. Si le capital de son père n’était pas venu à point renflouer la firme, il n’y aurait plus de vignobles Traverner. Et si Eleanor préférait l’oublier, Paul et David, eux, devraient s’en souvenir.

Rory gara sa Maserati sur le parking et se dirigea vers le bâtiment administratif. Aussi avenante qu’efficace, Cassie Deakin, la réceptionniste, l’accueillit avec un sourire communicatif.

— Que puis-je pour vous aider, monsieur Buchanan ?

— Sauriez-vous où je peux trouver Paul ?

— Il n’est pas encore arrivé de la Grande Maison.

— Et David ? Il est ici ?

— Il y était, mais il vient de partir. Il m’a dit qu’il serait à la Grande Maison si on avait besoin de le joindre.

— Je vous remercie, Cassie. Bonne journée.

— Dois-je les prévenir que vous êtes passé, monsieur Buchanan ? Vous voulez laisser un message, peut-être ?

— Inutile, je les verrai plus tard. Merci encore.

— A votre service, lança-t-elle dans son dos.

Il sortit sans s’être aperçu que Cassie Deakin brûlait de curiosité. La rumeur s’était déjà répandue que le règne de Dame Eleanor touchait à sa fin, et tout l’établissement bourdonnait comme une ruche. Une visite impromptue du directeur des établissements Buchanan ouvrait la voie à de nouvelles spéculations.

Mais Rory était trop concentré sur l’absence de Paul et de David pour s’en soucier. Il se demandait ce qui se tramait à la Grande Maison, ce qu’on y discutait si secrètement. Le poste de commandement d’Eleanor était certainement en jeu. Peut-être Paul se préparait-il à prendre le pouvoir sur-le-champ ? Un coup d’état. Hum. Intéressante perspective.

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Extrait ajouté par Underworld 2020-08-21T12:33:25+02:00

** Extrait offert par Emma Darcy **

3.

Ayant débarrassé la table du petit déjeuner, Louise remplit de café la tasse de Rory, se resservit elle aussi et alla s’asseoir en face de lui, dos à la vitre, dont la vue était sans intérêt pour elle — de sinistres gommiers et des oiseaux bruyants. L’attrait qu’exerçait sur certains le paysage du bush australien la dépassait. Ce qui l’intéressait ce matin, c’était Rory.

Il semblait satisfait, en paix avec le monde, et son regard errait avec plaisir sur les merveilles qu’il voyait dehors, dans la nature. Rory opposait parfois une résistance bornée à certaines de ses suggestions mais, ce matin, Louise avait la conviction qu’il l’écouterait d’une oreille favorable. Au fond, elle aurait peut-être avantage à lui offrir son corps chaque matin jusqu’à ce qu’il accepte de collaborer à son projet. Cela lui coûterait d’autant moins que l’objectif était en vue.

Rory ne manquait pas de potentiel. Sans quoi, elle ne l’aurait pas épousé. Encore qu’il fût très séduisant avec ses cheveux couleur de miel sauvage, ses yeux d’ambre, son sourire magnétique et son corps idéalement viril. Son seul physique suffisait à retenir l’attention et, maintenant qu’elle avait pris soin de remodeler son image, il émanait de lui une classe et une distinction peu communes. Louise ne doutait pas un instant de pouvoir en faire sa chose.

Elle sourit en songeant à son ambition première d’entrer en politique, comme son père. Actuel ministre de l’Industrie au gouvernement fédéral, Jeremy Stanhope ne vivait que pour le pouvoir, une passion enivrante qu’elle partageait avec lui depuis l’adolescence — avant même que sa mère ne parte pour l’Irlande avec un éleveur de chevaux de course. Louise avait choisi de rester avec son père. Elle préférait être l’enfant chérie de son papa plutôt que de jouer les seconds couteaux auprès de sa mère.

Il lui avait conseillé de renoncer à la politique.

— C’est prêter le flanc à toutes les attaques. Le pouvoir se trouve ailleurs pour les femmes.

Elle avait protesté, bien sûr.

— Sous prétexte que je suis une femme…

— Ton avenir est assuré, ma chérie. A toi de jouer correctement tes cartes.

— Que veux-tu dire ?

— Attache-toi à un homme qui pourra te conduire où tu veux aller dans la vie et fais de lui ton instrument. Etudie bien l’histoire, et tu verras que les femmes les plus puissantes ont toujours été celles qui savaient manipuler les hommes et user de leur position. Tu y trouveras plus de satisfaction qu’à te faire éreinter dans les débats parlementaires.

L’idée plut à Louise, et elle l’adopta.

C’était encore son père qui l’avait aiguillée sans le vouloir dans la direction de Rory lors d’une cérémonie à Camberra, cérémonie au cours de laquelle Eleanor Vandelier recevait son titre de « Dame » pour services rendus à l’industrie viticole australienne.

— Ma chérie, voilà un bel exemple de femme qui voit loin et vise juste. Deux fois veuve sur le chemin de la réussite, elle possède une superbe résidence à Hunter Valley et dirige aujourd’hui deux des plus grands vignobles du pays.

Louise avait remarqué qu’Eleanor n’était plus de première jeunesse.

— Elle a des fils célibataires ?

— Non, les deux sont mariés. Mais du côté de son frère, le futur héritier des vignobles Buchanan ne l’est pas. Tu aimerais lui être présentée ?

Une lueur de défi brillait dans le regard de son père.

Irrésistible.

D’autant que l’empire sur lequel régnait Eleanor avait de quoi faire rêver. La demeure que Max Vandelier lui avait construite surpassait de loin le vieux château désuet de sa mère en Irlande. Et puis il valait mieux être associée à la réputation mondiale des meilleurs crus australiens qu’à des chevaux, fussent-ils de course. Cela vous avait tout de même davantage de classe.

Lorsque Louise fit sa connaissance, Rory gérait déjà le vignoble des Buchanan depuis des années. Il savait tout des vignes et de la vinification. Avec elle pour le soutenir, il saurait assumer les responsabilités de directeur de la firme familiale, représenter et défendre les intérêts commerciaux des grands crus Buchanan et Traverner.

Après trois ans passés aux côtés de Rory, Louise voyait enfin le moment venu de toucher les intérêts sur le temps qu’elle avait investi dans ce mariage. Eleanor se mourait, la place était à prendre. S’ils en avaient l’audace, elle leur appartenait.

Louise but une gorgée de café, réfléchit aux arguments qu’elle mettrait en avant pour convaincre Rory d’agir comme il convenait et sans tarder. De lui-même, il n’en verrait pas l’utilité, moins encore l’importance, trouverait sans doute l’idée inconvenante. Mieux valait biaiser, ne pas l’aborder de front.

Résolue, elle posa sa tasse.

— Rory ? Tu n’as pas oublié qu’Eleanor rentre cet après-midi ?

Ces paroles déplaisantes lui gâchaient le plaisir de cette belle matinée. Rory se serait passé de s’entendre rappeller qu’Eleanor rentrait mourir chez elle. Son grand-père l’avait appelé la veille au soir de Sydney pour l’avertir qu’elle refusait de poursuivre les traitements et qu’il la reconduirait le lendemain sur ses terres.

Ellie. Son grand-père l’appelait toujours par ce diminutif affectueux. Pour Frank Buchanan, elle restait la petite sœur qui avait besoin de son aide et de son soutien. Pour les autres, Dame Eleanor Buchanan Traverner Vandelier n’avait rien de petit. C’était une force de la nature, une maîtresse femme qui vous écrasait de son autorité.

Rory se moquait bien qu’elle meure. A ses yeux, Eleanor incarnait la mort depuis l’été de ses seize ans. Son grand-père ne semblait pas voir les victimes que l’ambition de sa sœur laissait dans son sillage, voyant sa réussite et non les souffrances humaines que celle-ci engendrait.

— Non, je n’ai pas oublié, répondit Rory platement.

Il s’arracha à la contemplation des innocentes beautés de la nature pour regarder sa femme, qui avait une idée derrière la tête. Louise attendait quelque chose de lui, il le devinait au ton de sa voix. Trois ans de mariage lui avaient appris à détecter ce genre de subtilités.

Son déshabillé de soie entrouvert découvrait le tendre creux de sa poitrine. Ses longs cheveux blonds, libres sur ses épaules, reflétaient le soleil matinal. Rory tenta de ranimer les sentiments qu’elle avait éveillés en lui dans le plaisir. En vain. Peut-être faisait-il preuve de cynisme injustifié, mais il ne pouvait s’empêcher de se demander si la belle générosité de son épouse à leur réveil ne cachait pas un calcul.

— Tu devrais passer par les vignes des Traverner en allant travailler tout à l’heure, dit-elle.

Louise avait toujours un objectif en tête. Rory aurait préféré qu’elle se montre plus spontanée, mais il ne pouvait nier que sa femme eût ses intérêts à cœur. Leur mariage était une sorte de partenariat dont il n’avait pas à se plaindre. Seulement, il n’aimait pas les manipulations, qu’elles s’exercent sur lui ou sur autrui. Il en avait trop vu les effets avec Eleanor et ne voulait pas de cela chez lui.

— Pour quoi faire ? s’enquit-il.

— Pour parler à Paul et à David, leur témoigner ta sympathie. Eleanor a toujours été solide comme un roc, la nouvelle a dû leur causer un choc. Une visite s’impose, Rory, c’est la moindre des corrections.

Elle avait raison, bien sûr. Même monstrueuse, une mère restait une mère. Eleanor était le centre, et même le moteur de la vie de ses fils. Elle avait mis en branle mille machinations, rusé et calculé sans répit pour préserver l’héritage des Traverner, allant jusqu’à vendre son âme et épouser Max Vandelier afin de sauver la terre ayant appartenu à Richard Traverner, le père de Paul et de David.

Aimaient-ils mieux leur mère pour autant ? Ne rêvaient-ils pas d’indépendance, de voler de leurs propres ailes ? Ne voyaient-ils pas sa mort prochaine comme une porte ouverte sur la liberté ?

A leur place, Rory se serait senti soulagé, mais il n’était ni Paul, ni David, et il ignorait tout de ce qu’ils éprouvaient pour leur mère. Ils étaient loyaux envers elle. A juste titre. Ils hériteraient des fruits de son ambition, de sa passion obsessionnelle pour la terre.

Encore une réflexion cynique. Le seul fait de penser à Eleanor l’aigrissait. Mais il avait de l’affection pour Paul et David. Ils lui avaient généreusement appris tout ce qu’ils savaient des vignes, du vin et de son commerce quand son père était mort… l’été de ses seize ans.

La disparition brutale d’Ian Buchanan demeurait en grande partie une énigme, mais une chose était sûre, Eleanor avait su en tirer parti à son profit, pesant de tout son poids jusqu’à faire adopter le principe d’une entreprise familiale unissant les deux vignobles.

— Rory ? s’impatienta Louise.

— J’irai les voir, bien sûr. C’est la correction la plus élémentaire.

Dans un monde qui manquait singulièrement de correction, Rory mettait un point d’honneur à ne pas être pris en défaut. Idéaliste dans sa jeunesse, il le demeurait peut-être malgré sa carapace de cynisme nourrie par les déceptions.

— Je suppose qu’ils ont prévu une réunion de famille en l’honneur d’Eleanor ce soir, remarqua Louise d’un ton détaché.

Puis elle en vint au but :

— Rory, il faut que nous en soyons. Je tiens à y assister.

Lui ne tenait pas à constater de ses yeux qu’Eleanor était effectivement mortelle, ni à témoigner une sympathie hypocrite à une femme qu’il détestait cordialement.

— C’est ma grand-tante, Louise, pas ma mère ! Laisse donc cela à Paul, à David et à leurs épouses.

— Nous sommes de la famille au même titre que les autres. Et d’ailleurs, c’est ton grand-père qui la ramène de l’hôpital.

— Parce qu’elle le lui a demandé. Elle ne nous a rien demandé à nous, que je sache.

— Il n’y a pas de mal à prendre quelques initiatives. Surtout dans de telles circonstances.

— Je doute que nous soyons les bienvenus.

— Rory, je ne me laisserai pas exclure cette fois. Eleanor cherche toujours à nous écarter.

C’était donc à cela que Louise voulait en venir depuis le début. Etait-ce de la curiosité morbide, ou le désir d’être au cœur de l’action ? Il s’en moquait éperdument, au fond. Cela lui convenait, à lui, qu’Eleanor l’écarte. Il ne désirait pas davantage sa compagnie qu’elle la sienne ; Et si elle l’écartait, il savait bien pourquoi. Il incarnait pour elle le souvenir déplaisant de moments qu’elle préférait ignorer.

Il secoua la tête et se leva, prêt à partir, désireux d’en finir avec cette discussion.

— Il ne serait pas convenable que nous nous imposions, dit-il en contournant la table pour aller l’embrasser.

— Tu te trompes, Rory. Je veux voir, nous avons tous les deux besoin de voir comment elle va, l’effet qu’a eu sur elle la maladie. Et puis, toute la famille devrait être présente pour l’accueillir, montrer un front uni, c’est une question de respect.

Un front uni ! Rory ne put retenir un sourire ironique. Jamais sa folle de mère n’accepterait de s’associer aux pécheurs de ce monde et, à ses yeux, la famille était l’équivalent de Sodome et Gomorrhe réunies.

Et Tamara, donc ? Tamara qui ne respectait rien ni personne ? Elle serait capable d’arriver à la tête d’un orchestre de jazz jouant à grand renfort de cuivres When The Saints Come Marching In. Et si elle le faisait, bravo ! Rory serait même tenté d’applaudir.

— Désolé, Louise. Je n’ai plus aucun respect pour Eleanor depuis longtemps. Elle est peut-être la grande figure matriarcale de la famille, mais je me refuse à m’incliner devant elle. Je ne le ferai ni pour toi, ni pour Paul, ni pour David, ni pour personne.

Il se pencha pour effleurer ses lèvres d’un baiser, puis ajouta :

— Merci pour ce matin.

Il sentit ses lèvres se crisper sous les siennes, devina sa frustration. Le sexe ne l’avait pas amadoué, son plan avait échoué, tant pis pour elle ! Il faudrait bien que Louise finisse par accepter qu’il n’irait pas contre ses propres principes, qu’il ne se soumettrait pas à des grimaces aussi hypocrites qu’humiliantes.

Il montait déjà les marches qui conduisaient dans le hall quand elle lui lança :

— Rory, tu te trompes, tu te laisses aveugler.

Il se retourna, lui adressa un regard moqueur.

— Eh bien, éclaire-moi.

Ses traits s’étaient durcis en un masque de farouche détermination.

— Que tu respectes ou non Eleanor, il faut que nous soyons là pour l’accueillir. C’est de politique qu’il s’agit. Elle a tout pouvoir sur notre avenir, Rory. Elle est toujours à la tête de la firme et le restera jusqu’à sa mort. Elle décide du sort des deux vignobles. Mais elle disparue, qui prouve que Buchanan restera entre tes mains ? Y as-tu seulement pensé ?

— Tu nous prédis un rassemblement de vautours, c’est cela, Louise ?

— Le changement de direction entraîne généralement des modifications d’alliances. Sans la poigne d’Eleanor pour tenir les fils, qui sait ce qui peut se passer ?

— Louise, tu déraisonnes. Paul a été formé pour prendre la place d’Eleanor à la tête de la firme familiale. David gérera Traverner, et Buchanan restera sous le contrôle des Buchanan, à savoir, moi. Laisse Eleanor mourir en paix, si elle le peut.

— Rory, tu n’as que vingt pour cent de Buchanan.

— Mon grand-père en a vingt-cinq, et ma mère qui ne vote jamais en a vingt. Je ne vois pas bien comment on pourrait nous déposséder des vignobles, Louise.

— Eleanor va user de tout le pouvoir dont elle dispose à présent. Il faut que nous soyons là pour observer et tenter d’évaluer ses intentions, Rory.

— Et briguer ses faveurs, peut-être ?

— Ce n’est sans doute pas inutile. Cela peut même nous aider à voir où elle veut en venir.

— Louise, je ne lui ferai pas le plaisir de chercher à connaître ses désirs.

— Il ne s’agit pas de désirs, Rory. Eleanor ne donne pas dans le désir. Elle planifie, calcule et manigance. Si nous ne nous méfions pas, nous avons tout à perdre.

— Elle est mourante, pour l’amour du ciel !

— Eleanor ne mourra pas sans se battre. Elle n’acceptera pas plus la mort que tout ce qui lui répugne.

— Qu’elle fasse ce qu’elle voudra.

Il serra les poings pour contrôler sa rage. Lui, briguer les faveurs d’Eleanor ? Jamais. Louise le connaissait bien mal. Et elle n’aurait pas dû user de son corps pour briguer ses faveurs à lui ! Il ne voulait pas de cette sexualité intéressée. Il voulait qu’on se donne pour rien, généreusement. Il voulait ce qu’il avait eu autrefois avec Tamara. L’amour.

Sa colère se mua en amertume. A quoi bon raviver le souvenir de cette Tamara qu’il avait connue ? C’était à la fois stupide et destructeur. Elle n’existait plus. Elle n’était pas revenue vers lui après l’été qu’ils avaient passé ensemble et ne lui reviendrait jamais. Elle ne s’était pas privée de le lui faire comprendre de mille et une manières.

Il avait Louise avec lui maintenant. Non pas Tamara, mais Louise, l’épouse légitime qu’il s’était choisie. A lui de s’accommoder au mieux de ce mariage.

Décrispant les poings, il s’efforça de prendre un ton conciliant.

— Tu n’as pas lieu de t’inquiéter, Louise. Je te promets qu’Eleanor ne touchera ni à moi, ni à la direction de Buchanan. Ton avenir n’est pas en péril.

— Mais, Rory…

— Je passerai voir Paul et David, leur présenter mes respects. Mais je n’irai pas plus loin.

Louise le regarda partir en serrant les dents. Inutile d’en dire davantage pour le moment. N’empêche, Rory était plus myope qu’une taupe, et c’était irritant. Tôt ou tard, il lui faudrait éclairer sa lanterne. Elle avait besoin de lui pour arriver à ses fins. Et elle ne se contenterait pas de conserver le domaine des Buchanan. Elle voulait le contrôle de la firme.

Etant donné la répartition des parts en actions, la chose était possible. Il suffisait d’influencer le vote dans le bon sens. Son père s’y connaissait en chiffres et lui avait appris à compter.

Rory était bien sot de ne pas bondir sur l’occasion pour observer les réactions de la famille face à l’imminence d’un changement majeur. Observer était la clé du savoir, et le savoir, celle du pouvoir. Cela aussi, son père le lui avait appris. Mais Rory l’obligeait à renoncer au plan qu’elle avait établi. Heureusement qu’elle ne lui avait pas dévoilé toute sa stratégie dans le détail. Elle commencerait par mettre les atouts dans son jeu. Ensuite, cartes en main, elle lui montrerait de quoi il retournait.

Rory finirait par se plier à sa volonté.

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Extrait ajouté par Underworld 2020-08-21T12:32:34+02:00

2.

La surprise tira Rory du sommeil. Non que son érection matinale eût de quoi le surprendre. Elle était quasi quotidienne. Même s’il n’en voyait guère l’utilité. Louise n’aimait pas faire l’amour au réveil. Elle le lui avait fait clairement comprendre dès leur premier jour de mariage, et il n’était pas homme à imposer ses désirs à une femme. Pourtant, elle était blottie contre son dos et caressait son sexe.

Si ce n’était pas là une invitation, Rory ignorait tout de la vie. Non, il ne rêvait pas. Et pas question de remuer au risque d’interrompre ce plaisir inattendu. En temps normal, c’était lui qui faisait les premiers pas. Drôle de surprise, que ces caresses intimes de Louise.

Ou, plus exactement, agréable surprise.

Ses seins se pressaient délicieusement contre son dos. La chaleur de son corps l’excitait aussi sûrement qu’une potion aphrodisiaque. Et le mouvement de sa main sur son sexe le rendait fou. Il ne tiendrait pas beaucoup plus longtemps sans bouger.

Abandonnant son membre tendu, elle se hissa sur un coude pour lui mordiller l’oreille.

— Allez, Rory, viens ! Je sais bien que tu ne dors pas. Tu boudes ? Viens, je t’attends.

Trop heureux de laisser libre cours à son instinct animal, il émit une sorte de grognement et se retourna pour la posséder. Pas besoin pour lui de se contenir, elle ne donnait pas dans la délicatesse. Elle l’enveloppa de ses jambes, offerte, une lueur de satisfaction dans le regard. Il plongea en elle.

C’était bon, cette chaleur humide, ces muscles qui se resserraient autour de lui, qui l’aspiraient. Mieux que bon, délectable. Il s’abandonna au mouvement, à la friction rythmique. La tension s’accrut, et il éjacula dans une explosion incontrôlable. Trop vite, trop tôt.

Il eut envie de recommencer, de faire durer le plaisir. Mais il y renonça aussitôt. Mieux valait se contenter de ce peu que d’essuyer un refus. Il soupira, gratifia Louise d’un sourire attristé.

— Désolé. Je n’ai pas pu me retenir.

Elle lui répondit d’un sourire dénué de reproche.

— C’était parfait, juste ce que je voulais. J’aime te voir perdre tout contrôle.

Elle effleura ses lèvres d’un bref baiser, se dégagea de son étreinte et se rendit dans la salle de bains attenante.

Comme toujours. Pas de tendres câlins pour elle. Jamais elle ne restait langoureusement étendue près de lui après l’amour. Ce matin pourtant, Rory n’en souffrait pas. Le menu plaisir volé lui laissait une agréable sensation de chaleur. Il se sentait bien, détendu, comblé. Et peu lui importait ce souci pointilleux que Louise avait de l’hygiène. Louise était pointilleuse. Sur des tas de choses. Ce qui avait ses avantages et ses inconvénients.

Il venait de se doucher à son tour et, tandis qu’il se coiffait, le souci du détail de Louise lui revint à l’esprit. Elle attachait une grande importance aux apparences, tenait à ce qu’on soit toujours tiré à quatre épingles, à ce qu’on soit vêtu de couleurs assorties. Tout devait être à sa place, elle ne supportait pas un cheveu de travers.

A sa requête, il avait accepté d’aller chez un coiffeur se faire faire une coupe à la mode, mais il refusait que ses cheveux châtains soient artistiquement traités par un professionnel afin de tirer meilleur parti de ses mèches blondies par le soleil. Si Louise veillait jalousement à ce que sa longue chevelure blond cendré reste d’un cendré impeccable, il n’y voyait aucune objection. Ce genre de coquetterie était acceptable chez une femme. Mais chez un homme ? Ce n’était pas pour lui en tout cas. Il frémissait rien que d’y songer.

Elle lui achetait des vêtements de marque, et il ne s’en offusquait pas. Les chemises de qualité étaient d’un contact agréable sur sa peau, et les cravates de soie qu’elle lui choisissait témoignaient d’un goût infaillible pour les couleurs. Comme il se souciait peu de ce qu’il portait, cela ne lui coûtait guère de faire plaisir à Louise en ce domaine. Il avait toujours été fier de l’avoir pour épouse. Il était donc légitime qu’elle soit fière de lui.

D’humeur légère, il passa dans le salon où Louise avait mis la table pour le petit déjeuner. De la cuisine lui venait l’odeur des œufs au bacon qu’elle préparait. Une tasse de café chaud l’attendait. Il s’assit, en huma l’arôme corsé, en but une gorgée, amère, satisfaisante.

Le pan de mur vitré amenait l’extérieur jusque dans la maison, et c’était une bien belle matinée. Un soleil radieux brillait dans le ciel bleu, les oiseaux voletaient de branche en branche, des moineaux, des hochequeues, des rouges-gorges aux voix mélodieuses, qui chantaient leur joie de vivre en liberté.

Rory s’abandonna à une douce sensation de bien-être. Il aimait cette vue. Il aimait cette maison. Ce matin, il éprouvait même de l’amour pour sa femme.

Qu’il était donc bon d’être en vie !

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Extrait ajouté par Underworld 2020-08-21T12:31:46+02:00

** Extrait offert par Emma Darcy **

1.

Détruire…

Ce n’était pas une simple pensée, mais un besoin, une obsession, une décision irrévocable qui enflammait le sang de Tamara Vandelier, la poussait vers une politique de la terre brûlée dont rien ne saurait la détourner.

Quatre mois. Les médecins donnaient quatre mois à sa mère. Quatre mois pour que le cancer ait raison de ses forces. Quatre mois pour voir détruite l’œuvre de toute une vie, et avec elle l’ambition sans bornes qui animait le cœur glacé et calculateur de Dame Eleanor Buchanan Traverner Vandelier, d’Eleanor l’invincible, aujourd’hui condamnée, mourante.

Impossible de la voir ces dernières semaines, depuis l’ablation du sein. Eleanor avait établi ses quartiers privés à l’hôpital St. Vincent où des gardes veillaient jour et nuit à sa porte pour refouler les visiteurs indésirables. Et Tamara se savait indésirable entre tous sans qu’il soit besoin de le lui dire.

Mais Sydney était une grande ville, Sydney échappait au contrôle d’Eleanor, et le mur de silence dont elle s’entourait à l’hôpital avait bien vite donné des signes de faiblesse. Séduire un infirmier n’avait été qu’un jeu d’enfant pour Tamara. Il lui avait tout dit sur le diagnostic, les traitements en cours et la manière dont Eleanor y réagissait.

Enfin, le soulagement et la jubilation étaient venus avec la nouvelle de cet après-midi : Eleanor se refusait à poursuivre les traitements et décidait de rentrer chez elle, offrant du même coup à Tamara l’occasion tant désirée d’affronter sa mère pour la dernière fois. Les pièces étaient en place pour cette fin de partie, la reine mise en échec. Ce serait un duel à mort.

Demain, Eleanor serait rentrée.

Demain, le jeu pourrait commencer.

De la terrasse située en haut de la maison, Tamara regardait la mer ; caressée par la brise, elle inspirait l’air pur. De tout ce qu’avait construit son père, seule cette maison en bordure de la plage, au nord de Sydney, lui appartenait — à elle, et pas à Eleanor. Sa mère se souciait comme d’une guigne de cette propriété sans rapport avec la terre fertile et les vignobles renommés de Hunter Valley qui étaient sa passion et son obsession.

Un flot de haine impétueux et noir s’enfla dans le cœur de Tamara. Sur la plage, les vagues se brisaient, dessinant sur le sable de fines guirlandes d’écume, comme des rangs de perles. Pearl Beach — plage des perles. Perles de larmes. Des larmes, il y en aurait en abondance dans les quatre mois à venir. Mais pas les siennes, non. Les siennes avaient été versées depuis longtemps, depuis l’été de ses quatorze ans où elle avait connu la vie, et puis la mort.

A présent, c’était à Eleanor de connaître la mort, de voir ses rêves détruits — ce qui lui ferait plus de mal que de voir sa vie s’achever. Elle connaîtrait la douleur de celui qui perd ce qu’il a de plus cher au monde.

Tamara sourit. Son plan se doublait d’une ironie d’autant plus délectable qu’elle n’échapperait pas à sa mère. Eleanor verrait ce qu’elle avait cru détruire cet été-là resurgir et porter le fruit de la vengeance, le fruit qui scellerait sa défaite.

Et tous les noirs secrets enfouis remonteraient en pleine lumière pour venir hanter ses derniers jours sur terre, sur une terre qui n’obéirait plus à sa volonté. Car c’est la volonté de sa fille honnie qu’Eleanor verrait s’accomplir, de cette enfant de l’ambition, née du marché qu’elle avait conclu avec Max Vandelier — Tamara l’indésirable, la mal-aimée.

Aimer… Une douleur ancienne serra le cœur de Tamara. Elle la refoula. Demain, elle irait reconquérir Rory. C’était le premier pas dans la mise en œuvre de son plan et sa carte maîtresse. Rory…

Elle cria son nom, comme pour l’appeler à elle, puis elle éclata de rire. Emportée par la brise, la vague sonore alla se fondre dans le grondement de la mer qui semblait répéter le nom comme un écho. Rory… Rory… Rory…

Tamara triompherait.

Jamais plus Eleanor ne rirait.

Pas même dans sa tombe.

Détruire…

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