Denis Grozdanovitch

Biographie

Curriculum vitae

1946 Naissance à Paris, par un jour de pluie tenace…

1950 Ma grand-mère Madeleine m’offre ma première raquette de tennis.

1952 Je passe beaucoup de temps dans le fond du jardin en compagnie du chat et du chien. J’observe passionnément les insectes et je fais connaissance avec la solitude – à qui je tenterai par la suite, aussitôt que j’en aurai l’occasion, de fausser compagnie.

1958 Après la visitation d’une pensée fugitive, qui m’apparut comme merveilleuse, je commence à rédiger des carnets.

1959 Je remporte mon premier tournoi de tennis.

1960 Je prends la mesure de mon encombrante concupiscence pour le sexe opposé et je découvre simultanément le plaisir suprême des mélancoliques : contempler la pluie à travers les vitres d’une fenêtre.

1963 Je remporte le Championnat de France junior de tennis.

1964 Je découvre Blaise Cendrars et je réfléchis longuement pour savoir si je préfère être un actif ou un contemplatif, sans parvenir à me décider…

1965 Je voyage beaucoup avec l’Équipe de France de Tennis ; je remporte un certain nombre de tournois et je deviens très vaniteux.

1966 Le jury d’examen décide, à ma requête et ému par mon éloquence, de m’allouer le baccalauréat Philo bien que je n’aie répondu correctement à aucune question.

1967 J’intègre l’IDHEC (Institut des Hautes Études Cinématographiques) et je filme inlassablement mes voisins, les nuages et les canards du Parc Montsouris. On me reproche un défaut de casting.

1968 Depuis le balcon de mon appartement, j’observe avec beaucoup d’intérêt ce que je peux apercevoir des événements de Mai 68, mais, à l’époque, je m’intéresse nettement plus à la botanique.

1969 Je joue beaucoup aux échecs. J’acquière un bon niveau. Je découvre celui qui restera (avec Blaise et bien qu’ils soient très différents) mon maître existentiel et spirituel : John Cowper Powys.

1970 Je parviens enfin à résoudre la question cruciale que je me posais en 1964, en établissant un compromis : je deviens « un Tueur de Temps Actif » - échecs, flâneries, lectures, tennis, marivaudages, et discussions tardives dans les cafés…

1971 Première grosse déception sentimentale. Après notre rupture, ma compagne d’alors devient ethnologue et part étudier attentivement les pratiques des Jivaros (réducteurs de têtes) dans la jungle amazonienne !...

1972 Je découvre le Squash et je joue tous les jours. Je fréquente assidûment la cinémathèque de Chaillot et l’aquarium juste en face où je donne la plupart de mes rendez-vous galants- ayant constaté que la lascivité des grosses pieuvres avait un étrange effet érotique sur la plupart des filles.

1975 Je remporte le Championnat de France de Squash. Naissance de ma fille Emilie. Je lis Proust. Je voyage aux États-unis.

1976 Je découvre La Courte Paume, qui deviendra mon sport de prédilection. Je n’ai toujours pas lu un livre de Marguerite Duras.

1978

* Coup de foudre pour Judith, ma future femme.

* Champion de France de Paume.

1980 Je perds mon titre de champion de France de Squash conservé cinq ans.

1981 Je deviens membre actif de L’École du Chat, association bénévole qui nourrit les nombreux chats errants (vraisemblablement alléchés par les relents tenaces des poissons exotiques) qui se sont réfugiés dans les décombres de L’aquarium du Trocadéro désormais détruit et où je ne peux plus donner mes rendez-vous galants.

1982 Après la troisième tentative, je ne parviens toujours pas à terminer l’Ulysse de James Joyce.

1984

* Je remporte le championnat de France de Paume et je continue de rédiger inlassablement mes carnets de notes.

* Je n’ai toujours pas lu un livre de Marguerite Duras.

* Je prends l’habitude de conserver toujours sur moi mon petit Minox et commence à prendre beaucoup de clichés photographiques – essentiellement des façades, des portes, des fenêtres, des terrains vagues et des lieux tombés en déshérence.

1989 Je voyage de nouveau aux États-unis, puis je séjourne longuement à Corfou où j’enseigne le tennis et me baigne tous les jours dans des criques désertes.

1990

* Je lis de la philosophie et découvre mon philosophe spéculatif préféré : Jules de Gaultier qui me plait surtout parce qu’il n’exige nullement que ses lecteurs prennent sa philosophie au sérieux.

* Je publie divers textes dans diverses revues dont la NRF de Gallimard, sous la houlette de Jacques Réda.

1991 Nous restaurons, Judith et moi, une ancienne ferme en Aveyron où nous habitons la moitié de l’année. Nous y installons une douche de plein air dont raffolent les citadins.

1992 Beaucoup plus affecté par la mort de mon chat que par l’écroulement de l’empire soviétique.

1993 Mariage avec Judith.

1994 Rien de particulier.

1995 J’écris un recueil de poèmes « secs » intitulés : « La Faculté des Choses ».

1996 Je n’ai toujours pas lu Marguerite Duras.

1997 Désorienté par la mort de mon père.

1999 Mort de ma sœur Isabelle, dans une chambre d’hôpital sordide, tandis qu’en contrebas, sur un terrain vague, des enfants font voler un cerf volant rouge et qu’un chien vaque à ses affaires de chien…

2000 Je découvre avec stupéfaction l’œuvre de WG Sebald. Je commence à collecter les textes de mes carnets en vue d’un recueil.

2001 Durant l’été, je rédige, presque sans y penser (comme guidé par une sorte de fil onirique) le « Petit Traité de Désinvolture ».

2002

* 23 août : parution du « Petit Traité » aux éditions José Corti.

* Septembre : beaucoup d’articles élogieux dans la presse, je reçois des lettres de lecteurs.

* Octobre : le livre est nominé pour le prix Renaudot Essais, pour le prix Décembre, fondation Wepler, Cultures et Dépendances, Cazes, Grand-Gousier à Saumur, France Télévision. Le livre n’obtient aucun de ces prix.

* Novembre : le livre reçoit le prix de La Société des Gens de Lettres. Classé N° 7 dans la sélection des Vingt meilleurs livres de l’année par le Journal Lire.

* Décembre : je remporte le tournoi d’hiver de Paris à la Courte Paume.

2003

* Je tente de me remettre de toutes ces émotions qui ont bousculé le train paisible de mes habitudes, en me consacrant à mon élevage d’escargots. J’observe attentivement la manière qu’ont ces sages petites bêtes de rentrer dans leur coquille à la moindre alerte !

* Je commence à rédiger un nouveau livre et j’envisage d’abandonner définitivement le projet de lire un jour Marguerite Duras…

2004

* Durant l’été je termine mon nouveau recueil «Rêveurs et Nageurs » où j’aborde le sujet de la présence des morts et leur influence sur nos pensées intimes.

* Je suis invité dans bon nombre de salons littéraires où j’observe attentivement l’égocentrisme de mes confrères en écriture (je prends des notes).

* Judith et moi achetons une maison au bord de l’Yonne, lisons et devisons interminablement sous les arbres, au bord de l’eau, de temps à autre ébloui par la flèche bleue au ras des flots d’un martin-pêcheur !

2005

* Mon recueil « Rêveurs et Nageurs » me vaut un nombreux courrier auquel je tente de répondre. Je reçois aussi un certain nombre de manuscrits qui me laissent désemparé, et je médite sur cette déclaration d’un certain Octave Delepierre (Histoire littéraire des fous éd. Trübner, Londres, 1860, P.260) : « La folie d’écrire est particulièrement une des maladies mentales de cette partie du globe, effet probable d’un excès de civilisation ». Pour ma part, je persiste malgré tout dans ma folie privée et commence d’écrire « Brefs aperçus sur l’éternel féminin ».

* Je prends la décision irrévocable de ne plus me déplacer qu’en vélo dans Paris.

* Après quelques réticences, je suis finalement ébloui par le génie littéraire de Pierre Michon.

2006

* Parution début avril, chez Robert Laffont, des « Brefs aperçus » qui me valent ce que j’escomptais : un certain nombre de nouveaux contacts féminins...

* Au bord de l’Yonne, négligeant pour un temps les travaux de jardins, je commence de rédiger mon prochain livre, à paraître aux éditions Jean-Claude Lattès : « L’art de prendre la balle au bond, précis de mécanique gestuelle et spirituelle ».

* A mes nombreuses heures perdues, je songe, contemplant les remous du courant sur la rivière, à écrire un ouvrage répondant aux vœux de Charles Nodier : « ...un livre fait hors de toutes les règles communes de la composition et du style et dont il est impossible ou très difficile de deviner le but, quand il est arrivé que l’auteur eût un but en l’écrivant. »

Denis Grozdanovitch