Commentaires de livres faits par Shiravee
Extraits de livres par Shiravee
Commentaires de livres appréciés par Shiravee
Extraits de livres appréciés par Shiravee
Fervent adorateur de ces animaux, il avait l’air tellement anxieux quant à l’état de la bête que je revins en traînant des pieds dans mon bureau.
— Comment va Routoutou ?
Ça m’agaçait même de prononcer ce nom stupide.
Priya releva les yeux avec un grand sourire.
— C’est Brian qui demande ? La véto avait espéré pouvoir la réparer en relâchant les tissus à l’intérieur de la rotule, mais ils ont dû stabiliser la tubérosité tibiale avec des broches.
Je lui adressai un regard sévère, puis retournai auprès de Brian qui rôdait à l’accueil.
— Le chien va bien.
Il leva le pouce puis se retira dans son bureau.
Priya était en train de ricaner quand je revins, donc je lui tirai bruyamment la langue.
— Des boules à souhait, m’expliqua-t-il. Ils auront la saveur que vous souhaitez.
— Et ?
— Et rien du tout. Il n’y a pas de nourriture améliorant l’humeur, ce soir.
Puisque c’était ça, je me servis. Un de mes duos favoris de saveurs explosa sur mes papilles et j’en gémis.
Le serveur me jeta un regard en coin.
— Ça, ça n’est pas un gémissement de chocolat. Trop direct pour de la vanille ou du citron.
Il se tapota les lèvres du doigt.
— Aha ! s’exclama-t-il. Bacon et sirop d’érable.
— Qu’est-ce qui m’a trahie ?
Bien qu’il existe des Nefesh capables de lire dans les esprits, ils étaient rares et avaient tendance à être lourdement sédatés. Ce gars-là était trop joyeux.
— Je connais les gémissements, trésor.
Nous fixâmes tous deux l’objet offensant dans ma main.
— C’est une épée.
— C’est une putain de bite que tu viens de faire apparaître, gronda-t-il, et son expression s’assombrit sous l’effet de la fureur. Tu es nefesh ?
Peut-être que j’étais en réalité inconsciente et que tout ça n’était qu’un rêve induit par la fièvre ?
— Ben voyons, répondis-je. J’ai pensé animer un peu cette fête rasoir avec une tête de noeud géante. Je parle de l’épée, pas de toi. Je l’ai portée sous ma robe pendant tout ce temps en attendant le bon moment pour la sortir. Hilarant, non ?
OK, question mensonges, j’avoue qu’on était quelque part entre « j’ai posté le chèque ce matin » et « je ne vais pas jouir dans ta bouche » en matière de crédibilité. Mais la logique et le raisonnement cohérent s’étaient fait la malle devant le pénis transformé en arme.
— Bien sûr. Tu l’as portée sous ta longue robe rouge qui invite à la débauche et sans ligne de démarcation de sous-vêtements ? rétorqua Levi d’un air sombre.
— J’ai un soutien-gorge.
Arrête de parler, Ash. Je serrai le gode à m’en faire blanchir les
articulations. Si j’étais réellement magicienne, était-ce ça que j’avais produit ? D’accord, voyons le bon côté des choses. Je pourrais devenir une justicière bifflant les méchants de ma ville.
— Un tatoo pouf, chérie. Quelque chose de flamboyant et de joli à regarder pour ton Sugar Daddy quand il te met une fessée, répondit-elle en mimant avec enthousiasme le geste avant de s’écrouler de rire.
C’était tellement inapproprié, mais je me fendis tout de même d’un sourire tant elle était ridicule, et elle m’adressa un clin d’oeil.
Je tâtai le tatouage avec précaution.
— Voyager, une carrière riche et épanouissante, découvrir que je suis marquée d’un symbole religieux et patriarcal. Non. Ça ne fait pas partie des buts dans ma vie. Cela dit, un point bonus pour le côté Servante Écarlate.
— Hein ?
J’étais la juive la plus profane qui soit. Sérieux, je me préparais des sandwichs bacon-laitue-tomate avec du pain challah. Ce qui était en vérité le meilleur pain avec lequel les confectionner, car son léger goût sucré se mariait parfaitement avec le côté piquant du bacon presque brûlé.
J’arrêtai de saliver et me concentrai sur sa réponse.
— Le tatouage, m’expliqua-t-elle. Peu commun, mais on voit toutes sortes de façon d’exprimer sa religion dans mon job.
— Attendez. Quel tatouage ?
— Votre étoile de David ?
Devant mon regard interdit, elle tapota un endroit en bas à droite de son crâne. Précisément là où je m’étais assommée.
— Sous vos cheveux, poursuivit-elle. Nous avons rasé un petit carré pour pouvoir mieux examiner la bosse pendant que vous étiez inconsciente.
[...]
La doctoresse me dévisagea comme si elle était sur le point d’appeler un centre de désintoxication si je ne pouvais pas me rappeler de m’être fait tatouer la tête, et même Priya avait l’air inquiète.
Je me forçai à rire.
— Oh, celui-là. Il doit remonter à un an, je dirais.
Le Docteur Samuels fronça les sourcils.
— C’est dommage que le coup ait laissé une cicatrice en travers.
— Vraiment dommage. Cependant, je suis sûre que Dieu comprendra. Ça me semblait approprié de ponctuer cette déclaration avec quelque chose de religieux ; j’agitai donc la main en signe de bénédiction.
— Borei p’ri hagafen.
Je venais de réciter la bénédiction pour le vin dite lors du Sabbat, mais c’était la seule phrase un tant soit peu religieuse dont j’arrivais à me souvenir.
— Borei p’ri hafagen, répondit le Docteur Samuels.
Priya laissa échapper une quinte de toux étouffée, les épaules tremblantes. Maintenant que nous nous étions toutes deux bénies avec des raisins…
Elle rouspéta, mais j’invoquai les privilèges allant avec ma situation de meilleure amie sur son lit d’hôpital et obtins ce que je voulais.
J’en gémis presque de soulagement.
— Donne-moi une bonne raison pour laquelle Aiden ne te plaît pas, exigea-t-elle.
— Il part du principe que sa bouche est faite pour parler. À gauche. Plus haut. Plus haut. Ici. Encore. Non, ici. Aaah.
Priya arrêta de gratter.
— Tu es impossible.
— Parfait. Canalisons tout ça dans une réponse qui va faire exploser la tête de Levi, déclarai-je en me reposant à nouveau contre les oreillers. Prends le message.
Son sourcil gauche tressaillit. Son désir de m’envoyer paître parce qu’elle n’était pas ma secrétaire entrait en conflit avec le fait qu’elle ne laissait jamais qui que ce soit toucher à son ordinateur portable.
— Dicte-le-moi. Et uniquement pour cette fois, et seulement parce que tu es pathétique.
Elle ne me quitta pas des yeux.
— C’est ça, répondis-je en me raclant la gorge. « Du bureau d’Ashira Cohen, des Enquêtes Cohen. »
Priya tapa consciencieusement ma réponse :
" Cher Chef Exalté,
(Heureusement, pas le mien.)
Permettez-moi de vous rafraîchir la mémoire à propos du gala de charité au Monde de la Science, peu de temps après le Nouvel An, où j’ai eu la malchance de vous croiser. C’est difficilement ma faute si vous avez à la fois un côté compétitif assez moche et visez comme une merde, et avez échoué à me battre au lancer de balle d’eau. Me devant exactement 1537 $, vous m’avez tendu votre carte de crédit et m’avez indiqué avec grandeur de
« faire des folies et de boire jusqu’à plus soif ».
Vous avez toujours su jouer avec les mots, monsieur Montefiore. Si vous vouliez bien vous donner la peine de vérifier votre relevé de carte de crédit ainsi que votre mémoire, vous vous rappelleriez que je n’ai jamais acheté lesdites boissons. Au lieu de ça, je vous ai indiqué que je voulais avoir accès à la base de données de la Maison et bien que vous m’ayez adressé un sourire suffisant, tel le trou du cul condescendant que vous êtes, vous n’avez pas spécifiquement refusé.
De fait, j’ai transféré le montant de 1537 $ qui m’était dû dans
l’acquisition d’un accès premium aux archives de la Maison Pacifica, pour un total de 1200 $ à l’année.
Merci de bien vouloir rétablir mon compte et de me remettre
immédiatement le solde de 337 $ à l’adresse de mon bureau. Les intérêts courront sur tout montant impayé au-delà de trente jours.
Je vous prie d’agréer mes plus sincères salutations,
Ashira Cohen "
— Est-ce que ça serait abusé d’ajouter « P.S. : Allez vous faire voir » ?
— Ne t’abaisse pas à son niveau, me conseilla Priya en cliquant sur « envoyer ».
— Voilà ce que ça me rapporte, de me plier aux règles. Des accusations de fraude et l’impossibilité de me laisser oublier cette histoire d’oeufs du Camp Ruach.
— Oui, quoi ? demandai-je en serrant plus fort la couverture autour de mes orteils.
— Tu as reçu un e-mail.
Je lui indiquai de l’ouvrir, puisque j’avais lâché l’affaire il y avait des années concernant les mots de passe lorsqu’il s’agissait d’elle.
— Quelle missive de Sa Seigneurie, cette fois ?
Priya éclata de rire. Pour un canon d’un mètre soixante d’origine indocanadienne, aux cheveux noirs coupés au carré et aux yeux verts, elle riait comme un âne asthmatique.
Elle cliqua sur l’e-mail et le lut d’une voix bourrue.
— Chère Mademoiselle Cohen, c’est réellement un honneur et un plaisir que vous, en tant que détective privée d’un certain renom, portiez un tel intérêt à la base de données de notre Maison au point de créer un profil de niveau Platine pour exploiter nos ressources. Bien que récupérer mon numéro de carte de crédit afin de payer le compte susmentionné (Bonjour, Priya) soit un joli geste, cela constitue une fraude et un vol, et votre compte a été clôturé. Par respect pour le fait que nous nous connaissons depuis longtemps, et parce que ce n’est pas amusant d’écraser les petites gens, je suis généreusement enclin à mettre de côté toute idée de poursuites. Si d’aventure, vous souhaitiez me payer, et permettez-moi de préciser que
j’entends par là par des moyens légaux – non à l’aide de reconnaissances de dettes, d’oeufs ou de faveurs sexuelles, aucun d’entre eux n’ayant d’attrait –, la Maison Pacifica sera à l’évidence ravie d’examiner votre demande de compte légal.
Sincères salutations, Levi Montefiore, Directeur de la Maison Pacifica."
Priya conclut sa lecture et commenta :
— Il m’a mise en copie. J’ai apprécié la dédicace.
— Cet espèce de... Une fraude ? Des faveurs sexuelles ? m’écriai-je en appuyant mon doigt contre l’ordinateur comme si j’allais pouvoir atteindre Levi à travers et le poignarder. Il devrait se sentir chanceux.
— Eh biiiiiiien…
Je fixai bouche bée ma traîtresse de meilleure amie, qui haussa les épaules.
— Ces derniers temps, tu as vécu comme une nonne juive. Ce qui n’existe même pas. Avant que tu n’ailles distribuer des faveurs sexuelles à n’importe qui…
— Ouais. Le plan, c’est d’écarter les cuisses comme une putain à touristes.
— Tu devrais peut-être remonter à cheval et t’entraîner à certaines positions. Kai m’a envoyé un message tout à l’heure. Aiden et lui finissent tôt ce soir.
— Je ne vais pas coucher avec Aiden.
Priya pinça ses lèvres rose bonbon.
— Il est mignon et, bizarrement, il t’aime bien, ce qui est incroyable étant donné que tu ne fais rien de plus que grogner deux-trois mots à son attention.
— Pourquoi est-ce que tu sors avec Kai ? C’est l’équivalent humain de la Vache qui rit.
— Il est sympa.
Victoria m’accueillit dans une tenue de yoga violette en bambou qui devait être très confortable pour bouger, sauf que je ne pensais pas qu’elle aille en cours complètement maquillée, les cheveux striés de mèches blondes ramenés en chignon et avec de larges diamants brillants à ses oreilles.
Atteindre la paix intérieure grâce à Dior. Namasté, bande de connasses.
Cette lettre ne te trouvera sans doute pas là où j’aspire à te voir, mais encore auprès de ta famille, à l’ambassade d’Antille, où tu continues ta convalescence. Ou peut-être es-tu chez nous, dans ce château où nous nous sommes mariés. Te rappelles-tu ce moment ? Tu étais une mariée si délicate, bien trop pour la rudesse de ce monde dans lequel je t’ai propulsée, bien malgré toi.
Voici mon souvenir de nous, pour toi : ta main dans la mienne, fine et tremblante, alors que ton père te confie à moi. Je tremblais aussi, j’étais nerveux et un peu inquiet. S’unir à une personne que l’on connaît à peine a quelque chose d’effrayant, même pour le kaezer de Sibérion.
Et toi, quel souvenir de nous m’offriras-tu ? Auras-tu le coeur à m’écrire et éloigner la solitude d’un camp militaire sur le pied de guerre ?
Les soldats sentent l’approche du conflit, la rébellion de Lapan s’étend au comté tout entier et une guerre civile menace. Voilà le pays qui est désormais le tien, Eugénie. Voilà l’avenir que je déroule devant toi. M’en veux-tu ? À quel point me blâmes-tu pour ta présence ici ?
Le temps me manque pour t’exprimer les pensées qui m’agitent en cet instant. Néanmoins, sois assurée de mon dévouement ».
Aucune signature ne vient conclure la missive, cependant, la marque du kaezer y est imprimée partout.
jusqu’à son coeur, à nouveau, la faisant tomber amoureuse de lui, une seconde fois. Sa patience envers elle, l’honnêteté de ses sentiments, malgré son amnésie, sa retenue sont autant d’éléments qui ont plaidé en sa faveur.
A familiar redhead was perched behind the bar, but I’d only taken a few steps toward her when voices rang out.
“It’s Kit!”
“Hey, Morris, over here.”
“Kiiiit!”
I swerved off course, heading toward the largest group in the pub, who were clustered around two tables that had been pushed together.
“Nice timing, Kit,” Zora declared, slapping me on the back as I stopped beside her. Despite being a five-foot-nothing sorceress, she delivered her playful smack with the force of an MMA fighter. “We need your expertise.”
I arched my eyebrows. “Are you debating whether or not Deckard was a replicant? I think we all know he was.”
Blank stares and snorts sounded from the rest of the group, which included a stocky telekinetic, several other Arcana mythics, and a hydromage—all bounty hunting combat specialists.
“Okay, so, hypothetically,” Zora began, “if a small bounty team had just taken down a pair of vampires, and while they were cleaning up the mess, someone’s dog happened to snatch a dismembered hand before we—I mean, the hypothetical team noticed, would it be legal or illegal under MPD law to use magic to get the hand back?”
I gave her a squinty look. “Where is this hypothetical scenario taking place?”
“In an alley beside a park. But it’s late at night.”
After a moment’s thought, I said, “I guess it would depend on the magic used.”
“Telekinesis,” Drew said. Coincidentally, he happened to be a telekinetic.
I shrugged. “As long as no one saw. That’s all that really matters.”
The group exchanged looks.
“Right.” Zora nodded. “But what if, hypothetically of course, the telekinetic didn’t realize the dog’s owner was … uh … basically right there.”
I groaned. “Seriously?”
“It was dark! He blended in!” Drew protested defensively, then added, “Hypothetically.”
“So, hypothetically,” I said, “some poor shmuck going for a late-night puppy stroll not only got to see a gory severed hand in his precious pooch’s mouth, but said hand then flew off into the night of its own volition right before his eyes?”
Silence answered me.
“It wasn’t an off-leash park,” the hydromage, Laetitia, tossed out. “The dog owner broke the law first.”
“That definitely justifies the years of horrific nightmares he’s bound to suffer.” I rolled my eyes in an excellent Lienna impression. “What did he do after the hand floated away?”
“He just sort of stood there for a minute,” Drew muttered. “Then he put the leash on his dog and turned around to walk in the other direction.”
Probably questioning his sanity and/or whether someone had spiked his water supply.
“Assuming you included all relevant details in your report,” I told them, “it’d be a minor guild fine for reckless magic use. But if the traumatized dog owner shows up on The National to warn the world about an autonomous-zombie-limb invasion …”
— Vraiment ? Je ne sais pas… Edith tient extrêmement bien la chandelle, comme quand elle nous a parlé de ses cors sur le chemin du retour ? Je n’aurais jamais abordé le sujet lors d’un premier rendez-vous, mais j’ai apprécié sa sincérité.
Je lui dis que je me suis fait piquer par une abeille.
— Sur les lèvres ? s’enquiert-elle, dubitative.
— Ouais, c’était bizarre, elle est entrée tout droit par la fenêtre de la cuisine.
Ma voix vacille.
— Maintenant, si vous voulez bien m’excuser, je voulais lire…, déclaré-je en attrapant le premier livre à portée de main sur l’étagère à côté de moi.
Ce livre…
Je regarde la couverture : Techniques d’élevage avancées.
Elle jette les mains au ciel et s’éloigne.
— C’est étrange comme choix pour une lecture légère. Tu sais que c’est un livre sur l’élevage des animaux, pas vrai ? Aucun livre ne va t’apprendre à trouver un homme bien élevé.
essayer de repérer Jack dans la ferme. J’observe la fenêtre du bureau à l’étage, la fenêtre de la cuisine, la fenêtre de la chambre, et ainsi de suite. Il est introuvable. Après cette émoustillante mission de reconnaissance, je fais un peu de yoga pour me calmer les nerfs.
Je pense à toutes les façons dont je pourrais saboter sa vie, des plus extrêmes (empoisonner son bain de bouche) aux plus banales (préparer du déca le matin pour qu’il soit en manque de caféine). Je me repasse en boucle notre dispute dans son bureau et j’insère des réponses différentes.
Une partie de moi aurait préféré lui envoyer un classique va te faire foutre, simple et efficace. Peut-être que je lui dirai la prochaine fois que je le verrai.
Je mordais ma lèvre inférieure. M’accrochais à mon torchon.
Et puis il a soulevé le bas de sa chemise de travail pour essuyer un peu de sueur sur son visage et Edith m’a surprise, penchée au-dessus de l’évier, les yeux fermés pendant que je récitais ce que je me rappelais du Notre Père, c’est-à-dire à peu près les premières lignes. En général, je perds le fil après la partie sur le pain.
— Tu fais une crise cardiaque ou quoi ?
— Crampes menstruelles, ai-je menti.
— Va t’allonger et repose-toi. Je vais finir de les essuyer.
— Voilà ! déclare-t-elle fièrement en dégageant ses cheveux noirs de son visage. Tu m’as chronométrée comme je te l’ai demandé ? J’ai compté jusqu’à 35 Mississippi, ce qui fait quatre minutes pour les chiens !
Alfred lui aboie en pleine figure, manifestement heureux de voir qu’elle ne se noyait pas comme il le pensait, et elle ne bronche même pas, contrairement à ce à quoi je m’attendais.
— Bon, dans ce cas, continue-t-elle, tu devras me croire sur parole quand je te dis que je viens d’établir un record du monde.
Je me retourne et je vois Alfred trotter derrière moi à distance. Il se cache à moitié derrière un buisson. S’il le pouvait, il porterait une paire de lunettes de déguisement avec un nez et une moustache comiquement démesurés. Je continue à marcher et lui aussi. Je m’arrête, il s’arrête et s’assied, la langue
endante, les yeux brillant d’un amour idiot.
— Rentre à la maison, Alfred ! crié-je, pensant que mes mots feront mouche.
Il ne bouge pas. Sa queue se balance d’avant en arrière dans l’herbe.
— Allez ! insisté-je, agitant mes bras de façon menaçante. Va-t’en ! [...]
Ce n’est pas comme si j’avais encore si peur de lui. Ces derniers jours, je me suis même habituée à l’avoir dans les parages. Il est toujours dans la ferme, il dort sur son coussin ou sous la table de la cuisine, je le nourris et remplis son bol d’eau. Tout à l’heure, il est venu se coucher près de mes pieds pendant que je cuisinais, et je ne l’ai remarqué que lorsque j’ai failli le piétiner.
Il y a toutefois une différence entre la tolérance et l’amitié effective. Je préfère la première, mais Alfred n’est clairement pas d’accord. Il se rapproche de moi et trotte à mes côtés. Je le regarde avec des lèvres pincées, et il me donne un petit coup de museau dans la paume, comme s’il disait : Tu vois ? Je suis gentil. S’il te plaît, aime-moi. Il est plutôt mignon avec ses oreilles tombantes et son pelage doré. Bon sang.
— Comment ça va, ce matin ? lui demandé-je avec un petit sourire compatissant.
L’espace d’une seconde, sa bouche commence à former une réponse générique, mais elle doit apercevoir quelque chose qu’elle reconnaît dans mon expression car elle rit doucement et secoue la tête.
— Franchement ? J’ai connu mieux.
Je hoche la tête.
— Pareil pour moi.
— Ce sera tout ?
Elle désigne la boîte de cacahuètes. Je baisse les yeux et la lumière accroche ma bague en diamant. Il s’agit du dernier lien qui me rattache à la vie que j’essaie de laisser derrière moi, le dernier vestige d’un homme qui, pendant cinq ans, m’a couverte de cadeaux étincelants tout en faisant de son mieux pour ternir mon propre éclat. Je pourrais la vendre et garder l’argent
comme sécurité, Dieu sait que j’en ai besoin, mais je m’y refuse. Je ne veux plus de son argent. D’ailleurs, j’aurai bientôt le mien. Je viens juste d’être embauchée au Blue Stone Ranch. Je m’y vois déjà : moi dans une salopette en jean, un bandana noué autour du cou, un épi de blé entre les dents. Je serai la meilleure employée que ce ranch ait jamais connue, dès que j’y serai.
Sans l’ombre d’une hésitation, je fais glisser le lourd bijou le long de mon doigt et le laisse tomber sur le comptoir en linoléum ébréché avec un claquement.
— Tirez-en un bon prix, lancé-je en secouant la boîte de cacahuètes. J’ai eu mon compte.
— Au bahut.
— Pour quoi faire ?
Je regarde Misha, qui acquiesce pour m’indiquer que je peux annoncer la couleur. J’ouvre le sac posé sur mes genoux, j’en sors une bombe de peinture grise et je me tourne vers Ten.
— Parce que l’année est presque finie et que j’ai encore quelques petites choses à dire.
Ses yeux semblent sur le point de sortir de leurs orbites.
— Quoi ? explose-t-il.
JD me dévisage, sous le choc.
— C’était toi ?
Je croise le regard de Manny, et je peux voir qu’il réfléchit à cent à l’heure. Il est sans doute en train de réaliser que c’est moi qui ai écrit sur son casier.
"Tu n’es pas seul. Ça va s’arranger.
Tu es important et personne ne peut te remplacer.
Accroche-toi."
Je leur explique tout. Comment ça a commencé. Les raisons qui m’ont poussée à faire ça. Ce que j’ai prévu de faire ce soir.
— Vous êtes mal assortis, lance ma soeur en arrivant dans l’entrée.
Mal assortis ? Pourquoi ? Parce que sa cravate ne va pas avec ma robe ? Elle porte son minuscule short de pyjama, sans doute en l’honneur de Misha, et je suis soudain prise d’une envie irrépressible de mettre du vinaigre dans son bain de bouche.
Avant que j’aie le temps d’ouvrir la bouche pour lui lancer une
remarque assassine, Misha se tourne vers elle et pose une main sur son coeur d’un air exagérément ému.
— On est assortis ici.
Je ne peux pas m’empêcher de ricaner. Ma soeur lève les yeux au ciel et ma mère secoue la tête en souriant.
Je relève la tête et je vois Lyla debout à côté de moi.
— Rien qu’à te regarder, ça me coupe l’appétit.
Là-dessus, elle attrape ma brique de jus et la renverse sur moi. Je me lève précipitamment en poussant une exclamation de surprise. Le liquide glacé coule le long de mes jambes. Je lance à Lyla un regard haineux et je la pousse violemment en arrière. Elle trébuche, mais revient aussitôt sur moi pour me pousser à son tour.
[...]
Le jus d’orange colle à mes jambes et coule à l’intérieur de
mes chaussures, les murmures sont assourdissants autour de moi, et pourtant mon coeur se réchauffe. Misha est en train de prendre ma défense devant tout le monde.
[...]
Misha parvient à échapper à JD et regarde Trey comme s’il rêvait de le cogner jusqu’à lui ôter définitivement l’usage de la parole. Mais au lieu de ça il tourne les talons, me prend la main et me guide hors de la cafétéria.
— Monsieur Laurent ! crie la principale dans notre dos.
Misha l’ignore et m’entraîne à sa suite dans les toilettes pour hommes. Il attrape plusieurs essuie-mains en papier, qu’il passe sous le robinet. Il me pousse ensuite contre le mur, s’agenouille et essuie délicatement le jus d’orange sur ma jambe.
Des larmes me montent aux yeux tandis que je le regarde s’occuper de moi avec tendresse. Il en fait autant avec l’autre jambe puis il se met à délacer mes chaussures.
— Est-ce qu’on est encore amis ? Parce que j’ai besoin de Misha, pas de Masen.
J’avais tort hier soir. Tout en lui me rappelle Misha. Ils sont bel et bien une seule et même personne, et j’ai besoin de mon ami.
Il se relève, mes Converse tachées à la main, et il m’entraîne dans le couloir.
— Où est-ce qu’on va ?
— Loin d’ici.
[...]
Je ne sais pas si je suis prête à lui pardonner ce qu’il m’a fait, mais j’ai envie d’être avec lui, de le voir, de sentir son odeur, sa présence… Il n’a même pas besoin de me toucher. Rien que le fait d’être près de lui m’apaise. Peut-être parce que je suis vulnérable ? En tout cas, je ne voudrais être nulle part ailleurs à cet instant.
Elle semblait beaucoup, beaucoup plus sérieuse que la fille avec qui je gloussais en papotant de fausses cartes d’identité, de runes anti-boutons et de sortilèges pour cheveux brillants.
Elle n’avait même plus les cheveux roses ; ils étaient maintenant bruns et lustrés, tirés en un chignon soigné.
entraînement lui imposait plusieurs centaines de squats quotidiens quand il se retourna et me surprit en plein reluquage. Pendant une très brève seconde, je crus voir un éclair d’amusement sur son visage.
— Vous profitez de la vue ? grogna-t-il.
Je haussai les épaules ; il m’avait attrapée en flagrant délit, pas besoin de nier.
— Ouais. Grave, répondis-je.
— Et qu’est-ce vous diriez si je me permettais de vous porter la même attention ?
— Oh, je suis pour la parité.
Je fis volte-face pour qu’il puisse m’observer sous le même angle. Je ne reçus en réponse qu’un ricanement moqueur tandis qu’il repartait dans l’autre sens. Eh bah, fréquenter ce type ne devait pas faire du bien aux complexes.
— Engage un de tes laquais.
— C’est un boulot délicat.
— Et tu me fais confiance à moi ?
Si je haussais plus les sourcils, ils allaient s’envoler.
— Moins qu’à tous les autres. Mais tes compétences font que tu es la seule qui sois qualifiée.
Ah. Il voulait que j’enquête sur cette ombre. Ça pourrait s’avérer énorme. Sauf qu’il s’y prenait de sa façon despotique typique. Laissons-le mariner.
— Oh oui, bébé, continue avec tes compliments maladroits, ça me rend toute chose.
Levi sortit une petite boîte de pâtisserie de sa mallette et la fit glisser sur mon bureau.
— Un gage de réconciliation.
J’ouvris le couvercle. Un beignet à la confiture.
— Un seul ? s’exclama Priya.
— Je ne savais pas que tu serais là.
— Mouais, répliqua-t-elle avec impertinence avant de quitter la pièce.
Ooooh, Levi allait tellement le payer cher. Même lui avait l’air inquiet.
— Tu penses qu’un beignet à la confiture va apaiser les choses ?
demandai-je.
— Ce sont tes préférés.
— Depuis quand ?
En vrai, oui, totalement, mais comment le savait-il ? Est-ce qu’il
m’espionnait ?
Il tendit la main pour me montrer la minuscule cicatrice argentée à la base de son pouce.
— Depuis que tu m’as embroché avec une fourchette pour avoir le dernier quand on avait seize ans.
— L’exubérance de la jeunesse.