Tête Bêche
Auteur
- Jean Péchenart (Écrivain)
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extrait
Maintenant imagine le carré à bêcher. Un rectangle de huit mètres sur six, délimité par d'épaisses bordures de ciment d'un côté, de granit de l'autre. Rectangle au milieu des arbres, comme le Reflecting Pool de Bill Viola avec de la terre à la place de l'eau. Tu te reflètes dans cette terre que tu vas bêcher pour y semer des légumes et des fleurs. Tu as le temps maintenant à la retraite. Et puis c'est bon pour le myocarde. Tu attaques la terre noire, ligne après ligne, par morceaux massifs que tu retournes en grosses mottes que tu fends et c'est lourd car la terre s'est tassée depuis le temps qu'il a plu et replu et les grosses mottes font des mottes plus petites que tu fends à leur tour l'une après l'autre avec le côté tranchant de la bêche et de temps en temps tu te penches en veillant à plier les genoux afin d'épargner ton dos et tu enlèves les racines de liseron que tu jettes dans un sac ou parfois tu déterres d'autres racines ou de petits objets que tu nettoies entre tes doigts pour mieux les voir, pour les lire pourrait-on dire, et tu les mets de côté. De temps en temps tu fais une pause, toutes les trois ou quatre mottes et tu regardes autour de toi. C'est mars encore mais il fait beau, le roi n'est pas ton cousin.
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Résumé
« J'avais deux bêches, deux bêches à dents. Motoculteur non pas de motoculteur c'est trop rapide trop bruyant. J'avais deux bêches à dents, j'en ai même trois à présent. Celle de la maison d'avant, qui n'a plus que trois dents la quatrième est cassée ce qui n'en fait pas un trident pour autant. Celle de la maison d'aujourd'hui que j'ai trouvée dans la cabane du bas et qui neuve devait être d'une jolie couleur rouge car il en reste un peu sur le haut du fer, mais trop fragile, les dents se tordent ça bêche mal. J'en ai maintenant une troisième flambant neuve, de couleur noire qui s'en va peu à peu laissant place au brillant vif de l'acier, quatre dents solides et profilées comme des épées pour piquer ou tailler trancher terre, fendre les mottes. Une vraie bêche de soldat jardinier. » Jean Péchenart, homme de lettres subtil et profond, nous livre ici une méditation fouillée sur l'art de vieillir et de faire son jardin. Avec texte En bêche : Flûte alors.
Nombre de pages: 120 pages
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