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Mais vers la quatrième décennie du XXe siècle, tout les principaux courants de la pensée politique étaient des courants de doctrine autoritaire. Le paradis terrestre avait été discrédité au moment exact où il devenait réalisable.
Afficher en entierIl se demanda, comme il l'avait fait plusieurs fois déjà, s'il n'était pas lui-même fou. Peut-être un fou n'était-il qu'une minorité réduite à l'unité. A une certaine époque, c'était un signe de folie que de croire aux révolutions de la terre autour du soleil. Aujourd'hui, la folie était de croire que le passé était immuable. Peut-être était-il le seul à avoir cette croyance. S'il était le seul, il était donc fou. Mais la pensée d'être fou ne le troublait pas beaucoup.L'horreur était qu'il se pouvait qu'il se trompât.
Il prit le livre d'Histoire élémentaire et regarda le portrait de Big Brother qui en formait le frontispice. Les yeux hypnotiseurs le regardaient dans les yeux. C'était comme si une force énorme exerçait sa pression sur vous. Cela pénétrait votre crâne, frappait votre cerveau, vous effrayait jusqu'à vous faire renier vos croyances, vous persuadant presque de nier le témoignage de vos sens.
Afficher en entierNaturellement il chantait avec les autres. Il était impossible de faire autrement. Déguiser ses sentiments, maîtriser son expression, faire ce que faisaient les autres étaient des réactions instinctives. Mais il y avait une couple de secondes durant lesquelles l'expression de ses yeux aurait pu le trahir.
Afficher en entier"Nous savons que jamais personne ne s'empare du pouvoir avec l'intention d'y renoncer. Le pouvoir n'est pas un moyen, il est une fin. On n'établit une dictature pour sauvegarder une révolution. On fait une révolution pour établir une dictature."
Afficher en entierIl y avait une toute petite bibliothèque dans l'autre coin et, déjà, Winston se dirigeait de ce côté. Elle ne contenait que des livres sans intérêt.
La chasse aux livres et leur destruction avaient été faites avec autant de soin dans les quartiers prolétaires que partout ailleurs.
Il était tout à fait improbable qu'il existât, quelque part dans l'Océania, un exemplaire de livre imprimé avant 1960.
Afficher en entierIls parlaient de la loterie. Winston, trente mètres plus loin, se retourna.
Ils discutaient encore avec des visages pleins d'ardeur et de passion. La loterie et les énormes prix qu'elle payait chaque semaine, était le seul événement public auquel les prolétaires portaient une sérieuse attention.
Il y avait probablement quelques millions de prolétaires pour lesquels c'était la principale, sinon la seule raison de vivre.
C'était leur plaisir, leur folie, leur calmant, leur stimulant intellectuel.
Quand il s'agissait de loterie, même les gens qui savaient à peine lire et écrire, semblaient capables de calculs compliqués et de prodiges de mémoire déconcertants.
Il y avait tout une classe de gens qui gagnaient leur vie simplement en vendant des systèmes, des prévisions, des amulettes porte-bonheur.
Winston n'avait rien à voir avec le mécanisme de la loterie qui était dirigé par le ministère de l'Abondance. Mais il savait, en vérité tout le monde dans le Parti le savait, que les prix étaient pour la plupart fictifs.
Il n'y avait que les petites sommes qui fussent réellement payées.
Les gagnants des gros prix étaient des gens qui n'existaient pas. Ce n'était pas difficile à arranger, vu l'absence de toute réelle communication entre une partie et l'autre de l'Océania.
Afficher en entierIl n'y avait qu'une seule conclusion possible, les confessions étaient des mensonges. Naturellement, cette conclusion n'était pas en elle-même une découverte. Même à cette époque, Winston n'imaginait pas que les gens qui étaient anéantis au cours des épurations avaient réellement commis les crimes dont on les accusait.
Mais ceci était une preuve concrète. C'était un fragment du passé aboli. (...)
Ce document, s'il avait pu être publié et expliqué, aurait suffi pour faire sauter le Parti et le réduire en poussière.
Winston avait continué à travailler. (...)
il jeta la photographie avec d'autres vieux papiers dans le trou de mémoire.
En moins d'une minute peut-être, elle avait dû être réduite en cendres.
L'incident avait eu lieu dix, onze ans plus tôt.
Aujourd'hui, probablement, Winston aurait gardé la photographie.
Afficher en entierTout au long du jour et de la nuit, les télécrans vous cassaient les oreilles avec des statistiques qui prouvaient que les gens, aujourd'hui, avaient plus de nourriture, plus de vêtements, qu'ils avaient des maisons plus confortables, des distractions plus agréables, qu'ils vivaient plus longtemps, travaillaient moins d'heures, étaient plus gros, en meilleure santé, plus forts, plus heureux, plus intelligents, mieux élevés que les gens d'il y a cinquante ans.
Pas un mot de ces statistiques ne pouvait jamais être prouvé ou réfuté.
Le Parti prétendait, par exemple, qu'aujourd'hui quarante pour cent des prolétaires adultes savaient lire et écrire. Avant la Révolution, disait-on, leur nombre était seulement de quinze pour cent. (...)
Afficher en entierOn devait vivre, on vivait , car l'habitude devient instinct, en admettant que tout son émis était entendu, et que, sauf dans l'obscurité, tout mouvement était perçu.
Afficher en entierLe parti se trompait et lui était dans le vrai. L'évidence, le sens commun, la vérité devaient être défendus. Les truismes sont vrais. Il fallait s'appuyer dessus.Le monde matériel existe, ses lois ne changent pas
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