La ligue des enfants extraordinaires, Tome 3: Les gamins qui en savaient trop peu

– Les Murray n’ont pas d’enfants ! cria un voisin, dans la foule.

– C’est vrai, renchérit un autre. J’habite juste à côté depuis quinze ans et je n’ai jamais vu ce gamin !

– Monsieur Donaldson ? s’étonna Jonathan. J’ai passé trois jours dans votre cave, quand votre fils a oublié qu’on jouait à cache-cache ensemble !

Jouer à cache-cache était dangereux, pour les Ordinaires. Au sein de la Ligue, on ne comptait plus les histoires d’enfants ayant passé des jours, parfois une semaine, sous un lit, dans un placard ou derrière un rideau, attendant désespérément qu’on les trouve.

– Tu cherches à décrocher un scoop pour le journal de ton collège, ou quoi ? brailla un journaliste, qui attrapa Jonathan par le col de sa chemise et le renvoya sur le trottoir. C’est un travail pour les pros.

– Mais je ne mens pas ! J’habite ici ! Carmen et Mickey sont mes parents !

– Il y a trente-cinq des meilleurs journalistes du pays ici, aujourd’hui, alors crois-moi, si ces deux traîtres avaient un fils, on le saurait.

Une voix rocailleuse familière aux deux enfants intervint alors, dans leur dos :

– Écoute, gamin, une demi-portion comme toi n’a rien à faire ici. Prends donc ce billet de cinq livres et va t’acheter un hot dog.

Jonathan leva la tête et sourit.

C’était Hammett Humphries. Toujours aussi grand. Les cheveux plaqués en arrière. Vêtu d’un costume croisé gris à fines rayures. Un cure-dents fiché au coin des lèvres. Postée derrière lui dans son éternel uniforme blanc, l’infirmière Maidenkirk avait l’air aussi sinistre qu’à son habitude.

– Ethel et Julius Rosenberg ont été exécutés pour trahison en 1953, dit-elle.

– Bouclez-la, Maidenkirk ! aboya Hammett, avant de revenir à Jonathan. Je disais donc : tu devrais aller prendre un hot dog.