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Ma présence ici est illégale. Il nous est interdit de nous trouver en tête à tête avec les Commandants. Notre fonction est la reproduction; nous ne sommes pas des concubines, des geishas ni des courtisanes. Au contraire : tout a été fait pour nous éliminer de ces catégories. Rien en nous ne doit séduire, aucune latitude n'est autorisée pour que fleurissent des désirs secrets, nulle faveur particulière ne doit être extorquée par des cajoleries, ni de part ni d'autre; l'amour ne doit trouver aucune prise. Nous sommes des utérus à deux pattes, un point c'est tout : vases sacrés, calices ambulants.
Afficher en entierMais souvenez-vous que le pardon est aussi un pouvoir. Le mendier est un pouvoir, le refuser ou l'accorder est aussi un pouvoir, peut-être le plus grand de tous.
Afficher en entierPourquoi les femmes n'ont-elles pas à se prouver entre elles qu'elles sont bien de femmes ? Une manière de déboutonnage, de simple vérification de la fente de l'entrecuisse, tout aussi désinvolte. Un reniflage à la chien.
Afficher en entierComme il est facile d'inventer un caractère humain, pour n'importe qui. Quelle tentation facile. Un grand enfant, devait-elle dire. Son coeur avait du fondre, elle repoussait la mèche qui lui tombait sur le front, lui posait un baiser sur l'oreille, et pas seulement pour obtenir quelque chose de lui. L'instinct d'apaiser, de soigner? Là, là, devait-elle dire quand il se réveillait d'un cauchemar. C'est tellement dur pour toi. Elle avait surement cru tout cela, car autrement, comment aurait-elle pu continuer à vivre ?
Afficher en entierDIEU EST UNE RESSOURCE NATIONALE.
Afficher en entierEst-ce que vous savez sur combien de vies de femmes, sur combien de corps de femmes les chars d’assaut ont dû rouler juste pour arriver où nous sommes ?
Afficher en entierC'est pour vous que c'est le plus dur. Nous savons quels sacrifices sont attendus de vous. C'est dur quand les hommes vous humilient. Pour celles qui viendront après vous, ce sera plus facile. Elles accepteront leurs devoirs de bon cœur.
Elle ne disait pas: parce qu'elle n'auront pas de souvenirs de quoi ce soit d'autre.
Elle disait: parce qu'elles ne désireront pas ce qu'elles ne peuvent pas avoir."
Afficher en entierLe pire c'est l'instant de la trahison, la seconde où l'on sait sans l'ombre d'un doute que l'on a été trahi : qu'un autre humain a pu vous vouloir tant de mal
Afficher en entierNolite te bastardes carborundorum.
Afficher en entierJ’aimerais croire que ceci est une histoire que je raconte. J’ai besoin de le croire. Il faut que je le croie. Celles qui peuvent croire que pareilles histoires ne sont que des histoires ont de meilleures chances.
Si c’est une histoire que je raconte, je peux choisir son dénouement. Donc il y aura un dénouement, à cette histoire, et la vraie vie viendra après. Je pourrai reprendre là où je me suis arrêtée. Ce n’est pas une histoire que je raconte.
C’est aussi une histoire que je raconte, dans ma tête, au fur et à mesure.
Raconter, plutôt qu’écrire, parce que je n’ai pas de quoi écrire et que de toute façon il est interdit d’écrire, mais si c’est une histoire, même dans ma tête, il faut que je la raconte à quelqu’un. On ne se raconte pas une histoire seulement à soi-même. Il y a toujours un autre.
Même quand il n’y a personne.
Une histoire est comme une lettre. Je dirai : Cher Toi. Juste Toi, sans nom. Ajouter un nom rattache ce « toi » au monde réel, qui est plus hasardeux, plus périlleux : qui sait quelles sont les chances de survie, là-bas, pour toi ? Je dirai « Toi, toi », comme dans une vieille chanson d’amour. Toi peut représenter plus d’une personne. Toi peut signifier des milliers de gens.
Je te dirai : je ne cours aucun danger immédiat.
Je ferai semblant que tu peux m’entendre.
Mais cela ne sert à rien, car je sais que c’est impossible.
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