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Liste des extraits

Patch m'attendait sur le bas-côté, juché sur une vieille Harley-Davidson Sportster noire. En le voyant, je perçus un changement palpable dans l'atmosphère ; une sensation enivrante de danger vibrait dans l'air comme une onde électrique. Je l'aperçus et m'arrêtai net. Mon cœur palpitait, comme si Patch le tenait serré au creux de sa main et lui intimait ses volontés, par d'étranges et secrets desseins. Baignant dans le rayon de lune, il aurait presque pris des allures de criminel.

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D'abord, Hank ne doit pas nous voir ensemble. Ensuite, je ne veux pas t'attirer dans une situation qui pourrait rapidement dégénérer. Et s'il te faut une troisième raison, je t'aime. Pour l'instant, je m'aventure dans le noir, mais j'ai besoin de savoir qu'à la fin de la nuit, je pourrai te retrouver.

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Je n'hésitai pas une seconde. Aucun secret n'était trop lourd à porter pour protéger ceux que j'aimais.

Nora

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Désolé je viens de poster un extrait du tome 1 et non du tome 3 encore désolé.

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Prologue

Vallée de la Loire, novembre 1565

Chauncey était allongé sur les rives verdoyantes de la Loire en compagnie d'une paysanne lorsque l'orage éclata. Ayant laissé sa monture s'ébrouer dans la prairie, il devrait regagner le château à

pied. Il arracha la boucle d'argent de l'un de ses souliers et la tendit à la jeune fille, avant de la regarder s'éloigner, le jupon maculé de boue. Il chaussa ses bottes et se mit en route.

Les environs s'assombrirent brusquement et un rideau de pluie s'abattit sur la campagne. Une fois qu'il eut regagné le cimetière, Chauncey enjamba habilement les tombes envahies par les ronces et les lichens. De là, même dans le brouillard le plus

épais, il aurait pu retrouver son chemin sans crainte de s'égarer. La brume ne s'était pas levée ce soir-là, mais la pénombre et le déluge étaient suffisamment trompeurs.

Chauncey perçut un mouvement sur sa gauche et se retourna vivement. Une ombre, qu'il avait d'abord prise pour la statue d'un ange, se dressa de toute sa hauteur. Mais la silhouette, qui n'était faite ni de marbre ni de pierre, remuait bel et bien.

Torse et pieds nus, le jeune homme était vêtu d'un pantalon grossier qui lui tombait sur les hanches. Il sauta au bas du mausolée. La pluie ruisselait sur ses cheveux noirs et sur son visage, sombre comme celui d'un Ibère.

Chauncey porta lentement sa main à son fourreau.

—Qui va là ?

Un sourire se dessina sur les lèvres du garçon.

—On ne se joue pas impunément du duc de

Langeais, l'avertit Chauncey. Je t'ai demandé ton nom. Réponds !

—Un duc? répéta l'inconnu en s'adossant au tronc noueux d'un saule. Ou un bâtard ?

Chauncey dégaina son épée.

—Retire immédiatement tes paroles. Mon père

était le duc de Langeais. Et... je suis le duc, à

présent, bafouilla- t-il, maudissant l'hésitation dans sa voix.

—Ton père n'était pas le vieux duc, répliqua l'autre en secouant la tête.

—Et peut-on savoir qui était ton père? Rétorqua

Chauncey, piqué au vif, l'arme au poing.

Il n'avait pas encore mémorisé le nom de chacun de ses vassaux, mais il ne risquait pas d'oublier celui-ci.

—Je te le demande une dernière fois, prévint-il d'une voix grave, essuyant d'un revers de la main la pluie sur son visage, qui es-tu ?

Le jeune homme s'approcha et écarta la lame.

Il parut soudain bien plus âgé que Chauncey ne l'aurait cru ; peut- être même avait-il un an ou deux de plus que lui.

—Un rejeton du Malin.

L'angoisse saisit Chauncey au ventre et il siffla :

—Tu n'es qu'un dément. Ote-toi de mon chemin.

Le sol sembla alors se dérober sous ses pieds.

Des étincelles d'or et de feu dansèrent devant ses yeux. Courbé en deux, les ongles enfoncés dans ses cuisses, il releva la tête vers l'inconnu, tremblant, le souffle court, essayant de comprendre ce qui lui arrivait. Son esprit divaguait, comme s'il n'en était plus maître.

Le garçon s'accroupit face à lui.

—Ecoute-moi bien. J'ai besoin de toi. Et je ne partirais pas avant d'avoir obtenu ce que je veux.

M'as-tu compris ?

La mâchoire serrée, Chauncey secoua la tête pour signifier son incrédulité. Il tenta de lui cracher au visage, mais la salive coula sur son menton, car sa langue refusait de lui obéir.

L'inconnu prit les mains du jeune duc dans les siennes

: leur toucher ardent brûla Chauncey, qui laissa échapper un cri de douleur.

—J'ai besoin de ton serment d'allégeance, poursuivit le garçon. Mets un genou à terre et jure.

Chauncey essaya de forcer un ricanement méprisant, mais sa gorge se contracta et il suffoqua. Son genou droit fléchit, comme si un pied invisible l'avait frappé par- derrière. Il glissa dans la boue, et, saisi de nausée, se pencha de côté.

—Jure-le, répéta l'autre.

Une sensation de chaleur montait dans la nuque de Chauncey. Rassemblant ses dernières forces, il serra les poings et rit de lui-même, de cette situation pathétique. Sans qu'il comprenne comment, ce garçon lui infligeait cet horrible écoeurement, cette faiblesse, et prolongerait ses tourments jusqu'à lui arracher ce serment. Il dirait ce qu'il faudrait, mais en son for intérieur, il se promit de venger l'affront et de l'anéantir.

—Seigneur, je suis ton homme, cracha-t-il d'un ton haineux.

L'inconnu remit Chauncey debout.

—Retrouve-moi ici, au début du mois hébreu d'Heshvan. Entre la nouvelle et la pleine lune, j'aurai besoin de tes services.

—Quinze... jours durant? répondait Chauncey qui tremblait de rage. Mais je suis le duc de

Langeais !

—Tu es un Néphil, déclara le garçon, avec un semblant de sourire.

Chauncey retint l'injure qu'il avait sur le bout de la langue. Desserrant la mâchoire, il lâcha d'un ton venimeux et glacial :

—Qu'as-tu dit ?

—Tu appartiens à la race biblique des Néphilim.

Ton véritable père était un ange, chassé du

Paradis. Tu es à demi mortel...

Son regard sombre croisa celui de Chauncey.

—... Et à demi ange déchu.

Dans un recoin de son esprit, Chauncey perçut la voix de son précepteur, récitant des passages de la Bible. Il avait parlé d'un peuple perverti, né des anges bannis des cieux et des filles des hommes. Une race violente et puis- sante. Un frisson, qui n'exprimait pas seulement la révulsion, saisit Chauncey.

—Qui es-tu ?

Le garçon tourna les talons et s'éloigna. Chauncey voulut le poursuivre, mais ses jambes demeuraient clouées sur place. A genoux dans la boue, aveuglé par la pluie, il crut apercevoir deux larges cicatrices qui parcouraient le dos de l'inconnu. Elles se rejoignaient pour former un «

V » inversé.

—Es-tu... un déchu ? lui lança Chauncey. On t'a arraché tes ailes, n'est-ce pas ?

Le jeune homme, ou l'ange, quel qu'il fût, ne répondit pas. D'ailleurs, Chauncey n'avait pas besoin de confirmation.

—Si je suis à ton service..., j'exige de savoir quelle sera ma tâche ! cria-t-il.

Le rire grave du garçon résonna aux alentours.

1.

Coldwater, Maine, États-Unis

De nos jours.

En entrant en cours de biologie, je faillis tomber à

la renverse.

Bras dessus bras dessous, Barbie et Ken étaient suspendus au tableau noir. Les deux poupées

étaient entièrement dénudées, à l'exception d'un feuillage en plastique, positionné aux endroits stratégiques. Au-dessus, une légende à la craie rose bien appuyée indiquait :

LA REPRODUCTION HUMAINE (LE SEXE)

—Et dire que les téléphones portables avec appareils photo sont interdits ! s'exclama ma voisine,

Vee. Un cliché de ça sur le webzine du bahut, et adieu les cours de bio... Imagine : une heure de libre, à employer à quelque chose de bien plus productif...

Des classes de soutien individuel avec ces types canons de première ou de terminale, par exemple.

—Ça alors, Vee. Et moi qui pensais que ce sujet allait te passionner.

—On ne m'apprendra rien que je ne sache déjà, répliqua Vee avec un sourire entendu.

—Rappelle-moi : Vee, ça s'écrit avec un V...

comme vierge ?

—Hé, pas si fort !

Elle m'adressa un clin d'oeil et la cloche retentit.

Nous nous installâmes à notre table habituelle.

Le Coach McConaughy saisit le sifflet toujours pendu à son cou et émit un son strident.

—Assis, les gars !

L'entraîneur de l'équipe de basket-ball du lycée assurait aussi les cours de biologie des secondes.

Ça n'était un secret pour personne : il considérait l'enseignement comme une tâche annexe.

—Certains d'entre vous l'ignorent peut-être encore, mais le sexe ne se résume pas à quinze minutes de galipettes sur la banquette arrière d'une voiture. C'est une science. Et la science, c'est quoi ?

—Barbant, répondit une voix au fond de la salle.

—La seule matière où j'ai pas la moyenne, brailla une autre.

Le Coach passa en revue le premier rang et s'arrêta sur moi.

—Nora ?

—L'étude de quelque chose ?

Il s'approcha et tapota mon bureau de son index.

—Mais encore ?

—Une connaissance acquise d'après l'expérimentation et l'observation.

J'avais l'impression de réciter le manuel scolaire.

—Dans tes propres termes ?

Je me mordis les lèvres, cherchant une paraphrase.

—C'est une enquête, tentai-je avec hésitation.

—La science est une enquête, répéta le Coach en se frottant les mains. La science exige que nous devenions des détectives.

Dit comme ça, cela paraissait intrigant. Mais j'avais suffisamment fréquenté les cours du

Coach pour ne pas trop y croire.

—Et pour bien enquêter, il faut s'entraîner, poursuivit-il.

—Comme pour le sexe, lança un nouvel amuseur du fond.

La classe étouffa un rire tandis que le Coach se tournait vers l'agitateur.

—Ça, ça ne fera pas partie de vos devoirs pour aujourd'hui.

Puis, se tournant vers moi :

—Nora, tu es assise à côté de Vee depuis le début de l'année.

Je hochai la tête, mais ce genre de questions n'augurait rien de bon.

—Et vous faites toutes les deux partie du comité

de rédaction du webzine du lycée ?

J'acquiesçai une nouvelle fois.

—Vous devez certainement bien vous connaître.

Sous la table, Vee me donna un coup de pied.

Je savais à quoi elle pensait. Le pauvre Coach ignorait à quel point nous étions proches. Et je ne parle pas de petits secrets partagés çà et là.

Vee est ma fausse jumelle. Avec ses yeux verts, ses cheveux châtain clair, elle est légèrement plus ronde que pulpeuse. Je suis une brune aux yeux gris avec une tignasse bouclée à faire cauchemarder n'importe quel fer à lisser et je suis toute en jambes - un vrai tabouret de bar. Mais un fil invisible nous unit. On jure à qui veut l'entendre que ce lien devait exister bien avant notre naissance et qu'il ne sera jamais rompu.

Le Coach embrassa la classe du regard.

—D'ailleurs, je suis prêt à parier que chacun de vous connaît bien son voisin. Vous n'avez pas choisi votre place par hasard: habitude, affinités...

Les meilleurs détectives fuient tout cela comme la peste. Trop de routine brouille l'instinct de recherche. Voilà pourquoi, à partir d'aujourd'hui, vous allez changer de binôme.

J'ouvris la bouche pour protester, mais Vee fut plus rapide.

—C'est du délire ! On est en avril. Autant dire la fin de l'année ! Vous ne pouvez pas nous sortir un plan pareil maintenant !

—Des plans pareils, je peux vous en sortir jusqu'au dernier jour de l'année, si ça me chante, répliqua le Coach avec un large sourire. Et si vous redoublez, je vous retrouverai ici l'an prochain, où vous continuerez à subir ces « plans

».

Vee lui lança l'un de ces regards noirs dont elle a le secret. Quand elle vous jette ces yeux-là, on dirait qu'elle va se mettre à siffler comme un serpent.

Imperturbable, le Coach porta son sifflet à

ses lèvres et il ne nous resta qu'à nous exécuter.

—Ceux qui sont assis à gauche de la table – votre gauche -, vous avancerez d'une rangée. Ceux assis au premier rang - eh oui, ça vaut pour toi aussi,

Vee – vous repassez au fond.

Vee fourra son cahier dans son sac à dos et tira rageusement sur la fermeture Eclair. Les lèvres pincées, je lui adressai un petit signe d'adieu et me retournai pour observer la classe. Je connaissais le nom de chacun des élèves... sauf un. Le nouveau, arrivé d'un autre lycée. Le Coach ne lui prêtait jamais attention et il semblait s'en accommoder.

Toujours avachi sur sa table, il gardait son regard sombre et froid fixé droit devant lui.

Je n'imaginai pas un instant qu'il soit possible de rester ainsi, les yeux dans le vague, jour après jour, sans arrière-pensée. Il devait bien se passer quelque chose dans sa tête. Mais mon petit doigt me disait qu'il valait sans doute mieux ne pas le savoir.

Il posa son livre de biologie à la place de Vee et s'installa sur sa chaise.

—Je m'appelle Nora, entamai-je en souriant.

Son regard noir me transperça et les coins de ses lèvres se relevèrent. L'espace d'une seconde, mon pouls s'emballa et, durant ce bref instant, une ombre sinistre parut planer sur moi. Elle s'évanouit aussitôt, mais je ne pus le quitter des yeux. Son sourire n'avait rien d'amical. Il n'augurait que des ennuis. Il les garantissait, même.

Je fixai le tableau. Ken et Barbie m'observaient derrière leurs masques rayonnants.

—Il faut aborder le sexe avec doigté, reprit le

Coach.

—Baaah ! crièrent quelques clowns.

—Vous devrez donc faire preuve de maturité.

Et comme pour toutes les sciences, la meilleure approche est l'investigation. Durant le reste du cours, mettez cette technique en pratique en apprenant le plus de choses possible sur votre voisin de table. Demain, vous me rendrez vos observations par écrit et faites attention, je vérifierai chaque élément. Nous sommes en cours de biologie

: je veux des faits, pas de la fiction. Je veux voir le produit d'une véritable interaction et d'un travail d'équipe.

Le « ou sinon » était sous-entendu.

Je ne bougeai pas. La balle était dans son camp

: j'avais souri poliment, et ça ne m'avait menée nulle part. Je plissai le nez, cherchant à identifier son odeur. Ça n'était pas la cigarette, mais quelque chose de plus puissant, et de plus écoeurant.

Le cigare.

Jetant un oeil à la pendule, je tapotai mon crayon sur mon cahier, en rythme avec la trotteuse.

Génial. A ce train-là, j'étais sûre de ramasser une mauvaise note.

Malgré ma détermination à regarder droit devant, le grattement sur le papier à côté de moi m'intriguait. Que pouvait-il bien rédiger ? Il ne pensait tout de même pas que passer dix minutes assis à côté de moi suffisait à me connaître ? D'un bref coup d'oeil, j'aperçus plusieurs lignes et son paragraphe croissait toujours. N'y tenant plus, je lui demandai :

—Qu'est-ce que tu écris ?

—Et elle parle français, termina-t-il en rajoutant une dernière ligne de sa belle écriture fluide.

Je m'approchai pour tenter de lire ce qu'il avait noté, mais il replia sa copie en deux, cachant le texte.

—Dis-moi ce que tu as écrit, répétai-je.

Il saisit ma feuille encore vierge et la froissa.

Avant que j'aie pu protester, il l'avait lancée dans la corbeille près du bureau du Coach. Un beau trois-points.

Partagée entre la colère et l'incrédulité, je fixai quelques instants la corbeille, hébétée. Puis j'arrachai une nouvelle feuille de mon bloc.

—Quel est ton nom ? demandai-je, prête à écrire.

En levant les yeux, j'essuyai un autre sourire sardonique.

Celui-là semblait me défier de tirer quoi que ce soit de lui.

—Ton nom, insistai-je, espérant que ma voix faiblissait seulement dans mon imagination.

—Appelle-moi Patch. Et je suis sérieux : appellemoi, ajouta-t-il avec un clin d'oeil.

Je commençais à me demander s'il se moquait de moi.

—Qu'est-ce que tu fais de ton temps libre ?

—Je n'ai pas de temps libre.

—Je pense que ce travail sera noté, alors fais-moi plaisir.

Il s'enfonça dans sa chaise et croisa ses mains derrière sa tête.

—Plaisir, tu dis ?

Préférant ignorer l'allusion graveleuse, je cherchai un moyen de changer de sujet.

—Mon temps libre ? reprit-il distraitement. Je prends des photos.

J'inscrivis « photographie » sur ma feuille.

—Attends, je n'ai pas fini. J'en ai toute une collection sur une certaine membre du comité de rédaction du webzine qui prône le « tout bio », s'adonne en secret à l'écriture poétique, et frémit

à l'idée d'avoir à choisir entre Stanford, Yale et...

quelle est cette université dont le nom commence par un H ?

Je l'observai quelques instants, bouche bée. Il avait tapé dans le mille. Et je n'avais pas l'impression qu'il avait deviné tous ces détails, il savait. Et je voulais découvrir comment. Tout de suite.

—Mais tu n'iras pas, de toute façon.

—Ah non ? répondis-je sans même réfléchir.

Il glissa ses doigts sous mon siège et, d'un coup sec, rapprocha ma chaise de la sienne. Je me demandais quoi faire : m'écarter et montrer mon angoisse ou demeurer immobile et feindre l'ennui.

Je choisis la deuxième option.

—Même si tu as les capacités pour y parvenir, tu méprises ces institutions que tu considères comme un stéréotype de la réussite. Ta propension au jugement est ta troisième plus grande faiblesse.

—Et la deuxième ? poursuivis-je en serrant les dents.

—D'où sortait ce type ?

—Tu ne sais pas faire confiance. Pardon, je reformule

: tu fais confiance, mais toujours aux mauvaises personnes.

—Et la première ?

—Tu tiens ton existence en laisse.

—Ce qui veut dire ?

—Tu as une peur viscérale de ce que tu ne maîtrises pas.

La température de la pièce sembla chuter. J'avais la chair de poule et un frisson me parcourut la nuque. En temps normal, j'aurais été voir le

Coach pour exiger de changer de place, mais je refusais de me laisser intimider. Prise d'un besoin irrationnel de me défendre seule, je décidai de ne pas céder la première.

— Tu dors nue ? me demanda-t-il.

Je manquai d'ouvrir grand la bouche, mais je me retins.

—Tu t'imagines que je vais te répondre ?

—As-tu déjà consulté un psy ?

—Non, mentis-je.

A vrai dire, j'étais suivie par le psychologue du lycée, le Dr Hendrickson. Ça n'était pas par choix et je n'aimais pas vraiment en parler.

—Déjà fait quelque chose d'illégal ?

—Non.

Mieux valait ne pas évoquer mes rares excès de vitesse...

—Pourquoi tu ne me poses pas des questions normales ? Comme... le genre de musique que j'écoute, par exemple.

—Du baroque. Chez toi, tout tourne autour de l'ordre, du contrôle. Je parie que tu joues... du violoncelle

?

Il fit mine d'avoir sorti ça au hasard.

—Tout faux.

Encore un mensonge, mais ses réponses me glaçaient. Qui était ce type, à la fin ? Et puisqu'il savait que je jouais du violoncelle, que pouvait-il bien savoir d'autre ?

—C'est quoi, ça ? demanda-t-il en tapotant le creux de mon poignet du bout de son stylo.

Je l'écartai automatiquement.

—Une tache de naissance.

—On dirait une cicatrice. Aurais-tu des tendances suicidaires, Nora?

Il plongea ses yeux dans les miens et, intérieurement, je le sentis rire.

—Tes parents sont mariés, divorcés ?

—Je vis avec ma mère.

—Et Papa, où est-il passé ?

—Mon père est mort l'an dernier.

—Qu'est-ce qui lui est arrivé ?

Je grimaçai.

—On l'a... assassiné. Si ça ne t'ennuie pas, tout ça est assez personnel.

Le silence retomba et le regard de Patch parut s'adoucir un peu.

Ça doit être dur, remarqua-t-il, d'un ton sincère.

La cloche retentit. Il se leva d'un bond et se dirigea vers la porte.

—Hé, lui criai-je !

Il ne se retourna pas.

—S'il te plaît !

Il passa la porte.

—Patch ! Je n'ai rien noté sur toi !

Il fit demi-tour et s'approcha. Avant que j'aie pu réagir, il avait saisi ma main et inscrivit quelque chose sur ma paume.

J'observai la suite de chiffres tracée à l'encre rouge sur ma peau, et serrai le poing. J'aurais voulu lui dire qu'il pouvait toujours se brosser, que je ne l'appellerais pas, qu'il avait accaparé le temps imparti. J'aurais voulu lui répondre tout un tas de choses, mais je restais là comme une idiote incapable d'ouvrir la bouche.

—Je suis prise ce soir, finis-je par lâcher.

—Moi aussi, répliqua-t-il avec un grand sourire avant de disparaître.

Clouée sur place, j'essayais de comprendre ce qui venait de se produire. Avait-il fait exprès de me poser des questions jusqu'à la fin de l'heure ?

Pour que je n'aie rien à rendre au Coach ? Pensaitil s'en sortir avec un sourire béat ? Oh oui, me disje.

C'est bien ce qu'il croyait.

—Je ne t'appellerai pas, lui lançai-je, ni aujourd'hui, ni... jamais !

—Tu as fini ton article pour demain ?

Vee me rejoignit en prenant des notes sur le carnet qu'elle trimballait partout avec elle.

—J'ai l'intention d'en pondre un sur l'injustice des plans de classe imposés, reprit-elle. Je me suis retrouvée à côté d'une fille qui vient de terminer un traitement anti- poux.

—Mon nouveau voisin, indiquai-je en désignant le dos de Patch dans le couloir.

Sa démarche était insupportablement décidée :

de celle qu'on associe à un T-shirt délavé et un chapeau de cowboy. Le genre de garçon à ne porter que du noir : jean, polo et boots.

—Le redoublant? Apparemment il n'a pas travaillé

suffisamment la première fois.

Elle me lança un regard entendu.

—Jamais deux sans trois.

—Il me fiche la frousse. Il savait quel genre de musique j'écoutais. Sans le moindre indice, il a dit «baroque», marmonnai-je en imitant mal sa voix grave.

—Il aura deviné, non ?

—Il n'y avait pas que cela.

—Quoi d'autre ?

Je soupirai, curieusement réfractaire à l'idée d'énumérer tout ce qu'il savait de moi.

—Comment me rendre dingue, répondis-je finalement.

Je vais demander au Coach de nous remettre ensemble.

Je t'en prie. J'aurais bien besoin d'un sujet pour mon prochain article du webzine. « Les secondes se rebellent ». Ou mieux encore : « Le plan de classe échoue ». Mmmh. Ça me plaît.

A la fin de la journée, c'est moi qui avais échoué.

Le Coach n'avait rien voulu savoir. Apparemment, je resterai assise à côté de Patch. Du moins pour l'instant.

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Il se pencha vers moi et je sentis son souffle contre ma peau. Ses lèvres effleurèrent mon front, caressantes comme une plume. Je fermai les paupières, réprimant le désir absurde que sa bouche trouve le chemin de la mienne.

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- Qu'est-il arrivé à l'autre ? demanda enfin Patch.

Je suivis son regard, braqué sur la robe de Jessica Rabbit.

- Marcie a pensé que le rouge m'irait mieux, admis-je avec un soupir.

- Et toi, qu'est-ce que tu en penses ?

- Je pense que Marcie et Dabria s'entendraient à merveille.

Patch éclata d'un rire grave, qui fit courir un frémissement le long de ma peau, comme s'il l'avait effleuré du bout des lèvres.

- Tu veux mon avis ?

- Pourquoi pas, puisque tout le monde y va du sien.

Il s'assit sur mon lit, s'appuyant non nonchalamment sur ses coudes.

- Essaie-la.

- Elle est sans doute un peu serrée, avouai-je en piquant un fard. La seule chose que Marcie radine, c'est les tailles.

Patch parut amusé.

- Elle est fendue jusqu'à la cuisse.

Son sourire s'élargit.

Je me réfugiai derrière les portes du placard et enfilai la robe, qui glissa comme un liquide sur mes courbes. La fente s'ouvrit au dessus du genou, révélant ma jambe. J'avançai dans la chambre faiblement éclairée, en relevant mes cheveux.

- Tu peux m'aider ? demandai-je en désignant la fermeture Éclair.

Patch me dévorait du regard, les yeux soudain plus noirs que d'habitude.

- Je vais avoir du mal à te laisser aux mains de Scott dans cette tenue. Petit avertissement : si à ton retour la robe a le moindre accroc, je l'étripe.

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- [...] Au fait, c'est pour quelle occasion ? demanda-t-il en désignant ma robe du menton.

- Le bal de promo, dis-je en exécutant une pirouette. Elle te plaît.

- Je crois me souvenir que ce genre d’événement requiert un cavalier, non ?

- Euh, d'ailleurs, à ce sujet, balbutiai-je. J'y vais avec... Scott. Nous sommes tous les deux d'accord : Hank ne le cherchera sans doute pas à une fête de lycée.

Le sourire de Patch se figea.

- Je retire ce que j'ai dit. Si Hank veut trucider Scott, il a ma bénédiction.

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- On pari que j'arrive à te faire sourire comme ça. Et sans la TVA.

Je me retournai et vis Patch derrière moi, dans la cabine d'essayage, en jean et tee-shirt blanc. Les bras croisés, il me toisait de son regard noir et malicieux.

Un frisson tiède, qui n'était pas tout à fait désagréable, me parcourut.

- Je pourrais faire toutes sortes de blagues sur les pervers.

- Je pourrais te dire combien tu me plais dans cette robe.

- Comment es-tu entré ?

- Mes voies sont impénétrables.

- Je crois que ce sont celles du Seigneur, qui sont impénétrables. Toi, tu auras tendance à faire comme la foudre. Tu tombes toujours lorsqu'on ne t'attend pas. Ca fait longtemps que tu es là ? ajoutai-je, mortifiée à l'idée qu'il m'ait vue me tortiller dans la robe trop petite, ou pire, me déshabiller.

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Je le sentis me dévorer des yeux tandis que je traversais le salon. Sans jamais ciller, il me déshabilla du regard et un douloureux frisson me parcourut. Un baiser n'aurait pas été plus brûlant.

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