Extraits

Je lui lâchai le bras et la pris à bras-le-corps pour la jeter en travers de mon épaule.

Elle poussa un cri rauque.

— Qu’est-ce qu’il vous prend ?

— Un escargot à la coquille cassée irait plus vite que vous.

Ses petits poings s’abattirent dans mon dos.

— Vous êtes complètement dingue.

Souriant intérieurement, je la secouai un peu et fus récompensé par un petit cri étouffé et une pluie de coups redoublée. Ce genre de choses m’amusait beaucoup…

— Reposez-moi par terre, ordonna-t-elle. Ou je vous le jure, je vais vous botter le cul !

L’immobilisant d’un bras, je lui donnai de l’autre une tape sur les fesses.

— Surveillez votre langage. Ce n’est pas digne d’une dame.

— Ne recommencez jamais ça, ou… (Elle fut interrompue par un bâillement intempestif, qui gâcha totalement son effet.) Arrogant et autoritaire, vous n’êtes qu’un sale conn…

Paf. Je tapai cette fois son postérieur un peu plus fort.

— Votre langage, Serena.

Le flot ordurier qui se déversa alors de sa bouche me fit presque lâcher prise. Cela méritait une fessée, et au bout de la troisième elle finit par se taire.

J’avais la gorge sèche.

— Vous empiétez sur mon espace personnel.

— Vous êtes chez moi, vous n’avez pas d’espace personnel.

— Votre logique n’a pas grand sens.

Il inclina la tête sur le côté, les yeux mi-clos.

— Ma logique est la seule valable ici. Il va falloir vous y faire.

Et il allait devoir s’habituer à ce que je lui balance des objets, parce que l’envie me démangeait follement de recommencer.

— Mon Dieu…

Rien d’autre ne sortit de ma bouche. Mon Dieu. Il n’y avait rien d’autre à dire.

Les yeux de Serena luisaient de malice.

— Tu es devenu croyant ?

Mes lèvres frémirent.

— Est-ce que ça vous arrive de ne pas donner d’ordres aux gens ?

— Sans doute pas.

— Et vous vous rendez compte à quel point c’est grossier et horripilant ?

Un demi-sourire prit forme sur ses lèvres.

— Oui. Et si vous voulez le savoir, je m’en fiche complètement. Mangez, Serena.

Eh bien, il avait le mérite de l’honnêteté, mais j’avais presque envie de lui jeter mon café à la figure.

— Ne comptez pas sur moi pour vous dire merci.

— Je n’attendais pas de vous cette courtoisie élémentaire, répondit-il, ses yeux pâles pétillant… (De quoi ? de colère ? d’amusement ?) Après tout, vous ne m’avez pas non plus remercié d’avoir sauvé vos fesses, que vous avez d’ailleurs fort jolies. Je peux donc ajouter « absence de gratitude » à la liste de vos attributs. Il y a déjà : « réactions excessives », « agit sans réfléchir », « fait des scènes… »

— Oh, allez vous faire…

— Je vous déconseille de terminer cette phrase, m’avertit Hunter, d’une voix sourde qui me fit frissonner. C’est une chose que je ne fais jamais.

Oui, je voulais bien le croire. Les filles devaient tomber comme des mouches à ses pieds. Mais il devait suffire qu’il ouvre la bouche pour les faire déchanter.

— Je n’ai jamais eu l’intention de te laisser aller seule dans le Colorado. Je pensais… putain de merde… je pensais que tu renoncerais à y aller sans moi. Je voulais que tu viennes en Géorgie où tu serais en sécurité pour te garder près de moi. Pas parce que c’était mon boulot. Je redoutais qu’il t’arrive malheur dans le Colorado. C’est vraiment dangereux, et je… ne supporte pas l’idée qu’on te fasse du mal. (Chiotte. J’allais bientôt lui tenir la main et lui débiter des niaiseries sur les papillons et les arcs-en-ciel.) Écoute, je comprends les raisons pour lesquelles tu veux y retourner. Je n’approuve pas ta décision, mais je vais… t’accompagner, et nous irons ensuite en Géorgie tous les deux.

« Eh. Il était en train de faire foirer tout le babysitting.

- Tu me fais mal, dit-elle, montrant du regard la main entourée autour de son bras.

- Pas du tout.

Elle rougissa.

- Ok. Tu me déranges.

- Tu veux savoir un secret ?

- Quoi ?

- J'en ai rien à faire.

- Très drôle.»

— Serena Cross. (Je pris la main qu’il tendait, passant outre au grognement jaloux qui vibra dans la gorge de Hunter.) C’est un plaisir de faire votre connaissance.

— Eh bien, ma chère, le plaisir est partagé. (Il lança à son jumeau un petit sourire suffisamment grivois pour que mes joues s’empourprent.) Comment diable vous êtes-vous retrouvée avec mon frère ?

— Oh, c’est une longue histoire.

Le sourire de Lore s’élargit.

— Je suis tout ouïe.

S’avançant entre nous, Hunter sépara nos mains toujours jointes avec un regard noir.

— Si tu arrêtais de tripoter ma femelle et que tu nous faisais entrer ? On te racontera tout.

Son frère gloussa en s’effaçant pour nous céder le passage.

— Il manquerait quelque chose à ma vie si je n’entendais pas cette histoire.

Serena et Hunter:

-Tu ne vas pas te transformer en Iceman après?

-Iceman?

Elle mordilla sa lèvre inférieure en hochant la tête.

-Quand tout se recouvre de givre et que tu veux me manger.

Je gloussai.

-Combien de fois devrais-je te l'expliquer, Serena? Je n'essayais pas de te manger. Mais tu me donnes des idées. (Mes yeux descendirent sur ses cuisses légèrement écartées.) Des idées très tentantes.

Deux yeux d’un bleu si clair qu’ils paraissaient décolorés se plantèrent dans les miens. Les épais cils charbonneux qui frangeaient ces yeux-là accentuaient encore leur étrange pâleur. Pendant quelques instants, je me demandai s’il pouvait être aveugle. Son regard était brut… magnifique. Je me rendis alors compte que j’étais carrément en train de le reluquer et qu’il… me regardait d’un air moqueur.