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La famille Thatcher, Tome 2 : Pour que tout recommence



Description ajoutée par x-Key 2011-11-22T21:35:25+01:00

Résumé

Renita se prépara à recevoir Brett O’Connor dans son bureau. « Tu n’es pas du tout mon genre »… les paroles blessantes de Brett, du temps de leur adolescence, résonnaient encore dans son esprit. A cette époque, elle était la bonne copine, la bonne élève, la petite ronde à lunettes. Pourtant, elle avait osé rêver qu’il accepterait de l’accompagner au bal du lycée. Bien mal lui en avait pris… Mais aujourd’hui, la donne était différente : elle était une femme, et c’était lui qui avait quelque chose à lui demander. Les rôles s’inversaient. Comment cette rencontre imminente allait-elle se passer ? Brett aurait-il changé ? La trouverait-il changée, elle ? En mieux ? En tout cas, à quelques minutes de leurs retrouvailles, une chose était sûre : le cœur de Renita battait très fort, et elle était déjà tiraillée entre l’attirance qu’elle sentait renaître malgré elle, et un terrible désir de revanche…

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Classement en biblio - 5 lecteurs

extrait

** Extrait offert par Joan Kilby **

Chapitre 1

Renita Thatcher tira sur la veste de son ensemble de soie sauvage bleue pour essayer de la boutonner. Seigneur ! Si elle prenait un gramme de plus, elle serait obligée de se draper dans une toile de tente pour aller travailler. D’ordinaire, elle ne fermait jamais sa veste, malheureusement un bouton de son chemisier venait de sauter.

C’était vraiment le moment…

La porte de son bureau s’ouvrit à la volée et Poppy, sa jeune assistante, annonça tout essoufflée :

— Brett O’Connor est arrivé !

— Déjà ? s’écria Renita en comprimant le peu d’abdominaux qu’elle avait dans l’espoir d’introduire le bouton récalcitrant dans sa boutonnière.

Enfin ! Opération réussie.

— Pop, accordez-moi deux petites minutes avant de le faire entrer, je vous prie.

Dès que Poppy eut refermé la porte derrière elle, Renita ouvrit fébrilement le tiroir supérieur de son bureau pour en extraire un poudrier afin d’inspecter sa coiffure. Elle repoussa une longue boucle brune derrière son oreille et hésita quelques secondes à ôter ses lunettes. Elle y renonça aussitôt ; sans ses lunettes, elle était une vraie taupe. Puis elle examina ses dents dans le petit miroir et vérifia que ni trace de rouge à lèvres ni graine de sésame rescapée du bagel avalé ce matin en guise de petit déjeuner n’entachait leur blancheur.

Satisfaite, elle reposa son poudrier et respira à fond plusieurs fois pour tenter d’apaiser les battements de son cœur.

Quelle idiote d’être aux cent coups pour un simple rendez-vous professionnel ! Son béguin pour Brett O’Connor datait de l’époque du lycée. C’était de l’histoire ancienne rangée dans les souvenirs depuis longtemps. D’autant plus que Brett ne s’était jamais intéressé à elle sur un plan sentimental. Sa visite ne justifiait donc pas de se mettre dans un état pareil.

Et même si elle était curieuse de connaître les raisons de son retour à Summerside, pour l’instant ses préoccupations principales étaient, dans l’ordre : que le bouton de sa veste ne saute pas inopinément, et d’éviter à tout prix de révéler fortuitement par un mot, un geste ou un regard qu’un jour elle ait pu avoir ne serait-ce que le plus infime penchant pour lui.

Brett O’Connor venait vers elle en client. Elle allait le regarder en client.

Le professionnalisme, voilà la solution ! De plus, elle n’avait plus rien à voir avec la gamine de quinze ans, gauche et rondelette, folle amoureuse de l’athlète vedette du lycée — un garçon qui lui avait brisé le cœur. Elle était devenue une vraie femme d’affaires, la directrice du service crédit de la Community Bank. Et dans son bureau il n’y avait pas de place pour la romance. Ou les souvenirs.

Poppy frappa à la porte, et aussitôt Renita sentit sa bouche devenir aussi sèche que le papier qu’elle triturait entre ses mains moites pour calmer sa nervosité.

— Oui. Entrez !

Son assistante ouvrit la porte et fit entrer Brett O’Connor, un Brett sublime dans sa banale veste de costume, sa chemise à col ouvert et son jean de styliste. Il tenait une enveloppe kraft à la main.

A la dernière seconde, Renita se souvint du pot de bonbons qui trônait sur son bureau et l’escamota adroitement pour le faire disparaître dans un tiroir.

— Bonjour, Brett ! lança-t-elle en se levant pour l’accueillir, soulagée de constater qu’elle parvenait à parler tout à fait normalement.

Pourtant, la vue de son épaisse chevelure aux mèches délavées par le soleil et de son nez légèrement busqué venait instantanément de la projeter des années en arrière, à l’époque du lycée, quand il suffisait à Brett O’Connor de la gratifier d’un vague regard en passant près d’elle pour l’envoyer planer pendant des heures dans un monde de rêves tous plus romantiques les uns que les autres.

Mais tout cela, c’était du passé, se dit-elle une fois de plus. Elle n’avait plus aucune raison de céder à son charme ravageur. Ni aucune envie, d’ailleurs.

— Comment vas-tu ? demanda-t-elle en lui tendant la main.

— Bonjour, Renita. Dis donc, ça fait longtemps ! Combien de temps ? Treize ans, non ?

Sa poignée de main était ferme, presque brutale, comme s’il n’avait pas conscience de sa force, et son regard bleu, qui plongeait en elle…

— A peu près, oui ! répondit-elle vivement en lui désignant un siège tout en se rasseyant. Alors, que puis-je faire pour toi ?

Il s’assit, mais, au lieu d’aborder directement le sujet de sa visite, s’appuya nonchalamment au dossier et l’observa un moment.

— Je n’en reviens pas, conclut-il en secouant la tête. Tu n’as pas changé d’un iota.

— Eh bien ! Merci du compliment. Moi qui espérais avoir embelli.

— Toujours aussi sarcastique à ce que je vois, répliqua-t-il en lui décochant son plus éclatant sourire.

— Pas du tout, je parle toujours vrai. Ce sont les autres qui s’imaginent que je plaisante.

— Je voulais dire par là que je te trouve fabuleuse. C’est vrai, je t’assure, insista-t-il devant son air sceptique.

— Brett, arrête de jouer les flagorneurs.

Elle était soignée, mignonne peut-être, mais certainement pas belle. La plupart du temps, elle se trouvait pas mal du tout — enfin, si on excluait ses kilos superflus —, mais comment croire une seconde que Brett, habitué comme il l’était à être harcelé par une horde de groupies à moitié nues et à la taille mannequin, puisse sincèrement penser qu’elle était fabuleuse ?

— En fait, tu as l’air… authentique, reprit-il, presque étonné de sa propre sincérité.

— « Authentique » ? Tiens donc ! Voilà qui est mieux. Mais tu as raison. C’est tout à fait moi.

Authentique… En résumé : une femme avec des lunettes, coiffée comme un as de pique et boudinée dans sa veste.

Renita scruta le visage de Brett, certaine d’y déceler des signes de vieillissement précoce dus à la vie de débauche qu’il n’avait pas manqué de mener en tant que joueur de football professionnel — sans compter que la variante australienne de ce sport était particulièrement violente. A l’époque du lycée, Brett était terriblement sexy. Et bien plus encore lors des matchs retransmis à la télévision, avec son visage maculé de boue, ses muscles saillants exposés en gros plan dans la tenue moulante des footballeurs. Pourtant, à part la fine cicatrice blanche coupant son sourcil droit, les rides d’expression autour de ses yeux et de sa bouche, la masse de muscles qui avait épaissi sa silhouette d’adolescent, il était toujours le même qu’à dix-sept ans : athlétique et beau à tomber.

— Je suppose que tu es venu pour un emprunt, lança-t-elle, désireuse de réorienter la conversation sur un plan professionnel.

— D’abord, j’aimerais savoir comment va ma répétitrice de maths préférée.

Il lui décocha de nouveau cet irrésistible sourire dont l’assurance narquoise la fascinait tant autrefois, elle qui était si gauche et si timide. Mais, aujourd’hui, il commençait à lui porter sur les nerfs.

Brett cherchait à la séduire, c’était évident. Pour lui, séduire une femme était aussi naturel que de respirer, et, depuis le temps qu’il pratiquait, tout aussi machinal. Mais sa question la ramena à ces après-midi d’autrefois, dans la cuisine de la ferme familiale, quand elle s’échinait à lui enseigner la trigonométrie et qu’il s’ingéniait à la faire rire avec ses blagues douteuses au point qu’elle mourait d’envie de le gifler.

Ou de l’embrasser.

— Comment serais-je ta répétitrice préférée, alors que je t’ai laissé tomber quinze jours avant l’examen ? répliqua-t-elle avec un rire nerveux.

— C’est vrai, j’avais oublié, marmonna-t-il, perdant aussitôt son sourire. Pourquoi diable as-tu fait ça ?

— Mon père avait besoin de moi après l’école pour l’aider à la ferme, argua-t-elle, sentant soudain rejaillir sa douleur et sa colère.

Quelle idiote elle avait été ! Comment avait-elle pu imaginer, simplement parce qu’ils riaient ensemble et qu’il s’amusait à lui tirer sa queue-de-cheval, qu’il avait un faible pour elle ? Elle revoyait encore sa réaction effarée quand elle avait enfin osé l’inviter à l’accompagner au bal de fin d’année, et sa réplique atroce résonnait toujours à ses oreilles : « Désolé, tu n’es pas du tout mon genre. »

— Est-ce que tu viens me voir pour un emprunt professionnel, ou pour un prêt immobilier ? demanda-t-elle, s’arrachant à ces pénibles souvenirs.

— Chaque fois que je croisais ton père, il me fichait une trouille bleue, poursuivit Brett, apparemment inconscient de ses efforts pour changer de sujet. En revanche, je n’oublierai jamais les gâteaux et les biscuits que nous préparait ta mère pour le goûter ! Fabuleux ! Comment vont tes parents ?

— Ils ont vendu la ferme et se sont installés à Summerside pour se rapprocher de Jack, Lexie et moi, répondit-elle, résumant les six derniers mois en quelques mots.

Elle omit cependant de lui dire que ses parents n’allaient pas bien du tout. Non seulement leur mariage battait de l’aile, mais son père avait récemment fait un coma diabétique.

Mais ce n’était ni le lieu ni l’endroit d’évoquer les problèmes de Steve et Hetty Thatcher. Le professionnalisme !

— Dès le mois prochain, les taux d’intérêt risquent de grimper, c’est pourquoi je recommande à nos clients d’opter pour des remboursements à taux fixe, reprit-elle en feuilletant une liasse de papiers sur son bureau.

— Hier, en sortant de l’épicerie, je suis tombé sur Jack. Il m’a raconté que ton père avait été hospitalisé.

Renita soupira et hocha la tête. Elle ne voulait pas parler de la santé de son père ; le choc était si récent qu’elle en était encore ébranlée.

— J’espère qu’à présent il se porte bien, insista Brett. Jack était pressé. Il n’a pas eu le temps de m’expliquer ce qui s’était passé.

— On lui a diagnostiqué un diabète de type deux, déclara Renita en serrant son stylo entre ses doigts.

— Je ne pensais pas que cela nécessitait un séjour à l’hôpital.

Visiblement, il refusait de laisser tomber le sujet.

Excédée, Renita leva la tête et croisa son regard bleu azur… où elle se perdit aussitôt. Il s’en dégageait une telle compassion qu’elle ne put résister à se confier à lui.

— Maman était partie faire une retraite pour méditer. Papa a profité de son absence pour se nourrir en dépit du bon sens, surtout de gâteaux et de glaces. Personne ne savait qu’il avait du diabète. Résultat : une sévère déshydratation et une glycémie crevant le plafond. Il est resté deux jours dans le coma.

— Je suis désolé, murmura Brett. J’espère qu’il va mieux à présent.

Il était désolé ? s’étonna Renita qui tapotait nerveusement son stylo sur son bureau. Pour une raison qu’elle ignorait, son père et Brett avaient toujours été comme chien et chat.

— A présent, il est sorti de l’hôpital et maman est rentrée pour s’occuper de lui.

« Bien à contrecœur », se garda-t-elle d’ajouter.

Sa mère était persuadée qu’il s’était rendu malade exprès pour la punir d’être partie sans lui. Jack et Sienna pensaient la même chose.

— C’est le mois prochain qu’a lieu la Drôle de Course, non ? reprit Brett. Tu sais, cette course destinée à rassembler des fonds pour combattre le diabète. Ton père et toi devriez vous y inscrire.

— Moi ? Courir ? s’exclama Renita, horrifiée. Tu veux rire ! Je suis une créature née pour le confort, pas pour l’effort.

Elle s’agita nerveusement sur son siège. Elle partageait avec son père le goût des sucreries. Quant à la pratique d’un sport… Les heures obligatoires au collège et au lycée restaient pour elle un traumatisme. Mais le coma de son père l’avait fait réfléchir. Si elle ne s’employait pas à perdre du poids, elle terminerait comme lui avec un diabète de type 2. C’était décidé, elle allait entamer un régime ! Lundi prochain. Mardi, au plus tard…

Malheureusement, rien que l’idée d’avoir faim la faisait grimper aux rideaux.

— Cela n’a rien d’un marathon. C’est juste l’occasion de soutenir une bonne cause en faisant un peu d’exercice.

— Je soutiendrais volontiers la bonne cause, mais plutôt me faire enfoncer des bambous enflammés sous les ongles que de faire de l’exercice, s’écria-t-elle.

— Parfait, j’ai compris le message. Rassure-toi, je ne suis pas venu pour te torturer. Alors, que deviens-tu ? Tu vois toujours les copains du lycée ?

— La plupart sont partis.

Mais pourquoi s’acharnait-il à vouloir discuter du passé alors qu’elle ne voulait plus en entendre parler ?

— Il me tarde de renouer avec Jack et sa fiancée, reprit-il. Elle s’appelle comment déjà ?

— Sienna. Bon, si on revenait à nos moutons. Je suis certaine que ton temps est précieux, et moi j’ai un autre rendez-vous qui m’attend. Alors, tu es venu pour un emprunt ?

Sa question brutale fut suivie d’un silence, puis Brett sembla réaliser qu’il était venu pour un entretien professionnel.

— Je veux acheter le centre de fitness de Summerside J’ai pris la direction de la salle depuis peu, mais le propriétaire souhaite la vendre.

Elle le regarda un instant, surprise, et réalisa brusquement ce qu’il venait de dire. Il comptait s’installer à Summerside…

— Cela ne doit pas faire longtemps que tu t’en occupes, dit-elle machinalement. Je ne t’ai jamais vu en ville.

Elle n’avait pas non plus entendu les inévitables rumeurs qu’aurait dû provoquer la présence en ville d’une célébrité comme Brett.

— Non, cela date de la semaine dernière, répondit-il. Nous venons d’emménager dans une maison sur Cliff Road.

— « Nous » ?

Le mot lui avait échappé. Six mois auparavant, le divorce de Brett avait fait la une de tous les tabloïds, mais il n’y aurait rien eu d’étonnant à ce qu’il ait déjà retrouvé une petite amie.

— Excuse-moi, se reprit-elle vivement. Ta vie privée ne me regarde pas.

— Il n’y a pas de mal. Nous sommes de vieux amis, n’est-ce pas ?

De vieux amis ? Il plaisantait !

Il attendit qu’elle abonde dans son sens, mais, comme elle n’en fit rien, son regard se durcit.

— Je parlais de ma fille, Tegan, et de moi.

— Oh ! Je vois.

— Tegan déplore amèrement le manque de boutiques de mode à Summerside, poursuivit-il sur un ton léger. Pour ma part, je me réjouis qu’elle ne puisse plus passer ses journées à faire du shopping. Comme on habite pratiquement sur la plage, elle va pouvoir apprendre à naviguer. Summerside est le lieu idéal pour grandir, en marge aussi bien de la ville que de la campagne. Mais je ne t’apprends rien, à toi qui as vécu ici une enfance de rêve à la ferme.

Brett s’obstinait à évoquer le passé, à l’inciter à revenir en arrière, et elle éprouva une soudaine envie de mordre.

— A propos du club de gym… Je passe souvent devant. Les bâtiments semblent bien décrépits. J’espère que l’on t’en propose un prix avantageux.

— Sept cent cinquante mille dollars, en l’état, avec tous les équipements. C’est raisonnable. N’empêche qu’il va falloir que je rénove totalement les lieux, que je change les machines, les sols, que j’aménage la cafétéria, les vestiaires, que je crée une nursery, des locaux administratifs.

— Une cafétéria ? s’étonna Renita. N’est-ce pas paradoxal pour un club de fitness ?

— D’après ce que j’ai compris, au départ, la salle était un club de squash. Elle comportait une kitchenette où les joueurs se rassemblaient en attendant leur court. Je vais travailler dans le fitness, mais ce n’est pas vraiment mon domaine. Si les clients veulent boire un café ou un thé, pourquoi pas ?

— Est-ce que la salle dégage des bénéfices ?

— Bien maigres. Depuis que le propriétaire est parti à Sydney, l’année dernière, il a laissé le club partir à vau-l’eau. Il y a plusieurs mois, le directeur a démissionné sans être remplacé. Une des coachs a repris la fonction, mais visiblement elle n’arrive pas à assumer cette charge en plus de ses cours. Une fois que j’aurai repris les choses en main, je suis sûr que la situation va rapidement s’améliorer, affirma Brett en sortant une feuille de papier de l’enveloppe qu’il avait apportée pour la lui tendre. J’ai calculé les frais de fonctionnement, la balance entre les dépenses et les profits.

— On peut dire que tu as bien fait tes devoirs, déclara Renita, après avoir brièvement parcouru la feuille des yeux.

— Et, cette fois, sans ton aide.

Elle le regarda et la feuille trembla légèrement entre ses doigts. Brett la considérait avec ce sourire en coin qui l’avait toujours fait chavirer. Bien sûr, elle le trouvait encore séduisant — il aurait fallu être aveugle pour soutenir le contraire —, mais il ne la troublait plus du tout. Elle était bien au-dessus de ça.

— Espérons que tu as fait des progrès en maths, répliqua-t-elle en prenant sa calculette, avant de se replonger dans le document pour étudier les chiffres en détail.

Elle sentit qu’il remuait sur son siège. Pas étonnant, il n’avait jamais pu rester cinq minutes en place. Soudain, il se leva. Parfait ! Il allait peut-être s’en aller, pensa-t-elle, soulagée. Mais non, il se contenta de faire les cent pas dans la pièce en observant les tableaux aux murs et en déplaçant les bibelots sur les meubles. Distraite, Renita tenta de se concentrer sur les colonnes de chiffres, sans pouvoir s’empêcher de l’observer du coin de l’œil.

Ces jambes interminables, cette taille mince, ces épaules impressionnantes…

Après avoir examiné le pot de succulentes en fleur posé sur la crédence, près de la fenêtre, il s’empara de la photo de Frankie, son cacatoès, avec Johnny, son chat, qui voisinait avec un cliché de Lucy, son golden retriever. Soudain, il tourna la tête pour déchiffrer la plaque posée sur son bureau. Elle portait son nom de jeune fille. Aussitôt elle lut dans ses pensées : « Encore vieille fille. Elle collectionne les animaux de compagnie pour remplacer les enfants qu’elle n’a pas. » Et alors ? Elle n’avait que trente-deux ans et ne voulait peut-être pas se marier. Et puis, qu’est-ce qui lui disait qu’elle ne l’était pas ? Elle aurait pu garder son nom de jeune fille.

— Tu ne t’es jamais mariée ? demanda-t-il, confirmant son intuition.

— Je suis trop occupée pour entretenir une relation sérieuse.

— Tu as toujours été la plus intelligente d’entre nous, fit-il remarquer en reposant la photo, avant de croiser nonchalamment les bras en s’appuyant à la crédence. Tegan me réclame une perruche depuis longtemps, mais je répugne à garder un oiseau en cage.

— Frankie a une grande volière.

Juste au moment de se lancer dans le récit exhaustif du tragique destin de son perroquet — Frankie était encore un oisillon quand elle l’avait découvert avec une aile abîmée, et il ne pourrait plus jamais voler —,Renita s’interrompit net. Brett avait toujours eu le chic pour la faire dévier de son sujet. Mais, cette fois, il n’aurait pas gain de cause.

Elle s’éclaircit la gorge et se replongea dans le plan de financement. Tout paraissait en ordre, à l’exception d’une des colonnes, dénuée d’intitulé.

— Brett, dis-moi, cette colonne de chiffres, ce sont des dépenses ou des recettes ?

— Quelle colonne ? demanda-t-il en s’approchant du bureau.

Alors qu’elle s’apprêtait à lui tendre le papier, il passa prestement dans son dos et se pencha au-dessus de son épaule en appuyant la main sur le bureau. La chaleur de son corps, l’odeur subtile de son after-shave, ses doigts longs et déliés finirent de la déstabiliser.

— Euh… celle-ci, balbutia-t-elle en pointant les chiffres en question d’un doigt quelque peu tremblant.

— Ah, oui. Eh bien, ce sont… hum…, bafouilla-t-il, avant de prendre une grande inspiration. Ce sont des recettes.

— Tu en es sûr ? demanda-t-elle en remontant ses lunettes sur son nez pour le scruter d’un œil inquisiteur. Parce que, si ce sont des dépenses, tu ne feras pas un sou de bénéfice.

— J’en suis certain, ce sont des profits, aucun doute là-dessus, déclara-t-il avant de se reculer.

— D’accord, soupira-t-elle, dubitative.

Il se remit à marcher, crispant et décrispant les doigts de la main droite. Elle connaissait bien cette attitude, c’était celle qu’il avait au lycée quand il était nerveux avant un examen, ou quand il avait l’impression que la situation lui échappait.

— D’accord, répéta-t-elle, mais ça, ce sont bien des dépenses : 300 000 dollars pour la rénovation. Avec une telle somme, on en achète, des pots de peinture et des mètres de moquette !

— C’est destiné au remplacement du matériel : les vélos, les tapis roulants, les machines de musculation… Ils sont tous trop vieux.

— Et tu bases ces chiffres sur quoi ? Je ne vois aucun tarif.

— Je n’ai pas eu le temps de faire des recherches, marmonna-t-il. C’est juste une estimation.

— Une estimation ?

— Hé ! protesta-t-il en écartant les bras avec un sourire forcé. Tu sais bien que les maths n’ont jamais été mon fort.

— N’empêche que tu aurais pu t’appliquer. Et je trouve la somme un peu trop importante.

Déjà, au lycée, Brett était un incurable dépensier. Il cumulait deux petits boulots pour financer ses vêtements branchés et sa voiture tape-à-l’œil. Sa carrière de footballeur professionnel avait dû l’accoutumer encore davantage à obtenir les meilleures choses de la vie en claquant des doigts. C’était plutôt paradoxal si on considérait ses origines : un père ouvrier et une mère invalide, incapable de travailler. Sa famille vivait dans le quartier le plus pauvre de la ville où, d’après ce qu’elle en savait, ses parents habitaient toujours.

Quelques minutes plus tard, elle releva les yeux du projet et se tourna vers Brett.

— Pour l’achat et la rénovation, tu demandes un prêt global de plus de un million de dollars, ce qui implique des mensualités énormes. Je n’ai pas l’impression que les bénéfices de la salle de gym soient capables de couvrir un emprunt de cette ampleur et ses intérêts cumulés. En tout cas, pas la part destinée à financer la remise à neuf, pour laquelle tu ne peux fournir aucune garantie.

— Une fois que j’aurai rénové la salle, les cotisations augmenteront.

— De nos jours, nul ne peut avoir de certitude. Notre établissement est soucieux de ne pas laisser ses clients s’endetter au-delà du raisonnable. Tu n’as aucun fonds propre à investir dans l’affaire ?

— Si j’en avais, je n’aurais pas besoin d’un emprunt, répliqua-t-il avec une franchise désarmante.

— Tu veux dire qu’en treize ans de football professionnel tu n’as pas mis un sou de côté ?

Même si le football australien ne rapportait pas des sommes folles, il avait quand même dû se faire plusieurs dizaines de milliers de dollars par an.

— Mes économies sont bloquées à cause d’un conflit avec mon ex-femme sur le jugement de divorce, expliqua-t-il. Une fois que l’affaire sera réglée, je pourrai investir mon argent dans l’affaire et rembourser une partie de l’emprunt pour abaisser les coûts. En fait, ce que je réclame, c’est une sorte de prêt-relais.

Un conflit sur le jugement de divorce ? Les journaux n’en avaient pas fait état. Son ex-femme était-elle trop gourmande, ou était-il trop pingre ? En tout cas, un conflit de ce genre pouvait s’éterniser durant des années.

— Tant que ton divorce ne sera pas prononcé, la somme que tu peux rembourser ne sera pas clairement définie, affirma-t-elle en tapotant le dossier. Je ne peux me permettre de me laisser influencer ou de décider à la légère. Tu dis que tu vas diriger le club, mais as-tu de l’expérience dans ce domaine ?

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Commentaires récents

Diamant

géniale cette histoire elle est a lire

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Dates de sortie

La famille Thatcher, Tome 2 : Pour que tout recommence

  • France : 2011-10-01 - Poche (Français)
  • USA : 2011-02-08 - Poche (English)
  • USA : 2012-07-01 (English)

Activité récente

Titres alternatifs

  • In His Good Hands - Anglais
  • In His Good Hands (Summerside Stories #2) - Anglais

Les chiffres

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