Le Mystère incandescent de l'Ange

En arrivant près du but, je distinguai la silhouette d'un garçon assis sur le muret au bord de l'eau. Je me demandai ce qu'il pouvait faire là alors que le soleil se couchait et que la température chutait rapidement. Chipsy avait bondi vers lui et mes cris glissèrent au-dessus de sa tête sans l'atteindre. Elle pouvait entendre une croquette tomber dans sa gamelle depuis le fond du jardin, mais il y avait des sons qu'elle n'entendait pas. Le garçon l'entendit arriver et, surpris, se retourna. Valentin… Qu'est-ce qu'il pouvait bien faire là un vendredi soir ? Quelques heures auparavant, il était au Haras, puis je pensais qu'il était rentré se préparer pour sortir. Il n'avait même pas de veste.

« Désolée, elle n'est pas très obéissante… » m'excusai-je.

Chipsy lui léchait les mains pendant qu'il lui caressait la tête. Elle était très forte pour atteindre n'importe quel centimètre carré de peau. En m'approchant plus, je vis qu'il avait l'air très triste. Pourtant, ces derniers jours, il avait été de bonne humeur et presque toujours gentil avec moi, excepté en sport. Je m'arrêtais juste derrière lui. Il n'avait toujours pas dit un mot et je ne savais trop quelle attitude adopter.

« Ca va ? »

Il ne répondit pas. Étais-je censée faire demi-tour en lui arrachant la bête ? Il caressait toujours Chipsy, qui remuait la queue. Elle ne se rendait sans doute pas compte de la chance qu'elle avait. Je dansais d'un pied sur l'autre, ne sachant que faire.

« Assieds-toi… me proposa-t-il en levant enfin les yeux vers moi avec un léger sourire.

- Tu n'as pas froid ? lui demandai-je au bout d'un moment.

- Si, je suis congelé.

- Tu ne veux pas aller ailleurs ?

- Non, pas maintenant…

- D'accord, fais-moi signe quand tu veux bouger, si tu en es toujours capable… »

Il sourit, fixant toujours l'eau qui coulait sous nos pieds. Quand nous n'étions pas seuls, tous les deux, il n'était jamais comme ça, avec ce petit air vulnérable qui le rendait si attendrissant. En classe, il était toujours le premier à plaisanter et tout le monde l'adorait, surtout les filles, malgré son caractère lunatique. D'ailleurs, je ne discutais jamais avec lui lorsque nous étions en classe, parce qu'il était toujours entouré de ses copains ou d'une horde de filles. Au Haras, il était différent. Il y avait toujours des filles qui l'observaient, mais en dehors des heures de cours où il y avait beaucoup de monde, nous pouvions passer quelques moments seuls tous les deux. Il n'y avait que dans ces moments-là que je le voyais ainsi… Je pris soudain conscience qu'il me fixait depuis un moment déjà. « A quoi tu pensais ? me demanda-t-il, intrigué et amusé.

- A toi…

- Quelle chance ! Et plus précisément ?

- Aux différentes facettes de la personnalité de Valentin Némerange, créature étrange.

- Et quel est le résultat ?

- Il n'y en a aucun. Je me suis perdue…

- Alors toi non plus, tu ne trouves pas… »

Au bout d'un long silence, je commençais à congeler également, assise sur ce mur de pierres.

« Je t'invite à boire quelque chose de chaud, un chocolat ou un café, tout ce que tu veux, mais viens avec moi, avant qu'on attrape la crève ! » Il acquiesça d'un signe de tête. Il attrapa ma main.