Tous les parfums des Indes

Les obsèques de lady Naunton venaient d’avoir lieu dans la petite église du village…

Et maintenant, en remontant avec ses sœurs l’allée du manoir, Gabriela se demandait avec angoisse ce qu’elles allaient toutes les trois devenir.

Depuis toujours, elles avaient vécu dans cette magnifique demeure datant de l’époque de la reine Anne. C’était l’un de leurs lointains ancêtres qui l’avait fait construire. Ce manoir avait été transmis de père en fils… et maintenant, elles allaient devoir le quitter ?

De longues années auparavant, sir Reginald Naunton avait légué par testament cette propriété à l’un de ses cousins féru d’architecture. Quel choc quand, quarante-huit heures auparavant, le notaire avait appris aux trois sœurs l’existence de cette clause !

— Comment père a-t-il pu nous faire cela ? avait demandé Gabriela avec stupeur.

— A l’époque, père n’avait aucun souci matériel, avait expliqué Linette. Il gagnait beaucoup d’argent avec ses livres et ses investissements lui rapportaient de gros dividendes.

— Des investissements ? avait demandé Madeline d’une voix plaintive. Que sont-ils devenus ?

— Tu sais tout comme moi que le dernier livre de père n’a jamais été publié. Par conséquent nos parents ont été obligés de vivre sur leur capital… et l’ont grignoté peu à peu.

— Si bien que nous allons nous retrouver sans un sou, ni même un toit !

Pendant quelques jours, les trois sœurs avaient oublié leurs difficultés financières pour ne plus penser qu’à organiser les funérailles de leur mère.

Aussi douce que compréhensive et charitable, lady Naunton était très aimée dans la région. Lorsque les villageois avaient des problèmes de santé, d’argent ou de cœur, c’était à sa porte qu’ils venaient sonner. Elle les écoutait patiemment raconter leurs malheurs et trouvait toujours un conseil utile à donner.

Et maintenant, elle était morte…