Jérémie Janot : Sans filet

Je me souviens de ma rencontre avec Jérémie. Je suis alors directeur de l'ASSE depuis un an. Il a 15 ans et arrive accompagné de sa maman, qui avait sollicité un rendez-vous. Je la reçois et elle m'explique qu'ils sont originaires de Valenciennes et emménagent à Saint-Étienne pour des raisons professionnelles. Lui affirme qu'il adore le pied, qu'il évolue dans la cage, ce qui me surprend un peu vu son gabarit. Mais comme je suis plutôt du genre bienveillant, je lui propose de venir s'entraîner un mercredi après-midi. Entre-temps, j'appelle le club de l'USVA qui me confirme qu'il est un bon petit gardien, doté d'une solide motivation. Seulement voilà, à cette époque, le club a recruté le portier de la sélection régionale, Salvatore Caputo, et l'on ne manque pas de poste à ce poste. Certains collègues se font donc dubitatifs quant au recrutement d'un autre gardien, que personne ne connaît qui plus est…, je décide quand même offrir à Jérémie une place dans l'effectif. Je sens une telle détermination chez lui!«Il a quelque chose, ce petit», voilà ce que je me dis à l'époque. Et puis c'est un gardien très tonique, dynamique, explosif. Sa détente à l'arrêt est phénoménale. Il bondit comme un chat! Il signe donc à l'AS Saint-Étienne, sans contrat ni aucune assurance d'être aligné le week-end. La suite appartient désormais à la postérité.

À force de travail et d'abnégation, Jérémie comble son retard. Je me souviens que Jean-Noël Dusé, alors entraîneur spécifique dans le staff de Jacques Santini, en Ligue 1, avait pris Caputo sous son aile, voyant en lui le futur grand gardien de l'ASSE. Il l'emmenait sur un terrain à part, une fois par semaine, mais pas Jérémie. Ce dernier en a forcément ressenti une certaine forme d'injustice, de frustration, nourrissant encore un peu plus sa volonté de faire ses preuves. Je m'arrange au début pour le faire jouer un minimum, le samedi, et je le vois progresser… à tel point qu'il finit par dépasser Caputo! En pro, l'histoire s'est répétée à maintes reprises: le garçon fait preuve d'une telle énergie à l'entraînement qu'il utilise psychologiquement ses concurrents. Alonzo, Casagrande, Planté, etc.: