Notre relation fut aussi courte qu'une inspiration, il n'en reste pas moins qu'il ne m'a jamais quittée, comme si quelque chose en moi s'était lové autour de lui, adoptant une forme distincte, une nouvelle manière de conjuguer tous mes verbes à venir.

Loukine devait rester un voyageur sans mémoire, même dans la bouche discrète de Jon et Halle qui ont salué d'une même voix l'ami qui n'était jamais là mais auquel on a souvent pensé, peut-être parce que le jour où il est entré pour la première fois dans la maison à la porte ronde avec, dans son sac, ses livres en langue étrangère, on a eu tant de plaisir à l'écouter qu'on ne l'a jamais oublié, jusqu'à toujours lui garder une chambre, un lit, une table à laquelle s'asseoir.

Je me plais dans l'obscurité.
Chaque soir, j'attends l'extinction des feux, afin qu'il ne reste que la douce lumière du bassin central. Ce n'est pas parfait, mais c'est mieux que rien.
Une quasi-obscurité, celle que l'on trouve dans la mer, à mi-profondeur. C'est là que je vivais avant d'être capturé et emprisonné. Je ne m'en souviens pas, mais je ressens encore la saveur des courants indomptés au sein des eux vastes et froides. J'ai l'obscurité dans le sang.

Ce que les premiers textes de cette collection ont montré, c'est que certain.es enfants ne sont pas considéré.es par le secteur éditorial jeunesse français. On estime que leurs mondes, leurs réalités, leurs vécus, seraient communautaristes, incompréhensibles par les enfants lecteurices, celleux que l'on considère comme tel.les du moins.

Ce guide espère contribuer à aider les adultes qui cherchent des albums antisexistes et /ou non sexistes à naviguer à l'intérieur de l'offre éditoriale d'albums jeunesse pour trouver celui qui sera adapté à la situation, à l'enfant, à la discussion.

Ces attaques répétées qui font de l'approche intersectionnelle la source de tous les problèmes scientifiques et politiques actuels sont une façon pour des chercheurs et des chercheuses qui occupent une position établie au sein de l'institution universitaire de camoufler leur propre responsabilité dans la double faillite que nous connaissons actuellement en France : celle d'une incapacité à penser les questions minoritaires autrement que sous l'anathème du communautarisme et celle d'un refus de soutenir au sein de l'université une politique de la présence pour les membres de groupes minorisés aux expériences porteuses de perspectives intellectuelles dont le débat actuel a fort besoin.

L'usage du mot "toute" renvoie à une totalité - et pas n'importe laquelle : le "monde", excusez du peu. La ficelle rhétorique est grosse, là encore : il s'agit une fois de plus d'intimider, d'impressionner, de terrifier, d'attiser les phobies en produisant un sentiment de "submersion", d'"invasion", de "grand remplacement", au prix bien entendu d'un brouillage des enjeux et d'une caricature du point de vue adverse - puisqu'il est évident, dès qu'on prend le temps d'y réfléchir, que la question est proprement absurde et hors de propos, personne n'ayant jamais demandé ni à la France ni à la Belgique d'accorder asile et titres de séjours à la totalité des 281 millions de migrant.es de la planète.

En résumé, le rôle du père a été d'apporter au monde la gangrène de l'esprit mâle. Les hommes sont des Midas d'un genre spécial : tout ce qu'ils touchent se change en merde.

Nos villes sont des prisons dont les murs et les barreaux se parlent entre eux.

« L’État n’est pas la solution à notre problème ; l’État est le problème. »
(Traduit d'un discours de Ronald Reagan)

De toute évidence, les conquérants de l'espace et les fossoyeurs de la vie sur Terre sont les mêmes.

Je ne résistais plus guère, mais je prenais mon temps.
Quand on y pense, j'avais encore une grosse seconde devant moi.
Peut-être même deux. Ça me laissait de la marge pour voir venir.

Voyager une dernière fois. Dire tout, inventer tout, ne pas s'affoler face à l'indicible.
C'est dans mes cordes.
Et vu comme ça, au jugé, je dispose d'une seconde.
J'ai donc tout mon temps.

Dans cette logique, le livre devait pouvoir être jeté après consommation, ce qui avait été l'ambition des créateurs du Livre de poche, si on en croit les confidences d'Henri Filipacchi pour qui il aurait fallu lire ce genre de livre comme on effeuille un artichaut.

- Wittig: féministe, lesbienne, grammairienne.
- Oui mais tout de même, il faut faire entrer la langue ordinaire et les vies ordinaires dans la littérature.
- Première nouvelle: les gens (le peuple, etc.- les gens, c'est toi) parlent une langue simple, claire, transparente comme une source traversée de soleil jusqu'au fond. Ça se voit que vous ne connaissez pas ma famille. Truffée de mots oubliés, étrangers (catalan, limousin) de cassures et de répétitions.
- Cette langue "ordinaire"-là, celle de la littérature à laquelle nous sommes désormais habitué•es, elle est spécialement confectionnée pour une petite bourgeoisie inculte-cultivée, celle qui adore apprendre plein de choses (il faut donc que ce soit compréhensible). C'est une langue qui n'a pas été déscolarisée.
- Elle peut exprimer la colère, d'ailleurs, la révolte, l'émeute, le meurtre, que sais-je encore, mais elle les exprime sagement.
- Elle exprime sagement la colère, sagement la révolte, et elle cadre l'émeute.

- Dandel. Je suis une tortue. Je porte ma maison sur mon dos. Et pourtant on dirait que la maison la plus vraie que j'aurai jamais est l'endroit où nos routes se sont rencontrées et ont continué ensemble... pour quelques temps.

Je le regarde. Je me demande à quoi il rêve là-haut dans sa tête cabossée.

Mon téléphone m'indique que le volume sonore de mes écouteurs est trop élevé de 46%.
J'ai acheté des bouchons d'oreilles en plastique réutilisables qu'on range dans une élégante petite boîte ronde accrochée à mon porte-clé.
L'escargot est dépourvu d'oreilles, il est totalement sourd. C'est pour cela qu'il se fout de la tondeuse des voisins. L'escargot utilise le toucher et l'odorat pour s'orienter. Si on tape très fort des mains à moins de cinquante centimètres de lui, il se rétracte dans sa coquille, mais seulement à cause du mouvement de l'air.

Cette action directe, cette prise en charge par les personnes de ce qui les concerne, comprend des moyens comme "la grève, depuis la simple grève de revendication salariale jusqu'à la grève générale; le boycott; le sabotage, sous toute ses formes; la propagande antimilitariste; et en certains cas [...], la résistance armée du peuple afin de protéger sa vie et sa liberté". Ajoutons à cette liste la désobéissance civile. Rien de tout cela n'a cessé d'être, sinon toujours pratiqué, du moins défendu comme désirable dès que les conditions le justifiant le permettent.

Chomsky dit : Il est trop irréfléchi et précipité de ne faire de nos actuels systèmes de justice que des outils d'oppression au service d'une classe: ils ne le sont pas. Bien sûr ils incorporent des systèmes d'oppression de classe et des éléments d'autres types d'oppression également; mais on y trouve aussi une tendance vers la vraie humanité et vers des concepts valables de justice, de décence, d'amour, de bonté et de sympathie qui sont bien réels.

Le but de l'éducation est la liberté, mais elle demande le recours à l'autorité et suppose donc en quelque sorte que l'on cultive la liberté par la contrainte. Les anarchistes, qui accordent l'importance décisive que l'on sait au refus de toute autorité illégitime, sont - puisqu'il s'agit par définition ici d'enfants qui ne sont pas encore formés et donc pas encore capables de prendre pour eux-mêmes des décisions éclairées - placés devant un réel dilemne.

D'Hélène Legotien, que sait-on aujourd'hui? Presque rien, sinon qu'elle a été assassinée par son illustre conjoint. C'est elle, finalement, qui est morte deux fois, et son assassin est responsable de ses deux morts. Il a provoqué la première de ses propres mains, la seconde en occupant tout l'espace public pour parler de lui, en feignant de parler de sa mère à elle.

En mémoire de Hélène Legotien-Rytmann, sociologue et résistante assassinée par son mari (L. Althusser) en 1980 à l'ENS. On n'oublie pas. On ne pardonne pas.

Sur ce dont on ne peut parler, on doit se taire.

Certains soirs, ces autres Lysia me paraissent si proches, si réelles qu'il me semble que je pourrais presque les apercevoir rien qu'en me concentrant. Puis l'obscurité gagne la steppe, efface les frontières, les limites, et de manière paradoxale le réel reprend ses droits.

Je peux être arrêtée, jugée, jetée en prison, mais je ne me tairai jamais. Je n'acquiescerai jamais à l'autorité, je ne m'y soumettrai pas; Je ne ferai jamais la paix avec un système qui rabaisse la femme au rang de simple couveuse et s'engraisse sur le dos de ses innocentes victimes. Je déclare ici et maintenant la guerre à ce système, et je ne poserai pas les armes avant que ne soit dégagé le chemin pour une maternité libre, pour une enfance saine, joyeuse et heureuse.