De métal et de papier

France, Ardèche, ville fictive de Crowfery, de nos jours...

A quelques mois de sa majorité (21 ans), Lyle suit des études de lettre en fac, comme un étudiant lambda. Mais Lyle n'est pas un étudiant lambda : son père est parti il y a 6 ans de ça, les quittant sa mère et lui pour une pouf à peine plus âgée que lui, et il faut payer les factures. Le boulot de caissière dans une station service de sa mère sert tout juste à payer le loyer, Lyle a du se résoudre à trouver un job, deux ans plus tôt : mais qui peut accepter d'employer un gamin mineur, pas disponible le jour...

Lyle a trouvé un job dans un night club, le Satyr's Nest, situé dans l'un des coins les plus pourris de la ville, une zone de non-droit où la police ne passe jamais. Et il a vite compris pourquoi : le patron, Epsilon, fait la loi. Et tous ceux qui bossent au Satyr's lui appartiennent. Lyle, avec sa belle gueule, a vite eu une promotion : d'abord serveur, puis très vite sur la scène, à s'exhiber accroché aux barres de pole dance, puis en coulisses, pour des shows privés, ou ce ne sont pas ses talents de danseur qui intéressent les clients, et puis enfin dans la rue, tout ça pour un salaire de misère, l'essentiel de ce qu'il rapporte allant dans la poche du patron... Le fait qu'il ne soit pas d'accord, qu'il ait essayé de quitter son job n'y change rien : il appartient à Epsilon, qui n'a pas hésité à envoyer son gorille le chercher chez lui et le ramener au club par la force, son corps se rappelle encore des coups reçus et des menaces proférées ce jour-là... mais il y en a eu tellement d'autres depuis. Et si sa mère pleure tous les soirs en le voyant partir habillé pour faire le tapin n'y change rien : ils ont besoin du peu d'argent qu'il gagne.

Mais l'entrée en lice d'Ethan Lence, jeune policier à peine plus âgé que lui, dans la vie de sa mère pourrait bien changer les choses. Ethan est idéaliste, il rêve de protéger, de faire respecter la loi, de justice, mais aussi d'une vie bien réglée : mariage, enfants, maison, un chien et la barrière blanche... Le fait que Carol soit plus âgée que lui et ait un fils presque majeur ne le gêne pas, c'est signe de maturité, de stabilité, de sérieux...

Par contre, il ne comprend pas pourquoi Carol est aussi laxiste avec Lyle, pourquoi elle n'insiste pas pour qu'il reste à la maison le soir pour étudier, pourquoi elle ne l'empêche pas de sortir habillé de façon provocante, pourquoi elle lui dit de ne pas s'en mêler, avec un regard si triste et résigné... mais quand il va croiser le regard de Lyle un soir, à l'occasion d'une patrouille à un endroit où il n'aurait pas du aller, il va commencer à comprendre.

Et tout va changer, le faisant plonger dans une vérité tellement crue et barbare, ou il risque de se perdre, déterminé à sauver Lyle par dessus tout.

Premier roman que je lis de cet auteur et c'est une grosse claque que cet univers qu'elle a créé : une zone de non-droit "à l'américaine" mais située en Ardèche. Un monde de corruption, de violence, d'argent, de trafic d'êtres humains, de prostitution, de désespoir, de meurtres, de sadisme (et pas des clubs normés mais de véritables sadiques), où un jeune homme tente de survivre malgré la peur, la terreur, le dégoût de lui-même, et ou un jeune flic va réussir à rallumer la petite flamme d'espoir qu'il pensait éteinte à jamais, et lui donner envie à nouveau de se battre, de s'en sortir...

J'ai aimé ce découpage en dix parties, aux titres percutants, chaque partie commençant par un moment d'un procès pour meurtre, vu par une greffière, qui va dévoiler peu à peu le final de l'intrigue.

J'ai été complètement embarquée par cet univers, j'ai souffert avec Lyle, en vivant son quotidien, j'ai été assez écœurée par l'attitude de Carol (d'abord pour sa résignation, et puis pour une de ses réactions, qui peut aussi malgré tout se comprendre), j'ai aimé le lent cheminement d'Ethan, qui va se révéler au contact de Lyle, ne semblant admettre et comprendre toutefois qu'à la toute fin ce qu'il ressent, j'ai espéré en voyant le comportement de certains des collègues d'Ethan, notamment Gregory le taiseux...

Un roman très dur, à ne pas mettre dans toutes les mains, certaines scènes sont dures, insupportables, ce que vit Lyle est insoutenable, cette violence, cette peur permanente, cette tension, ce dégoût de lui-même, de ce qu'il est forcé de faire. Si vous cherchez une romance toute douce, avec une fin heureuse, clairement, ce roman n'est pas pour vous... la fin est ce qu'elle est, beaucoup ne s'en satisferont pas, moi j'ai compris et ça me va.

Bonne route, les lutins.

Un univers étonnant que créée Tess Annzu pour ce roman. Un monde à part, situé en Ardèche, à la fois complètement décalé de notre monde et y faisant référence : surprenant...

Pour autant, ce n'est pas un monde de Bisounours qu'elle nous décrit mais bien un monde empli de fange et de corruption. L'ambiance est glauque, de par la vie peu amène de Lyle. Mais je n'ai pu m'empêcher de plonger tête la première dans cette histoire.

Nos nerfs sont mis à rude épreuve, et la construction du roman, entre le témoignage d'une greffière sur un procès en cours, et la vie de Lyle, nous tient en haleine tout le long, à chercher comment et pourquoi le tout se raccorde, ce qu'il s'est passé exactement...

Extrêmement bien construit, avec des personnages, aussi bien principaux que secondaires, forts et à la psychologie très bien travaillée, je ne peux que vous conseiller de vous plonger dans cette découverte...

Au début j'ai eu un peu de mal mais au fil des pages, l'auteure a réussi à susciter mon intérêt, j'ai vraiment voulu savoir ce qu'il s'était passé, et au final j'ai adoré. Par contre j'aurais aimé des pages supplémentaires car j'avoue qu'il m'a manqué quelque chose.

Lyle est incroyable car malgré sa condition il ne se plaint jamais, il fait preuve de beaucoup de courage.

Ethan est parfait : gentil, idéaliste, bienveillant mais aussi têtu et naïf. Il va être génial avec Lyle.

J'ai beaucoup aimé leur complicité.

L'histoire est addictive, l'enquête passionnante et l'intrigue bien menée. Le sujet est fort et douloureux alors certains passages sont assez difficiles.

J'ai passé un très bon moment.