Commentaires de livres faits par mandarine43
Extraits de livres par mandarine43
Commentaires de livres appréciés par mandarine43
Extraits de livres appréciés par mandarine43
[ "A tout jamais" ]
[ "A tout jamais" ]
[ "Joseph, la nuit..." ]
les choses allaient s'en revenir comme avant...
comme quand j'étais encore là, pis vivant...
Mais j'vois ben que ça s'peut pas...
Plus depuis Montréal...
La liberté... La liberté de Montréal...
... Tu l'as rapportée avec toi...
Par un après-midi de printemps de cette année 19.. qui des mois durant sembla menacer si gravement la paix de l'Europe, Gustav Aschenbach, ou d'Aschenbach - depuis son cinquantième anniversaire il avait le droit à la particule - était parti de son appartement de Prinzregentenstrasse à Munich, pour faire seul une assez longue promenade. Surexcité par les difficultés de son travail du matin, auquel il lui fallait apporter une attention toujours en garde, une circonspection et des soins infinis, une volonté pressante et rigoureuse, l'écrivain n'avait pu, même après déjeuner, arrêter en lui l'élan du mécanisme créateur, de ce motus animi continuus par lequel Cicéron définit l'éloquence, et il n'avait pas trouvé dans la sieste le sommeil réparateur qui, la fatigue le prenant désormais toujours un peu plus vite, lui était devenu une quotidienne nécessité. Aussi avait-il aussitôt aprés le thé cherché le plein air, espérant que la promenade le remettrait d'aplomb et lui vaudrait une bonne soirée de travail.
On était au commencement de mai, et après des semaines d'un froid humide venait la surprise d'un faux été. L'« Englischer Garten », quoiqu'il ne fît encore que se parer de feuilles tendres, sentait l'orage comme au mois d'août, et Aschenbach l'avait trouvé aux abords de la ville pleine de voitures et de piétons. Au restaurant de l'Aumeister où le conduisaient des allées de moins en moins fréquentées, Aschenbach avait un moment considéré l'animation populaire de la terrasse, au long de laquelle s'étaient arrêtés quelques fiacres et des équipages ; au coucher du soleil il était sorti du parc et revenait à travers la campagne ; comme il se sentait fatigué et que l'orage menaçait au-dessus de Fohring, il attendit au cimetière du Nord le tramway qui le ramènerait directement en ville.
- Tu aurais pu dire ça avant qu'on se couche !
Au début, il y avait les jambes d'Alice. Fines. Fuselées. Cousues main. Aristocratiques. Sans une ombre de graisse. Des jambes élégantes, lisses, vraiment douces, des jambes qui miroitaient au soleil, satinées, des jambes de gazelle. Des mollets effilés en longueur et des cuisses qui s'élançaient sans complexe, sans retenue, sans pudeur. Elles fusaient vers un ventre plat, ferme, dur, un ventre qui n'en était pas un. Un creux plutôt entre les côtes et sous une poitrine abondante et bien charpentée. Des bras minces presque sans limites, et des poignets fragiles que l'on n'osait toucher de crainte de les briser. Alice avait un corps de rêve qui faisait bander les jeunes gens qui flânaient près de la gare de Termini et ceux qui sirotaient affolés leur cappuccino, piazza Navona.
Alice faisait bander les jeunes bruns, les vieux frisés, les pleins de pasta alla carbonara et de penne all'arrabiata. Les blonds aussi la regardaient, perchés sur leur moto, les yeux rivés sur ses seins et sur ses cuisses qu'ils auraient voulu emporter au loin.
Alice ne se laissait pas toucher. Regarder, oui. Mais toucher, non. Elle seule avait le droit de caresser sa peau douce et tendue qu'elle admirait pendant de longues heures devant la glace. Elle en scrutait chaque recoin, et elle devait bien l'admettre, elle se trouvait parfaite, absolument parfaite. Elle adorait le creux entre ses deux cuisses, le galbe de ses mollets et le marron glacé de ses mamelons. Elle avait beau chercher, tout était à sa place, comme béni par la main de Dieu...
- Oui, monsieur le major, dit Lagrappe.
Le médecin eut un bond sur place et jura :
- Sacré nom de Dieu !
C'était un homme formidable, aux poings d'athlète, semés de poils roux. D'une incapacité notoire dont il avait l'âpre conscience, il la rachetait par un absolutisme outré de brute entêtée et despote, rendant des arrêts sans appel et imposant à ses malades le culte de ses ordonnances. La cravate de l'homme au furoncle cingla ainsi que d'un soufflet sa susceptibilité chatouilleuse de cancre.
La Brige : Du tout. De quoi ?
Le Président : D'avoir montré votre derrière.
La Brige : Moi ?
Le Président : Vous.
La Brige : A qui ?
Le Président : A treize mille six cent quatre−vingt−sept personnes dont les plaintes sont au dossier.
La Brige : J'invoque la pureté notoire de mes mœurs. Montrer mon derrière ! Pourquoi faire ?
Le Président : C'est ce qu'établiront les débats. En attendant, treize mille six cent quatre−vingt−sept personnes déclarent, je vous le répète, l'avoir vu.
- Très bien ! dis-je ; voilà une pierre dans mon jardin que je suis ravi d’y recevoir : elle m’enlèverait mon dernier remords si j’en eusse conservé quelqu’un ! Rien de tel comme un coup de fer rouge sur l’amour-propre pour cicatriser les scrupules !
Dans la cour...
Je suis sournoise et vilaine, en plus d'être vieille. J'habite au fond de la cour, derrière les poubelles. J'ai une fenêtre. A doubles ventaux. De ma fenêtre, je vois la porte d'entrée. Tous les gens qui entrent, je les vois. Et je note. Tout. Sur des calepins à spirales à petits carreaux. Au crayon. Au crayon de papier attaché avec un lacet rouge. Les lacets rouges, ce n'est pas si simple à trouver. Je cherche, je préfère les rouges. Les spirales, c'est mieux pour arracher les pages. Je n'efface pas. Je ne rature pas. Je déchire. Tous ceux qui ne me plaisent pas. Le crayon de papier, ce n'est donc pas pour effacer. C'est pour marquer le temps. Peu à peu, on s'amenuise, on disparaît. Les carnets, c'est parfait pour les poches. D'ailleurs, j'en ai partout, des poches. C'est une obsession. Sans doute parce que j'ai manqué quand j'étais petite. De nourriture. D'affection. Mais aussi de petites choses frivoles et délicieuses : une tartine de pain croustillant revêtue de beurre et saupoudrée de cacao, j'en ai salivé pendant des années, ou posséder une jupe à volants qui tourne avec une poupée aux cheveux d'or lisse dans les bras. On devient une autre avec une jupe qui tourne. Ou bien se frotter à une joue duveteuse poudrée d'iris, des joues de velours odorantes pour petite fille affamée. Le rêve.