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Mémoires d'un chasseur Lilia Forever



Description ajoutée par Ccwriting 2018-03-13T13:46:53+01:00

Résumé

« Roman ou biographie, fiction ou réalité ? Entre ténèbres et Lumière, le parcours initiatique d’une vie hors du commun. Celle d’un être émotionnel qui tente de conserver l’équilibre et côtoie la passion parfois destructrice dans sa recherche de douceur et d’attention ! L’harmonie à la croisée des chemins de vie. Celui d'Amvrossi Livius Laromir entremêlé à celui de Lilia Pecsy de Barayan. Une histoire presque intemporelle, insondable et pourtant si présente que l’on pourrait la toucher du doigt...»

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Classement en biblio - 1 lecteurs

extrait

Copyright 2018 by Christian Crossman

Email: c.c.writing@gmx.fr www.facebook.com/christ.crossman www.facebook.com/LiliaForeverbyChristianCrossman https://ccrossman3.wixsite.com/crossmanwriting

Couverture : Christian Crossman

Photo : www.facebook.com/Florinejeannotphotographe

Illustration : www.facebook.com/illustration.aaricia/

Lilia : https://www.facebook.com/lilia.pecsydebarayan.3

Tous les droits sont réservés. Ce livre ou toute partie de celui-ci, ne peut être reproduit ou utilisé, de quelque manière que ce soit sans l’autorisation écrite expresse de l’auteur, sauf pour l’utilisation de citations brèves dans une revue, un journal où à des usages d’enseignement.

C. C. Writing, 2018

ISBN : 978–2–9563231–0–5

Mémoires d’un Chasseur

Lilia Forever

Christian Crossman

2018

Remerciements

L’auteur, qui se plait à parler de lui à la troisième personne, voudrait remercier sincèrement les bêta lectrices et correctrices Anne-Charlotte, Florence, Christiane, et Sandrine sans qui ce roman n’aurait pas vu le jour.

L’écrivain bien sûr souhaite aussi remercier son équipe, composée de Mélissande Muah, Laurie Illustratrice, Florine Photographe, qui ont accepté de consacrer de leur temps personnel pour transformer cette œuvre de l’esprit en une réalité tangible et conforme à ses attentes.

Vient enfin, un grand merci à Margarida, pour sa talentueuse implication dans le premier tome de cette trilogie. À moins que l’auteur n’ait pas foncièrement tout dévoilé et que la susmentionnée modèle ne soit personne d’autre que la véritable Lilia Pecsy de Barayan…

Naturellement, merci aussi à l’ensemble des contributeurs qui ont permis le financement de ce projet.

PREMIÈRE PARTIE

GENÈSE D’UNE VIE

1. L’AUBE DU PREMIER JOUR

Je me garderai bien de dire que je détiens la vérité unique, tant de questions, d’interrogations et d’opinions, me viennent encore à l’esprit au soir de ma vie. Je n’ai pas eu et je n’aurai probablement jamais toutes les réponses, mais avant que les souvenirs du passé ne m’abandonnent, je vais coucher ici les lignes de ma mémoire ! Mon nom est Amvrossi. Je le tiens de celle qui m’a fait. C’est arrivé, je ne saurais comment vous dire, l’année de mes dix-sept ans, non loin de Brasov au pied de Castelul Bran à la frontière de la Valachie en 1698...

J’en étais certain à cette époque et j’en suis encore conscient aujourd’hui. Elle n’était pas d’ici, elle se faisait appeler Lilia et venait de Hongrie. Pour moi, fils de paysan ; le temps des moissons, un mois de juin comme un autre, rien ne me préoccupait vraiment jusqu’à ce que je croise Lilia... Figé, oui je me suis figé, si majestueuse, si charismatique, si belle... si magnétique, une longue robe violine corsetée de dentelle noire, un tour de cou d’un velours du même ton, et surtout des yeux et des cheveux ébène comme je n’en avais jamais vu auparavant. Non assurément, elle venait d’ailleurs, forcément ! Elle, qui se tenait là, à quelques mètres de moi seulement, tout à côté de la porte principale de l’église noire. Elle me fascinait, et je ne savais pourquoi. À cette minute-là, l’unique chose dont je me souvienne encore nettement, est que j’aurais voulu être gentilhomme, dignement vêtu pour qu’au moins elle m’aperçoive, ne serait-ce que le temps d’un instant. Mais, mon habit de paysan m’ôtait tout espoir d’être celui qu’elle semblait ambitionner... je voyais bien que la dame, de son regard cherchait quelqu’un, à moins que ce ne fût quelque chose ?

Rapidement, je retournais à mes affaires, au moins en pensées, ne me préoccupant que des blés dont j’avais la charge. Combien de kilos de grains et de fétus de paille, pourrais-je récolter cette année ? Vlajko m’aiderait-il encore cette fois ? Des céréales, nous en avions eu assez l’an dernier, mais la période de la soudure était toujours une épreuve à passer pour nous. Je convins sans tarder avec moi-même que j’irais aux champs, juste après midi, une fois le marché terminé.

Plus tout à fait le même, mais pas tout à fait différent, le regard envoûtant de cette femme me revenait en mémoire, encore et encore... Enfant, il me semblait l’avoir déjà croisée, peut-être à cet endroit-là, sur ce chemin assez fréquenté pour se rendre en ville, mais non, je devais me tromper, cela ne pouvait pas être elle. Elle serait de fait beaucoup plus âgée maintenant, et puis elle ne pouvait pas être d’ici.

Vêtue de tels apparats, je l’aurais évidemment reconnue, moi qui empruntais chaque jour les chemins à travers champs, puis marchais dans les hautes herbes, pour me rendre aux terres que mes parents cultivaient. Cette sensation pourtant, je l’avais déjà éprouvée à plusieurs reprises quelques années auparavant, mais en ce début d’après-midi je n’y prêtais guère attention, l’esprit trop occupé à penser à la moisson. Et puis… surtout, il y avait les effluves sucrés d’une miellerie toute proche, mêlés aux odeurs de la campagne ensoleillée, qui attisaient ma convoitise... La journée s’écoula sans plus d’étrangeté et je m’endormis rapidement ce soir-là... comme presque tous les soirs d’ailleurs, à croire que je n’étais pas un animal de nuit… Demain, je me réveillerais aux frontières de l’aube pour profiter de cette nature silencieuse et majestueuse et admirer le levant…

2. CANDIDE AVERTI

C’est donc aux premières lueurs que je me réveillai, enfilai rapidement mes vêtements et me rendis aux champs... Encore et toujours le même chemin.

Je marchais depuis peu, je ne sais plus, tout au plus dix minutes quand soudain, je la vis, là, assise, sur le bord de ce chemin, au pied d’un arbre, dans sa robe violine presque parfaite. Mon Dieu, c’était diablerie ou mes yeux qui me jouaient des tours ? Chimérique... je devais encore rêver, endormi sur mon matelas de paille et de chanvre... aucune autre possibilité. Pourtant pas de doute, j’étais bien éveillé ! Quelle improbable coïncidence ! Et cette sensation à nouveau si présente, comme une impression bienveillante de flou, sans parler de cette brume inhabituelle, présente tout aux alentours. Une certaine grisaille. Je mis cela sur le compte de l’heure matinale. Je fis encore un pas, et le brouillard qui m’assiégeait s’épaissit jusqu’à m’envelopper.

Elle était là et ne me regardait pas, un peu comme si je n’existais pas, absolument invisible, trop pauvre paysan valaque assurément. J’avais l’impression d’être plus transparent que l’air que je respirais. Prenant mon courage à deux mains, je décidai d’oser m’adresser à la Dame en violet, peu importe les conséquences. Il fallait que je le fasse ! En moi, se diffusait le sentiment que le futur en dépendait… le futur oui, et surtout mon futur !

Et voilà que je m’entendis prononcer les mots suivants :

 – Belle Dame, noble et courtoise, fleur de jeunesse et beauté, prêtez-moi votre attention, je vous en conjure, dussé-je être emprisonné entre quatre murs pour avoir osé ! 

Un petit mouvement de tête et la Dame posa sur moi un regard que je n’oublierai jamais… Glacial, transperçant, terrifiant, presque inhumain. Mais instantanément, à ma vue, celui-ci se commua en quelque chose de bienveillant. Pourtant, j’eus soudainement peur, je ne comprenais pas… Comment une dame esseulée, assise là, sans cocher, ni gentilhomme auprès d’elle pouvait-elle m’inspirer une quelconque crainte ?

Et ce qu’elle répondit m’interrogea encore plus :

– J’ai enduré nuits et froideurs ! J’ai patiemment attendu, attendu longtemps que vous vous présentiez enfin à moi. Je me nomme Lilia Pecsy de Barayan.

Puis, d’un seul mouvement, presque invisible, elle se jeta sur moi, me renversant d’une inimaginable force, et me plaqua au sol. J’en ressens encore aujourd’hui, parfois, un point de douleur entre les omoplates. On eut dit à cette seconde un loup sauvage... Etait-elle enragée ? Démoniaque peut-être ? J’allais pourtant souvent assister à l’office du Popă, afin de recevoir de lui le Taïna, ce sacrement qui me protégerait des succubes. Mais à cet instant, encore gravé en moi, et ne sachant que faire d’autre, je m’appliquai à prier à voix haute… énonçant toute une liturgie que j’avais souvent entendue à l’église noire… Alors celle qui se prénommait Lilia se mit à rire et rire encore puis disparut comme elle m’était apparue, avec les brumes et les brouillards matinaux, laissant place à la douce tiédeur du levant.

J’en étais totalement retourné et n’osais en parler à personne, pas même à notre Popă bien aimé ! Je sentais bien qu’il fallait que je garde cela pour moi, mais je ne me doutais pas que cela serait le début de si longues années de silence et de mystères, pour lesquels, aujourd’hui, le temps est venu que mon âme se libère et expie…

3. FRACASSANTE APPROCHE

Étonnamment, la vie reprit son cours, presque comme de rien et les journées se mirent à nouveau à s’écouler paisiblement au rythme des champs et des saisons. Pour tout vous dire, je ne me souviens pas quand j’ai revu Lilia la fois suivante. Juste que je ramassais du bois avant l’hiver et qu’il me semble que cela était au moins quelques jours après que le synode d’octobre 1698 fût convoqué et que le Patriarche et les Popăs se reconnurent membre de l’église Sainte de Rome. J’entends encore résonner au cœur de la nef à Brasov les mots prononcés par notre Popă bien-aimé :

– Noi, Vlădica, Protopopii și Popii Băsericii Românești dăm știre tuturor că de bună voia noastră ne unim cu Băserica Romei și ne mărturisim mădulările cestei Băserici Sânte a Romei. 

Comme la fois précédente, Lilia se trouvait là sur le bord du chemin, à la différence qu’elle montait un superbe tarpan gris. Tout autant que son animal, elle était belle, aussi immobile qu’une Vierge de marbre pût l’être. J’étais fasciné, pris entre l’envie de détaler sans me retourner, et le désir de ressentir la Dame tout contre moi, pareillement à notre dernière rencontre. Une attirance magnétique, totalement irrépressible, et bien que la raison m’indiquait dans une folle agitation intérieure de fuir le plus vite et le plus loin possible, il y avait a contrario en moi cette sensation étrange qui revenait plus forte à chaque fois, comme un frisson de toute puissance qui parcourait chacun des muscles de ma nuque jusqu’au bas de mes jambes.

Cette fois, elle mit pied-à-terre lentement, et s’approcha de moi comme si nous étions du même rang. Elle s’avança encore, presque à m’en étourdir et me susurra à l’oreille :

– Tu es Amvrossi, montre-moi qui tu es vraiment Amvrossi.

Je ne comprenais pas… mais elle m’entraîna, sans autre mot dire, avec cette force incroyable dans une danse tourbillonnante à laquelle je ne pus résister. J’avais l’impression de virevolter au-dessus du sol, et je l’entendais encore et encore prononcer ce prénom qui résonnait comme un écho…

Amvrossi… Amvrossi… Amvrossi quand soudain l’arrière de mon crâne heurta le tronc d’un arbre ! Toutes ces années plus tard, j’en garde toujours la marque ainsi qu’une bosse tant le choc fut violent.

À mon réveil, il faisait nuit, et je ne savais pas où j’étais, hormis qu’il était évident que je n’étais point sur la paillasse de chanvre de la maisonnette de mes parents, mais bien allongé sur le confortable lit d’une belle et grande chambre. Lilia était là, assise et comme à chaque apparition parfaitement immobile. À peine avais-je ouvert les yeux que je l’ouïssais déjà :

 – Bien vaigniez à Castelul Bran et absolvez-moi pour la malaventure.

Mais comment pouvais-je l’entendre… tandis qu’elle ne prononçait pas un seul mot ? Mais qui donc parlait alors ?

 – J’ai jeté, en forêt, vos défroques pour un meilleur affublement et je n’ai nul doute que vous apprécierez, Monseigneur Amvrossi…

Elle devait se moquer, ou bien le coup que j’avais reçu m’avait rendu fou… et tandis que je me retournai, alors qu’il n’y avait personne d’autre que moi, elle renchérit :

 – C’est bien à vous que je parle, oui vous… J’ai cru vous avoir morti par la quantité de sang qui s’est écoulée de votre teste et fort heureusement nous possédons ici un exemplaire en latin du Tarsif d’Abdulcassis qui invite dans votre cas au cautère, mais comme vous en aviez fort perdu et que vous ne reveniez pas à vous, j’ai imploré notre Maître et seigneur de vous offrir le sien, ce qu’il a consenti à faire il y a cinq jours déjà. Vous irez mieux très vite désormais, j’en suis certaine.

Cela faisait donc cinq jours que je me trouvais ici. Mes parents, assurément inquiets, avaient dû battre champs et forêts. Probablement avaient-ils retrouvé mes vêtements couverts de sang, envisageant sans doute ma mort dans l’attaque d’une meute de grands loups alors que j’étais en quête de bois. J’avais bien sûr à confesse entendu parler des bêtes féroces qui dévoraient les voyageurs… Chez nous, on les appelait des Strigoïs .

Je devais prévenir ma famille, mais quelque chose m’en empêchait, comme si une fois encore, le futur en dépendait, le futur oui et surtout mon futur. Là aussi, les souvenirs sont flous désormais et, à l’époque, les jours filaient les uns après les autres. Lilia disparaissait parfois, mais finissait toujours par revenir. Je trouvais ici tout ce dont j’avais besoin pour mes apprentissages. Sincèrement, je ne crois pas avoir quitté Castelul Bran avant l’été suivant, date à laquelle Léopold 1er de Habsbourg en prit possession en devenant prince de Transylvanie.

4. INITIATION SIBYLLINE

C’est donc en juillet 1699 que Le Maître, ses serviteurs, Lilia et moi, nous sommes installés à la Citadelle de la Poénarie. Chaque jour passé, je me sentais plus fort, plus rapide plus vif, ma vue s’améliorait, tous mes sens en éveil, plus affinés que jamais et que dire de ma complicité avec Lilia…. Elle me subjuguait toujours autant… Cependant, il me manquait encore beaucoup de clefs et surtout de l’expérience, sans oublier Lilia qui disparaissait trop souvent à mon goût. Et puis, il y avait le donjon aussi où elle s’enfermait des heures avec le Maître, Donjon auquel je n’avais pas accès. Tout cela me chagrinait et rapidement, cette vie à me prélasser m’ennuya. Certes, Lilia m’avait appris à lire et à écrire. Je dormais dans des draps soyeux où elle venait parfois me rejoindre, j’avais de l’amusement et des livres à volonté. Mais cela, ne me suffisait pas…

Je décidai donc un matin de janvier 1700, de reprendre ma liberté. Dehors, le ciel était gris, un temps glacial à en geler un mort ! Mais cette froidure, je ne la craignais plus, ni les loups non plus, pas même le Maître. Je sentais l’instinct du chasseur en moi. Amvrossi était bien là, il me guiderait dans mes pas. Le soir précédent mon départ, j’avais secrètement préparé mon paquetage et quand le soleil fut assez haut pour m’éclairer, je glissais hors de mes appartements, filant discrètement jusqu‘à la porte de la citadelle. Je n’avais pas encore mis la main sur la serrure que la voix rauque du Maître résonnait déjà.

– Où vas-tu jouvenceau ? Je ne crois pas t’avoir autorisé à quitter les lieux ! 

 – J’ai décidé d’aller explorer le monde au lieu de consumer ma vie à ne rien connaître !  (Je m’affairai à déverrouiller l’arrêt de porte dans le même temps.) Et sauf votre respect Monseigneur, vous êtes peut-être le Maître de Lilia, mais non le mien. Je ne suis pas un serviteur et je vais où bon me semble ! 

– Tiens donc, me rétorqua-t-il en riant. 

– Oui, je vais où bon me semble et j’aurai disparu, avant que vous n’ayez eu le temps de traverser la pièce Monseigneur. J’aurai bientôt vingt ans, je suis jeune et fort. Sans vouloir vous offenser, vous en avez presque soixante… 

Basculer l’arrêt de porte me prit moins d’une seconde, mais il n’en fallut pas plus pour que le Maître fonde sur moi et me projette à plus de trois mètres de là, avec une force que je ne connaissais pas, sa puissance... dix fois celle de Lilia peut-être.

 – Jouvenceau, ici les décisions sont prises par moi ! 

Je me relevai aussitôt, étourdi, mais bien décidé à ne pas me faire humilier par un vieillard trois fois plus âgé que moi. À mon tour de me précipiter sur lui, mais alors que j’y mettais toute la vélocité que je trouvais en moi, il esquivait facilement, comme si j’agissais au ralenti…

– Ta première leçon est ici ! Jouvenceau ! Ne sois jamais trop fier de tes forces, et ne mésestime jamais ton adversaire.

Simultanément à ses paroles, il me frappa d’abord l’intérieur du genou gauche, qui n’était autre que ma jambe d’appui, pour ensuite finir à la gorge, d’un revers de main, au moment où je m’effondrai au sol… Puis il partit en me lançant laconiquement :

– Je suis tout de même satisfait que tu te décides enfin à prendre ta destinée en main ! Ta seconde leçon sera demain, ici, et à cette même heure ! 

Lilia me trouvant là, un moment plus tard allongé sur le sol de la salle des Gardes, me raccompagna à mes appartements. Je crois, ce jour-là, ne pas avoir bougé de mon lit jusqu’au matin suivant. Rapidement, il me sembla que Lilia fût amoureuse. Elle s’approchait souvent de moi, me susurrait des mots incompréhensibles à l’oreille, jouait de sa beauté… et surtout, si j’avais bien saisi, elle avait convaincu le Maître de me prêter vie et de m’enseigner son savoir !

Le lendemain matin, remis de mes émotions, et comme par enchantement ne souffrant plus d’aucune douleur, je comptais bien en découdre avec le vieillard ! Et, il était déjà là à m’attendre…

5. LE SEPTIEME FILS

– Tu n’es pas en avance Amvrossi, et nous avons fort à faire, tu dois apprendre, avec la tête, le cœur et les yeux !

C’était la première fois qu’il m’appelait Amvrossi, quelque chose allait donc changer.

– Suis-moi jusqu’au Donjon…

Ce que je fis prestement tant j'avais le désir de découvrir cette pièce qui m'avait été, jusqu'à présent, interdite.. Je vais essayer de décrire précisément ce qui, dans ma mémoire, est gravé comme dans le marbre.

J’entrai dans une vaste salle, au fond un large escalier de bois noir ciselé de dorure invitait à se rendre à l’étage supérieur. Dans cet endroit, pas d’ouvertures, à l’exception de deux petites meurtrières. Une sorte de grand tapis épais recouvrait le sol. Sur ma gauche, ce que je pris pour une espèce de tronc d’arbre vertical, le Maître m’apprit plus tard qu’il s’agissait d’un Mook Jong… ni plus ni moins qu’un mannequin de bois. Et le long du mur à droite, une gravure, celle d’un mystérieux paysage que je ne reconnaissais pas, un portrait au faciès étranger pour moi. Et puis deux épées courbes, l’une plus courte que l’autre, aux lames curieusement travaillées. Je n’en avais jamais vu de telles. Je suivais le Maître, sans mot dire, les yeux écarquillés, avalant les escaliers quatre à quatre. En haut, la pièce était illuminée par de larges ouvertures donnant sur la cour intérieure, les murs n’étaient qu’une immense bibliothèque. Combien pouvait-il y avoir de livres, de manuscrits ? Impossible de le dire, plus que je pensais savoir compter ! Il y avait aussi quatre très belles écritoires, qui semblaient faites dans le même bois noir que celui de l’escalier, toutes ornées de têtes de démons aux dents acérées.

– Voici donc ton cabinet à écrire Amvrossi, dit-il, en attirant mon attention sur le bureau à sa gauche.

– Assieds-toi et écoute ! 

Je m’exécutai aussitôt, trop heureux d’avoir de nouvelles perspectives devant moi.

– L’heure de ta seconde leçon est venue. Il y a ici plus de trois mille ouvrages que je veux que tu étudies avec soin et conscience. Ils sont l’histoire des Moroïs depuis Lilith, notre mère à tous jusqu’à toi. Tu es le septième fils du septième fils. Tu verras et tu entendras ce que le commun des mortels ne perçoit pas. En toi, tu trouveras le don de seconde vue, tu es né pour être un gardien des équilibres et un chasseur. 

Plus tard au XXe siècle, on nous appellerait les « watchmen ». Mais à ce moment-là, je pensais que le Maître était simplement fou… trois mille ouvrages… et tous les autres alors ! Il y en avait au moins dix mille. Je n’aurai jamais assez de toute une vie…

– Écoute bien ce que je vais te dire, je ne le répéterai pas, me lança-t-il. Le septième fils du septième fils est un Strigoï, et Lilia avait pour mission originelle de te surveiller et de te mortir avant tes dix-sept ans. Cependant, elle n’a pas pu s’y résoudre. Elle a vu quelque chose, peut-être quelqu’un en toi, et elle s’est empressée de te ramener ici et de venir m’en parler. Certes, au début je ne l’ai pas entendue ! Mais à force de mots, de larmes et de convictions et, la voyant déjà prête à te donner son sang pour te garder à la vie, j’ai décidé d’intervenir et de t’offrir la rédemption. Tu es des nôtres désormais, chasseur Moroï, et je suis ton Maître tout autant que celui de Lilia. Je suis le Maître, non pas parce que vous êtes mes esclaves et que vous êtes là pour me servir, mais parce que c’est moi qui ai la charge et la responsabilité de vous enseigner et de vous guider, et j’en assume son poids... Je possède en moi la dominance, la détermination intérieure, qui s’oppose aux gesticulations extérieures. Je suis le Maître parce que je connais mes forces et mes faiblesses, et que je cherche incessamment à m’améliorer. J’attends que vous en fassiez de même, non pas parce que je vous le demande, mais parce que vous en voyez le besoin autant que moi. Enfin, je suis le Maître, non pas parce que quelqu’un m’appelle comme cela, mais parce que je canalise mon moi-intérieur et que je domine et contrôle le Strigoï !  Ta seconde leçon est donc ici : Il y a deux loups en chacun de nous, l’un représente l’amour, la sérénité et la gentillesse, l’autre la peur, la haine, l’avidité. Celui qui l’emporte est celui que l’on nourrit ! 

Bien sûr, j’avais déjà entendu parler des Moroïs et des Strigoïs, où les humains n’étaient que les sujets d’une lutte fratricide. Mais une foultitude de questions émergeait en moi, un chasseur, mais chasser quoi ? Et où ? Dans quel but ? Avec quels moyens et pourquoi chasser ? J’avais bien d’autres envies, dont celle de convoler en mariage avec la belle Lilia !

Je n’eus même pas le temps d’ouvrir la bouche pour satisfaire mes interrogations et m’éviter de conjecturer que le Maître avait déjà disparu. Et comme il était encore tôt, il ne me restait qu’à consulter le premier opuscule qui me tomberait sous la main. Pour cette première, je pris soin de noter dans un carnet la date du jour comme celle de l’accès au Donjon, et je constate de fait, en le relisant, que nous étions le mardi 16 janvier 1700, soit le mardi 26 janvier 1700 de notre actuel calendrier grégorien. En effet, à cette époque, toute la Valachie se satisfaisait des dates juliennes qui ne furent remplacées en Roumanie que le 31 mars 1919, alors qu’elles l’étaient déjà depuis plus de cent ans en Hongrie.

À paraître DANS LA MÊME COLLECTION

- Mémoires d’un Chasseur

Tome 2 Une vie intérieure

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XVIIème siècle.

Amvrosi, un jeune paysan, se rend comme chaque jour aux champs afin d’y effectuer ses récoltes. Sur le chemin, il aperçoit une jeune femme élégante, aux apparats majestueux. De son statut, il ne pouvait imaginer qu’une telle beauté puisse s’intéresser à lui. C’est ainsi qu’il poursuivit son chemin et retourna à ses affaires.

Le lendemain, aux premières lueurs du jour, il prit la même destination que la veille. Quel fut sa surprise lorsque pour la seconde fois, la vision de la charmante inconnue de la veille s’offrit à lui. Il engagea alors la conversation sans vif espoir d’être écouté et entendu de la belle dame. A son grand étonnement, cette dernière lui rendit réponse et se jeta sur lui sans qu’il ait le temps de riposter.

Mais qui est cette magnifique créature ? Que cherche-t-elle à obtenir d’un pauvre paysan ? Que signifie cette réaction à son égard ?

Vous souhaitez en savoir davantage ? Alors poursuivez votre lecture et/ou lisez ce roman qui vous mènera des profondeurs des ténèbres à la lumière.

Mémoires d’un chasseur : Tome 1 – Lilia Forever est le premier roman d’une trilogie. 

D’une plume fluide et fantastiquement maîtrisée, l’auteur assoit admirablement sa notoriété en tant qu’écrivain.  

Avec ce premier roman, nous découvrons l’univers de Christian Crossman. Un univers fantasmagorique où se mêlent réel et irréel. Une atmosphère contrastée, des ténèbres à la lumière, dans laquelle nous sommes absorbés.

De la Roumanie à la Chine, en passant par la Hongrie ou encore par l’Italie, nous voyageons aux côtés d’Amvrosi. Un voyage initiatique au cours duquel ce dernier va être confronté à des obstacles, des épreuves, de nouvelles expériences qui vont le forger et faire de lui un adulte, un homme.

Dès les premières lignes et le premier paragraphe, Christian pose le cadre spatio-temporel de son récit. Nous y découvrons un des personnages principaux, Amvrosi en Roumanie à la fin du 17ème siècle.

Au paragraphe suivant, nous faisons la connaissance de Lilia, une belle jeune femme, au charme envoûtant. Une rencontre que nous conte Amvrosi.

A la lecture des premières pages, nous ne pouvons qu’être subjugués par la qualité et la richesse des descriptions que ce soit des décors, des lieux, des personnages. Un travail de précision qui permet au lecteur d’être rapidement immergé dans l’époque d’Amvrosi Livius Laromir et dans  l’univers de Lilia Pecsy de Barayan.

Aux abords d’un chemin, deux vies qui se croisent pour une destinée épique. Un bouleversement pour l’un, une conquête pour l’autre. Deux êtres bien différents qui vont entrer en symbiose et vivre, au-delà des frontières du surnaturel, une histoire hors du commun. Une histoire d’amour mais pas seulement. Une quête de l’esprit. Une quête initiatique sur fonds d’arts martiaux, d’épreuves morales et physiques ainsi que de pouvoirs surnaturels.

J’ai été transportée par cette histoire qui se veut être de tous les temps. Je suis conquise ! 

Je vous invite à vous plonger dans les ténèbres des Mémoires d’un chasseur : Tome 1 – Lilia Forever et de trouver la lumière aux côtés du valeureux chasseur Amvrosi Livius Laromir.

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Diamant

Cher Christian, vous avez réalisé mes rêves les plus fous !! En écrivant un livre qui me fasse vibrer à 45 ans. Vous avez une magnifique plume ainsi qu'un magnifique visage. Je suis votre plus grande fan !!! A quand une dédicace à Lyon pour enfin rencontrer l'homme qui m'a fait tant rêvé ? J'envie tellement Lilia qui a eu la chance de poser devant vous. La représentation de vous même me rend jalouse de Lilia et je rêverais de me croquer, et que vous aspiriez jusqu'a la dernière goute le sang de notre amour.

Pat <3 :)

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