Nouvelles chroniques télé

ADLER LAURE

NOVEMBRE 1995 l'ai regardé hier soir « Le Cercle de minuit »>. Compte tenu de son heure de diffusion tardive, je ne connaissais pas cette émission, dont le public est constitué de feignas ses gauchistes qui n'ont pas à se lever le lendemain matin. J'avoue que je n'ai pas perçu tout de suite l'inté rêt d'un tel programme. Pour commencer, un écrivain ouzbek avec une cravate de réfugié albanais parlait de son livre intitulé Voyage dans l'absurde condition humaine au-delà du mal et des escalopes milanaises. Puis un griot africain en pagne est venu interpréter un air du folklore sénégalais en s'accompagnant d'un ins trument traditionnel constitué d'une seule corde. Il s'agissait d'une mélopée ancestrale, mais également lancinante, très lancinante, lancinante à un point que vous avez du mal à imaginer...

Pour terminer, le metteur en scène du théâtre subven tionné d'une municipalité communiste - dont on devinait même à la télévision qu'il avait une haleine épouvantable est venu nous parler de l'hommage à Molière qu'il va monter prochainement à la MJC de Bobigny, sous le titre évocateur et elliptique de Fucking Poquelin »>.

Affligé par un tel programme, j'allais appuyer sur le bouton off de ma télécommande lorsque j'arrêtais brusquement mon geste («ô doigt, suspens ton vol >>) car soudain, je venais de voir apparaître... les genoux de Laure Adler! Là, j'ai compris que l'idée géniale du «Cercle de minuit » consiste à inviter des gens très laids et surtout très chiants pour que notre attention ne soit pas distraite un seul instant des genoux de Laure! «Les genoux de Laure »... On dirait un titre de film néo romantique, on dirait du Rohmer et c'est pourtant vrai qu'elle a le genou romantique, Laure. Comme d'autres ont le genou organique... Il existe un mystère des jambes féminines. Par exemple, lorsqu'on regarde les cuisses de la baronne de Rothschild, qui curieusement persiste à les montrer à chacune de ses apparitions télé visées, on pense : « C'est d'la viande ! » On se dit : « Tiens 《 au fait, c'est vrai, dans une femme y a aussi de la chair, des veines qui font des nœuds et du gras comme dans le jambon polyphosphaté ! » Alors que les genoux de Laure évoquent un déjeuner sur une terrasse en Toscane au mois de juin, le vent qui joue dans les cyprès, avec le goût de la mozzarella et de l'huile d'olive sur du pain de cam pagne... Je suis sûr qu'on a dû faire beaucoup de décla rations d'amour à Laure Adler, mais je suis sans doute le seul à lui avoir dit que ses genoux avaient un goût de mozzarella sur du pain de campagne toscan...